S. WINONA ROSE ► Nastassia Lindes.

Maintenant que vous me connaissez un peu mieux, que avez cerné mon caractère, je suis sur que vous aimeriez savoir d'où me vient cet orgueil imparable. A l'inverse de mon cachet bien trempé et compliqué, mon histoire demeure plutôt simple, plutôt douce. Effectivement, je viens d'une famille considérablement aisée et attentionnée. Fille unique, j'ai toujours eu ce que je souhaitais de la part de mes parents. Tiens mes parents, parlons-en justement de mes parents. Ces êtres tout à fait lucides et sans prétention. Ils travaillaient dignement pour gagner leur vie, ma mère étant cadre supérieure dans le plus renommé des hôpitaux en maxillo-faciale de l'Etat, mon père, lui, PDG d'une multinationale. Mon père, ce grand homme qui croyait tant en moi. Il m'aimait d'un amour immodéré, m'idolâtrait même. Je l'aime aussi d'ailleurs. J'étais une fille seule avec ses parents attentifs, dans une école privée et prestigieuse de Phoenix, plus ou moins populaire au lycée. J'avais quelques amis qui me suffisaient, déjà désireux de ma situation, de tous mes désirs assouvis. Seulement voilà, c'est bien connu : tout beau récit à une fin. Et la mienne, précoce, est parvenue avant ma majorité : à 16 ans. Pourquoi ? Je ne sais pas, ou du moins je ne veux pas l'entendre. Mes relations se détérioraient, mes habitudes aussi, mes passes-temps étaient devenus impurs et crapuleux... Je n'étais plus la petite fille gâtée et encore bienveillante non, j'étais à présent une odieuse jeune femme égocentrique et colérique. Je fumais, je buvais, je baisais. N'importe quand, n'importe où. Quand l'envie me prenait à midi, à 16h, à 20h, à minuit, à 4h. Aucunes limites ne m'encadraient. C'était ma loi, c'était mes choix. Malgré cela je restais une personne dotée d'une certaine intelligence et j'obtint mon diplôme de justesse sans aucun travail. Je me suis découvert une immense passion pour la mode. J'aurais aimé intégrer une école artistique de New-York mais mes très chers paternels me prédisaient un tout autre avenir. Mes proches ne me reconnaissaient plus. Ma mère me détestait, et moi-même je la haïssais. Seul mon père croyait toujours en moi, sa seule fille. Elle, elle me descendait, me fusillait, m'aspergeait de remarques, de blessures profondes. Sans doute faisait-elle ça pour mon bien mais personne je dis bien personne n'a le droit ni le pouvoir de m'affronter. Après tout, c'était de sa faute si j'étais devenue une telle môme. Il n'aurait pas fallu me choyer et me protéger autant. Dès lors, maman était devenue ma pire ennemie, ma plus grande rivale. Face à qui ? A mon père. Elle le détournait, le montait contre sa propre enfant. Et lui, rationnel et désolé, tentait de me résonner chaque jour. Je n'en fis rien. L'alcool se cachait dans mes placard, les joints, les mecs et même les filles. J'étais irrespectueuse, intolérante, une enflure, une tête de pioche. Je vivais ma vie comme bon me semblais ne craignant aucunement le fait de me retrouver à la porte. D'ailleurs c'est en quelque sorte ce qui arriva. Papa ne voulant m'envoyer dans un quelconque foyer d'arriérés drogués pensant que je valais bien mieux que ça, prit la décision de me faire prendre l'air, de me faire voyager et de m'offrir un aller simple pour Harvard. Voila pourquoi je me trouve actuellement ici, à Cambridge. Merci. Merci à toi papa. Je te promets d'en finir avec toutes ces anciennes absurdités. Il est temps pour moi de devenir une nouvelle personne, plus manipulatrice et garce que jamais. Mais cette fois-là, dans la classe et la volupté.