Tes mains dans les miennes, je sentais tes derniers souffles. Je te voyais me quitter sous mes yeux, apercevant chacune de tes larmes couler le long de tes douces joues. « Je t'aime. » Tu utilisais tes derniers souffles pour moi, tu gaspillais tes derniers instants à me consoler, mais c'était toi qui partais. Tous ses longs mois à combattre ce cancer, tous ces longs mois évaporé en quelques instants, ces derniers instants. Je me remémorais toute ma vie à tes côtés, toi la seule femme de ma vie. Tu étais la seule pour moi, tu étais la seule à t'occuper de toi, sans jamais me laisser tomber, sans jamais me juger. Tu m'as élevé sans aucune aide, sans l'aide d'un homme à tes côtés, cet homme qui t'avait abandonné quand il a su pour ta grossesse. Tu es la première personne que j'ai vu en voyant le jour. Personne ne se souviens de sa naissance, c'est impossible, mais moi, je sais que la première personne que j'ai vu en ouvrant les yeux il y a presque vingt-deux ans, c'était un ange, toi maman. Je savais à quel point c'était difficile pour toi de m'élever, sans emploi, sans homme, tu étais seule mais jamais nous n'avons manqué de rien. Ton amour était mon cocon, ma présence était ta raison de vivre. Mais moi maman, que vais-je devenir sans toi ? Cette question me hantait depuis des semaines, depuis que nous avons appris que plus rien ne pourrait te sauver. Mais comme toujours tu as trouvé les mots, tu as trouvé les mots pour me réconforter. « Tu seras un grand artiste, je sais que de là-haut, je serai fière de mon fils. Des étoiles, je te guetterais, toi, mon étoile à moi. » Je te donnerai ma vie pour te sauver, mais je ne peux pas, je suis trop faible. Je ne serai jamais comme toi. Toi qui m'as toujours protégé des moqueries, toute mon enfance on s'est moqué de moi, de mon physique, de mes couleurs de cheveux et surtout, du fait que je n'ai jamais connu mon père. Quand tu as huit ans, c'est impossible de riposter, mais toi tu as toujours été là pour moi, pour me protéger de ces monstres qui dévoraient mon âme. Dès mon plus jeune âge tu m'as encouragé, tu as été la première personne et la seule à connaître réellement mon amour pour la musique et pour la guitare. Je me souviens de ce jour, tu n'avais aucun emploi, mais tu as réussi à trouver un petit job payait au black de la sueur de ton front, pour pouvoir m'offrir ma guitare pour mes dix ans.
C'est ce jour-là que tu as su que je deviendrai un jour, un grand homme. Moi le petit rouquin de service, celui dont les gens se moquent sans cesse. Je me souviendrai toujours de ses moments passés avec toi, moi à la guitare et toi chantant de ta voix d'ange, cette voix si magnifique que je ne pourrai jamais plus entendre. Tu étais mon idole et tu le resteras même de là où tu seras. Tu m'as donné la vie et tu as fait de moi ce que je suis aujourd'hui. Je n'ai jamais eu d'ami, mais je t'avais toi et la guitare que tu m'avais offerte. Je n'ai jamais pu en jouer au grand jour, mes camarades de classe se moquaient de moi, j'étais leur bouc émissaire, celui dont ils se moquaient sans cesse. Maintenant que tu me quittes petit à petit, à chaque seconde que Dieu fait, que vais-je devenir ?
C'était grâce à toi si je pouvais m'évader en jouant de la guitare, mais c'est aussi grâce à toi si je suis encore en vie aujourd'hui, assis à ton chevet en te voyant rendre l'âme. Tu savais qu'être seul, sans ami me tuait à petit feu, tu savais que ma dépendance à la drogue venait de là. Mais contrairement aux autres mères qui auraient giflé leur fils pour avoir consommé cette chose, toi tu m'as encouragé à me battre. Tu m'as encouragés à battre ces vieux démons sans jamais me juger. L'alcool et la drogue étaient mes seules amies et cela, dès l'âge de quatorze ans. À cette époque je me détruisais moi-même, aujourd'hui encore ses démons me suivent, mais tu as toujours été présente pour me donner des limites. Demain tu ne seras plus là, que vais-je devenir ? Qui va m'aider à battre ce diable qui se prénomme "drogue" ? Je n'ai plus personne maman, demain je serai seul. Je n'ai jamais eu de père, tu n'as jamais voulu me dire qui était cet homme qui t'avait abandonné, tu n'as jamais voulu me le dire.
Tu combattais ce cancer depuis presque quatre ans maintenant, je me souviens de ce jour, la fin du lycée, je devais entrer à Harvard, j'étais fier de te l'annoncer, car tu savais aussi bien que moi qu'Harvard serait le seul endroit où je pourrais m’épanouir et jouer et chanter autant que je le souhaitais. Mon rêve s'était d'apprendre le chant et la musique à Harvard, tu m'as toujours poussés à réaliser ce rêve. Mais ce jour où nous avons appris le début de notre descente en enfer, tout à changé. Tu voulais à tout prix que j'accepte cette place à Harvard, mais je refusais de te laisser seule. Je refusais de te laisser te battre, tu m'as toujours aidé, c'était à moi de te rendre l'appareille. Tu l'as battu une fois, mais quelques mois plus tard, ton cancer est revenu, plus fort que jamais.
Et voilà où nous en étions aujourd'hui, sur ton lit de mort. Mes larmes étaient plus nombreuses chaque seconde, ma main dans la tienne, ton visage d'ange me sourire durant ta derrière seconde. C'est alors que t'appuyais de toutes tes forces sur tes dernières ressource physique pour te pencher sur ta table de nuit pour me tendre une lettre. Un sourire sur ton visage si fatigué. « Je l'ai toujours su, tu me rendras fière. Je ne veux pas que tu te morfonds sur ma mort. Je ne regrette rien, j'ai donné la vie au plus beau jeune homme de cette terre, du plus grand artiste que je n'ai jamais connu. À cause de moi, tu n'as pas pu réaliser ton rêve, maintenant je te laisse ta liberté. Deviens l'homme que tu dois devenir. » Ce papier, c'était une acceptation à Harvard. Alors que tu étais mourante, tu as envoyé mon dossier d'inscription à Harvard. Tu as donné tes dernières forces pour que je puisse réaliser mon rêve. C'était la dernière fois que je te prenais dans mes bras, sentant tes larmes se coller à mes joues et les miennes faire de même sur les tiennes. Grâce à toi, je vais rejoindre Harvard l'an prochain ainsi que le Summer Camp qui débute dans à peine un mois. Je me suis couché à côté de toi sur ton lit, nous nous sommes endormi, bras dessus bras dessous, mais un seul d'entre nous a ouvert les yeux le lendemain matin. Ce n'est pas ta voix que j'ai entendue au réveil, mais celle du docteur. « Toutes mes condoléances. » Maman, je t'aime.