Rip my heart out and leave — (( sackson ))

Fatigué. Physiquement et mentalement. Les cernes sous les yeux, le sac que je laisse dans le hall et les enfants que je prends avec moi pour les promener. Ça dure pas très longtemps, une petite trentaine de minutes avant de retourner à la maison et de les laisser gambader. J'imagine que Sage est à son bureau, alors je retire mes chaussures et je monte à l'étage, passant devant son bureau sans rien dire, pour aller m'assoir sur le lit dans notre chambre.

@Sage Brennan-Jobs

10.10, milieu d'après-midi — prises de tête incessantes depuis vingt-quatre heures, agacée au point d’avoir abandonné la maison toute la nuit durant pour aller te réfugier chez ta soeur. d’autant plus énervée depuis ce matin en ayant appris que vos enfants sont restés seuls puisque lui aussi a décidé de s’enfuir loin de votre chez vous. pas un mot échangé alors que tu l’as entendu rentrer pour récupérer les enfants. pas plus d’échange à son retour, en l’ayant pourtant vu passer devant la porte du bureau où tu travailles. c’est un quart d’heure plus tard que, dans un soupir, tu quittes la pièce pour le chercher sans un bruit. et quand enfin tu le vois assis sur votre lit, tu prends une inspiration avant de l’y rejoindre. assise à cinquante centimètres de lui, sans un mot, dans le silence le plus complet, vos respirations comme seules compagnies audibles, le regard droit devant toi.

Je me sens tellement vidé que je suis là, à regarder dans le vide comme un idiot. Je gère mal les conflits et vingt quatre heures dans cet état, ça n'aide pas. C'est trop. Beaucoup trop. Je la sens venir dans la chambre et s'assoir à côté de moi, sans un mot. C'est tellement lourd, tellement pesant que ça fait tout remonter, le poids sur mes épaules qui s'alourdie encore plus plus et qui fait mal. Mal physiquement, autant que psychologiquement. Je sens les larmes qui me montent aux yeux et c'est un combat avec moi même pour pas craquer, pour pas les laisser couler. Y'a juste ma main qui cherche la sienne sur le matelas, le regard toujours perdu dans le vide, trop concentré, trop dans ma tête.

tristesse qui nage au fond de ton âme, l'énervement qui a pourtant pris le dessus dès le départ sans être parti depuis. les hormones qui te jouent des tours après de légères sautes d'humeur ces derniers mois, rien d'extrême jusqu'à présent. toi qui pensais y échapper, tu te retrouves sans même t'en rendre compte en plein dans une crise. billes plongées dans le vide, le silence trop lourd qui plane sur vous, sensation d'avoir l'épée de damoclès tout juste au-dessus de ta tête. un mot suffirait à tout redémarrer, un geste aussi. ta main qui recule pourtant d'un centimètre au contact de la sienne, surprise par cet infime contact auquel tu t'attendais pas. les paupières grandes ouvertes sans plus de geste, sans mot, figée comme une statue de cire à cet instant, bercée par une fierté mal placée de rapprocher à nouveau ta main de la sienne, préférant la laisser là, inerte.

Je déglutis en la sentant bouger sa main ; parfois, il n'y a pas besoin de mots pour faire passer un message. Mais la rejection physique est probablement plus brutale que celle par messages, alors les larmes que je retenais jusqu'à là s'échappent et j'en profite pour retirer ma main du matelas et passer le dos de celle-ci sur ma joue, me levant pour prendre mon sac de piscine de ma séance de la veille au soir pour sortir mes affaires. J'ose même pas la regarder, même pas dire un mot. L'égo est plus que piqué maintenant.

le coeur se déchire un peu en le remarquant du coin de l'oeil glisser le dos de sa main sur son visage, plus encore lorsqu'il se lève pour attraper ce qui te semble être un sac. t'as mal, au fond. t'as mal de te rendre compte que ta réaction involontaire, qui ne fait qu'ajouter une couche au trop-plein qu'il ressentait déjà, le met dans cet état. t'as mal. mais t'as cet égo qui, cette fois, te dit de rester là, sans trop comprendre pourquoi. toi qui, d'ordinaire, aurais couru dans ses bras, tu restes là de trop longues secondes encore. une minute terriblement lente avant de te lever finalement, le coeur trop lourd, pour sortir de la pièce et le laisser là.

Les affaires de piscine sorties, je la vois quitter la chambre sans un mot et je ne comprends pas. Je ne comprends pas pourquoi elle réagit comme ça et je n'ai pas envie d'empirer les choses, alors je n'ose pas dire grand chose. Je me contente juste de passer devant son bureau en allant dans la salle de bain, m'arrêtant à sa porte pour dire, "Je vais aller faire des courses après ma douche, laisse moi une liste si tu veux quelque chose" et je vais dans la salle de bain. J'ai juste besoin d'une douche bien chaude pour me remettre les idées en place.

t'essayes de réfléchir mais tout s'emmêle dans ton esprit ; plus rien n'est clair et la seule chose à laquelle tu penses, c'est de retourner dans ton bureau. trop concentrée sur ton écran pour comprendre ce que ton mari te dit, tu tapes sur le clavier à la vitesse de la lumière pour prévenir ton chef que tu dois t'absenter une trentaine de minutes en usant de ta meilleure excuse : ta grossesse. l'eau que t'entends couler peu de temps après avoir eu son accord, ta silhouette qui disparaît du bureau pour pénétrer dans la salle de bain, le plus discrètement possible. et alors qu'il a le dos tourné sous l'eau, tu te hisses jusqu'au bord de la douche, encore habillée, pour lancer un simple désolée... sans te demander s'il risquait de frôler le malaise cardiaque par ta visite impromptue.

L'eau chaude qui coule sur mon visage, je ferme les yeux en profitant de ce moment de solitude. Je passe mes mains sur mon crâne avant de me souvenir que je suis chauve à cause de DJ. Ça va aller, que je me répète sans cesse. C'est une mauvaise passe, ça arrive, mais ça va aller. J'ai assez confiance en nous et en notre amour pour ça, mais ça ne rend pas la situation présente plus facile, au contraire. J'ouvre les yeux pour prendre du savon, quand tout à coup, j'entends une voix raisonner dans la salle de bain. Je m'y attendais tellement pas qu'en l'espèce d'un quart de secondes je sursaute, fais tomber la bouteille de gel douche et glisse dessus en essayant de me tourner vers la voix, cognant ma tête contre la paroi de la douche, le cul sur le sol, totalement sonné.

ta voix qui résonne et, en un quart de seconde, tu vois la girafe au sol. tu restes figée là, à le fixer et à refaire la scène dans ta tête pour comprendre ce qui lui est arrivé, avant d'avoir un soupçon de logique en te rendant compte qu'il est sonné. jax ?! ni une, ni deux, tu rentres dans la douche italienne à ton tour, toute vêtue, pour te baisser au ralenti à cause de ton ventre qui prend beaucoup trop de place dans tes mouvements à ton goût. tu t'es fait mal ?? t'es partagée entre la panique et le rire qui reste toutefois au fond de toi. parce que la scène te repasse en boucle dans la tête alors que t'essayes de regarder l'état de son crâne quasi-chauve pour être sûre qu'il se soit pas ouvert. tu vois combien de doigts là ? un. l'annulaire, sans ton alliance. même si t'as été tentée de lui tendre le majeur pour ce test rapide. l'eau qui continue à couler sur vous, pas la présence d'esprit de l'éteindre.