entre ombres et protection (( tomïca #1 ))

La nuit était tombée depuis longtemps, enveloppant la ville dans un voile épais de silence et d’obscurité. Seules les lumières des lampadaires ponctuaient le bitume, créant des ombres dansantes sur les trottoirs désertés. Tommy était accoudé contre sa voiture, les mains dans les poches, attendant Anaïca. Ils avaient décidé, sur un coup de tête, de sortir pour une virée en pleine nuit. Ce n’était pas la première fois qu’ils faisaient ça. Depuis la mort de l’oncle d’Anaïca, Tommy avait pris son rôle de protecteur très à cœur, veillant sur elle comme sur une petite sœur... même si leur relation avait changé au fil des années. Quand il la vit s’approcher, un sourire se dessina sur ses lèvres. Anaïca avait grandi. Elle n’était plus la gamine qu’il avait connue. Elle avait maintenant 25 ans, et tout en elle trahissait cette transition : son allure, son assurance, mais surtout ce regard qui le fixait avec cette intensité nouvelle. Une part de lui luttait avec cette réalité. Il avait vu en elle quelqu’un à protéger, une mission que son défunt ami lui avait implicitement confiée. Mais récemment, les frontières entre eux s’étaient brouillées. « Prête pour la virée ? » demanda-t-il en lui ouvrant la portière avec un clin d’œil. Tommy démarra la voiture, et ils prirent la route sans destination précise, comme ils le faisaient souvent. La radio jouait en fond, mais aucun d’eux ne prêtait vraiment attention à la musique. Le paysage défilait sous leurs yeux, mais l’esprit de Tommy était ailleurs.

@Anaïca Simms

Abandonnant à son sort son livre de cours ainsi que son carnet de notes, aillant passer de longues heures à réviser, les yeux qui brûlent de fatigue, l'esprit qui s'égare par l'ennui, elle avait d'une pause. Alors que Tommy lui avait proposé une voie de secours, pour vite lui dérober sous le nez la seconde d'après. Il décide de finalement changer d'avis quand elle persiste qu'elle ira seule à la place, n'ayant besoin de personne si elle désire tant s'évaporer les idées sur autres choses que ses cours. Refusant de la voir dans les rues de Boston sans sa garde rapprochée à cette heure, il lui propose enfin cette échappatoire qu'elle avait méritée soit dit en passant. Elle se change histoire d'être présentable, sans vouloir se l'avouer elle-même qu'elle veut qu'il la voit toujours à son meilleur, malgré qu'il ne la verrait jamais sur une autre lumière que sa protégé, au grand désarroi d'Anaïca. Depuis la mort de son oncle, il avait endossé son rôle, sans toutefois combler cette présence, car jamais elle ne peut oublier son oncle et tous ces jolies souvenirs qui lui a offert. Et puis Tommy...bref, elle ne veut pas s'attarder sur ça, l'esprit toujours perturbé par cet homme. L'attendant au pied de son immeuble, elle ne peut s'empêcher de sourire en voyant l'automobile qui lui est si familier. Un vrai chevalier servant, il lui ouvre la porte en lui lançant un clin d'œil qui la fait presque rougir, mais s'en retient. Quand elle rentre à l'intérieur, elle se fait discrète en reniflant le parfum de qui émane dans l'habitacle. Si enveloppant et suave. Son odeur unique à lui. ꟷ Totalement prête. J'ai besoin de prendre un peu d'air. Souffle-t-elle de réjouissance. ꟷ Alors, comment était ta journée ? Elle se retourne vers lui après quelques minutes depuis qu'ils étaient partis du dortoir.

@Tommy Mendy

Tommy jeta un coup d'œil à Anaïca, un sourire amusé en coin. Elle avait ce regard qui en disait long, comme si elle attendait qu'il transforme cette soirée en échappée mémorable. D'un geste décontracté, il tourna légèrement le volant, quittant la route principale pour prendre une voie plus calme, bordée d’arbres et de lampadaires diffusant une douce lumière. "Pas mal," répondit-il enfin, en haussant les épaules. "Rien de bien palpitant... mais la fin de la journée, elle, s'annonce beaucoup plus intéressante." Il laissa planer un léger silence, profitant de l’atmosphère détendue dans l'habitacle. Il se surprenait à apprécier cette rare sortie nocturne avec elle, loin des horaires, des obligations, des promesses de surveiller sa sécurité. Ce moment, c'était pour elle, rien d'autre. Il se tourna vers elle, un sourire taquin aux lèvres. "T’as l’air d’en avoir sacrément bavé aujourd’hui. Tu sais quoi, oublie tout ça pour ce soir. Où veux-tu qu’on aille ? Je te laisse décider. Juste toi et moi, la ville endormie et... un monde entier de possibilités." L'idée de la voir se détendre, de rire un peu sans penser à la prochaine échéance, le remplissait d'une chaleur qu'il n'aurait jamais vraiment pu exprimer en mots. Il était là pour veiller sur elle, c'était son devoir, sa promesse silencieuse. Mais ce soir, il espérait lui offrir plus qu’une simple compagnie : un moment de liberté, loin de tout.

@Anaïca Simms

 C'est parfois dans ces moments, en regardant le paysage défiler sous ses yeux, admirant la ville dans sa nuit, les lampadaire illuminant la chausse et un peu ses environs sans toutefois offrir cette même vue une fois le soleil levé, elle laisse cours à tout ce qui peut lui traverse la tête. Ses parents, qui seraient renfrognés à l'idée de la voir se balader en compagnie d'un homme, à son Oncle dont la vie lui a été coupé trop vite, à ses études, dont parfois elle se sent dépassée par les travaux qui n'en finissent jamais, ayant l'impression d'être submergé à en être étouffée. Tout ça bien sûre, elle garde cacher, ne voulait pas décevoir son entourage qui souhaite la voir à sa réussite et non sa défaite. ꟷ Ouais...disons que cette année, c'est un peu plus corsée que les autres, mais bon je fais avec. Elle hausse des épaules ne laissant rien paraitre, ne voulant pas que Tommy s'inquiète plus pour elle. ꟷ Hummm.. si tu me laisses le choix, alors je dirais le Charles River. elle se retourne vers lui, attendant qu'il dise quoi se soit. Elle savait qu'il n'allait pas lui refuser vu comment elle est parvenue à lui faire changer d'avis à la fin et lui offrir cette balade.

@Tommy Mendy

tw : mention de décès.

Tommy sourit en entendant son choix. Le Charles River, évidemment. Il aimait cet endroit, même s’il ne l’avouait pas si facilement. « Ça me va. Allons-y. » Sur le chemin, il lui jette des regards de temps en temps, se demandant ce qui lui passe par la tête. Arrivés près de la rivière, ils s’arrêtent face au courant silencieux et à la lumière des bâtiments qui dansent à la surface de l’eau. Tommy s’accoude à la rambarde, observant le reflet des lumières, se demandant ce qu’il peut bien faire de sa vie. « C’est vrai que cette année, elle est dure. Pour tout le monde. » Il hoche la tête, comme pour confirmer ce qu’elle a dit, mais sans l’insistance. Il respecte son silence, même s’il aimerait parfois qu’elle se confie davantage. « J’ai du mal à penser que ça va faire bientôt un an… » Et c’était alors à lui de se confier. Il ne voulait pas foutre une sale ambiance entre eux, mais il avait besoin d’en parler. Et malheureusement il ne se voyait pas le faire avec Eline. Malgré tout l’amour qu’il lui portait, il ne se voyait pas lui rappeler la mort de son frère comme ça. « D’un côté j’ai envie que le temps passe, pour effacer les blessures et d’un autre côté, le temps passe me rappelle que j’ai rien fais, pour eux, pour les venger. » Il se tourne vers elle, sans aucun sourire. « J’ai rien fais depuis, je suis un bon à rien. »

@Anaïca Simms

N'ayant pas d'objection à sa demande, ils se rendent sur le bord de la rivière. Pendant le chemin, elle pouvait sentir les regards que lui jettent Tommy durant la route, comme s'il tentait de percer ses pensées, mais elle ne laisse rien paraître, se contentant de contempler le paysage. Ils finissent par arriver au Charles River. Ses environs calmes à cette heure tardive permettait d'avoir leur propre intimité sans l'achalandage qui pouvait y avoir à ses heures habituelles sur la piste qui était aux abords de la rivière. Ils marchent cote à cote en silence, tous deux perturbés par leur propre tourment. Tommy finit par être le premier à confesser. Elle hoche la tête, étant d'accord avec lui que les choses n'ont pas été simples non plus ces derniers temps. Anaïca n'ose tout de même pas parler pour ne pas l'interrompre, le laissant aller sur sa lancée. ꟷ Cela va peut-être te paraître controversé ce que je vais dire, mais... dit-elle en hésitant avant de continuer. ꟷ Continuer à vivre avec autant de haine, autant de soif de vengeance est-ce que c'est saint ? Loin de l'idée de ne pas honorer les vies de tes camarades, au contraire. Mais serait-ce plus honorable de vraiment vivre ta vie et tout en glorifiant à chaque jour vos actes de courage d'avoir protégé votre pays ? À quoi bon combattre la violence avec encore plus de violence ?
@Tommy Mendy

tw : mention de décès.

Tommy serra les poings, chaque mot d’Anaïca résonnant comme une lame bien aiguisée traversant ses défenses. Il n’était pas habitué à se voir comme un homme consumé par la haine. La vengeance, oui, il en avait goûté le feu plus souvent qu’il ne le reconnaîtrait. Mais la haine ? C’était une autre histoire. Ils marchaient toujours côte à côte, leurs pas unissant le silence entre eux. La rivière murmurait à peine, comme pour préserver leur conversation de toute oreille indiscrète. Tommy finit par s’arrêter, détournant son regard vers les reflets de l’eau. La lune jetait des éclats d’argent sur sa surface, et dans cet instant, il avait presque l’impression que tout était en suspens. Il prit une profonde inspiration, le poids de ses pensées alourdissant son souffle. « Je comprends ce que tu dis, vraiment. Peut-être que c’est ça, le problème. » Il fit une pause, cherchant ses mots comme s’il craignait de leur donner trop de puissance. « Je sais pas comment faire autrement. Le souvenir de mes potes, c’est pas juste des visages, c’est des rires, des coups de gueule, des… trucs qu’on partageait. » Tommy secoua la tête, s’efforçant de ne pas flancher. Il serra un peu plus les poings, comme pour contenir la tempête intérieure. « T’as peut-être raison, » reprit-il doucement, presque en murmurant. « Peut-être qu’honorer leur mémoire, ça devrait être autre chose que… d’entretenir la rage. Mais j’ai jamais appris à faire ça autrement. » Il releva finalement les yeux vers elle, luttant pour maintenir le regard d’Anaïca. « Et si je laisse aller cette part-là… j’ai peur de plus rien ressentir. »

@Anaïca Simms