the loser ─ Rosace #13

Amore n'est plus avec eux, emmené ailleurs pour confirmer son état médical. Là, y'a plus que Rose, dans le couloir, et Ace, dans la cellule. Pas un mot, juste des regards en biais ; malgré sa gueule et son état, la voir est source d'un bordel sans nom dans sa tête et ses sentiments. Puis on l'interpelle, alors Ace se redresse, s'approche de la porte quand on vient lui ouvrir. Le flic s'en va, lui dit de se bouger, mais Ace est las, alors c'est en se traînant qu'il se lève, jusqu'à la porte métallique. Il lance un regard à Rose, puis dans le couloir. Et c'est là qu'il se fige.
Y'a un homme. Un asiatique d'une cinquantaine d'années, très bien habillé, costard cravate, les mains dans les poches, l'air détendu mais affreusement sérieux, qui l'attend juste au bout du couloir. « Mr Chung. » qu'ils peuvent l'entendre dire. Et sans un mot, c'est derrière Rose qu'Ace vient trouver refuge.

dernier regard jeté sur amore avant de le reporter sur toi. immobile. le coeur qui martèle la poitrine. incommodée. tes derniers mots en mémoire. plus de proximité. alors j'reste loin. malgré l'envie qui me démange d'effacer cette distance. irrespirable. rétines qui captent ton inconfort. suivant le même chemin jusqu'à cet homme. physiquement proche du tien. ton père ? ton oncle ? pas le temps d'y réfléchir. ton corps qui vient se placer derrière moi. me donnant l'impression d'être utilisée comme rempart. les sourcils haussés, faisant face à l'inconnu. bras croisés. — tu le connais ? j'murmure à ton intention, le visage légèrement tourné dans ta direction. inquiète.

Ace se planque derrière Rose, comme si elle était capable de faire rampart par sa simple présence. Il ne répond pas à elle cela dit, et l'homme en face s'avance d'un pas, passant ses mains dans son dos, d'un air détendu. « Mr Chung. Votre père m'envoie. » « Plutôt crever. » La réponse est crachée et il se place un peu plus derrière Rose, allant même jusqu'à tendre la main dans sa direction pour attraper son vêtement ; juste une attache. Une ancre. Quelque chose pour le retenir.

aucune réponse à ma question. suscitant encore plus d’interrogations. ta main qui attrape ma veste. geste qui me déstabilise. quand toi-même tu as exigé qu’on ne se touche plus. les émotions dissimulées. visage de marbre tourné vers l’inconnu. votre père m’envoie. pas son paternel donc. un larbin dans ce cas. le cerveau connecte les informations. les souvenirs qui refont surface. ceux où tu me demandais de faire un choix sur la plage. — il est avec moi. je m’occupe de son cas. vous pouvez partir. dégager aurait été mieux. mais j’me retiens. attrapant ta main dans mon dos pour la ramener près de ma hanche, liant tes doigts aux miens.

La main de Rose, Ace s'y accroche. Il se rapproche d'elle, mais le contact n'a rien de ceux qu'ils avaient l'habitude de se donner. Celui-ci est fort, nerveux, et Ace ne décroche pas son regard de l'homme, qui observe maintenant Rose. « Et vous êtes ? » Court silence, avant qu'il n'enchaîne. « Ah oui, Rose. Rose Morelli. » Il regarde Ace à nouveau. « Mr Chung, la patience de votre père a ses limites. Vous auriez pu y laisser la vie. » Le stress. La main d'Ace reflète sa nervosité, alors que la deuxième rejoint la première pour tenir celle de Rose.

réponse qui me fait froid dans le dos. frisson désagréable qui me parcoure l'échine. ta main en rappel, m'ancrant à la réalité qui se déroulait face à moi. il connaissait mon nom. il savait qui j'étais. tu lui avais parlé de moi, ace ? à ton paternel ? j'espérais que l'information venait de toi dans un sens. le contraire m'angoissait. les sourcils se froncent davantage lorsqu'il se tourne de nouveau vers toi. n'ayant nullement prêté attention à ma demande. suis-je réellement surprise ? non. la situation était délicate. nullement certaine d'être un réel obstacle. d'avoir une réelle importance. ta seconde main vient s'accrocher à la mienne. il te rend nerveux n'est-ce pas ? j'peux pas te voir. mais j'peux le ressentir. la force que tu exerces sur mon épiderme. pression supplémentaire en guise de réponse. j'te lâche pas. — et là c'est ma patience qui commence à atteindre ses limites. Mr Chung va bien, faites passer le message à votre patron et laissez-le tranquille. l'ambiance devient glaciale, irrespirable. envisageant déjà l'option de prendre la fuite. avec toi.

Le visage faussement détendu de l'homme s'oriente à nouveau sur Rose ; et en un court instant, par cet échange de regard, tout devient sombre. Froid. Menaçant. D'un côté comme de l'autre, les regards assassinent, mais l'un est plus dangereux que l'autre. Ace le sait. Et même s'il a peur, c'est l'idée que Rose devienne une cible qui l'angoisse le plus ; alors il tire sur sa main pour la reculer, la plaquant contre lui alors qu'il passe un bras autour de ses épaules. « Non. » Non guttural, profond, menaçant à son tour. C'est sur Ace alors que remonte le regard de l'homme, qui le fixe longuement... avant de soupirer. « Vous n'avez pas changé. Votre père ne vous abandonnera pas, Mr Chung. Vous savez où le trouver en cas de besoin. » Un dernier regard en direction de Rose, et l'homme tourne les talons pour s'éloigner.

les regards assassins qui se reflètent dans cette atmosphère étouffante. les volontés qui s'opposent. nullement avisée de m'en détourner. détermination qui enflamme mes rétines, prête à me jeter à corps perdu dans cette cause. même si elle ne me concerne plus. tu finis par me surprendre, venant t'interposer sans que j'puisse rien contrôler. l'corps qui recule contre ma volonté. ton bras par dessus mes épaules. nos épidermes qui reviennent se toucher. incrédule. étrangère à cet échange qui s'ensuit. laissant le bourreau lâcher son venin. l'être indésiré qui finit par quitter les lieux. l'silence pour seule réponse. nos corps toujours liés, ne sachant pas s'il fallait rompre le lien dès à présent. — c'est donc ça ton quotidien ? recule à nouveau pour me délier de ton emprise. pour t'inviter à mon tour à venir à mon encontre. ton torse qui bascule contre ma poitrine. et mes bras qui viennent t'enlacer. fortement. seule chose que j'suis encore en mesure de t'offrir. parce que pour le reste, j'en suis plus vraiment légitime, non ?

Les noeuds au ventre persistent, malgré le départ de l'homme en costume. Le visage d'Ace est fermé, bloqué dans une agressivité et dans la peur d'avoir à se défendre ; mais cette colère se dissipe quand Rose se retourne pour le prendre dans ses bras. Surpris par le geste, Ace reste un instant immobile, mais le malaise de la situation persiste. Il pose alors ses mains sur les épaules de Rose et la repousse en douceur, ne croisant que brièvement son regard avant de lui répondre. « ... pas tout le temps non. Mais ils finissent toujours par me trouver, me coincer quelque part. » Il soupire et croise les bras, encore mal à l'aise, le sang trop salement nettoyé sur son visage. Le regard fuit, n'osant pas la regarder. « Désolé. Qu'tu aies été forcée d'te mêler à ça. Tu peux y aller, il est parti aussi. »

un automatisme. venir t'enlacer. te presser contre mon corps. pour m'assurer que ça va. que ça ira. sans moi. pour venir t'épauler. te défendre. j'voulais juste te montrer que malgré tout ce qui se passe, malgré les mots blessants et les gestes maladroits, j'demeure présente. non loin. mais tu me repousses. doucement, certes. mais tu le fais quand même. arborant une posture défensive, les bras croisés. les rétines qui me fuient. fuis mon visage. mon regard planté dans le tien. déçu. encore une fois, ma vulnérabilité craint. m'reprends en pleine gueule cette douceur que j'ai essayé de te partager. la leçon bien retenue. — Ok, je m'en vais. vu que t'as l'air pressé que j'parte. désolée. pour le câlin. c'était stupide. l'corps qui fait volte-face. sans plus attendre. ton mal-être, j'le ressens. j'le vois. mais putain, arrête de me repousser à chaque fois que j'fais un pas vers toi. tu sais ce qu'il m'en coûte à chaque fois ? de mettre mon égo de côté ?