Entre souvenir et réalité : Moment de collaboration non désiré ! [Lexie]

 
  
Je me tiens devant la porte d’entrée, plus nerveux que je ne voudrais l’admettre. Ce n’est pas chez elle. Ce n’est pas cet appartement où j’avais l’habitude de venir, où on avait passé tellement de soirées ensemble. Non, cette fois, c’est chez ses parents. Et je dois avouer que ça me déstabilise un peu plus que prévu. La maison est différente, ça se voit tout de suite. Plus grande, plus calme. Je suis sur un terrain inconnu, à plus d’un titre.
Quand la porte s’ouvre, je lève les yeux vers elle. C’est la même Lexie, mais l’atmosphère est différente. Je prends une inspiration, tentant de paraître détendu.
« coucou »
Je hoche la tête, un peu maladroitement, et j’entre. L’intérieur est lumineux, propre, et respire une certaine tranquillité. Je ne sais pas exactement où me diriger. Mes yeux parcourent la pièce rapidement, repérant les photos de famille, les meubles en bois clair, et tout ce qui donne cette impression d’être chez quelqu’un d’autre. Ce n’est clairement pas l’endroit où je l’imaginais vivre. Pas après tout ce qu’on a partagé.
« C’est… sympa ici. »
Je me débarrasse de ma veste et je la pose sur le dossier d’une chaise, comme je le ferais chez n’importe qui, tentant d’ignorer cette impression étrange de n’avoir plus ma place ici.
Mes pensées sont trop occupées à essayer d’éviter tout ce qui n’est pas lié au devoir. Pourtant, l’atmosphère reste lourde, pleine de non-dits.
On doit travailler sur : Prise en charge des patients atteints de maladies chroniques : collaboration entre chirurgie et psychologie
Le sujet doit se concentrer sur la manière dont la chirurgie et la psychologie doivent collaborer pour offrir une meilleure prise en charge aux patients souffrant de maladies chroniques comme le cancer, où le traitement chirurgical s'accompagne souvent d'une détresse psychologique.
Je ne sais pas par quoi commencer, je reste donc planté la pour le moment.

 
  
Je n'aurai jamais pensé que je sois forcée en quelque sorte de revoir Ian. Le temps a coulé sous les ponts depuis notre séparation enfin la sienne c'est sa décision. Bien évidemment je ne peux pas en vouloir à notre professeur qui a eu la bonne idée de nous mettre en duo sur ce projet, il ne peut pas savoir qu'il fut un temps nous étions "un couple". Ni même que depuis mon départ en Afrique, le jeune homme et moi nous évitions de nous croiser. Enfin du moins, j'évite Ian. Est-ce que je lui en veux d'avoir décidé de rompre et de ne pas attendre une année entière après moi. Je ne sais pas si c'est de la colère que je ressens ou une certaine tristesse. Mais, soit le résultat est là, je dois coexister avec lui quelques temps afin de mener à bien ce travail. Les maisons de nos fraternités étant encore fermée, n'ayant pas assez d'argent pour me louer un appartement, j'avais bien été obligée de retourner chez papa et maman. Ne voulant pas non plus que les gens nous voient trainer ensemble et ne se pose des questions. Je lui avais demandé de me rejoindre ici pour qu'on puisse travailler. Et puis même imaginer que notre entrevue ne se passe mal? Je n'avais pas l'envie de me donner en spectacle dans la bibliothèque. J'entend alors sonner à la porte. Vous dire que ça me stresse? Oui c'est un grand OUI! J'ouvre la porte pour voir Ian se tenir devant ma porte frais comme un gardon me servir un coucou comme si jamais de rien avait été entre nous.

Salut, entre. dis-je d'une faible voix, mal à l'aise de cette situation. Je me décale pour le laisser entrer. Heureusement pour moi, les parents travaillent encore et ne sont pas près de rentrer avant un bon moment. Imaginez la scène de trouver mon ex petit ami ici, ils sauteraient directement aux conclusions. Et non Ian et moi ne nous sommes pas remit ensemble. Nous étions dans la cuisine. Merci c'est la maison familiale. Tu veux boire quelque chose? Les parents ne sont pas là, assieds-toi si tu veux. dis-je comme si je tentais de la détendre aussi, au final il devait trouver cette situation aussi étrange que moi. Allions nous réussir à rester plus de cinq ou dix minutes en présence l'un de l'autre?

 
  
Je m’avance dans l’entrée, essayant de ne pas trop prêter attention au fait que ma présence ici semble aussi inconfortable pour elle que pour moi. Je sens cette tension, ce malaise sous-jacent. Elle est là, palpable, même si aucun de nous n’ose vraiment la nommer. Je me rends compte que ça fait des mois que je n’ai pas entendu sa voix, et ce simple "Salut" un peu hésitant me ramène bien plus loin que je ne le pensais.
Elle mentionne que ses parents ne sont pas là, et je hoche la tête en silence. J’imagine bien la scène si l’un d’eux passait la porte et me trouvait là, comme si rien n’avait changé. Mais en réalité, tout est différent.
« Merci, » dis-je simplement, avant de m’asseoir à la table.
Je pose mes mains sur mes genoux, essayant de cacher un peu la légère nervosité qui monte en moi. C’est étrange, vraiment étrange, d’être là, dans cette maison, après tout ce qu’on a traversé. Mais en même temps, je ne peux pas m’empêcher de me dire que ce n’est pas si mal d’avoir un peu de calme pour bosser, loin des regards curieux. Si on avait été à la bibliothèque, tout le monde aurait probablement commencé à se poser des questions.
Elle me propose quelque chose à boire, et je réalise que ma gorge est un peu sèche. Peut-être à cause de l’atmosphère, ou de tout ce que je m’efforce de ne pas dire. Je fais un signe de tête, tentant d’adopter un ton détendu, même si c’est loin d’être le cas.
« Un verre d’eau, ce serait parfait. »
J’attends qu’elle revienne, regardant mes mains pendant un instant, avant de me forcer à me redresser. Il faut qu’on reste concentrés sur le travail, et pas sur le passé. Je vois bien qu’elle aussi essaie d’éviter les sujets qui fâchent. Nous sommes là pour un devoir, et c’est tout. Enfin, en théorie…
Je me raclais légèrement la gorge, cherchant à ramener la conversation sur un terrain plus neutre, plus sûr.
« Le sujet est intéressant. Prendre en charge des patients chroniques demande vraiment une collaboration entre la chirurgie et la psychologie. » Je parle presque pour remplir le silence, mais je crois sincèrement en ce que je dis. « Quand on y pense, les patients atteints de maladies chroniques, surtout ceux qui subissent des opérations lourdes, vivent avec des incertitudes permanentes. Ce n’est pas seulement une question de réparer le corps, mais aussi de savoir comment ils vont gérer ça mentalement. »
Je regarde autour de moi, comme pour chercher une échappatoire, mais je sais que je dois rester concentré. J’essaie de rester professionnel, de ne pas laisser mes pensées s’égarer. C’est dur, parce que tout dans cette pièce me rappelle que la distance entre nous est plus grande que jamais, même si physiquement, elle n’a jamais été aussi petite depuis des mois.
« On pourrait commencer par un ou deux cas concrets. Des patients qui ont subi une intervention chirurgicale pour traiter un cancer, par exemple, et voir comment la psychologie a aidé ou non à leur rétablissement. »
Je me penche un peu en avant, prenant un des dossiers que j’avais apporté.
« J’ai regardé quelques études avant de venir. Les résultats sont clairs : sans un soutien psychologique adéquat, le taux de rechute, voire de dépression, est plus élevé chez ces patients. »
Je repose le dossier sur la table, attendant sa réaction, mais j’ai cette impression étrange qu’on marche tous les deux sur des œufs. Rien n’est simple entre nous, et pourtant, je me force à agir comme si ce n’était qu’un devoir, qu’un projet comme un autre.
Je prends une respiration plus profonde, et sans vraiment la regarder, je finis par murmurer :
« On devrait pouvoir s’en sortir. Même si… c’est pas l’idéal comme situation. »Je me rend compte soudainement que je parle beaucoup voir même un peu trop...

 
  
Pour être franche, cette situation me mets réellement mal à l'aise. J'ai tout fais pour éviter au maximum de recroiser Ian depuis mon retour d'Afrique du sud. Il y a encore trop de souvenirs, de blessures, j'ai été réellement déçue qu'il n'ai pas comprit que je ne partais pas pour le plaisir mais pour un avenir et que ses sentiments n'aient pas été suffisant que pour m'attendre. Alors me retrouver presque forcée de bosser avec lui sur ce projet de devoir, ce n'était vraiment pas facile. Le revoir ici dans cette maison un peu comme si rien n'avait changé, c'est compliqué. Mais, que l'on ne nous voit trainer ensemble serait sans doute pire encore. Il s'assoit et je me contente d'aller lui servir un verre d'eau fraiche. Je referme le frigo perdue dans mes pensées alors qu'il se mets littéralement à débiter un flots de paroles que je n'arrive pas réellement à suivre. Devoir, chirurgie, psychologie, intéressant il n'y a que quelques mots qui percutent mon esprit. Suis-je troublée par la présence du jeune homme, il y a fort à parier que oui. Soutien psychologique. Et d'un seul coup les mots s'échappent involontairement de mes lèvres. Moi aussi je vais avoir besoin d'un soutien psychologique. Mes lèvres se pincent, réalisant que je viens de m'exprimer à haute voix. Je me retourne alors le regard un peu perdu tout en venant déposer le verre devant Ian. Je suis la meilleure dans mon domaine, du moins j'essaie de l'être et je ne recule jamais devant un challenge. Mais, j'ai toujours été une jeune femme réactionnelle aussi. Mes yeux se relèvent sur le visage de mon ex petit ami. Désolée Ian ça va un peu trop ... Vite pour moi. Je ne m'attendais pas à devoir faire équipe avec toi et pour être franche c'est un peu compliqué. Autant être franche.

Je repars quelques instants vers la machine à café, il allait bien me falloir au moins ca pour me redonner consistance et aborder peut-être plus sereinement le fait de faire équipe avec Ian. Silencieuse comme une morte je reviens me poser et m'assoir juste en face de lui. C'est psychologiquement dur pour les adultes atteints de cancer en phase terminale, ils ont non seulement besoin du soutien de leurs proches mais, quand ils ne l'ont pas? Un soutien d'un professionnel s'avère encore plus primordial. Imagine quand ce sont des enfants alors. Je m'étais spécialisée vers la chirurgie pédiatrique assez récemment et c'est la voie que j'avais choisie pour mon internat. Pas l'idéal comme situation! C'était pas les mots que j'aurai choisis pour décrire le moment que nous vivions en ce moment. Un avait rompu enfin il avait rompu, j'étais partie et depuis on en avait jamais parlé, on ne s'étaient jamais expliqué. Pas très adulte tout cela non?

 
  
Je prends le verre d’eau qu’elle dépose devant moi, mais mes pensées sont ailleurs. Ses mots me frappent comme une vague froide. « Moi aussi je vais avoir besoin d’un soutien psychologique. » Elle l’a dit presque par accident, et ça m’a pris de court. Pendant un instant, je me demande si elle plaisante, mais son ton sérieux me rappelle que ce n’est pas le cas. Ça me ramène brutalement à notre situation.
Je la regarde alors qu’elle repart vers la machine à café, son geste presque mécanique, comme si elle essayait de se recentrer, de retrouver un peu de contrôle sur ce moment. Je sens bien qu’elle est aussi perturbée que moi par ce devoir imposé, par cette collaboration forcée. Et je comprends, même si ça me met aussi mal à l’aise.
Elle revient s’asseoir en face de moi, et je peux voir dans ses yeux que la façade qu’on tente tous les deux de maintenir commence à se fissurer. Ses paroles résonnent dans ma tête. "C’est un peu compliqué." Ouais, c’est le moins qu’on puisse dire. Rien que d’être ici, dans cette maison, me fait réaliser à quel point nous sommes éloignés, non seulement géographiquement, mais émotionnellement.
Quand elle parle des patients, des enfants atteints de cancer, je sens la passion dans sa voix. La chirurgie pédiatrique, c’est clairement devenu son chemin, sa vocation. Et je me rends compte que je n’avais jamais vraiment compris à quel point elle était impliquée là-dedans.
Je m’adosse un peu plus sur ma chaise, essayant de trouver un équilibre dans cette conversation qui devient de plus en plus personnelle, malgré nous. J’ai envie de répondre, de trouver quelque chose à dire qui ne soit pas maladroit, qui n’envenime pas la situation. Mais tout ce qui me vient à l’esprit sonne creux, comme si rien ne pouvait vraiment apaiser la tension.
« Je comprends. »
Je marque une pause, mes yeux fixant la table devant moi, puis je reprends d’une voix plus calme.
« Je veux dire… je comprends que ce soit difficile. Pour toi. Pour moi aussi, honnêtement. » Je pousse un léger soupir. « Je m’attendais pas à ce qu’on se retrouve comme ça, dans ces conditions. »
Je bois une gorgée d’eau, plus pour gagner du temps que par réelle soif. Comment est-ce qu’on en est arrivés là ? Assis l’un en face de l’autre, à discuter d’un devoir universitaire, alors qu’il y a encore tellement de choses non résolues entre nous ? Je m’interroge sur ce que j’aurais pu faire différemment. Peut-être qu’en étant plus patient, j’aurais pu attendre, supporter son absence pendant cette année en Afrique. Mais à l’époque, tout me paraissait insurmontable.
Je repose le verre et me redresse légèrement, tentant de ramener la discussion sur un terrain plus neutre, même si ça devient de plus en plus difficile.
« Je sais que ça n’a jamais été facile de parler de tout ça… et c’est peut-être pas le bon moment pour en reparler maintenant. Mais… je veux qu’on arrive à faire ce devoir correctement. Et si ça veut dire qu’on doit prendre le temps de gérer tout ce qu’il y a entre nous avant, alors… je suis prêt. »
Je me rends compte que je viens d’ouvrir une porte que j’avais gardée fermée pendant trop longtemps. C’est peut-être pas l’endroit, ni le moment idéal pour ça, mais Lexie mérite d’entendre au moins ça de ma part. Même si on a évité cette conversation pendant tout ce temps, même si je sais que j’ai merdé à l’époque, je ne peux plus continuer à faire comme si de rien n’était.
Je reprends une respiration profonde, tentant de calmer le flot de pensées qui tourne dans ma tête.
« En tout cas… pour le projet, t’as raison. Les enfants atteints de maladies chroniques, c’est un sujet encore plus complexe. Le soutien qu’ils reçoivent, ou ne reçoivent pas, change tout dans leur guérison. Ça pourrait vraiment être le centre de notre étude. On pourrait se concentrer sur un ou deux cas spécifiques, analyser comment la psychologie et la chirurgie ont travaillé ensemble pour améliorer leur bien-être. »
Je me tais un instant, guettant sa réaction, même si je ne suis pas sûr de ce que j’attends vraiment. Je me demande si elle veut vraiment reparler de nous, ou si elle préfère qu’on continue à faire comme si tout ça n’était que du passé, quelque chose de lointain et d’oublié.

 
  
Il ne s'attendait pas à ce que l'on se retrouve dans ces conditions? Je ne m'attendais pas à ce que l'on se retrouve tout court. Cette fin de relation m'avait laissé un certain goût amer. Cette relation avortée m'avait tout simplement donné l'envie de fuir l'attachement, au jour d'aujourd'hui dès que quelque chose pointait avec quelqu'un et bien je ne montrais plus rien. Je fis un bref signe de tête même si pour être franche je ne voyais pas en quoi cela été difficile pour lui? C'était lui qui avait préféré tout arrêter avant que je m'en aille. Oui peut-être que vouloir aller "sauver le monde" enfin aider un pays défavorisé pour en apprendre un max pour ma vie future était égoïste enfin c'est très certainement ce que Ian avait du penser. Je l'abandonnais pour une année entière, je mettais des milliers de kilomètres entre nous et pas seulement pour une brève semaine. J'avais retourné ça dans les deux sens, me mettant à sa place aussi. Qui des deux étaient fautifs? Y en avait-il seulement un? Moi encore moins mais, on est adultes et on va bien trouver le moyen de fonctionner ensemble... On en a jamais parlé Ian! Tu as décidé, je suis partie malgré tout et voilà on s'est juste soigneusement évité. On peut en parler et on aurait très certainement dû le faire directement. Alors oui je veux bien parler mais, est-ce que cela changerait quelque chose?

Finissant de préparer mon café je revenais auprès de mon ex, m'asseyant alors en face de lui. Mon regard se posa alors brièvement sur son visage. Je n'avais pas la moindre idée de comment il accusait ma réponse. J'aurai aimé savoir lire dans les pensées. Quel avait été son ressenti à lui, pourquoi avoir fait ce choix et tout un tas de choses qui restaient dans l'ombre. Il fallait très certainement qu'on finisse un jour par en parler. J'opinais de la tête quand il revint sur le sujet de notre petite réunion en tête à tête. Oui la pédo-psy est encore parfois plus complexe que la simple psychiatrie et la psychanalyse pour adulte. Très jeune les enfants on plus de difficultés a mettre des mots sur leurs ressentis. Je suis d'accord pour partir sur ça. concluais-je alors tentant un bref sourire pour dissiper un peu le malaise ambiant.