Son reflet qu'elle observait et qu'elle détestait face au miroir, un verre de champagne vidé d’un trait, l’élixir doré adouci par une pilule pour traverser la soirée. Ce qu’elle est, et ce qu’elle représente, devait s’effacer pour laisser place à cette potiche souriante qu’elle exécrait tant. Jouer un rôle n’avait jamais fait partie de ses habitudes, alors il fallait que son âme s’échappe, ne laissant que ce corps, privé de libre arbitre, offert à ce pauvre imbécile qui lui servait de fiancé. Tous les invités étaient déjà réunis dans la salle de réception, et son père, incapable de contenir son impatience, frappait doucement contre la porte, lui rappelant qu’il était temps de descendre. "C’est ta fête, Astra, tu adores ça d’habitude." Ces mots résonnaient comme des coups de poignard supplémentaires, plantés dans son avenir avec une indifférence cruelle. Elle prit une profonde inspiration avant de se lever, résolue à enfiler ses talons hauts. Un dernier regard vers son reflet pour s’assurer que le mascara n’avait pas laissé de traces, ces larmes symboles de celle qui hurlait intérieurement pour qu’on la libère. Son cœur manqua un battement lorsque la porte s’ouvrit brutalement, corps qui sursaute en reconnaissant ce visage. Pas toi, James, pas maintenant. Elle aurait pu être son meilleure soutien en cet instant, mais elle ne serait qu’une dernière poignée de terre destinée à enterrer définitivement son âme. Elle resta là, muette, comme une enfant prise en flagrant délit de la plus grande erreur de sa vie, incapable de trouver les mots pour s’excuser ou se justifier.
(Astra Rothschild)