— moth to a flame (sonny)

@sonny kidd — trop perturbée par la dernière soirée pour en rester là. par la distance au goût amer, l'indifférence dure à supporter. se dit que les choses arrivent pour une raison, cherche les signes où ils n'existent pas. sur cet état d'esprit que les pas la guident dans le sud de la ville. parc de maisons mobiles, sans doute le dernier endroit où elle se serait fourrée. le choix des escarpins regretté, alors qu'elle s'enfonçait dans l'herbe. les habitations toutes alignées, s'y confondait presque sous la lumière faible. l'arrêt se fait devant le numéro indiqué. les premiers cognements sur la porte, le silence qui s'en suit. le téléphone dégainé pour vérifier que le numéro de porte n'avait pas été confondu. finit presque par tourner les talons, quand elle entend un bruit de l'intérieur. le faux rire lâché, les fils se connectent. il veut pas d'elle. – sonny ? les coups à la porte plus hargneux. pas prête à accepter la défaite et repartir bêtement. pas de son, pas d'image. – y'a un mec bizarre au loin, tu veux pas m'ouvrir ? le mensonge sans scrupule. user des grands moyens pour le faire céder. s'il lui restait encore une âme.

@Rym Borges — les coups à la porte. toc, toc. tambourine avec une assurance qui s'estompe, jusqu'à mourir. comme les rêves, ici. les mains sur le visage, entre ses doigts glissent la crinière invisible. exaspéré. s'il avait voulu flirter avec les fantômes de son passé, il s'y serait pris autrement. l'agacement de la revoir masquait une amère déception. elle avait rien à faire avec eux avant, elle avait pas plus quelque chose à faire avec eux maintenant. pas un mouvement, pas un son. en l'ignorant suffisamment longtemps, elle se lassera. fait le mort sur le lit. mais curiosité l'emporte sur la raison. colère, avarice, envie, orgueil, gourmandise, paresse, luxure... le mal-aimé, l'oublié des (huit) péchés capitaux. il l'aperçoit. vision à sens unique. mirage en chair et en os. une brume l'enveloppe. elle, et sa longue chevelure dorée. elle, et ses traits délicats, mais tourmentés. elle, et sa silhouette élancée. elle, et son regard noisette indéchiffrable. elle, et son sourire hargneux. plancher craque sous son poids. putain. la trahison vient de son propre camp. c'est pas pour autant qu'il s'avoue vaincu, ignore les coups qui s'intensifient. la voix s'immisce à travers le grabuge. soupir bruyant. c'est foutu, il abdique à ses suppliques. « entre. » prend pas le temps de la saluer qu'il l'empoigne par le coude pour l'attirer à l'intérieur de son palais coin miteux. jette un coup d'oeil à l'extérieur; à gauche, à droite. referme la porte, l'air furax – c'était pour la forme. « mytho. y'a personne. » reproche dans la voix. voile sombre dans les yeux. a capté le stratagème à retardement, c'est trop tard maintenant. sait pas où poser le regard, alors il la détaille. de la tête aux pieds. sourire ringard. « sacré accoutrement... t'as pas reçu le mémo pour le code vesti' clodo? » clash. la belle et le clochard.

@sonny kidd — pas son genre de s'arrêter à un échec. les trailers tous identiques parcourus dans la pénombre, les escarpins qu'il aurait mieux fallu troquer contre des chaussures plates. la mauvaise idée de s'embarquer dans le sud de la ville après un rendez-vous professionnel. bien trop apprêtée pour l'endroit dans lequel elle se rendait, mais le coup de tête avait pulsé ses pas. impossible de se laisser vaincue, alors qu'elle avait entendu du mouvement à l'intérieur. certaine qu'il était là, et ça se confirmait quand il ouvrait la porte pour la tirer à l'intérieur. comme un individu qui tentait de se cacher du monde extérieur. les yeux scannaient la pièce, pour finalement se retourner vers lui. – j'me suis vêtue pour toi, t'aimes pas ? les mains rejoignaient le sac, sourire d'une parfaite innocente. il ne la connaissait que trop bien pour savoir ce qu'il se cachait derrière les traits étirés. – faut inventer des histoires sombres pour que t'ouvres la porte, tu trouves ça normal ? talent inégalable pour retourner toutes les situations à son avantage. faire oublier son mensonge tordu pour concentrer la faute sur lui. quelques pas pour terminer sa visite, et elle s'installait naturellement sur le fauteuil. – tu m'offres à boire ? j'suis essoufflée après avoir autant cogné sur ta porte. la couche de culpabilité en plus, de sorte à ce qu'il ne lui refuse pas ce verre.

@Rym Borges — il la toise, l’air sévère. elle et son regard fauve. la silhouette à l’élégance sauvage d’une panthère. why not friend, if friend shaped? redoutable bête capable de vous achever les yeux fermés, dos tourné. et pourtant, derrière cette façade indomptable se cache une vulnérabilité soigneusement dissimulée. lui, il les a vu ses failles. jadis. à une époque qui semble désormais si lointaine qu’il en vient à se demander si ce n’est rien de plus que le fruit de son imagination. il la dévisage, recueille en silence les indices de sa présence jusqu’à ce qu’elle achève le monologue dans lequel elle s'était lancée. « c’est bon, t’as fini? », qu’il s’enquiert, railleur, décroisant les bras de sur son torse pour jouer d’un violon imaginaire. le geste est sarcastique, nonchalant, mais faussement méprisant. « t’inventes toujours des histoires. à force de crier au loup… j’te laisse compléter le dicton par toi-même. » mais ce qu’il dit pas, c’est qu’il était pas prêt à garder la porte fermée et à courir le risque que ce soit vrai.

promenons-nous dans les bois
pendant que le loup n'y est pas
si le loup y était
il nous mangerait

 

un sourire semi-blasé, semi-narquois effleure ses lèvres. un sourire qui dit je sais c’que tu caches, mais je jouerai ton jeu, si c’est c’que tu veux. il se retourne pour ouvrir le réfrigérateur, dans lequel il se penche. tablettes vides, ou presque. pas le loisir de les garnir. « j’ai de la bud, de la stella ou de la guinness. ou l’eau du robinet. pick your poison. » puis, sans même lui laisser le temps de choisir, il saisit une bière, la décapsule, avant de la porter à ses lèvres. « qu’est-ce que t’es v’nue faire ici, rym? qu’est-ce que tu veux? parce que j’sais que tu te pointes pas ici sans raison. »

@sonny kidd — elle peut pas le tromper, lui. celui qui a vu dans ses yeux tout ce qui se cachait de mauvais. toutes les insécurités, les complexités.. ou presque. le cinéma fonctionne pas sur lui. – tu m’laisserais me faire dévorer, sonny ? qu’elle demande, curieuse de sa réponse. il aurait jamais laissé ça arriver, il y a deux ans. quand ils avaient beau être au milieu d’un large groupe, et qu’ils ne restaient jamais éloignés bien longtemps. le seul qui avait suffisamment suscité son intérêt parmi eux. celui pour qui elle était revenue, aussi. même si elle n’était pas prête à faire cette confidence, à préférer jouer sur l’aspect flou. comme le flou dans son esprit face à sa mine presque désintéressée de la voir. à se demander si ça traduisait ses réelles pensées, ou si ce n’était qu’un genre qu’il se donnait. jouer le détaché, comme elle en était l’experte. semblables sur bien des points. regard de la blonde des plus ennuyés, comme si elle ne s’intéressait pas à tout ce qui pouvait se trouver ici, dans l’espace resserré. sa réponse qu’il n’attend même pas, l’impolitesse qu’elle est prête à lui faire payer. – un pote habite pas loin, c’était l’occasion de passer par ici. sourire aux lèvres, essaie même pas d’être crédible. s’il lui servirait pas réellement de boisson, c’était la sienne qu’elle prendrait. deux pas en avant pour récupérer la bière de sa main, la porter à ses lèvres. piètre qualité, lui tire une grimace contrôlée. – toujours le goût pour les choses néfastes. trop amer pour être absorbable.