Good for you !
I guess you moved on really easily.
Y a-t-il quelque chose de plus humiliant que de devoir récupérer ses affaires chez son ex, surtout quand il a rompu avec vous quelques jours avant la Saint-Valentin pour un motif aussi absurde que "Je me sens prisonnier de la relation" ? Probablement pas. Il lui avait fallu un courage immense et de longues heures de débat intérieur avant de se résoudre à envoyer ce fameux SMS à Soren la veille pour le prévenir qu’elle viendrait passer. Elle ne pouvait tout de même pas abandonner ses T-shirts de festivals ou sa précieuse trousse de maquillage de voyage. C’est ainsi, traînant les pieds, qu’elle s’était finalement rendue chez lui. Bien sûr, elle avait pris le temps de se coiffer et de s’apprêter autant que possible. Hors de question d’avoir l’air pathétique ou désespérée devant lui. Il devait voir qu’elle avait tourné la page, qu’elle était passée à autre chose !
Mais l’avait-elle vraiment fait ?
Devant la porte de son appartement, elle poussa un long soupir. Ses yeux fixaient la poignée, son esprit en proie à une lutte interne. Après cinq bonnes secondes, elle se décida enfin à lever la main pour toquer, deux coups rapides et secs. Dans le même geste, elle recula d’un petit pas, mettant une certaine distance entre elle et la porte, comme si cela pouvait atténuer l’inconfort de la situation. Puis, machinalement, elle redressa son sac à main noir sur son épaule, passa une main dans ses cheveux lissés, ajusta sa chemise blanche à motifs floraux, remonta légèrement son jean noir, et, dans un geste de dernière minute, passa sa langue sur ses dents pour s’assurer qu’aucun reste de salade n’était coincé.
Et c’est alors qu’elle se rendit compte, agacée, de tous les efforts qu’elle faisait inconsciemment pour continuer à plaire à un garçon qui, en fin de compte, n’avait même pas été capable de lui offrir le minimum. Est-ce qu’elle avait demandé la lune ? De boire la mer ? Non, juste un peu d’attention. Peut-être beaucoup, mais après tout, est-ce trop demander ?
Chaque seconde qui passait devant cette porte faisait se contracter un peu plus son estomac et sa gorge. Elle resserra son sac contre elle, cherchant du réconfort dans ce geste, tandis qu’elle tentait de rassembler le courage nécessaire pour ce qui allait suivre.
Devait-elle vraiment être là ? Était-ce une bonne idée de venir, de se replonger dans cet endroit qui avait été témoin de tant de moments heureux, mais aussi de tant de désillusions ? Elle s'était promis de ne plus y penser, de ne plus laisser son esprit errer dans les souvenirs de leur relation, mais maintenant, tout lui revenait en pleine figure avec une force brutale. Elle se revoyait, riant aux éclats dans cette même pièce, partageant des moments complices qui lui paraissaient si lointains maintenant, presque irréels. Autrefois, elle ne toquait pas ici, elle rentrait d'un geste rapide comme si c'était chez elle, parce qu'elle s'y sentait comme chez elle.
Une partie d’elle, une petite voix persistante au fond de sa tête, la suppliait de faire demi-tour, de laisser tomber, de ne pas s’infliger cette épreuve inutile. Elle n'avait besoin de rien de ce qui se trouvait derrière cette porte, se disait-elle. Ce n’était que des objets, des souvenirs matériels qu'elle pourrait remplacer. Mais une autre partie d’elle, plus forte, plus déterminée, lui soufflait que c’était nécessaire, qu’elle devait affronter cela pour vraiment tourner la page, pour prouver à elle-même qu’elle pouvait le faire... et parce que le maquillage, ça coûte quand même très cher mine de rien.
Elle essaya de se concentrer sur des détails pour se calmer : le grain de la porte, la douceur de ses cheveux sous ses doigts. Mais rien ne pouvait véritablement apaiser l’agitation qui bouillonnait en elle. Elle voulait que cette rencontre soit brève, sans accrocs, qu’elle puisse entrer, récupérer ses affaires, et repartir sans un mot de plus, mais elle savait au fond qu’il ne serait pas si facile de masquer ce qui se passait en elle.
Et si la porte ne s’ouvrait jamais ? Si Soren avait décidé de l’ignorer, de la laisser plantée là, comme une sorte de vengeance mesquine ? Cette pensée la frappa, la remplissant d’un mélange de colère et de tristesse. Mais non, ce n’était pas lui, il n’était pas cruel. Il finirait par ouvrir, par la laisser entrer, et elle pourrait enfin mettre un terme à cette histoire.
Faniahh/Lala/Cyalana
(Léo Isra)