THE BIG BLUES
« Y a des rumeurs… » j’en arrête de mâcher le morceau de pizza que je venais de me décider à manger. Des rumeurs probablement mon mot préféré. Lorsqu’il ne me concerne pas. Mais là, je n’ai pas de possibilité d’hésitation sur la personne visée. C’est moi, je le sais. Alors je décoche un regard sur l’une de ces filles qui se croit assez bien pour traîner avec moi. Pour se rapprocher du sommet, mais si j’ai des amies, ce n’est que pour les apparences, il n’y en a aucune d’elles qui comptent dans mon existence. « Des rumeurs ? » Explique-toi, que je puisse te bouffer plus rapidement, n’est-ce pas ? Et dans son regard, je parviens à lire l’appréhension, l’envie de tourner sa langue dans sa bouche un peu plus de sept fois avant de se remettre à parler. « Sur toi. » Sans déconner, je n’aurais pas su, seule, le déterminer. « Mais encore ? » à défaut de manger ma part de pizza, c’est sur un verre d’un apéritif que s’agrippent mes doigts. « Et Hackman. » Le nom de famille tombe comme une insulte, un véritable blasphème dans notre petit univers saupoudré de paillettes. « Y a rien entre lui et moi. » On a beau avoir quitté l’université, les gamineries tendent à ne pas nous quitter. Puis c’est la stricte vérité. Entre Dan et moi, il n’y a absolument rien. Un amusement peut-être, un rejet, ça, c’est certain, mais je ne m’abaisserai pas à dire que c’est le sien. « Pourtant, on dit qu’il prend beaucoup de place dans ta vie. » Voilà ce que je récolte à m’afficher avec lui. A avoir passé le début de mes vacances dans un hôtel merdique en Italie. « J’en ai rien à foutre de Dan Hackman. » Un caillou dans mon soulier, voilà l’image désignée. Qu’importe que ce soit faux ou vrai. C’est ce que mon monde veut entendre pour se rassurer. Pour se dire que Wendy ne s’est pas ramollie. « Respecte-moi, je peux avoir qui je veux. Je te le prouve quand je veux. » En clair, je peux trouver mieux que Dan pour des jeux luxurieux. Et parce que j’ai remarqué depuis le début de la soirée qu’il est là, sans sa chienne à promener, je bois une longue gorgée avant de balancer aux filles un sourire carnassier. Je peux avoir qui je veux. Je m’approche, je me fais délicate pour toucher sa main, comme le seraient les doigts d’Haiwee, ça me débecte rien que d’y penser, une fraction de seconde avant qu’il ne se tourne et capte mon regard. « Joue le jeu. » Ordre craché en un murmure, avec rapidité. C’est un véritable service Sheng, que je te demande, celui de me sauver. Mon visage s’approchant pour l’embrasser.
MADE BY @ICE AND FIRE.
(Wendy Witter)