Never alone ✧ Feat Safiya Knights-Anwar

Étant en freelance, tu pouvais te permettre d'aménager ta journée comme tu le souhaitais. Aujourd'hui il faisait plutôt beau et pas non plus trop chaud alors tu en profitas pour sortir un peu de ton hibernation. Rester toute la journée devant l'ordinateur n'était pas non plus agréable alors il fallait que tu ailles prendre l'air. Habillé légèrement et accompagné de ton carnet, tu en profitas pour te rendre à pied dans la ville. Depuis quelques temps, tu avais repéré un petit café bien sympathique alors tu comptais t'y poser une nouvelle fois. L'ambiance y était chaleureuse et tu savais que tu y passerais du bon temps et que cette pause serait fortement agréable. Tu entrais donc dans la boutique en te dirigeant directement vers la caisse. Il y avait un peu de queue pour l'heure mais tu ne patientas pas longtemps avant de faire ta commande. Cela ne prit que quelques minutes avant que ton café et ton cinnamon roll soient prêts. Muni de ton plateau, tu balayas la salle du regard à la recherche d'une place. La table en hauteur proche de la baie vitrée te semblait être le meilleur emplacement alors tu t'installas tranquillement sur le tabouret. Tu sortis tes affaires de ton sac et déposa ton carnet à ta droite, assez loin de ton café pour ne pas tâcher les feuilles. Tu ne savais pas encore ce que tu allais dessiner mais tu savais que l'inspiration te viendrait au fur et à mesure alors pour l'instant tu gribouillais seulement. Il fallait que tu l'avoues, prendre du temps pour toi de cette manière te faisait décompresser du travail. Penser à autre chose et ne pas avoir les yeux rivés sur ta 3D à t'arracher les cheveux n'était pas négociable. Tu espérais réellement que ce petit interlude de bonheur ne serait pas chamboulée par l'arrivée d'une certaine femme. A real pain in the as*.

L'été me semble long et maussade. Même si le soleil est présent, je ne passe mon temps qu'à travailler ou à essayer de faire mes tâches pour être tranquille. J'enchaine chaque jour sans véritable passion. La nuit précédente, j'ai eu quelques déconvenues avec des clients et contre toute attente, c'était sur la plateforme Uber et pas pour mes "autres" livraisons de nuit. J'ai réussi à dormir quelques heures mais je me sens encore un peu vaseuse avec le sommeil qui n'a pas été réparateur. Je sors de mon van et le ferme solidement en m'assurant que mon alarme est bien enclenchée. J'enfonce les écouteurs alors que je prends le chemin jusqu'à mon petit café habituel. parfois, j'y crois Colter pour qui j'aime bien titiller l'esprit car il refuse de se laisser séduire. Il a 39 ans, j'en ai 25. Nous sommes pourtant majeurs mais il est rebuté à l'idée de me toucher. Je suis trop jeune pour lui, à ce qu'il dit. ça me désole qu'il se bloque sur des mœurs comme celle-là. Au fond, je respecte mais de l'autre, je ne peux pas m'empêcher de minauder auprès de lui. Je ne sais pas s'il sera là. Je le croise souvent mais pas tout le temps. En approchant du café, je n'y pensais plus, mes pensées sont concentrées sur ma musique et les panneaux derrière la barista. Je commande et patiente le temps que ma boisson soit prête. Je pensais repartir quand je le vois. Mon regard se pose sur cette allure masculine que je trouve attirante. C'est déroutant que votre genre d'homme ne daigne pas vous regarder. Bon sang ! Je prends, enfin, mon café et je me dirige vers lui avec un petit sourire. Comme si le voir me donnait l'énergie que ne m'avait pas donné la nuit. Ma jupe se voile au mouvement de mes hanches, prête à séduire un homme dans le vent mais je n'avais pas dis mon dernier mot. Je m'assois en face de lui, avec mon plus beau sourire. -- Salut Colter... Je me mordille la lèvre tandis que je bois une gorgée de mon café. -- ça fait longtemps, tu m'as manqué... je doute de la réciproque mais je m'en préoccupe pas. Je peux m'amuser un peu avant de continuer ma journée.

Les yeux rivés sur ton carnet, tu ne faisais pas spécialement attention à ce qui t'entourait. Tu étais un peu comme dans une bulle, même le bruit assourdissant de la machine à café ou le brouhaha que provoquait les personnes autour de toi ne sauraient te détourner des pages que tu étais en train de remplir de croquis. Tu avais fait un peu de perspective, dessinant le mobilier autour de toi, avant d'enchainer sur un peu de dessin d'observation des passants dans la rue que tu voyais à travers la vitre. Ton crayon glissait de lui-même sur la plage blanche, donnant vie au dessin. Tu étais tellement plongé dedans que tu ne remarquas pas la jeune femme s'assoir en face de toi, seule sa voix insupportable te fit frissonner et te ramena à la réalité. Voilà, elle venait d'éclater la bulle et ça avait le don de t'hérisser le poil - comme d'habitude -.

- Safiya... soupires-tu bruyamment en levant les yeux au ciel, croisant les bras sur ton torse, tu n'as pas mieux à faire ?

Non mais c'est vrai, tu avais l'impression qu'elle passait sa vie ici ! Ou du moins, à chaque fois que tu venais, elle avait le don pour se pointer au même moment. Tu as même arrêté de compter le nombre de fois où elle a essayé de te faire du rentre dedans. Mais tu es catégorique : elle est bien trop jeune pour toi. Quatorze ans d'écart ? Elle pourrait complètement être ta fille, quelle horreur ! Enfin, objectivement parlant, c'était une jolie fille, il n'y avait pas à dire. Mais vraiment, le critère de l'âge était très important pour toi et tu n'arrivais pas à passer outre. Et puis de toute façon tu ne cherchais à voir personne, alors qu'elle arrête de forcer les choses.

L'âge n'a jamais été un facteur pour moi. Ce qui pouvait me rebuter, c'était la maladie car je ne pouvais pas gérer ça émotionnellement. Je le savais. Colter, lui, n'était pas vieux à ce point. Je trouvais même que ce n'était pas embêtant aux vues des mœurs qui ont évoluées ces dernières années. Nous avons des exemples probants parmi les célébrités américaines ! J'occulte les expressions négatives de Colter et lui offre mon plus beau sourire. Je serre ma tasse et en souffle la fumée alors qu'il vient à me gronder. -- Pourquoi tu commences déjà mal ? Je n'ai donc pas le droit de dire Bonjour à un ami que j'apprécie beaucoup ? je prends un air choqué alors que c'était "mon jeu" habituel avec lui. Je crois que c'est mon trait le plus toxique : la persévérance quand aucune chance ne s'offre à moi en face. -- Je passais prendre mon petit café du matin et je vois un bel homme seul en train de dessiner. Je bois une gorgée bien chaude et croise les jambes tout en papillonnant des yeux. -- Tu es vraiment méchant, Colter. je voulais juste te tenir compagnie et prendre de tes nouvelles. si je pouvais le toucher, je le ferais. une geste de la main sur la sienne, un pied qui frôle la cheville, que des invitations à séduire. cependant, je suis consciente de la réalité écrasante et respecte l'espace vital de Colter. Si je ne le ferais pas, je me dis que je ne serais pas mieux qu'une harceleuse. Au moins, j'ai le mérite de tomber par hasard sur lui ! -- Que faisais-tu ? je demande innocemment en tordant le cou pour voir ce qu'il y a sur la table. Je remarque des dessins mais de mon point de vue, j'ai du mal à en saisir ce que ça représente.