Au voleur !

Le summer camp touchait déjà à sa fin et il était temps de rentrer. Tu voulais mettre les petits plats dans les grands et concocter un pique-nique pour ton équipe, afin de profiter d'un dernier moment de convivialité. Pour ce faire tu avais décidé de faire des emplettes au marché. Tu avais choisi les légumes avec soin, puis, tu sortis ton portefeuille de ta poche pour payer. Mémoire de poisson rouge oblige, tu t'aperçus au dernier moment que tu avais oublié quelque chose sur ta liste, aussi tu posas ton portefeuille à côté de toi et tu ajoutas les derniers articles à ton achat final. Grossière erreur. Lorsque tu tournas la tête pour chercher de la monnaie, tu t'aperçus que ton portefeuille avait toit bonnement disparu. "Euh, s'il vous plaît?" Tu interpellas la personne à côté de toi, qui était elle aussi en train de faire la queue. "Vous n'avez pas vu mon portefeuille? Il était juste là!" Pendant ce temps, le vendeur s'impatientait, attendant de pouvoir encaisser, sauf que tu n'avais pas d'argent à lui donner.

Plus calme. Voilà ce qu’a été ce mois d’Août. Beaucoup plus calme que mon mois de Juillet. Et si c’était ce que j’avais dit vouloir, à la base… Je dois me rendre à l’évidence, tout un mois à ne rien faire c’est… foutrement ennuyant. Je ne compte même pas le nombre de fois où j’ai pensé rentrer chez moi. Evidemment, je ne le pouvais pas, parce que c’était ce que ma mère voulait et comme d’habitude, je n’avais aucune envie d’accéder à ses envies, alors je suis restée en Italie, et j’ai subi. Super, en fait. Moi-même je doute de mon intelligence légendaire. C’est vrai.

Je le sais, que je ne suis qu’une gamine insatisfaite, et qui n’aurait jamais dû se traîner sur ce marché. Parce que je ne supporte pas les autres êtres humains, bon sang. "Euh, s'il vous plaît?" Un temps pour déterminer que c’est à moi que l’on est en train de s’adresser, et les mots au bord des lèvres ce n’est pas moi, j’ai rien fait, mais qui ne sortent pas, "Vous n'avez pas vu mon portefeuille? Il était juste là!" Respire Junior, la voleuse, ce n’est pas toi. Et réponds, un peu con, « Bah c’est-à-dire que… non. » en fait, j’étais en train de divaguer dans mon propre esprit pour être totalement attentive à ce qu’il se passait. « Mais c’est pas moi ! » finalement, ça sort, en décalé, mais ça sort quand même, c’est déjà ça.

@Rainier de Danemark

Quelle tuile! Il fallait que tu te fasses braquer ton portefeuille juste avant de repartir à Boston. Heureusement que tes papiers les plus importants étaient à l'abri dans le coffre-fort mis à disposition dans ta chambre d'hôtel mais tout de même. Il y avait de l'argent liquide - même si tu n'étais définitivement pas à cent balles près - et ta carte de crédit sur laquelle tu allais devoir faire opposition. En tout désespoir de cause tu avais interpellé les personnes qui se trouvaient autour de toi et personne n'a daigné te répondre, trop affairés, sans doute à faire leur emplettes pour prêter attention à ce qui se passait autour d'eux. En fait, seule une jeune femme blonde que tu ne connaissais pas t'avait répondu, et elle disait ne pas être la voleuse. En cela tu voulais bien la croire, elle n'avait pas l'air d'avoir la tronche de l'emploi. "Ce n'est grave." Tu dis alors en levant les mains en signe d'apaisement. "C'est de ma faute aussi, je n'ai pas fait attention, ce n'était pas très malin d'avoir laissé ça à vue. " N'importe qui pouvait se servir et ils ne s'étaient pas gênés. Tu soupiras en secouant la tête. "Tu n'as pas vu par où il est parti?" Tu n'étais pas certain que cette information soit pertinente ni même utile mais faute de mieux...

Je reste là, à me défendre comme une mauvaise avocate. Je ne bouge même pas. En fait, je pourrais me faire arrêter que je ne broncherais pas. Et je n'ose pas imaginer ce que je dirais au téléphone… « Papa, je suis en prison en Sicile, mais tout va bien, t’inquiètes. Dis juste à maman d’envoyer un chèque et votre jet. » "Ce n'est grave." Ah. Bah dans ma tête, le scénario, il se stoppe direct. Ce n’est pas grave de façon générale ou ce n’est pas grave si je l’ai volé ? Y a une différence, notable, pas vrai ? "C'est de ma faute aussi, je n'ai pas fait attention, ce n'était pas très malin d'avoir laissé ça à vue. " Maintenant, qu’il le dit… Oui, c’est clairement sa faute, on ne lui a jamais dit qu’en Sicile, la mafia existait ? Cela cité, je ne sais pas si c’est un mythe ou une réalité.

Je ne réalise qu’après sa question que j’ai toujours les mains levées en signe d’innocence ; "Tu n'as pas vu par où il est parti?" Alors je les baisse, et je grimace comme première manière de lui répondre. Puis ajoute, « Je crois que je ne l’ai pas vu tout court. » et j’en suis désolée. Mais pour me faire pardonner d’être, dans ma propre tête, trop bloquée, je propose, « Tu veux que je paie ? » Flash Info, Junior, je ne suis pas sure que ce soit le comportement approprié. Peut-être, mais je ne suis pas à quelques dollars prés.

@Rainier de Danemark

Il faut croire que tu avais un don pour t'attirer ce genre d'emmerdes, comme si tu le faisais exprès. Connaissant tes problèmes d'attention tu devrais en principe te prémunir contre ce genre d'incident mais ça finissait par arriver malgré tout. Le pire, c'est que ça t'arrivera encore, parce tu n'apprenais jamais de tes erreurs, tout du moins, ce genre d'erreurs.. À présent que tu te trouvais devant cette fille, tu te sentais vraiment bête. Déjà, tu te maudissais en silence, avant de t'excuser parce que tu avais la sensation que c'était vaguement de ta faute. Et peut-être que malgré tes vingt-sept ans passés, tu avais encore cette candeur qui te desservait. Tu avais tellement foi en l'humanité que tu n'imaginais pas que l'on puisse te faire les poches alors que tu kiffais simplement tes vacances. Pourtant il te suffirait simplement d'allumer la télévision ou la radio pour casser tes illusions, ce qui était un comble pour le journaliste en devenir que tu étais. "Je ne pensais pas que des pickpockets iraient faire les poches des touristes en plein marché." Maintenant que tu le disais, ça te semblait plausible, les endroits bondés devaient être un festin pour les vautours de ce genre. Comme quoi, ça n'arrive pas qu'aux autres. Tu écarquillas les yeux quand elle se proposa de payer pour toi. Il est vrai que le marchand attendait sa monnaie et il semblait s'impatienter. Tu te frottas l'arrière du crâne, embarrassé. "Ça ne pose pas de soucis?" Tu t'enquis, tant inquiet qu'embarrassé. Tu avais l'impression d'avoir débarqué dans un mauvais conte de fées, où une mystérieuse inconnue pensait aider un miséreux alors qu'il s'agissait d'un prince - sauf que en l'occurrence, c'était littéralement le cas. "Je vais essayer d'appeler la banque pour geler ma carte de crédit." Tu imaginais d'ores et déjà la tête qu'elle fera au moment où tu déclineras ton identité auprès de la banque pour faire opposition sur tes moyens de paiement.

J’sais pas ce qui m’a pris, et je suis à deux doigts de reculer. Lui dire que non, finalement, je ne vais pas payer. Pourquoi je le ferais d’ailleurs ? On ne se connaît pas. Junior, il faut se méfier des étrangers, tu le sais, non ? Enfin… Pour le coup, l’inconnu s’est fait voler, ce n’est pas comme s’il allait m’agresser. "Je ne pensais pas que des pickpockets iraient faire les poches des touristes en plein marché." Alors je ne suis pas experte, mais j’imagine quand même que le scénario n’est pas trop mauvais. Surtout si on part du fait qu’en réalité… C’est partout que cela peut arriver. "Ça ne pose pas de soucis?" J’imagine que non puisque je l’ai proposé. Cela dit, je ne suis pas totalement certaine de ce que je fais. J’entends même la voix de ma mère qui me dit que je suis en train de déconner. « Non, non. » Ma bouche parle, dit le contraire de ma raison. Je frôle un tantinet, l’aliénation. "Je vais essayer d'appeler la banque pour geler ma carte de crédit." J’approuve d’un mouvement positif du visage, et puis fouille dans mon sac à dos afin de trouver de quoi payer ses achats, aussi étrange que ça le soit. « Là tout de suite ? » que je demande et je ne saurais même pas dire pourquoi je le fais. Si bien que j’enchaîne directement avec un, « Ca faisait combien ? » J’ignore si je m’adresse à lui ou au vendeur, qu’importe dans le fond, mais que l’on me dise combien va me coûter ma bonne action.

@Rainier de Danemark