Tu n'es vraiment pas douée ou bien tu traines simplement pour m'énerver ? Criais-je, en haut de l'escalier, m'efforçant de contenir mon impatience. Elle me décocha un regard furieux et avec une maladresse qui ne la caractérisait pas d'habitude, elle se pencha pour ajuster les lanières de sa chaussure. Sa robe était si courte qu'elle devait être en train de donner une vue imprenable à tous les garçons, ou les filles d'ailleurs, se trouvant derrière elle.
Qu'est-ce que tu fous ? Criais-je à nouveau en m'asseyant sur la plus haute des marches, lorgnant ma soeur du regard. Je ne distinguais que sa chevelure éclaircie par les dernières semaines de vacances passés par la famille sur une île de carte postale ainsi, quand elle se redressa brusquement, j'eu du mal à intercepter chacun des gestes qu'elle fit ensuite, elle avait ôter sa chaussure et d'un geste plutôt précis, il fallait bien l'admettre, me l'envoya. Elle rata sa cible, la sandale atterrissant à quelques marches de moi.
Loupé lançais-je en me relevant, me délectant de l'air faussement féroce sur le visage de ma soeur cadette. Elle avait désormais un pied nu, sur les dalles brulantes qui couvraient le sol de la propriété des Castellano.
Tu ne veux pas me lâcher ? Siffla Olivia Castellano, dix-sept ans. La fratrie Castellano était constituée de trois enfants, semblables comme des gouttes d'eau sur le plan physique : Olivia, Lea et Estevan avaient les mêmes yeux vert que leur père, la chevelure brune de leur mère et l'arrogance commune à leurs deux géniteurs.
J'ai que ça à faire et c'est toi qui a les clés. Répliqua Estevan avec un haussement d'épaule désinvolte. Grandir entouré de deux soeurs n'étaient pas une mince partie de plaisir. Sans arrêt tirées à quatre épingles, toujours malheureusement perchées sur des talons hauts vertigineux peu indiqués pour une ascension d'escaliers, ses créatures de rêves étaient devenus depuis son adolescence le sujet de conversation préféré d'Estevan ainsi que son plus grand boulet au quotidien; Olivia était un boulet qu'il était obligé de se traîner, nul doute là-dessus. Elle était encore une gamine du point de vue de son frère, frère dont elle avait hérité tout son mauvais caractère et à l'opposé de ses airs grognons, elle était tout aussi obsédée par son apparence que les autres femmes de la famille. Alors qu'il songeait sérieusement à revenir sur ses pas pour porter sa soeur jusqu'à la porte d'entrée, une voix éclata à la droite d'Estevan.
Petit frère ! Cria une voix joviale. Lea apparu dans le champ de vision de son frère qui esquissa un sourire à la vue de sa soeur jumelle. Elle était en maillot, un tube de crème à la main, sa chevelure attachée en un chignon. Elle se jeta contre lui et il la fit tournoyer un peu sans difficulté. Estevan embrassa sa soeur sur la joue avant de détendre son étreinte.
Comment c'était ses vacances ? Demanda l'aînée de la famille, un large sourire aux lèvres. Elle n'avait pas put se joindre à sa soeur, son frère et leurs parents pour les vacances en raison d'examens qu'elle préparait essentiellement perchée sur un transat, des lunettes de soleil aux verres colorés perchées dans un équilibre précaire sur son nez.
Pas mal, dommage que tu n'ai pas pu venir. C'était sincère, Estevan étant qui plus est tout particulièrement proche de Lea. Si elle se trouvait être toute aussi coquette qu'Olivia, elle était aussi sa jumelle, de quelques minutes son aînée. Son double, son ombre et de toute évidence, sa plus grand alliée sur cette terre.
Ouais, j'aurais préféré être avec vous moi aussi répondit Lea avec un soupire avant de r'afficher un sourire.
Ou est Olive ? Ils furent interrompus par une chaussure volante qui vint cogner le torse d'Estevan.
Eh grogna ce dernier en tournant la tête. Olivia était arrivée et était désormais pied nu, l'air fatigué.
Salut Lea lança-t'elle en rejoignant sa soeur et son frère.
Tu étais ici ? Souffla-t'elle en se mettant à tresser sa chevelure. L'intéressée fronça les sourcils.
Oui et les parents aussi d'ailleurs. Le regard d'Olivia se braqua sur son frère qui l'ignora, se dirigeant déjà vers la porte d'entrée. Son tee-shirt était trempé par la sueur et il n'aspirait qu'à s'en débarrasser. Ses soeurs lui emboitèrent le pas à l'instant ou il franchissait la porte d'entrée de la demeure familiale des Castellano à Valence. Quelques bruits lui parvinrent tandis qu'il se dirigeait vers l'imposante cuisine. Sa mère s'y trouvait, non en train de cuisiner, ils avaient des employés pour cela, mais en train de tremper ses lèvres dans une tasse de thé. Elle leva les yeux en entendant son fils entrer dans la pièce et le suivit du regard tandis qu'il ouvrait le frigo pour se prendre une canette de soda. Il la déposa sur le plan de travail sculpté et tendait la main vers une corbeille remplie de fruits aux couleurs diverses et appétissantes lorsque sa mère le coupa dans son élan.
Ne mange pas, le brunch commence dans une heure lui apprit-elle en agitant la main dans sa direction. Estevan fronça les sourcils en levant la tête vers l'horloge fixée au mur.
Il est un peu tard pour bruncher, non ? Sa mère ne répondit pas, buvant une autre gorgée de thé avant de reposer sa tasse. Va prendre une douche se contenta-t'elle de dire avant de quitter la pièce, laissant la question de son fils en suspend. Ce dernier, laissé seul dans la pièce, attrapa une mangue et mordit dedans avant de quitter la pièce afin d'emprunter l'escalier menant au premier étage. Tout en mangeant, son fruit Estevan rejoignit sa chambre, nettoyée depuis son départ par la femme de ménage. Des vêtements trop chauds au goût du garçon pour la saison avaient été laissés sur son lit. Mordant une dernière fois dans son fruit avant de le jeter dans sa corbeille, Estevan passa dans sa salle de bain et se glissa sous une bonne douche froide. Une fois propre, il retourna dans sa chambre et troqua les vêtements choisis pour lui contre d'autres au tissu plus léger. Une fois vêtu d'un bermuda et d'un tee-shirt en coton, il quitta la pièce et descendit l'escalier. Des voix lui parvinrent alors qu'il descendait les dernières marches. Alors qu'il s'apprêtait à rejoindre le petit groupe réuni dans l'imposant salon de la maison, une main vint serrer son poignet. Rendu vulnérable par la surprise, il se retrouva entraîné derrière l'escalier par une jeune femme plus petite qu'Olivia, un peu plus menue aussi et aux cheveux dorés. Avant qu'il ai eu le temps de faire quoi que ce soit, elle plaqua ses lèvres contre les siennes. Après avoir mit fin à ce baiser enflammé, emprisonnant toujours un des bras d'Estevan de sa petite main, elle lui adressa un grand sourire.
Bonjour mon coeur.Ca porte malheur, imbécile. Souffla Maya, avec une voix entre la douceur et la panique.
On s'en fiche, je suis pas superstitieux et c'est une de ses nombreuses choses qu'on a en commun. Et puis je suis ton imbécile, c'est ça qui compte. Un sourire naquit sur le visage de la jeune femme qui se pencha vers son fiancé, capturant ses lèvres entre les siennes.
Qu'est-ce que tu peux être mignon parfois murmura-t'elle avant de l'embrasser. Dans ce baiser, elle tâcha de lui communiquer tout son ressentit. L'amour bien sûr, qu'elle lui portait depuis des mois, le bonheur d'épouser son meilleur ami, l'excitation dut à la fête qui se préparait et qui aurait lieu le soir même, quelques jours avant le grand jour, celui ou ils se diraient oui. Elle pensait avoir réussi avec brio le petit défi personnel de ce baiser emplit de sentiments et elle se sentit chuter en reculant son visage pour guetter l'expression d'Estevan. Elle connaissait son visage par coeur, tout comme l'intégralité de son corps d'ailleurs. Elle connaissait exactement l'emplacement de sa tache de naissance, elle avait souvent fait courir ses doigts sur la longue cicatrice qu'il avait en travers de la jambe et qui le faisait parfois souffrir encore, elle savait tout. Aucun détail ne lui échappait, ainsi se sentit-elle perturbée en reconnaissant en l'expression actuellement arborée par Estevan celle d'un garçon perdu et déboussolé. Cela ne dura pas. Au bout de quelques instants, il avait retrouvé son air lumineux et imposant. Il irradiait à nouveau de chaleur, de confiance, mais Maya n'était pas dupe.
Ca va ? Demanda-t'elle, soucieuse. Estevan sembla surpris par cette question et elle se vexa malgré elle.
Bien sûr, pourquoi cette question ? Il mentait. Soit, il mentait beaucoup aux autres, mais les dimensions étaient plus importantes quand elle était celle à qui il racontait n'importe quoi. Elle ne voulait pas non plus s'énerver. C'était sensé être leur semaine et elle ne voulait pas engendrer les débuts d'une dispute. Il se braquerait sur le champ et cela ne servirait à rien.
Laisse tomber souffla finalement Maya en se détachant de lui, lissant les pans de sa robe de mariée. Le ton de sa voix indiquait qu'elle n'allait pas laisser tomber pour sa part et Estevan se crispa un peu, refroidit dans la seconde. Il se sentait penaud et ne voulait pas se répandre sur un sujet houleux. Il fit claquer sa langue avant de reprendre la parole.
Je vais rentrer me préparer pour ce soir dit-il d'une voix qu'il voulu douce, mais dans laquelle perça une bouffée de frustration qui n'échapperait pas à Maya, il le savait pertinemment.
Ne tarde pas trop, d'accord ? Elle ne répondit pas, se contentant d'hocher légèrement la tête en guise de réponse, puis il quitta la petite boutique sans se retourner, sans murmurer un je t'aime ou quoi que ce soit qui aurait put la rassurer un peu. Il s'en rendit compte une fois dans la rue et ne put se résoudre à revenir sur ses pas. Hésitant, Estevan s'apprêtait à héler un taxi lorsqu'il décida plutôt de faire une partie du trajet jusqu'à chez lui à pied. Enfouissant l'une de ses mains dans les poches de sa veste en cuir marron glacé, il en sortit un paquet de cigarette et un briquet. Il l'alluma et la coinça entre ses lèvres. Alors qu'il tirait des taffes, jetant des cendres sur son passage, il tâcha de retrouver une vague bouffée de sérénité. Ses temps-ci, il dormait particulièrement mal. Il se réveillait, perdu, les draps en flanelle de son lit poisseux, en sueur. Il se sentait blasé, perdu, sa respiration s'affolant. Le noir lui donnait des mal de crâne particulièrement désarmant : il ne parvenait plus à se souvenir d'ou il se trouvait et quand il finissait par distinguer les contours familiers de la chambre ou il dormait depuis sa petite enfance, il se surprenait à avoir envie de vomir. Ce n'était pas franchement ce qu'un jeune marié était sensé ressentir à l'approche du jour devant être le plus beau de toute sa vie d'homme. Il n'en parlait pas à Maya, car elle ne comprendrait pas. Lui même ne comprenait pas vraiment. Il aimait cette fille et pas seulement sous la contrainte. Soit, ses parents lui avaient légèrement forcés la main, pensant cette alliance de famille particulièrement bénéfique pour tout le monde, mais il n'avait jamais trop eu l'impression irritante d'avoir la corde autour du coup. Maya et lui se connaissaient depuis l'époque du bac à sable et des couches, sûrement qu'ils étaient fait pour être ensemble. Peut-être qu'il était juste stressé et c'était là parfaitement compréhensible, il n'avait que vingt-ans après tout. Sûrement que c'était là bien trop tôt et il était bien trop tard pour envisager le moindre retour en arrière. Il n'y songeait même pas. Il finirait par s'y faire, car il le voulait vraiment. Il aurait franchement voulu croire en toutes ses choses qu'il se soufflait en permanence afin de se rassurer, mais ce n'était pas totalement le cas. Il se sentirait peut-être mieux, si tout le monde arrêtait un peu de lui parler de sa prochaine vie, celle d'un homme marié.
Estevan ! Cria une voix et il tourna la tête pour en définir la provenance. Une imposante voiture aux vitres teintées venait de s'arrêter juste à côté de lui. L'une des vitres arrières descendit et le visage de son futur beau père se dessina à l'intérieur. Estevan laissa tomber sa cigarette et l'écrasa avec la semelle de sa chaussure avant de monter dans le véhicule après que l'homme l'ai invité à le faire.
Tu fumes ? Il faudra arrêter à la venue du bébé. Estevan commença à pâlir à vue d'oeil et se sentit brusquement étouffer. Une main lui attrapa l'épaule.
Je plaisante mon garçon. Hilarant voulut lancer Estevan, mais il s'abstenu, qui plus est il était encore trop ébranlé pour ouvrir la bouche. Il éprouva un soulagement certain quand la voiture s'arrêta et s'extirpa de la cabine sans attendre qu'on lui ouvre la portière. La façade familière de la maison des Castellano se dessina devant lui et Estevan commença à gravir les marches. Alors qu'il était pratiquement arrivé en haut, sa soeur déboula devant lui, le souffle court, l'air au bord de la crise de nerfs.
Ils viennent de nous téléphoner, je n'arrive pas à y croire Lea s'interrompit et fondit en larmes. Estevan la dévisagea avant de la serrer contre lui. Pourquoi sa soeur se mettait-elle dans des états pareils. L'attitude de sa soeur l'inquiéta, mais elle ne semblait pas capable de répondre à la moindre question. Il s'apprêtait à l'embrasser sur le front lorsque Olivia les rejoignit à son tour. Elle portait un peignoir rose bonbon trempé au niveau des épaules par sa chevelure humide. Son visage arborait une expression défaite qui fit accroître l'inquiétude grandissante de son frère.
Olive, que se passe-t'il ? C'est maman ? C'est papa ? Dis-moi ! Sa soeur fronça les sourcils en reniflant.
Non, ce n'est pas pas eux... C'est Maya dit-elle. Voilà qu'elle aussi semblait au bord des larmes.
Elle vient d'avoir un accident, Estevan. Elle est décédée. Sur ce, elle craqua et vint rejoindre Lea contre lui. Estevan était trop bouleversé pour se soucier de consoler ses soeurs. Il avait le sentiment que l'on venait de lui donner un coup de poing dans le ventre. Il se serait bien écroulé si l'étreinte de ses soeurs ne l'empêchait pas de se laisser aller au choc engendré par une nouvelle qui lui semblait aussi absurde et irréelle.
Il y a des universités en Espagne et elles ont de bonnes réputations, tu n'as pas à partir à l'autre bout du monde, Estevan. Tu n'as qu'à aller dans celle ou maman a étudier proposa Olivia en faisant irruption sur la terrasse, un sorbet dans la main. Son frère, assit en retrait sous l'ombre d'un parasol, son ordinateur posé en face de lui, secoua la tête en guise de réponse. Il ne voulait pas avoir à l'expliquer à tout le monde, mais il lui apparaissait comme important de prendre un peu de recul. Le décès de Maya remontait déjà à quelques mois, mais il se réveillait toujours dans la nuit en pensant à elle. Sur la terrasse ou il se trouvait actuellement, il avait échangé de nombreux baisers avec la jeune femme, il se souvenait même s'être tenu exactement au même endroit pendant qu'elle faisait tourner les pages de classeurs regorgeant de photos de gâteaux de mariage, demandant l'avis d'Estevan à l'apparition de chaque nouveau cliché. Tout dans cette maison faisait remonter à la surface chez lui des souvenirs liés partiellement à Maya et l'idée de vivre une vie sans elle dans cet endroit lui filait fréquemment des haut-le-coeur. C'était tout bonnement immonde d'avoir un tel ressentit en étant chez soit. Ainsi, quand bien même la vie était devenue une épreuve de tous les jours, Estevan fut malgré lui tenté par la suggestion de sa soeur. Une partie de lui ne voulait vraiment pas quitter Valence, ne serais ce que temporairement. Sa vie était en Espagne, voilà tout. L'idée de ne plus s'y sentir bien suffisait à le laisser penser que sa vie était peut-être en quelque sorte terminée. Idée idiote et douloureuse qu'il n'aurait jamais osé aborder à voix haute. Sa famille y aurait perçu le pire et l'aurait mit dans le premier avion qu'ils auraient trouvés. Estevan avait besoin de faire son deuil et peut être qu'une bonne dose d'éloignement ne serait pas de trop. Alors qu'il était plonger dans ses pensées, pesant le pour et le contre d'aller étudier à l'étranger, une main bienveillante vint lui presser l'épaule.
Tu cherches encore parmi les universités ? Estevan leva la tête en entendant la voix de son père. Monsieur Castellano était un homme grand et particulièrement courtois. Pour avoir passer des vacances dans la maison de ses grands parents, Estevan pouvait affirmer que son père avait dut recevoir une éducation plutôt stricte. Grand-mère Castellano était une femme très à cheval sur la propreté, les bonnes manières et la dégaine. A vrais dire, elle ne plaisantait pas au sujet de beaucoup de choses. En un sens, elle ressemblait assez à sa belle-fille dans ce sens là. De l'enfance de sa mère, Estevan savait qu'elle était l'aînée d'une fratrie composée de quatre enfants. Elle avait trois soeurs et avait toujours prit ce rôle très au sérieux. Adulte, elle était devenue une femme assez froide en permanence, mais son fils ne s'y attardait pas trop : il l'avait déjà vu craquer, fendant sa carapace sous le regard de ses proches.
Et Harvard ? J'y ai étudié quand j'avais ton âge. Estevan fronça les sourcils. Comme quoi, on apprenait à tout âge.
Quoi ? Tu as grandi en Espagne. Et ? L'un n'empêche pas l'autre, Estevan. Celui-ci esquissa un sourire fatigué.
Ce n'est pas ce que je veux dire. Je ne savais pas, c'est tout. Son père tira une chaise et s'installa à côté de son fils.
Je ne t'en ai pas parlé. Ta grand-mère me fatiguait, je voulais être plus indépendant et mes notes étaient suffisamment bonnes pour Harvard, tout comme les tiennes d'ailleurs. Tout en tapant 'Harvard' dans un moteur de recherche, Estevan refoula quelques questions qui lui vinrent à l'esprit avant d'en poser une.
Et ça a marché ? Tes parents ont acceptés et tu t'es sentis mieux comme ça ? Il supplia intérieurement son père de dire que oui, que c'était ce qu'il fallait faire et qu'il ne devait pas se poser trop de questions.
Ils n'étaient pas très emballés, mais ils ont finis par se faire à l'idée. Ils voulaient le meilleur pour moi et c'est mon ressentit à l'égard de toi et de tes soeurs également, si c'est ce qui t'inquiètes. Estevan secoua la tête en guise de réponse. Non, ce n'était pas vraiment l'éventuelle réaction de ses parents s'il en venait à prendre la décision de quitter le pays qui troublait ses nuits.
Harvard ? Lança une voix par dessus l'épaule d'Estevan. Sa mère s'approcha, déposa un baiser dans ses cheveux bruns avant de rester immobile, ses mains posées sur le dossier de la chaise.
L'université de ton père. C'est toi qui lui a mis cette idée en tête ? Elle n'était pas énervée, mais quand bien même elle cherchait à donner à sa voix une certaine légèreté, Estevan sentait bien que sa mère n'était pas non plus une grande fan de cette possibilité.
Je n'ai rien décidé lança Estevan en rabattant l'écran de son ordinateur portable. Il sentait le regard de ses parents peser sur lui et trouva brusquement cela désagréable.
Je sors un peu, à plus tard. Se relevant tout en prenant soin de pas écraser les pieds nus de sa mère et après avoir glissé son ordinateur sous son bras, Estevan repartit à l'intérieur de la maison.
Un tout nouveau tournant, voilà ce à quoi s'est apparenté l'arrivée d'Estevan à Harvard. A l'initiale, il n'avait pas prévu d'y rester. C'était une alternative, une solution de quelques mois, le temps qu'il parvienne à repartir du bon pied. Une petite parenthèse dans sa vie en quelque sorte. Il n'avait pas anticipé qu'il se plairait à ce point aux Etats-Unis. Cela fait près de deux ans qu'il a quitté Valence, ou il retourne encore fréquemment pendant les vacances ou bien encore dans des élans de nostalgie qui se trouvent être la plupart du temps assez féroces. Sa nouvelle maison, il l'a trouvé sur un campus, ce en croit il ne croyait pas beaucoup lors de son inscription. Comme quoi, la vie regorge finalement vraiment de surprises.
Inspiration : La proposition (film), journal de Stefan (livre).