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Cela aurait pu être un samedi soir comme un autre. Oh oui, ça aurait pu, si seulement Paloma ne s'était pas mis en tête d'aller fouiner du côté des soirées étudiantes - ou non - dans le but d'avoir à l'œil tous ces jeunes inconscients qui ne prenaient visiblement pas en compte les effets nuisibles de l'alcool. Paloma n'était pas une rabat-joie mais, qu'on se le dise, elle avait en horreur tout ce qui touchait de près ou de loin aux soirées. Car, qui disait soirée, disait alcool, disait substances peu recommandables, disait rencontres douteuses, disait photos embarrassantes, disait dépravation incontrôlée et tout cela finissait à quatre pattes au beau milieu du trottoir en train d'évacuer, d'une façon plus que charmante, tout le contenu de l'estomac. Bon, Paloma avait parfois tendance à tout exagérer mais, les soirées, très peu pour elle.
Mais alors pourquoi, POURQUOI était-elle là, à jouer des coudes au milieu de ce troupeau de buffles enragés remuant sauvagement leurs derrières ? Pourquoi, au grand diable pourquoi, était-elle en train de suffoquer dans une atmosphère irrespirable, à moitié aveugle à cause des spots qui lui balançaient leur éclairage multicolore en pleine face ? POURQUOIIIIIII ?! En fait, elle-même ne savait pas trop ce qui l'avait poussé à se rendre, au péril de sa vie, dans l'une des boîtes de nuit les plus fréquentées de la ville. Peut-être se sentait-elle l'âme d'une Wonderwoman, prête à venir en aide à n'importe quel charmant personnage en train de commater dans un coin, un filet de bave dégoulinant sur son menton mal rasé ? Telle était la question.
Paloma était donc là, au beau milieu de ce que le commun des mortels appelaient une "boîte de nuit", à se demander comment ces comparses pouvaient prendre plaisir à se trémousser dans un endroit où on avait tout juste la place de se maintenir debout. Bousculée de tous les côtés, la jeune femme ne savait pas où aller pour prendre un peu l'air. Ou tout du moins, pour s'éloigner du gros balourd qui la collait depuis au moins une bonne heure. Prenant son courage à deux mains, Paloma se fraya un chemin tant bien que mal à travers les corps gigotants qui peuplaient le "dance-floor". Au passage, un individu peu délicat lui écrasa le pied avec grâce et lui fit pousser un cri qui fut couvert par la musique assourdissante. Paloma jeta un regard noir en direction de l'individu qui lui bouchait maintenant le passage. En temps normal, Paloma était quelqu'un de très agréable. Toujours souriante et se montrant rarement désagréable envers les gens, elle aimait faire de nouvelles connaissances et était toujours là en cas de besoin. Mais, remettons les choses dans leur contexte ... La jeune étudiante se trouvait dans un endroit surpeuplé, avec une musique qui lui vrillait les tympans. Elle avait chaud et les gens qui la collaient n'arrangeaient pas les choses. Et je ne vous parle même pas de l'odeur ! Et puis, il y avait ce grand baraqué qui lui avait délicatement effleuré le pied, avec ses gros sabots, et qui, à présent, l'empêchait d'aller rejoindre son havre de paix - comprenez l'un des uniques endroits de la boite où Paloma pouvait disposer d'un espace vital supérieur à deux centimètres. S'en était trop pour elle, qui avait déjà beaucoup de mal à supporter ce genre d'endroit. Une main sur les hanches, elle se campa devant l'individu indésirable et de l'autre main, tapota l'épaule du jeune homme. Elle hurla, dans l'espoir que sa petite voix puisse couvrir le brouhaha ambiant : « PARDON ! Tu m'empêches de passer, là ! ». Pas de réaction. Le grand gaillard continuait de se dandiner, les yeux fermés, vivant visiblement à fond le moment présent. Levant les yeux au ciel, Paloma se maudit intérieurement d'être venue dans cet endroit. Et de son plein grès, en plus ! « OH, KING KONG, TU PEUX ALLER REMUER TES FESSES AILLEURS, TU GÈNES ! », hurla t-elle en assénant une grande claque sur l'épaule de l'inconnu, qui se décala d'un millimètre pour la laisser passer, les yeux toujours fermés. Paloma se dépêcha de filer, sans oublier de hurler un « Merci ! » au passage. La politesse avant tout !
Se laissant tomber sur un tabouret, non loin du bar, Paloma massa sa nuque endolorie. Elle avait trouvé un petit coin où l'air était à peu près respirable et où personne ne venait lui assener de grands coups de coude ou pire, lui marcher sur les pieds. Maintenant qu'elle ne risquait plus de mourir écraser comme une mouche, la jeune étudiante put se livrer à une activité qu'elle adorait particulièrement : observer les personnes qui l'entouraient. En effet, c'était une habitude qu'elle avait toujours eu. Où qu'elle aille, elle aimait se poser dans un coin tranquille et prendre le temps de regarder son environnement. Et ici, elle avait de quoi faire ! S'installant aussi confortablement qu'elle le pouvait sur son minuscule tabouret de bar, elle entreprit de balayer la salle du regard.
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