ETHLYN ► What is going on ?

Un sourire crispé, je me hisse dans l’avion pour me glisser le plus rapidement dans le siège qui m’est destiné. Ethan me suit de près tandis que la baby sitter est dans mon champ de vision, berçant une Molly à moitié endormie. Je ne peux pas croire qu’il était bien là, si près de moi. Lorsque mes prunelles se sont posées sur lui, j’ai ressenti comme une onde électrique parcourant ma colonne vertébrale. Le stress engendré par son simple visage m’a immédiatement poussé à la fuite, parce que dans le fond c’est la seule chose que j’étais capable de faire. Ce n’était pas une option, c’était une nécessité, quelque chose de vital pour moi et surtout pour ma fille. Je m’enfonce dans le siège, incapable de trouver quoi que ce soit à dire, je me contente simplement de me plonger dans un magazine. Si cela a pour but d’éviter une conversation avec Ethan, le bout de papier se trouve aussi d’une forte utilité pour éviter que Matthéo ne s’aperçoive lui aussi de ma présence. Je tente de reprendre mes esprits, tandis que mes mains tremblent telles deux feuilles agitées par un vent d’automne. Pourtant, ce n’est rien encore comparé aux pensées qui s’entrechoquent dans mon esprit. Ce matin, alors que les grands yeux de Molly s’étaient ouverts pour me contempler tendrement, je m’étais dit que nous entamions des vacances merveilleuses. Tout devait être réuni pour que les choses se déroulent parfaitement, la présence d’Ethan à mes côtés, sa chaleureuse main dans la mienne à l’aéroport, nos deux silhouettes frémissant au contact de l’autre lors de l’étreinte de nos retrouvailles, et puis la promesse d’un été haut en couleur et en émotion… Avec Molly auprès de nous. Et puis tout a basculé. Matthéo a de toute façon toujours su mettre un sacré bordel dans ma vie et quand je le pensais à New York, faisant partie intégrante de mon passé révolu, je le découvre finalement dans la file d’attente de l’aéroport, s’apprêtant à emprunter le même vol que moi. Tant je suis tourmentée par son visage, je ne me rends pas réellement compte que l’on décolle et seul Ethan me tire de mes songes, bien après des dizaines de minutes de vol. Je replace immédiatement le magazine devant mon visage quand il tente de faire le contraire et je soupire agacée lorsqu’il insinue que je le boude. C’est certainement la plus mauvaise des réactions, me braquer contre Ethan n’amènera nullement l’apaisement dont j’ai besoin, mais je n’arrive pas à cacher mon irritation et ce même si Ethan n’en est pas l’objet. « Ça n’a rien à voir avec toi. » Lançais-je peu délicatement. Je me rends compte que mon ton est peut-être un peu agressif et je baisse alors enfin le magazine, pour affronter son regard. « Pour être franche, je cherche à éviter quelqu’un et… » Je ne sais pas vraiment comment dire à Ethan que mon premier amour se trouve lui aussi être sur le chemin pour rejoindre la même destination que nous. Et comment ajouter que qui plus est, il est tant qu’à faire aussi le père de ma fille, oui, ce petit bout de chou qui s’est finalement endormie. Je me lève d’un bond et me rue vers les toilettes, la tête baissée pour éviter de croiser un visage familier. Je sais que c’est stupide de laisser ma phrase en suspens, qu’elle éveillera facilement la curiosité d’Ethan mais je ne peux pas faire autrement, j’ai besoin de me rafraîchir. Je me glisse dans la petite cabine, ne prenant pas même le temps de la fermer à clé et je m’asperge le visage d’eau froide avant d’affronter ma mine défaite. L’été promet d’être mémorablement long…

J'avais beau réfléchir, le front contre l'hublot, rien ne me venait, je n'avais rien fait qui pouvait expliquer l'attitude d'Evelyn, d'ailleurs cette dernière me l'avait finalement signalé avant de s'éclipser vers les toilettes. Il s'agissait d'une personne, une personne qu'elle avait l'air de très bien connaître et qu'elle évitait à tout prix. Je ne connaissais pas d'ennemi à Evelyn, elle était une femme correcte, amicale. La curiosité m'envahissait, je ne pouvais pas attendre plus longtemps sans rien faire. Je devais prendre mon mal en patience et affronter ma peur de l'avion. Je m'étais donc détaché pour retrouver la jeune femme dans la petite cabine. La demoiselle n'avait même pas pris la peine de s'enfermer, je passais alors ma tête dans l'entrebâillement de la porte à sa recherche. J'avais de suite fixé son reflet dans le miroir, elle n'était pas dans son assiette pas besoin d'être un psy pour s'en apercevoir. Je n'avais jamais vu autant d'agressivité dans ce petit bout de femme, encore une nouvelle facette que je découvrais. " Mais... Qu'est-ce qu'elle t'as fait cette personne pour que tu te sentes si mal ? " demandais-je d'un air innocent avant de déplier la porte pour entrer en totalité. " Tu peux tout me dire, si tu as tiré les cheveux d'une Cabot ça ne me choquera pas " ajoutais-je avec une pointe d'humour. Je riais comme un imbécile, car dans ces circonstances c'était tout ce que j'avais trouvé à faire. Je n'étais pas fait pour de longs discours, pour les interrogatoires, je préférais tout prendre à la légère. L'atmosphère était électrique, je ressentais les mauvaises ondes, nous n'avions pas besoin de ça maintenant, ni jamais. J'avais attendu les vacances avec impatience, si c'était pour se cacher les prochains jours autant rentrer à Cambridge de suite. " Aller chérie, dis moi tout " finissais-je par demander tout en me rapprochant de sa silhouette fine. J'étais passé derrière elle, attrapant ses hanches et posant mon menton sur son épaule. Nous nous regardions grâce au miroir et la petite lampe fixée au dessus. J'avais déposé un baiser sur sa joue avant de balancer nos deux corps au ralenti. J'oubliais soudain que mes pieds étaient a des centaines de kilomètres au dessus de la croûte terrestre. Toutefois quelque chose me chiffonnait, je gardais le sourire, mais mon coeur lui commençait à s'exciter, mon ventre à se nouer. Le visage d'Evelyn était si décomposé que je m'attendais au pire.  

Je sursaute lorsqu’un visage apparaît dans le miroir, mais mon cœur cesse de s’affoler lorsque les fossettes d’Ethan se dessinent dans mon champ de vision. L’espace d’un instant j’ai craint que ce ne soit Matthéo qui se précipite à ma rencontre. Je suis sans conteste la fille la plus paranoïaque de cet avion, il n’y a nul doute possible sur le fait que le jeune homme na m’a pas aperçu, sinon, le connaissant, il m’aurait forcément interpellé. Et ce même si notre histoire s’est terminé de manière abrupte et compliqué. Je me laisse apprivoiser par les bras d’Ethan qui s’enroulent autour de moi tandis que nos yeux se croisent dans l’immense glace. Le reflet de ce petit couple amouraché l’un de l’autre m’apaise un instant. Je n’ai en aucun cas envie de briser ce petit bout de bonheur que nous nous sommes finalement créés après quelques mésaventures compliquées. A présent, je n’ai plus à m’inquiéter ni de ce qu’il pense de mon rôle de mère, ni de la présence intrusive de sa meilleure amie, et alors que nous devrions roucouler dans l’avion, pressés d’atteindre la Floride et ses plages dorées, me voilà sur le point de bouleverser une nouvelle fois le havre de paix qui semble nous échapper à chaque fois que nous l’approchons. J’aurai préféré tirer les cheveux d’une Cabot, et je retiens quelques mots maladroits de s’échapper de mes lèvres alors qu’il me demande ce que cette personne a pu me faire. ‘Un enfant’ serait très certainement mal venu et j’ai la hantise de voir le regard tendre d’Ethan se muer en un regard glacial. Je n’ai pourtant pas envie de lui mentir, partir sur une base peut solide serait très certainement une erreur, pour cette relation que je souhaite voir évoluer réellement. Je baisse les yeux, et dans le miroir je n’aperçois bientôt plus que sa ceinture, je fixe mes prunelles sur la boucle de celle-ci avant de me lancer à l’aveugle dans des explications farfelues. « Je pensais qu’il était encore à New York. » Commençais-je d’un ton plutôt évasif. « En fait, je n’ai plus aucune nouvelle de lui depuis longtemps, c’est une partie de mon passé… Que je ne souhaitais pas forcément revoir. » Me livrais-je doucement. « En réalité, c’est un peu à cause de lui que j’ai pris peur en voyant votre duo soudé à toi et Presley… Je t’ai dit un soir que je ne voulais pas revivre cela. Je faisais allusion à cette histoire… Matthéo a une sœur jumelle qui ne m’a jamais apprécié et elle l’a poussé à partir du jour au lendemain. » Je me racle la gorge. Mes doigts enlacent le bras d’Ethan, ce contact me rassure et m’aide à dévoiler le plus gros du mystère. « Je me demande ce qu’elle dirait si elle savait qu’il est père à présent… » Je me tais. J’ai l’impression que cette révélation a l’impact d’une bombe, dans cet avion…

Blotti contre Evelyn, je restais à présent silencieux tout en me noyant dans ses prunelles émeraudes. Mais son regard s'était fait fuyant, je ne le captais plus, sa tête s'était légèrement abaissée, je gonflais subitement mes poumons, comme si la quantité d'oxygène inspirait aller parer ses révélations. Je m'étais bien trompé car la douleur était là. Si j'avais pu appuyer sur un bouton pour disparaître, je l'aurais fait immédiatement. Il ne s'agissait pas d'une simple femme qu'elle redoutait, non c'était son premier amour, le père de Molly. Mon coeur semblait s'être arrêté une seconde de trop avant de repartir, je dévisageais la glace qui nous faisait face avant de retourner la belle blonde. Son récit était perturbant, comment devais-je le prendre ? Si sa fameuse soeur jumelle n'était plus dans les parages, alors elle pourrait retrouver "Matthéo" sans aucun problème, c'était ça ? Je devenais probablement paranoïaque et mes interprétations étaient peut être exagérées, mais voilà ce que les dires d'Evelyn signifiaient pour moi. Mon sourire charmeur s'était volatilisé, j'avais pris un coup, là dans la poitrine. " Euh... Excuses-moi mais ça fait beaucoup d'informations, je m'attendais pas à ça " je mordillais l'intérieur de ma bouche avant de compléter ce que j'avais entamé, je sentais une importante vague de chaleur m'envahir. Ce n'était pas forcément de la colère, je ne pouvais pas en vouloir à Evelyn, elle n'y était pour rien. Mais je me faisais du soucis sur ce qu'il devait se dire dans sa tête et ce qu'il devait se passer dans son coeur. " Écoutes je pense pas que je devrais me mêler de ces histoires, ça ne me regarde pas, fais ce qui te sembles juste, je vais me rasseoir, il le vaut mieux " j'étais donc sorti de cette minuscule pièce plus inquiet que jamais pour regagner ma place. Je fusillais les sièges tour à tour à la recherche de ce type, que je puisse mettre un visage sur ce qui allait être probablement mon pire cauchemar à l'avenir. Mais il y avait tellement de jeunes que j'avais fini par abandonner, la triste réalité viendrait me rattraper lorsque je m'y attendrais le moins. La demoiselle était revenue se glisser à mes côtés dans la plus grande discrétion. J'avais tourné mon corps vers la paroi glaciale de l'avion, évitant au maximum tout contact. Evelyn était capable de me procurer un plaisir immense, mais elle était aussi capable de me détruire en quelques mots. Je n'avais pas choisi n'importe quelle femme, il avait fallu que je tombe amoureux d'une jeune mère !        

Mon récit est entrecoupé d’hésitations, mais je tente tout de même d’expliquer les réelles raisons de mon mutisme depuis le début du vol, et j’aurai sans doute aimé qu’il comprenne, qu’il me serre contre lui, qu’il me rassure sur le fait que cela ne changerait nullement les choses entre nous. Mais c’est une toute autre réaction qui anime Ethan, et il décide finalement de rejoindre sa place, décidé à me fuir de toute urgence. Je regrette presque instantanément de m’être livrée à lui, et je maudis cette histoire de ne pas pouvoir se dérouler sans encombre une seule semaine complète. Je ferme les yeux quelques secondes pour tenter de me réveiller de ce cauchemar, mais ce n’en est pas un, malheureusement. Ethan a réellement regagné sa place, Matthéo est quelque part dans cet avion et mon cœur et mon esprit sont totalement démunis face à toutes ces émotions qui se raniment en moi. La rancœur prend pourtant le dessus et j’en veux à Ethan à la fois de sa réaction et du mal que Matthéo m’a fait. C’est comme à chaque fois, une réaction idiote que je choisis pour affronter les choses. Je décide finalement de libérer la petite cabine, pour rejoindre ma place et faire face à un homme déterminé à fuir tout contact visuel ou physique. Je m’aperçois que préoccupée par celui qui malgré tout occupe pleinement mon cœur, j’en ai oublié de me méfier de la présence de Matthéo. Je me laisse tomber sur mon siège, prête à affronter une fin de vol silencieuse quand Molly émerge dans les bras de la baby sitter dans la rangée d’à côté. Je n’hésite pas une seule seconde avant de m’emparer de sa silhouette fine et de la bercer contre ma poitrine. Ses grands yeux me fixent et je peux pour la première fois depuis sa naissance entrevoir quelques ressemblances avec son père. Peut-être que jusqu’à présent, je refusais d’y faire face, mais il est bien là, sur le même vol que nous et sans doute sera-t-il aussi dans le même hôtel. Ai-je envie de l’affronter ? J’aurai sans nul doute préféré passer un séjour de rêve auprès d’Ethan, mais les choses semblent avoir pris une autre tournure. L’avion rencontre quelques turbulences alors que nous sommes sur le point d’atterrir. Parfois, je tente une œillade en direction d’Ethan qui fait mine de dormir contre le hublot. Je me concentre alors uniquement sur ma fille, jusqu’à ce que l’avion touche réellement la terre ferme. Dans un silence total, je m’empare de mon sac et suit les autres passagers pour me hisser hors de notre moyen de transport. Je devrais rayonner à l’idée de ces vacances et pourtant ce n’est pas le cas. Nous rejoignons l’aéroport en silence et c’est la nourrice engagée pour garder la petite qui me propose d’aller lui changer la couche dans les toilettes avant de monter dans un taxi. J’acquiesce en lui tendant ma petite princesse. Je m’appuie contre le mur, attendant que les valises ne se mettent enfin à tournoyer sur le tapis mécanique. Et je craque. « Tu n’as pas le droit de m’en vouloir pour mon passé, c’est totalement injuste ! » Explosais-je sans ménagement. « Je te demande pas combien tu as d’ex petite amie, et je ne sais pas si tu as encore des contacts avec elles, si celles qui ont réellement comptés sont encore présentes dans ta vie… » Ajoutais-je toujours déterminée à rompre ce silence dérangeant. « Tu comptes arrêter de me parler durant toutes les vacances ? »

Je ne m'étais pas endormi une seule fois durant le trajet, j'étais dorénavant trop encombré par les phrases d'Evelyn. J'avais tout suivi même si ce n'était que du coin de l'oeil ou en tendant l'oreille. La petite avait fait pas mal d'aller retour entre les genoux de la baby sitter et les bras de jeune femme à mes côtés. J'avais pratiquement fusionné avec le siège, essayant de me faire oublier un maximum alors que je n'avais rien fait. Je ne voulais pas encore me noyer dans ce problème, j'avais peur de mes réactions, des réactions imprévisibles qui par le passé m'avait mené à ma perte. J'optais pour le silence jusqu'à l'atterrissage. Enfin sur la terre ferme, Evelyn était bien occupée avec la petite, je les suivais donc de loin tout en continuant de ressasser ses déclarations. Nous nous étions retrouvés face au tapis qui desservait nos bagages, les bras croisés sur mon torse, je restais une fois de plus impassible et distant. Tout à coup la voix fluette de la jeune femme s'emporta, j'étais sa cible. Moi qui croyait jouer la carte de l'insensibilité je m'étais trompé, l'emportement m'avait gagné " Hé c'est pas moi qui ai un gosse dans les pattes et qui évite le père ! D'ailleurs si tu as si peur de lui faire face ce n'est pas pour rien " cette animosité révélait peut être un transfert que je faisais inconsciemment, je me mettais à la place de la petite, ne pas connaître un de ses parents était atroce, malgré tout l'amour que le parent avec lequel on vivait nous donnait, il y avait toujours un vide. Mais ce n'était pas que ça, j'étais terrifié, terrifié qu'elle se rende compte qu'un avenir était maintenant peut être possible avec le père de sa fille. Elle l'avait aimé, elle avait porté son gamin, ce n'était pas une page que l'on pouvait tourner comme mes histoires d'amours précédentes. " Enfin bref, je crois que j'ai besoin de respirer un peu, rien de plus " j'aurais très bien pu m'arrêter là mais il avait fallu que j'en rajoute de quoi raviver la colère impitoyable de la belle blonde. " Enfin je te laisse le temps d'aller le retrouver quoi, je suis pas chiant comme mec t'as vu ça ? " voilà que je me mettais à parler avec les mains, mes origines latines reprenaient le dessus. Les passagers nous dévisager et peut être qu'à travers la foule, ce Matthéo nous observer. Je reportais ensuite mon attention sur le distributeur de bagages, ma valise passait devant moi, je me dépêchais aussitôt de m'en emparer. La nounou était revenue, la petite était là, je calmais alors mon courroux pour ne pas lui faire sentir le malaise. " On en reparlera ne t'en fais pas " adressais-je à la jeune femme tout en pointant mon index vers son visage. Je ne m'étais jamais embrouillé à ce point avec une femme, c'était assez nouveau pour moi. Ce n'était plus des gamineries, des longs silences, j'avais parlé en toute franchise au risque de blesser mon interlocutrice. Je savais déjà que j'allais m'en vouloir comme pas possible lorsque je serais seul face à moi même. De toute façon il était trop tard, le mal avait été fait.     

Je ne parviens pas à croire ce que j’entends. Mon cœur s’emballe mais cette fois-ci cela n’a rien à voir avec les sentiments profonds que je nourris à son égard. Je me sens comme attaquée sur mon propre terrain, comment ose-t-il parler de cette façon de la prunelle de mes yeux, de ma huitième merveille du monde, de la petite fille si inoffensive qui ne tarde pas à nous rejoindre, un sourire accroché aux lèvres. Je ne connais pas objectivement une enfant plus adorable, plus accueillante et souriante que Molly, et ce n’est pas uniquement parce que c’est ma fille. Telle une tigresse, défendant son petit, je ne peux m’empêcher de répliquer sur un ton plein de reproches. « Un gosse dans les pattes ? Mais tu sais Ethan, tu avais la possibilité de t’en aller si ça te gêne tellement que j’ai un gosse dans les pattes ! Et tu ne connais rien de ma relation avec lui, alors ne t’avise pas de juger s’il te plaît ! Je pensais réellement pouvoir compter sur toi mais en fin de compte tu fuis au moindre obstacle ! » Je lève les yeux au ciel lorsqu’il prétend devoir respirer un peu. La colère s’est emparée de chacun de mes membres, je n’aurai jamais pensé avoir ce genre de discussion avec lui et encore moins lors du Summer Camp. J’avais eu l’infime espoir que tout se passerait bien, pour une fois. Je ne suis pas une amoureuse des causes perdues  et je ne m’obstine jamais bien longtemps pourtant je ne comprends pas comment je m’attache sans relâche à cette histoire qui si souvent boit la tasse. C’est pire encore que des montagnes russes, et sa phrase cinglante me fait presque l’effet d’un coup de poignard. Je devrais choisir le silence, ce même silence que je choisis généralement quand je suis blessée, mais au contraire, mon ton est plus dur, mes mots sont irréfléchis. « Ça tombe bien je ne savais pas comment aller le retrouver avec toi constamment à mes côtés, mais maintenant me voilà rassurer je vais pouvoir renouer contact avec lui ! » Je n’en pense pas un mot en réalité. Parce que je n’ai jamais eu dans l’esprit de me rapprocher de nouveau de Matthéo, son départ m’a fait bien trop de mal. Je ne lui ai jamais demandé de choisir et pourtant il l’a fait, et sa jumelle l’a emporté. Je n’ai nullement envie de me remettre une fois de plus dans la position de la femme détestée par la belle famille. Molly arrive bien rapidement à notre niveau, suivie de sa baby sitter attitrée et alors Ethan me pointe du doigt, la colère se lit dans ses yeux et je regrette instantanément tout ce que j’ai pu dire. Je contemple ses traits durcis tandis que Molly s’agrippe à ma jambe. Je me baisse pour la prendre dans mes bras et la serrer contre moi. « Si tu veux prendre un taxi pour toi tout seul pour ne pas nous avoir dans tes pattes, n’hésite pas. » Dis-je d’un ton neutre cette fois-ci.

Il n'y avait pas d'insultes, mais les mots qu'elle maniait suffisaient pour me faire souffrir. J'allais à coup sûr les ressasser une fois que j'aurais poursuivi ma connerie jusqu'au bout et que je serais seul, seul dans ma chambre d'hôtel. La proposition que m'avait faite Evelyn n'était pas tombé dans l'oreille d'un sourd, c'était une perche qu'elle me tendait. Étant encore hors de moi même et pas prêt d'enterrer la hache de guerre, j'avais serré la poignée de ma valise pour passer mes nerfs " Ouais c'est ce que je vais faire, prends soin de la petite et de toi " cette fois-ci pas de phrases aiguisées portant sur Matthéo, je n'avais pas envie de me dégommer le coeur en m'imaginant des scénarios tout droit sorti d'un film. Bien que le feu dominait en moi, j'avais tout de même déposé un baiser sur la joue de la belle blonde avant de prendre la fuite. C'était trop tard pour faire demi tour, je regrettais déjà de m'être acharnée sur elle, je n'avais pas pesé mes mots, maudite impulsivité ! J'étais sorti de l'aéroport, respirant enfin l'air tiède de Floride. L'endroit était idyllique mais je ne le partageais avec personne. Les portes s'étaient refermées derrière moi et pourtant j'avais regardé par dessus mon épaule pour tenter de voir une dernière fois sa silhouette. Je m'étais peut être caché la triste réalité depuis que je la connaissais, le fait qu'elle est un enfant n'était pas facile à gérer mais maintenant que le père était dans les environs, je devais redoubler de vigilance, lui faire confiance, vivre avec... Seulement étais-je capable de tout ça ? En avais-je vraiment envie ? Cette sorte de pause que nous venions d'instaurer après cette dispute allait probablement m'amener des réponses. Evelyn me manquait déjà, c'était bon signe mais signe que je devrais aussi me battre pour accepter la situation...