Soon you'll get better (Wendy)

Certes, il était amoureux et totalement fidèle à son petit ami mais cela ne signifiait pas pour autant qu’elle l’avait perdu. Il allait le lui préciser pour la rassurer jusqu’à ce que horreur et damnation, elle lui révèle qu’il n’était pas la source de ses tourments. Comment était-ce possible ? Il ne sait pas comment cela est arrivé, ni la manière dont cela est arrivé. Il ne l’a pas vraiment cherché mais cela est venu tout doucement, naturellement. Sans qu’il y ait le moindre artifice ou manipulation de part et d’autre. C’est devenu comme une évidence autant que le sentiment glaçant de la réalisation. Wendy Witter et Kristofer Vermeer étaient devenus amis. Sinon pour quelle autre raison, se confierait-elle sur de tels sujets avec lui ? Elle devait avoir toute une batterie de psy ou autre employé à son service pour être utilisée comme échappatoire, voire des coups d’un soir pour une simple évacuation du trop plein d’énergie ou d’interrogation. Mais non, elle avait fait le choix de confier ses doutes et ses interrogations auprès du néerlandais. Au delà du fait que cela confirmait à ce dernier son importance, une étrange chaleur lui enserrait le coeur en réalisant que la rouquine en disposait d’elle dont elle venait d’entrouvrir la porte à son entier bénéfice. Bon, même s’il devait avouer qu’il était un peu déçu de découvrir que ce n’était pas lui qui faisait battre son myocarde au point de la rendre malade parce qu’elle ne pouvait pas l’avoir.

L’aigreur de la jalousie infantile avalée, il se prêta à un examen particulièrement soutenu de la belle en répétant ses propos : “Ce mec ?” Il laissa un ange passer dans la pièce. Mais il sembla qu’en plus de l’ange, c’est tout une compagnie de saltimbanque à ailes qui se glissèrent dans la pièce dans un silence assourdissant. “Un mec que tu aimes bien ?” Sa voix s’éleva à la fin de sa phrase cherchant des réponses à son interrogation et laissant Wendy s’exprimer librement plutôt que de lui prêter des paroles qui n’appartenaient qu’à elle.

C’est tellement étrange pour lui de voir la belle rouquine ainsi. En un sens, il avait l’impression de se voir dans un miroir quelques mois auparavant. Même si physiquement et financièrement, ils n’avaient pas grand chose en commun si ce n’est leur amitié incongrue, ils se ressemblaient plus qu’il ne le voulait l’admettre. Du moins, Wendy ressemblait à celui qu’il était avant de rencontrer Percy. C’était peut-être le même chemin qu’elle empruntait et il espérait secrètement qu’elle connaisse une issue aussi heureuse que lui. Il lui adressa une petite moue dubitative lorsqu’elle lui donna davantage d’explication avant de sourire doucement mais de cacher ce dernier sous une toux venue de nulle part. Il n’avait pas envie de se faire décapiter par une dragonne, même si cette dernière n’était pas au sommet de sa forme. “Je vois.” Il hocha la tête. “Et le fait qu’il t’ait …” Il choisit soigneusement ses mots, toujours dans cette optique d’éviter une décapitation précoce. “... qu’il n’ait pas semblé intéressé, ça a piqué ton ego ou autre chose ?” Il savait de quoi il parlait vu le nombre de râteaux qu’il s’était prix avec elle et qui lui aurait permis d’ouvrir un magasin de jardinage à Boston. Pour autant, c’était davantage son ego qui avait souffert que son coeur, preuve en était de leur amitié sortie de nulle part et surtout pas d’eux même. “Tu l’as connu au Spring Break ?” Il regrettait désormais que l’avant-première de son film se soit déroulé en même temps. Auquel cas, il aurait bien été cassé le nez de ce type pour rejeter une bombe sensuelle comme pouvait l’être la jeune femme.

Il était étrange de considérer que Wendy Witter, la redoutable femme d’affaire qui était capable de glacer sur place quiconque oserait la regarder puisse être meurtrie du rejet d’un homme. Elle avait sans doute l’habitude qu’on lui dise oui et qu’on ne la rejette pas mais il y avait autre chose en dessous de son apparente maladie et de son aveu du bout des lèvres. Kitt en savait quelque chose puisque le teint cireux qu’elle arborait, il le connaissait pour l’avoir déjà porté. Et cela n’avait rien à voir avec un quelconque virus ou soirée un peu trop arrosée. Enfin presque pas. Il hocha la tête lorsqu’elle décida qu’il ne valait pas la peine de se mettre dans ces états, suivant le mood du dragon pour éviter de se faire couper la tête comme dans Alice au Pays des Merveilles. Qui n’avait pas de dragon mais une reine un peu colérique en fait. “Oui, tu n’auras plus à le revoir par la suite et tu peux le rayer de ton existence.” confirma-t-il. “Te concentrer sur ce logo…” Il donna un coup de tête vers la table où trônait les propositions. “Profiter de tes vacances après avoir fêté dignement ton diplôme.” Un sourire en coin se dessina sur ses traits. “Et t’envoyer en l’air avec le premier beau gosse venu.” Il haussa les épaules. “Même s’il ne sera jamais aussi bien que moi.” Un clin d’oeil pour essayer de la remettre d’humeur, quitte à ce qu’elle passe ses nerfs sur lui. Cette amitié était peut être singulière et inattendue. Mais elle était précieuse aux yeux du néerlandais qui ne connaissait pas grand monde sur Boston et ne se reposait que sur un cercle très restreint dont elle faisait partie. "Je peux te présenter quelques uns de mes élèves." Lui n'avait pas le droit de toucher mais elle, oui.

Elle était touchante, Wendy Witter. Même si elle ne le réalisait pas. Même si elle l’étranglerait pour ne pas avoir de témoin gênant si jamais elle devait découvrir que c’était ce qu’il pensait d’elle. Un sourire attendri sur les lèvres du néerlandais le trahirent cependant alors qu’elle lui signifiait sans grande subtilité qu’il était temps pour lui de dégager et d’aller voir ailleurs si elle était. Il dût se mordre l’intérieur de la joue afin de se refréner et de la prendre dans ses bras, de déposer un baiser sur le sommet de son crâne rouquin et de filer avant qu’elle ne lui torde le poignet pour avoir commis un tel geste. A la place, il se contenta de hocher la tête et de répondre : “Si tu le dis…” Il ne précisa pas quel était le fond de sa pensée mais il avait bien l’intention de lui faire oublier ce demeuré qui l’avait fait douté de sa capacité à séduire, bien plus qu’elle ne pouvait l’admettre. L’idiot ignorait le diamant qu’il venait de laisser filer même si sa dureté pouvait faire peur quiconque n’était pas taillé pour le manipuler sans s’y couper les doigts. Il l’observa encore quelques instants avant d’adresser un signe de tête et de claquer les mains sur ses genoux et de se relever. “S’il y a quoi que ce soit, n’hésite pas.” Avec le temps et malgré leurs réticences, il se considérait maintenant comme un véritable ami de l’irascible femme d’affaires. Le fait qu’elle l’ait appelé à l’aide sans vraiment le faire témoignait malgré elle de ce qu’elle ressentait aussi. “Prends soin de toi, Witter.” Il lui adressa un clin d’oeil avant de disparaître non sans vérifier derrière la porte qu’elle ne s’était pas mise à pleurer ou autre sensibilité. Qui a dit qu’il n’était pas attentionné ?