are we all lost stars trying to light up the dark ? (asher)

La nuit a été longue, très longue. Pourtant, il aurait dû s’en douter Jonah. C’était prévisible. Ça l’est forcément quand il vit la même chose une nuit sur deux depuis plusieurs mois. Il aurait pu épargner à Asher d’avoir son sommeil perturbé s’il avait réfléchi. Mais non, il est encore trop optimiste faut croire. Pour penser que son passé le laissera tranquille pendant ses vacances. Erreur. Un réveil en sursaut à deux heures du matin, impossible de retrouver les bras de Morphée depuis. Pâle, des cernes sous les yeux, il a l’air d’un zombie. Un zombie avec à sa charge six personnes à ramener seines et sauves à Miami. Évidemment. — T'es prêt ? Qu’il demande à son meilleur ami en zippant la fermeture de son sac à dos. Prêt à partir. Ou du moins, prêt à sa façon.

Asher n’avait rien dit, il n’avait pas réagi. Pourtant, il l’avait entendu Jonah, suffoquer dans son sommeil, s’agiter. Mais il savait son meilleur ami pudique et ne voulait pas mettre les deux pieds dans le plat, alors qu’il avait revécu visiblement un événement traumatique. Malgré les habitudes sportives, la journée d’hier avait été éprouvante et la fatigue était toujours présente. Après une bonne douche bien froide pour réveiller et soulager ses muscles, Asher bouclait son sac. — Ouaip ! Il passait la lanière de son sac que son épaule et prenait place à côté de son meilleur ami, pour retourner vers le hall de l’hôtel. Sur le chemin, il tenta une approche. — Tu veux que je prenne le volant en premier ? Sous-entendu, avec sa petite mine et étant aux premières loges, il avait compris.

Trop fier pour demander de l'aide, même pour un simple trajet en voiture. Lui qui a assuré à Olympia que ça ne le dérangeait pas de rouler ces trois heures alors que madame voulait prendre un chauffeur. Et c'est vrai, ça ne le dérangeait pas avant ce matin. Mais avouer que quelque chose ne va pas et le pointer du doigt, c'est rendre réel le problème. Mettre un nom sur toutes les faiblesses qu'il a réussi à cacher et qui le tuent pourtant à petit feu. Ouais, parfois il se demande comment c'est possible que personne n'ait rien remarqué avec la gueule de déterré qu'il a. — C'est une question ou une suggestion ? Les yeux viennent directement trouver ceux d'Asher, sans la moindre animosité. C'est avec plaisir qu'il lui laisse le volant, un poids en moins sur ses épaules déjà trop lourdes. — Je t'ai réveillé c'est ça ? Évidemment que oui. Il a entendu. L'a sûrement vu quitter la chambre aussi. Et il ne peut pas lui en vouloir Jonah, pas à lui.

Asher ne voulait pas s’octroyer le droit d’aborder le sujet. Il était prêt à être présent pour son meilleur ami, à condition que le premier pas vienne de lui. Il ne voulait pas être intrusif, ne voulait pas le forcer à parler d’un sujet qui le tiraillait. Alors à sa manière, il tentait de le soulager un peu, proposant de prendre le volant pour que Jonah puisse souffler un peu, respirer parce que cette nuit l’air semblait lui avoir manqué. — Une affirmation plutôt. Sac sur les épaules, il tournait une dernière fois le regard sur leur chambre d’une nuit, s’ancrant des souvenirs positifs, avant de regarder à nouveau le tic de son tac, le yin de son yang. — Ouais. Il secouait doucement la tête pour appuyer ses propos, expirant doucement l’air emprisonné dans ses poumons. — J’voulais être discret, on n’est pas obligé d’en parler. Ce n'était pas son but, il voulait juste le soutenir et parfois, les mots n’étaient pas nécessaires.  

L'une des rares personnes à ne pas le harceler pour tenter d'obtenir réponse à ses questions. Et avant ce matin, il ne savait même pas qu'il se posait des questions, Asher. Rien d'étonnant pourtant, au vu de la nuit mouvementé dont ils ressortent. De toutes les personnes avec qui ça aurait pu se produire, il est soulagé Jonah, que ce soit tombé sur cet ami en particulier. Parce qu'avec lui, il n'a pas besoin d'esquiver ou de mentir à outrance. Encore moins de partir au quart de tour comme ça lui arrive, quand on s'acharne trop. — Ouais... je sais. Ils ne sont pas obligés. Jamais. Mais dans le fond, il ne sait même pas pourquoi il s'efforce autant à garder tout ça secret. La peur ? la honte ? La vérité, c'est qu'il en sait rien. Sans doute qu'il n'y voyait tout simplement pas l'intérêt, avant aujourd'hui. — Mais je suppose que je te dois bien ça pour t'avoir empêché de dormir... Est-ce que ce serait si mal que ça d'aborder le sujet avec lui ? Juste un peu. Tant qu'il ne rentre pas dans les détails, ça ira, n'est-ce pas ? — Ça n'a rien d'anodin. Qu'il lâche, plus sérieux, en s'arrêtant. S'ils doivent parler, autant le faire ici, à l’abri des oreilles indiscrètes. — Ça m'arrive tout le temps. Donc à l'avenir... évite de partager une chambre avec moi si tu peux. Ce serait dommage d'être réveillé au milieu de la nuit, encore une fois.

Il essayait de se mettre à la place de Jonah. Bien que c’était compliqué pour Ash de réellement ressentir, il se permettait d’imaginer. Il avait toujours eu une vie tranquille, pas de bagage à se traîner et encore moins des traumas à gérer. Peut-être qu’à sa place, comme lui, il préférerait taire le sujet. Il hochait doucement la tête, preuve qu’encore une fois, il le soutiendrait, qu’importe sa décision. Il s’arrêtait à son niveau quand il remarquait son arrêt et l’écoutait attentivement. — Tu arrives à gérer tes nuits agitées ? J’imagine que tu as tout essayé pour les stopper ? Relâchant le sac de ses épaules, il ajoutait : — Ça m’a plus inquiété que gêné, tu sais ? Ce n’est même pas comme si tu pouvais le contrôler. Et Asher, il ne poserait jamais un jugement sur sa situation.

Certains diraient qu'il se fout du monde, des autres. À envoyer balader quiconque essaie de lui soutirer des informations depuis des mois maintenant pour finalement s'ouvrir à celui qui ne lui a jamais rien demandé.  Faut pas chercher, c'est la logique à la Jonah. Lui seul sait ce qu'il se passe réellement dans sa tête... et encore. Parfois, lui-même n'en a pas la moindre putain d'idée. Il agit et après il réfléchit. Son nouveau crédo depuis le fameux incident. — Gérer ? Nan, c'est pas vraiment le mot... C'est même tout l'opposé à vrai dire. Mais c'est pas faute d'avoir essayé pourtant, tout essayé, comme le dit si ben Asher. — Ouais je sais... Ça me fait juste chier de t'avoir coupé dans ton sommeil. Surtout de cette façon. Parce qu'il ne contrôle rien, non. C'est sûrement ça qui l'emmerde le plus dans l'histoire, ne plus avoir le contrôle.

Il ne pouvait pas réellement comprendre et il espérait n’avoir jamais à le faire. Pourtant, il avait saisi le plus important : son meilleur ami vivait avec une cicatrice intérieure qui n’avait jamais réellement guéri. Ou alors il était complètement accro à une drogue qu’il n’avait pas pu emporter avec lui. Toujours est-il qu’Ash, bien que curieux, ne cherchait pas à comprendre l’entièreté de la situation pour le soutenir. — Est-ce que c’est ça, ou le fait que j’ai assisté à tout ça ? Ancrant ses billes ébène dans l’azur des siennes. — Tu sais que ça ne change rien pour moi ? Le regard que le Coréen posait sur son ami ne changerait pas, jamais. S’il avait peur qu'Asher ait pitié, il préférait balayer cette crainte.

C'est pas pour rien, si Asher est son meilleur ami. Ils ont beau s'être choisis inconsciemment à l'époque, la volonté d'entretenir cette amitié au fil des années est bien volontaire. Et il le lui prouve une fois de plus en cet instant. — Les deux. Mais surtout le fait de t'avoir réveillé. Dans tous les cas, il peut plus rien y faire. En temps normal, ça l'aurait fait bouillir de l'intérieur mais le calme du jeune homme suffit à le canaliser. — Ouais je sais, c'est pas ça le problème. C'est lui. Jonah Blum est son propre problème. — Tu veux pas savoir pourquoi j'me réveille en pleine nuit une fois sur deux ? Il sait bien qu'il le forcera pas. Mais est-ce qu'il n'est pas un minimum curieux, malgré tout ? Ce serait compréhensible. Et sans doute qu'il lui aurait posé des questions, J, si les rôles étaient inversés.

Jamais Asher, ne pensait que la situation de son meilleur ami, atteignait ce point. Si des doutes étaient bien présents depuis un moment, ils étaient désormais confirmés. Pourtant, il savait comment Jonah fonctionnait et par conséquent, le laissait venir à lui. C’était leur façon de faire, être présent, sans chercher à dépasser une certaine limite. Il haussait les épaules. — Ce n’est rien, j’te l’ai déjà dit. Il aurait très bien pu le frapper dans son sommeil agité, qu’Asher ne lui en aurait toujours pas porté rigueur. — Est-ce que j’aimerais savoir ce qu’il t’arrive vraiment ? Oui, mais que si toi, tu le veux, aujourd’hui, dans plusieurs semaines, ou jamais je respecterais toujours ton choix. Il inspire longuement, sans quitter du regard Jonah. — Je n'ai certainement aucune conscience de l’étendue des « dégâts » mais quoi qu’il arrive, ça ne changera jamais la manière dont j’te perçois. Qu’il ajoutait. Jonah restait Jonah à ses yeux, son ami. Son meilleur ami. Qu’importent les démons qui l’habitaient.