rancœur de côté -- marcus

les fêtes de fin d'année, période préférée de la majorité des américains. mais toi, tu n'en fais pas partie. grinch réincarné, noël te rappelle un peu plus que tu es seule. parents effacés de ta vie, frère en prison, aucune famille pour partager ces moments. t'es pas triste pour autant, désormais habituée à cette situation. ce qui te dérange le plus, ce sont ces foutus examens qui te paraissent interminables. t'es pas dans un bon mood cette année ; aucune motivation, aucune détermination, t'y vas un peu au feeling. révisions morcelées, tu t'es connue plus impliquée que ça. pourtant, t'as pas le droit à l'erreur, finances restreintes obligent. t'enchaînes déjà deux boulots pour y parvenir, hors de question d'en prendre un troisième pour éponger tes erreurs. t'aspires que cette session se termine, déjà soulagée d'avoir terminé l'épreuve du jour que tu redoutais. tu marches à l'extérieur, liberté d'esprit de quelques instants avant de rentrer chez toi pour entamer de nouvelles révisions. sur ton chemin, tu croises marcus. tu pourrais le snobber comme tu fais habituellement, mais suite à son dernier message, tu prends sur toi. ─ bonjour marcus, j'espère que tu vas bien en cette si belle journée ? l'ironie à son maximum. sourire forcé que tu affiches sur tes lèvres. il t'a demandé de ne plus lui faire la guerre, voici ta réponse. un peu trop surjouée, du nora tout craché.

Cette fin d'année était franchement éreintante. Si les exams prenaient tout mon temps, les fêtes à venir elles occupaient toutes mes pensées. J'étais déjà tendu rien qu'à l'idée de me rendre en autriche pour voir Père, sachant combien ce rituel était en réalité une véritable épreuve chaque année. Déjà je voyais les efforts que j'allais devoir déployer pour tempérer Gracie et ses envies de meurtre, le self control que j'allais devoir maintenir malgré les remarques acerbes du paternel... Sans parler du fait que ma soeur avait eu la merveilleuse idée de convier Brinley à ce moment censé être familial. Et père qui avait accepté ça, je n'en revenais toujours pas.
C'est l'esprit déjà embrumé par toutes ces conneries que je sortais de mon examen de finances. A peine à l'extérieur je me sortais une clope, ignorant le froid sur mes doigts pour tirer les quelques taffes salvatrices. Et quand je relevais la tête, mon regard tomba sur Nora, sortie de nulle part qui, pour une fois, venait me saluer. L'ironie du monde entier personnifiée. Mes lèvres s'étirèrent dans un sourire tout aussi ironique, ne sachant soudain si je ne préférais pas quand elle me snobait. « Je me porte comme un charme, et toi Nora ? » répondis-je le plus normalement du monde.

une nouvelle épreuve de passer, plus que deux avant que cette session éprouvante ne se termine. tu comptes les heures jusqu'au moment de la délivrance. celle à boire dans un bar pour fêter la fin. tes jambes qui te mènent hors du bâtiment, croisant marcus en pause clope. tes mots sonnent faux, sans parler de ce sourire ironique qui arbore ton visage. t'aurais pu le snobber un énième fois, mais tu te dis que l'indifférence est la meilleure des armes. manquerait plus que tu lui donnes l'impression que votre histoire t'a marquée. t'as surtout un égo surdimensionné que tu as du mal à mettre de côté. ─ super. j'espère que tu notes l'effort que je fais en ce moment-même. prends-tu la peine de notifier. ça t'évitera un nouveau message te pointant du doigt parce que t'es pas capable d'agir comme une adulte. il n'a pas tord en soit, mais jamais tu ne lui donneras raison. bien trop bornée pour avouer que tu lui fais la guerre.

Ca lui écorchait tellement la bouche de venir me saluer, c'était affligeant. Ca m'agaçait autant que ça m'amusait à vrai dire. Parce qu'au final, c'était bien ce caractère tempêtueux qui m'avait séduit par le passé et qui parvenait encore à me charmer quand les âmes insipides et lisses m'ennuyaient. Je devinais que notre dernière conversation sur meets l'avait piquée puisque, finalement, elle venait m'accoster malgré tout. « Pour ne pas continuer à faire la gamine ? Oui oui, je note » lâchai-je malgré moi. Je savais d'avance que ça allait la faire bondir, mais je n'avais pas pu m'en empêcher. Un peu plus de quatre mois qu'on avait mis fin à notre relation et pourtant, c'était comme si rien n'avait bougé depuis. « C'est maintenant que l'on se demande comment se sont passé nos exams respectifs non ? A défaut de pouvoir parler de ce temps de merde » poursuivais-je avec ironie, prenant une nouvelle taffe. En réalité, ça me faisait plaisir de la voir, en chair et en os.

envie de lui sauter au cou et de lui arracher les globes oculaires losqu'il mentionne le mot gamine. mais ce serait lui donner raison, alors tu fais mine que ça ne t'atteint pas. ─ t'vas finir par le regretter, que j'vienne te parler. peut-être qu'il se rendra compte que te snober était finalement la meilleure issue. tu peux facilement être détestable, étonnant qu'il ne s'en souvienne pas. ─ s'il faut faire semblant, autant y aller jusqu'au bout. ca s'passe tes examens ? à peine dans l'abus. toujours le mot pour te donner cet air d'intouchable alors qu'en vrai, c'est pas tant une torture que ça de lui parler. c'est juste difficile pour toi de mettre ta fierté de côté. puis, maintenant que t'as fait l'effort de ne pas le snober, autant entamer un semblant de conversation. ─ j'peux te piquer une clope ? tu comptais en prendre une sur le chemin du retour, mais t'as laissé ton paquet dans la voiture. peut-être que ça t'aidera à te montrer plus cordiale..

Un mince sourire teinté d'ironie venait étirer mes lèvres quand je la sentais sur le qui vive, sachant pertinemment que j'avais utilisé le bon vocabulaire pour la faire sortir de ses gonds. Je voyais l'effort sur son visage, la crispation qui s'imposait pour qu'elle parvienne à conserver tout son self control. Ca aurait presque pu être attendrissant si elle n'était pas réellement en train de me menacer parce que soyons clair, je savais de quoi elle était capable. « Bizarrement je commence à me dire qu'en effet, c'était peut-être mieux ainsi » répondis-je toujours sur le même ton, comme si nous parlions de la pluie et du beau temps. « Très bien oui merci. Une étape de plus dans notre chère vie d'étudiant. Et toi ? » répondis-je le plus naturellement du monde. Je tirai à nouveau une taffe, ce qui devait lui donner envie car voilà qu'elle me demandait une clope. Je la regardais, ayant soudain l'impression qu'en une poignée de seconde la réalité de ce moment nous rattrapais. Combien de fois on avait fumé ensemble il y a à peine quelques mois de ça ? Machinalement je sortais mon paquet, lui tendais une cigarette. Puis je tendais le bras briquet à la main, la lui allumais.

tu prends sur toi, self control dont tu ne te pensais absolument pas capable. plutôt du genre impulsive pour un oui ou pour un non. mais pas cette fois. trop de changements en si peu de temps ; toi, qui parle à marcus alors que tu le snobais il y a encore quelques instants. à croire que les examens te retournent la tête. ─ c'est toi qui m'a demandé de ne plus te snober. épaules qui se haussent, fausse innocence qui prend place sur ton visage. en mode, tant pis pour toi. ─ pareil, j'décompte les jours jusqu'à ce que ce soit la fin. envie de reprendre ton quotidien de débauche, autre qu'à avoir le nez plongé dans tes livres. parfois tu demandes pourquoi tu t'es aventuré là-dedans. puis tu penses à ton passif, et à la volonté de réussir comme tes progéniteurs ne l'ont pas fait. tu attrapes la clope qu'il te tend, la pince entre tes lèvres alors qu'il te l'allume. quelques secondes perchées dans le temps, comme si rien n'avait changé. tu tires une bonne bouffée, regard tourné en sa direction. ─ merci. pas si mal élevée que ça. moment même presque trop cordial.

L'échange paraissait simple, presque anecdotique et pourtant.. c'était probablement la première fois que nous nous adressions réellement la parole depuis la fin de notre relation. Sans cris, sans que ça parte dans tous les sens. La tension était palpable mais malgré cela, je me retrouvais à lui donner une cigarette que je venais allumer du bout des doigts. Gestes presque instinctifs pour avoir été répétés tant de fois par le passé, créant l'espace d'un instant cette proximité envolée depuis plusieurs mois. J'acquiesçai en silence à son "merci", appréciant cette accalmie. « Tout va bien pour toi ? » me risquais-je à demander, sincère. Sans ironie ni sarcasmes - mes artifices habituels. Car si elle s'évertuait à me faire la guerre au final, je n'oubliais pas l'attachement qu'il y avait eu entre nous. Qu'il y avait, certainement encore un peu.

échanges empreints d'ironie, toujours mieux que la rancœur que tu as pu faire preuve avant aujourd'hui. bien déterminée à le contredire en chassant cette attitude de gamine comme il te l'a reproché. en réalité, tu ne sais pas faire semblant. rancune qui te colle à la peau, encore plus que lorsque t'on égo a été touché. cigarette que tu portes à tes lèvres, les opales rivés devant toi. un merci sincère, venant balayé cette tension palpable entre vous. tu ne sais pas où te positionner par rapport à lui. tiraillée entre l'envie de lui faire la guerre, et celle d'oublier. personnalité indécise, du genre à compliquer ce qui pourrait être simple. ─ ouais, on peut dire ça, et toi ? bien est un grand mot quand on connait tes combats. pas du tout enjouée à l'approche des fêtes de fin d'année, les premières que tu passeras sans ton frère. cette période n'aura plus la même saveur.

Même si nous avions partagé notre intimité au final, je connaissais assez peu de choses de Nora. Ce qu'elle avait bien voulu me confier dans des moments de confidence où nous nous rapprochions sans doute bien plus que lorsque nous partagions le même lit. Est-ce qu'elle faisait encore ces cauchemars où elle se réveillait en sursaut ? J'en savais rien et à cet instant, il me semblait déplacé de le lui demander. Pas quand elle m'exprimait clairement son antipathie et sa rancoeur. J'hochais la tête en entendant sa réponse, me contentant de ça. Elle me retournait la question, mon plongeant un instant dans la réflexion. J'étais extrêmement sur les nerfs en ce moment, pour tout un tas de raison. Là il y avait les exams, demain ça serait l'épreuve des fêtes de fin d'année en compagnie de celle que je voulais éviter à tout prix mais qui, pourtant, parvenait à s'incruster même dans ma vie privée. Ca allait être une sacrée épreuve. « Ca va » répondis-je, peu loquace comme toujours lorsqu'il s'agissait de parler de moi. Ma cigarette finie, j''écrasais le mégot dans le cendrier présent à côté d'une poubelle. « Je suppose qu'on peut se souhaiter de bonnes fêtes ? Je ne pense pas te revoir d'ici-là » dis-je, sur le départ.