FIONA A. LINWOOD ► perrie edwards

« Fiona, qu’est-ce que tu as encore fait à tes cheveux ? » Le ton amusé de son père la fit sourire et une fois de plus, elle remercia le ciel d’avoir une famille si ouverte d’esprit. Bien qu’appartenant à la haute bourgeoisie anglaise, ses parents étaient les êtres les plus tolérants du monde. Ils se moquaient des conventions et des "qu'en dira-t-on". Ils vivaient leur vie comme bon leur semblait et se fichaient pas mal de ce qu'en pensaient les autres. S’ils n’avaient pas été membres d’une famille si influente, ils auraient depuis longtemps été exclus de ce monde superficiel rempli de faux-semblants. Voir Fiona débarquer dans le salon avec les cheveux d’un mauve éclatant ne l’avait pas choqué outre mesure. Il était habitué à l’excentricité de sa fille depuis de nombreuses années et pour dire vrai, il l’encourageait à se démarquer des autres. Fiona était le portrait craché de son père : elle n’en faisait qu’à sa tête. Elle avait toujours été à part. D’aussi loin qu’elle se souvienne, on l’avait toujours qualifiée de « bizarre », « fêlée », « déjantée », « originale » et autres mots beaucoup moins tendres. Elle n’avait jamais été le le stéréotype de la petite bourgeoise anglaise comme on en croisait souvent. Elle achetait ses fringues dans des friperies de quartiers ou des petits magasins bon marché, elle ne choisissait pas ses amis suivant leur rang social mais en fonction des affinités qu’elle avait avec eux, elle ne s’interdisait pas de s’amuser ou de dire des grossièretés quand elle en avait envie… Elle vivait, tout simplement. Et cet amour de la vie n’était pas du goût de tout le monde. Toute petite déjà, elle était la fille qui aimait La Famille Addams et L’Étrange Noël de Monsieur Jack alors que toutes ses camarades de classe ne juraient que par Cendrillon ou Belle, de la Belle et la Bête. Celle qui portait des vêtements dépareillés et des t-shirts à l’effigie de vieux groupes de rock alors que toutes les autres copiaient le look branché des starlettes à la mode. Celle qui passait son temps à griffonner des paroles de chansons et des portées dans ses cahiers d'école parce que la seule chose qui l'animait était la musique. Elle était elle, tout simplement. Pas l’un de ces clones sans âme et sans personnalité qu’on voyait à chaque carrefour londonien. « Quoi, tu n'aimes pas ? Grâce à moi, le prochain gala de charité sera animé ! Je vais bientôt partir, il faut bien que je marque le coup », répliqua la jeune fille en souriant. Une fois de plus, son style particulier serait au cœur de toutes les conversations et une fois de plus, les gens chuchoteraient sur son passage. Elle les trouvait tellement minables, eux et leurs préjugés débiles… Fort heureusement, c'était la dernière fois qu'elle aurait à participer à ce genre de réunions profondément ennuyeuses où les bonnes manières et les robes de soirées étaient de mises. Sa candidature avait été acceptée et elle allait intégrer la prestigieuse université d'Harvard. Une nouvelle aventure, loin de la haute-société Londonienne allait commencer et elle avait hâte de pouvoir changer d’air. « Tu sais que tout le monde passe son temps à me parler de toi ? Ils se demandent si tu ne devrais pas aller voir un psy. Ils trouvent que ton look et tes manières sont, je cite : « très inappropriés » et que tu as sûrement un trouble psychiatrique. » Fiona l’écouta en levant les yeux au ciel. Les aristocrates avaient un esprit tellement étriqué… Toutes les personnes qui ne correspondaient pas à leurs critères étaient forcément anormales. Et si c’étaient eux, les parias ? Après tout, ils ne représentaient pas la majorité – et leur mode de vie était souvent bien archaïque. « Eh bien tu leur diras que c’est gentil de s’inquiéter pour ma santé mentale, mais que tout va bien. Ce n’est pas parce que nous n’avons pas la même vision des choses que je suis forcément névrosée. Cela dit, je devrais les remercier. S’ils n’étaient pas là, j’aurais beaucoup moins d’inspiration pour mes chansons... » La musique avait toujours tenu une place importante dans sa vie et plus les années passaient, moins elle pouvait s’en passer. Piano, guitare, batterie… Elle savait jouer de nombreux instruments et plus encore, elle écrivait et chantait ses propres chansons. Ses textes reflétaient ce qu’elle vivait au quotidien et la débilité des personnes qui l’entourait l’inspirait toujours. La plupart de ses morceaux évoquaient les inégalités sociales, les préjugés, le fait de se sentir à part ou complètement différente des autres, le fait de vouloir voler de ses propres ailes sans avoir à rendre de compte à personne… Bref, tous les sujets qui lui tenaient à cœur. Chacune de ses compositions reflétaient un état d’esprit, une émotion particulière. Elle était convaincue qu’une chanson avait bien plus d'impact qu'un long discours et d'ailleurs, elle parvenait mieux à s'exprimer en chanson qu'avec de simples mots. La musique était une arme redoutable. Arme que Fiona maniait à la perfection. En fait, elle n'avait l'impression d'être réellement elle-même que lorsqu'elle se trouvait derrière un piano ou devant un micro, une guitare à la main. La musique l'avait révélée et jamais plus elle ne pourrait s'en passer. Qu'elle soit à Londres ou à Harvard (et peut-être même plus à Harvard qu'ailleurs), elle s'adonnerait à sa passion quoi qu'il arrive. Plus qu'un exutoire, la musique était sa raison de vivre.