ange noir (lenny)

À la cime des toitures, le soleil aiguise sur les pierres la hâte de s’enfuir qui palpite dans ta cage thoracique. Large prison s’efforçant de contenir l’adrénaline de l’ascension et du déclin, la folle fuite du voleur. Ta silhouette épouse les angles, et pour chaque oiseau dans les feuilles, pour les cailloux et les bruits du silence, tu effectues ton spectacle habituel. Les briques reconnaissent tes mains familières, l’œil déjà pétillant de son larcin. Comment survivre sans cette rythmique nécrophage ? Pourquoi décevoir les mésententes, ces attentes malheureuses entourant ta piètre personne ? Ton père se dispensera bien de cet appareil photographique. Tu inspires légèrement avant de relâcher l’accroche, fondant comme un prédateur au sol. L’herbe étouffe la chute, pas un bruissement. Quelle incroyable dextérité, Lenny. Les dernières lueurs solaires pourraient encore dénoncer ton cheminement mais le clown s’incline en une ultime salutation à la foule invisible… Non. « — Tu t'entraînes à l'alpinisme ? » Failure dans l’atmosphère dont la pesanteur semble désormais bien plus lourde. Qui est donc le témoin de ton crime ? Brisés les ailes dans l’élan, néanmoins ton sourire ne se volatilise pas. Elle ne se dissimule pas même derrière les branchages, trônant fièrement dans l’allée. Tu te penches en avant, lui adressant finalement ta révérence. « — J’espère que ce divertissement aura été plaisant made…  » Les mos s’étranglent dans ta gorge, aspirés par son souvenir. Nul doute n’est possible. Envisageable. Elle est debout sur tes paupières, et ses cheveux se hissent jusqu’à ton visage. Elle t’engloutit dans son ombre, comme une misérable trajectoire dans l’immensité du vide. Elle a toujours les yeux ouverts et ne te laisse jamais véritablement dormir. Tes rêves foudroyés par la présence d’une ange ainsi matérialisée. « — Tu es l’ange, n’est-ce pas ? »