SIDE EYES - Tullio.

« Hey Tullio ! » La voix aux suaves notes espagnoles l'interpelle et il pivote sur le bout de ses pieds, les mains plongées dans son blason noir, blason qui importe peu. Le style qui lui convient, qui l'apporte ailleurs. Toujours bien fringué, mais il n'achète pas dans les plus grandes marques. Il en lève une main un peu rigide dans sa direction. « Ouais, t'veux quoi, Georgio ? » Il n'a pas envie d'être importuné, le verre déjà dans le nez. Nulle substance qui empoisonne ses veines pour le moment. Il s'embrouille le cerveau, ne veut rien ressentir qui le relie à son amour perdu. Aux souvenirs de sa mère. De son père. Famille O'Shea qui cache de sérieuses histoires les unes par-dessus les autres et il ne peut pas oublier. Malédiction pesante et il entend son prénom lancé par une femme. Fronçant les sourcils, l'italien n'a pas d'autres choix que de suivre le mouvement et il se retrouve avec un jeune homme qu'il connaît. La relation qui n'est pas au beau fixe. Pas la plus pire, non plus... Mais le jugement hâtif de Ruben avait fait en sorte que Tullio l'avait traité de certains noms dans un excès de colère et qu'il avait quitté prestement l'endroit sans un regard derrière, parce qu'il n'a jamais aimé se faire juger et pourtant... Les yeux pistache de l'étudiant sont braqués sur le bouclé. Il croise un peu ses bras, prenant le verre de l'une de ses mains. Il a bu, Ruben et Tullio le voit très clairement. « Salut... » Il pivote un peu sur son siège pour lui faire face. « C'est à moi de te poser cette question. Qu'est-ce qui se passe avec toi ? » Parce qu'il sait. Il se souvient. Ruben ne boit pas autant. Ruben n'est pas comme ça. Et il s'en raconte des mots, comme des murmures portés par le vent qu'il capte à son gré. « Une addiction reste une addiction... Ça détruit, l'une comme l'autre. » Il pointe le verre, comme ajustement visuel à son argument. « Laisse moi te donner un endroit où tu peux te reposer et évacuer ça sans te poser de questions. » Tullio ne cherche pas plus. Ne veut pas le pousser, mais il peut refermer sa main sur son être si c'est nécessaire afin de l'aider. Parce qu'au fond de lui, quelque chose le rattache à l'étudiant de la maison jaune. Il ne restera pas là les bras croisés.

< tu veux faire un concours de qui est plus bête qu'un autre ? > Tullio n'aime pas le voir ainsi affligé. Car si l'Italien peut se montrer désobligeant et froid, il n'est pas sans coeur et la situation de Ruben semble cogner dans sa tête. Ses mots le frappent encore et Tullio en serre le verre quelques secondes, manquant de faire craquer celui-ci, mais il se reprend. < Peut-être que si tu cherchais un peu plus tu verrais que la personne en face de toi pourrait finir par te dire la même chose. Mais nos propres malheurs nous rend aveugle.> Comme l'amour, le dicton... Mais l'Italien n'avait rien ajouté. Il le voit continuer de boire et Tullio soupire lourdement avant de se redresser de son siège. Il venait de lui proposer quelque chose pour le rendre mieux, lui faire oublier ses malheurs peut-être. Aucune arrière-pensée quand il avait pourtant le vent plus doux dans ses azurs.
Et il sent la rancune de celui avec qui il s'est embrouillé. Roulant les yeux, il se penche un peu vers lui. Plus grand. < Tu penses juste que je te détestes et que je n'en ai rien à faire de toi..? Tu te trompes. Il arrive de s'embrouiller. Alors maintenant tu peux bien m'en vouloir pour ce qui va suivre, mais sache que ça, je m'en fiche.>
Il vient attraper le verre de l'autre étudiant afin de le poser sur le comptoir et Tullio s'approche. Plus près encore. Et il ne lui laisse pas le temps de répliquer qu'il se penche et ses bras glissent autour de ses cuisses pour le soulever. Quitte à ce qu'il se retrouve avec du vomi dans le dos.. mais il soulève Ruben sans mal, le posant sur son épaule et il serre ses mains derrière ses cuisses afin qu'il ne glisse pas. < Ça suffit. Tu viens. > Plus question de choix et l'étudiant commence à marcher vers la sortie en se fichant des regards. Inquisiteurs, curieux, amusés, sceptiques... Toutes sortes et il poursuit son chemin sans laisser à Ruben l'occasion de lui échapper et lorsque le frais du soir caresse leur visage, il le fait glisser. Il ne passe pas sur ses fesses afin de le respecter, mais elles passent sur ses hanches pour s'assurer qu'il retrouve bien le sol. < Je n'ai aucune raison de profiter de toi ni de ton état. Si tu es trop con pour accepter de l'aide, tu m'en voudras demain. En attendant, tu viens. Il est hors de question que je te laisse te bousiller encore plus que ça...>

Il se débat un peu sans que ce ne soit excessif. Oh... l'Italien pourrait éclater de rire face au petit fou qui se tortille comme un ver entre ses mains, la tête et les mains dans son dos, mais il poursuit son chemin sans un regard derrière et il amène le pauvre écorché loin des âmes fêtardes et des regards indiscrets jusqu'à se voiler dans ses émotions lorsqu'ils sont à l'extérieur. Tullio le dépose enfin au sol afin que tout cesse de tourner pour celui abordant des couleurs jaunes jusqu'au moment de le voir gronder et franchement, l'Italien ne répond guère. Ne pipe mot et l'observe agir pauvrement sous l'effet de l'alcool face au videur qui le refuse. Il se prend l'accusation sur la gueule , ce qui le fait siffler en roulant des yeux.

< Ce n'est pas parce que tu es blessé que tu dois blesser les autres qui veulent t'aider... Et ne me sort pas que tu n'as pas besoin d'être aidé. Le jour où tu vas me démontrer que c'est le cas, je te lâcherais.> l'Italien le suit, les mains dans les poches, veillant discrètement sur le pauvre émotif qui cherche désespérément à éteindre sa douleur. < Si tu cherches vraiment à te bourrer la gueule alors je vais t'amener dans un bar que je connais. C'est à la condition que tu restes près de moi. Et je paye même tout.> Oh il tente juste de l'aider, Tullio. Ses yeux ceruléens sont une mer tranquille où l'on peut refléter les poèmes les plus tristes. Bousillé, gamin de l'Europe qui manque toujours de s'étouffer sur ses propres malheurs et jusqu'aux poisons qui s'enfilent les uns après les autres jusqu'à s'oublier. Le plus grand s'approche et une main plus chaude et douce se dépose contre l'épaule de Ruben où il finit par presser gentiment, le retournant afin qu'il lui fasse face. < Regarde moi, s'il te plaît.. Je suis désolé. Peu importe ce qui se passe dans ta vie... Je n'ai pas le droit de la diriger. Je suis désolé, de t'avoir forcé. S'il te plaît laisse moi seulement veiller sur toi. Je m'inquiète de ce qui t'arrive... Peu importe ce que c'est. Dès que tu seras en sécurité, je serais devenu une ombre parmi l'ombre.. " Il disparaîtra ensuite. Parce que Tullio ne veut pas lui causer de tort, ainsi il se fait le spectateur du mal, réceptacle du petit diable et de ses délires.

(tw : décès relié au suicide)

L'air frais est bon, il caresse et glisse dans les broches. Tullio soupire discrètement avant de voir les larmes de Ruben. Ça lui pince le coeur... Parce qu'il sait que les histoires d'amour peuvent être compliquées. Il sait... Oh, tellement. Il se fait doux dans son contact et il réceptionne le brun contre lui en refermant ses bras autour de ses épaules. Son nez vient gentiment se caler contre ses mèches et Tullio se fait berceuse imaginaire. Gentiment, il le berce contre lui sans dire un mot. Il ferme même les yeux, essayant de le protéger d'un monde horrible. Des sentiments qui l'assiège. C'est factice. Il le sait. l'Italien ne veut qu'au fond de lui, lui apporter un peu de paix et il ne dit rien. Peu importe aussi le lien familial .. Tullio ne cautionne pas certaines choses et ne fera aucun favoritisme. Sa main gauche glisse pour rejoindre sa nuque jusqu'à son dos qu'il se met lentement à frotter. < C'est fort, de dire que l'on déteste quand on est émotif... Prend le temps de recul...> Qu'il murmure avant de sentir ses propres émotions se mélanger. Il reste plusieurs minutes dans cette position avant de doucement se détacher. Il glisse son bras autour de ses épaules en le maintenant contre lui. Il lui impose de marcher. < La vie sera toujours injuste sur plusieurs fronts.. et je sais de quoi je parle. Tu sais, Ruben... J'ai déjà et amoureux moi aussi. Je l'ai été. Si fort.. C'était un coup de foudre.  Du jour au lendemain. Et on allait se marier, lui et moi ... Mais il est parti. Du jour au lendemain. Sans explications. J'ai du lui dire ainsi adieu sans y être préparé. Et je ne pourrais jamais savoir.. > Tullio s'arrête non loin d'un banc public sur lequel il les fait s'asseoir. < J'ai tout perdu de mon cœur, ce jour là... Et tu ignores encore beaucoup de cette histoire.> Comme le fait qu'il est mort, qu'il s'est enlevé la vie. < Parce qu'il...> Mais il n'y arrive pas à souffler le mot mort. Il affiche un air triste, si triste... Sa main se pose affectueusement sur la tête du brun. < Je serais là si tu as besoin de moi..  et je partirais quand tu ne voudras plus.>