Rhéa E. O'Praola ► Florrie Arnold

« Rhéa, please come here. ». Lorsque vous êtes âgés de cinq ans, cette phrase n’a pas de signification attendue. Non cette phrase semble être un simple appel prévenant une petite nouvelle sans de grands impacts ou encore une punition suite à la énième bêtise que vous avez faites mais rien de plus. Rien qui pourrait changer considérablement votre vie. Pourtant cette fois là, cette parole fût plus lourde de conséquences. « My darling, j’espère que tu vas être contente, la famille va s’agrandir. Mama, attend des jumelles. ». Alors que la plupart de ses copains et copines n’avaient ni frères ni sœurs, elle, elle allait en avoir deux d’un coup. Certes elle pourrait jouer avec eux et elle se sentirait moins seule mais est-ce qu’elle intéresserait encore quelqu’un dans la famille ? Les problèmes commençaient…

« Pourquoi on apprend pas à ces choses à parler plutôt que de toujours pleurer ? Tu te rends compte que quand ce n’est pas l’une c’est l’autre ? Est-ce qu’un jour ce sera utile ces petits machins ? Même mes bébés ils sont plus gentils et plus polis. ». Il s’agit là d’une discussion que Rhéa avait quotidiennement avec son père. Ce dernier souffrait indirectement de ne plus avoir du temps pour sa petite protégée. Certes il avait tout autant l’envie d’avoir un autre enfant mais il ne pensait pas avoir des jumeaux et par conséquent deux fois moins de temps pour sa préférée. (Chose qu’il n’avouait à son épouse bien entendu qui tentait tant bien que mal de répartir son temps de la manière la plus équitable).

Le meilleur moyen d’attirer l’attention lorsque le monde autour de vous semble oublier votre existence est d’être parfaite et la plus sollicitée. C’est comme ça que c’était passé l’adolescence de Rhéa. Toujours première de classe, volontaire pour aider les autres, elle faisait du bénévolat et était d’une importance pour ces amis. Il n’y avait, à vrai dire, rien de plus important que ses amis. Que ceux-ci soient masculins ou féminins. Elle leur vouait une amitié et une fidélité qu’elle ne pouvait apporter à sa famille. Les tensions familiales étaient en effet toujours plus fortes. Et toujours plus déstabilisante. Si elle ne se libérait pas l’esprit et si elle n’était pas comblée d’une autre façon elle sombrerait. Quoiqu’elle doit bien avouer que voir son père souffrir de voir sa grande réussir sans même pouvoir jouer un rôle actif dans ce succès était d’une jouissance surprenante. Mais le pauvre avait tant de mal avec les petits monstres qu’elle avait pour sœur…

Cette année, pour ses dix-sept ans, elle avait été élue reine de promo. De plus, lors de ce bal, elle découvrit un tas de chose. Tout d’abord que la perfection et la grandeur était synonyme de son prénom et qu’elle pouvait donc se voir faire une longue carrière à l’avenir. Ensuite, que la jalousie de la femme pouvait nourrir d’autant plus la volonté d’obtenir quelque chose. Et enfin, que sa beauté et sa fragilité (parfois fausse) pouvait lui permettre d’avoir un nombre incalculable de garçons à ses pieds sans pour autant aller beaucoup plus loin étant donné qu’elle était toujours vierge

Plus les années passaient plus Rhéa avait le besoin de s’émanciper et de vider son énergie, sa colère, sa rage dans une branche artistique. Son choix ne fût pas long : la musique était son échappatoire. Guitare, batterie, piano, musique de fond ou chant, en groupe ou en solo. C’était son plaisir à elle. Sa façon à elle de se sentir aimer, de se sentir vivre de prouver ce qu’elle vaut. Et vu le succès de son album, elle le faisait plutôt bien.
La musique n’était pas la seule chose qu’elle faisait bien. Elle venait de rentrer il n’y a pas longtemps dans la plus grande université : Harvard. L’économie la fascinant, c’est dans cette option et dans l’optique de devenir indépendante qu’elle y faisait ses études. Pas besoin d’un job étudiant étant donné que papa payait tout jusqu’au moindre cent. Plus de mère sur le dos pour lui dire quoi faire, plus de sœurs criant ou fouinant dans ses affaires pour lui emprunter à long terme son tout nouveau rouge à lèvre et ses Louboutin encore jamais mises. Elle était libre. Libre de voir qui elle voulait, de sortir avec qui elle voulait (riches ou pauvres tant qu’ils lui apportaient du bien être), de ne pas manger de viande pas même du poulet, de prendre des compléments alimentaires pour perdre du poids ou encore de porter des vêtements plus courts que le raisonnable. Elle avait son appartement, ses amis et aucun tracas. Pas de factures à payer, pas de mobilier de seconde main à devoir racheter d’urgence parce qu’il a craqué, pas de tracas pour tous ces examens à passer étant donné qu’elle avait la réussite facile, pas de dépression parce qu’aucun garçons ne veut d’elle. La belle vie était devant elle et petit à petit elle prenait sa revanche sur l’enfer qu’on lui avait fait vivre indépendamment de sa volonté.