J e venais de sortir, fallait que je cours, que je m’enfuie. Calmant une crise d’angoisse, je voulais m’élancer. J’avais envie de courir. Sentir ma robe sur mes jambes, de courir aussi loin que je le pourrais. Mais une main m’en empêcha, comme un licol empêche un cheval de foncer au quadruple galop, comme on empêche un enfant de rire. Je me retourne : « Merde... J'suis tellement désolé ». La rage. La haine. L’incompréhension. Le sentiment d’être trahie. Tous mes sentiments, tous mes sens se réveillèrent. La crise d’angoisse s’est calmée, la crise de nerf va commencer. Mesdames et Messieurs, je vais vous présenter Hulk version Blueberry. Dans un hurlement de rage, ma main libre s’abat durement sur la joue de Gabriel
« Lâches moi !! Traitre ! Enfoiré ! Connard ! Putain de drogué de merde ! Pauvre tâche ! Sous merde ! Egoïste ! Egocentrique ! Briseur de cœur ! Briseur de rêve ! Briseur de vie ! CREVES !! Je veux que tu CREVES ! »
Gueule je suis Gabriel. Oui … je gueule. Oui, je suis violente. Oui, je le frappe. Je lui donne des coups de poings sur son bras, je m’efforce à tout faire pour le blesser physiquement, lui donnant même un coup de pied dans le tibia ! Une femme brisée qui devient hystérique ça fait peur. Soudain, alors qu’on croyait que je m’étais calmée, je prends ma respiration et hurle de toute mes forces, déversant toute ma rage, toute ma haine sur lui et ma tristesse, mes poings serrés, mes muscles contractés, mes yeux injectés de sang, mon cœur qui bat comme un fou furieux, je devais mon contraire. Une femme impulsive, haineuse, rancunière.
« J’ai baisé comme la dernière des chiennes parce que je me sentais comme une merde ! Je me suis trahie en bossant comme une tarée à m’en faire un ulcère et toi … TOI tu te permets de me dire ça ! ‘Désolé’ Mais vas te faire foutre ! Je t’ai tout donné … TOUT ! Ma confiance ! Mon amour ! Mon cœur ! Mon corps ! Mon histoire ! Je t’ai défendu face à mes potes qui doutaient de toi putain je me suis trompée sur toi ! Merde ! C’est plus que des excuses que tu me dois … bien plus qu’un simple ‘désolé’, c’est trop facile »
Durant ma longue tirade, j’ai haussé le ton comme je ne l’ai jamais fait. Je ne voulais plus le comprendre, je voulais restée enfermer dans mon propre égoïsme. Je voulais me plaindre de lui, je voulais me faire passer pour la victime, mais surtout, je voulais vider mon sac et bon sang ! Je vous assure que ça fait un bien fou ! La dernière phrase fut dite calmement, peut être même que c’était trop bizarre. Un calme après une tornade … ça n’annonce rien de bon. Ma tête tournait, je soupire et secoue la tête devinant qu’il s’était drogué. Je soupire. Je ne voulais pas le comprendre. Je ne voulais pas le plaindre. Mais en tout cas, l’envie de courir et de pleurer dans mon coin, venait de s’envoler POUF comme une traînée de poudre. Je marche doucement vers un banc non loin, les jambes fébriles, je m’assois. On m’avait peut être entendu gueuler, car au loin, des gens discutaient entre eux. Je pense que Valentin aurait tout donné pour me voir dans cet état contre Gabriel. Il se serait marré le con, aurait pointé du doigt Gabriel. Malgré tout, cette pensée ne me réjouit pas. Les sourcils froncés, je regardais le vide
« Je te déteste. J’ai jamais … détesté quelqu’un comme ça. Pas même mon ex qui m’a poignardé, violé, laissé pour morte. Non. Tu … tu as été un tout pour moi. J’étais persuadée qu’on formait un beau couple … me tromper comme ça, ça me ronge … et ce qui me ronge encore plus, c’est de t’enlever de mon cœur … je t’ai dans la peau putain, c’est trop dur d’effacer tout … et toi ! Tu te drogues comme un con … » Mes larmes sortaient encore. Font chier celles-là ! Mais je me calme facilement. C’est la fatigue qui me ronge maintenant. Je me calme, me force à le faire, je n’avais plus envie de gueuler alors, je m’affale sur le banc, la tête contre, je regarde les étoiles. Je déglutie, Gabriel se droguait certainement parce qu’il s’en voulait. Et là, la Blue d’avant revient. Je m’inquiète pour cet âne bâté. Mais je n’ai pas envie de le montrer, alors je reste le visage impassible, devant le ciel étoilé, en silence. les larmes commençaient à revenir, mon coeur battait durement, on aurait dit un genre de vieux truc mécanique qui galérait à fonctionnerDis je en fermant les yeux, serrant ma mâchoire. Bon sang ... je l'aime encore. Je donnerais n'importe quoi pour que tout ce qui s'est passé n'arrive pas. Je désespérais à l'idée de le perdre, je ne voulais pas qu'il s'éloigne de moi, je voulais le garder dans ma peau. Mais s'il s'éloigne de moi, qu'il vive sa vie, alors mourir sera un choix judicieux. Je regarde le ciel et là, j'ai compris« Ma mère s'est tuée parce qu'elle avait mon père dans la peau et qu'elle avait peur de plus jamais me revoir ... je crois que ... je ne suis que son pâle reflet »
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