- Déchiré est l'univers. + Quentin

Au bout du monde. En apesanteur. Résonne à ses oreilles, le bruit des grillons. C’est à la fois, apaisant et agaçant. Parfaite contradiction. Perchée à plusieurs mètres de hauteur, la silhouette de la brune ne ressemble plus qu’à un vague point sur le château d’eau. Mollement, ses jambes pendent dans le vide, tandis que ses mains enserrent le granit. Les paupières closes, elle inspire l’air frai. Oublie le monde. Loin de l’agitation de Boston, elle avait trouvé refuge à une vingtaine de minutes. A Arlington plus précisément. Ça lui avait pris par hasard. Alors, qu’elle s’était subitement rappelée de cet endroit durant ses révisions. Fugueuse. La voilà. Ici. Avec enfin, l’impression de vraiment respirer. D’emplir ses poumons d’oxygène pur. Sans la pression des examens. Sans la réalité de son retour. Tout ce qu’elle désirait, c’était une parenthèse. Un instant. Entre illusion et réalité. Et toujours ce risque. Qu’elle saisit. A n’importe occasion. Oubliant qu’ici, on n’était pas dans les caraïbes et que la nuit, on était rarement seule. Et c’est bien ça, elle ne l’entend pas l’ombre furtive. Peut-être, qu’elle aussi, avait tenté d’échapper à sa vie. De déchirer un pan de l’univers. De briser la temporalité. Juste un moment.

Dans la pesanteur nocturne, le bruit détonne. Donne l’illusion d’être une onde qui viendrait briser l’opacité du silence. Instinctivement, sa tête se tourne vers la source. Là, une ombre. La première chose qui l’assaille, c’est le coup de massue dans l’estomac. La peur. L’irrationnel. Elle aurait presque pu croire à un désincarné, si elle n’avait pas reconnu la sonnerie familière d’un portable. Finalement, c’est la peur de tomber sur un taré. Effrayée, car mise devant sa propre inconscience. Et comme à chaque fois qu’elle se retrouve devant un imprévu, elle se part d’un masque. Se force à reprendre le dessus sur la situation. Au pire, elle pourrait toujours compter sur son ingéniosité pour se sortir de là ou tout simplement sauter. « La politesse serait de se présenter. » La voix est posée. Sans trace de perturbation. Pourtant, son pulsant s’emballe. Tambourine sa poitrine comme s’il était sur le point de sauter. « Après tout, j’étais là, la première. »