Welcome to the twilight zone (Donovan)

T’es impatiente. T’as pensé qu’à ça toute la journée, comme un gosse la veille d’une sortie scolaire. Il est enfin temps que tu lâches tes livres, ne serait-ce que pour une soirée. Tu le mérites, bonne élève t’es pas vraiment en retard dans tes révisions alors tu peux bien t’accorder quelques heures. Mêmes si celles-ci ne seront pas de tout repos. Ouais l’urbex c’est pas l’activité la plus tranquille que tu connaisses et pourtant elle fait parti de celles qui te détendent le plus. Cette fois-ci t’es accompagné par Donovan. Rencontre sur meet, le feeling passe bien. T’as envie d’en apprendre plus sur loin et d’en montrer plus sur toi. Alors aujourd’hui tu lui fais découvrir une de tes passions. A bord de ta voiture, tu roules en direction du spot que t’as repéré, entourés par les sapins. « J’espère que t’as pas mis ta meilleure tenue, je suis pas sûre qu’on ressortira tout propre. » Par expérience, on ne ressort jamais sec ou immaculé d’une telle exploration. « Je crois qu’on approche… » Un coup d’œil sur ton téléphone qui te sert de GPS. Vous n’êtes plus très loin. Un grand sourire excité orne tes lèvres. « Ça va être trop cool ! Ok, est-ce que tu veux que je commence à te raconter un peu l’histoire du lieu ? » Il faut bien qu’il y ait une histoire, sinon c’est moins drôle.

J'ai aucune idée de ce qui m'attend pour le coup. L'urbex, j'en avais entendu parler via les réseaux sociaux, via certains clubs présents dans l'université. Mais jamais je m'étais dit que je braverai les interdits pour visiter certains lieux. De toute évidence, tu étais plutôt une habituée de ton côté et je te faisais confiance quand à la marche à suivre pour que la soirée se passe bien. « merde... j'ai mis mes baskets préférées... » Heureusement que je m'étais renseigné et que, non, j'avais pas mis mes baskets préférés. Je pouvais décidément pas compter sur toi pour me donner ce genre d'informations AVANT qu'on soit dans la voiture pour faire ton activité préférée. Main gauche sur le bras droit, récemment libéré de sa cage en plâtre, c'était encore bizarre comme sensation. Manche bien tirée, je m'amusais même à la tirer d'avantage, n'aimant pas ce qui se trouvait en dessous. « on dirait presque qu'une musique angoissante pourrait avoir sa place là... » Et j'étais prêt à en chercher une sur spotify, mais je me retenais, préférant t'écouter raconter l'histoire du lieu. « je suis toute ouïe ! »

Un rapide coup d’œil dans sa direction et tu ris doucement. « T’as pas l’air très embêté pour un mec qui va détruire sa paire préférée. » Ouais pas sûre que vous ne tombiez pas sur une grosse flaque d’un liquide non identifié ou qu’il vous pleuve tout simplement dessus, même si la météo s’annonçait clémente pour aujourd’hui. « Carrément ! En plus ça irait bien avec ce que je vais raconter. » C’est l’heure de l’histoire qui fait peur. « Ce soir on va explorer une maison qui parait tout à fait normale et qui pourtant cache un lourd passé. Dans les années 70 deux sœurs y ont emménagés et ont décidé de transformer leurs domiciles en maison d’hôte pour les touristes. Il y avait toute sortes de clients, des familles, des amis, des personnes seules, mais leurs préférés c’était les couples. Elles les chouchoutaient, rendaient leur séjour magique jusqu’au moment du départ. Ils ne repartaient jamais. En fait elles étaient jalouses, jalouses de l’amour que partageait ces couples, tout cet amour que personne n’avait voulu leur offrir. Si elles n’en avaient pas droit alors eux non plus. Alors elles se sont mises à assassiner tous les amoureux qui passaient leur porte. Oh tiens je crois qu’on est arrivé ! » Un virage sur la droite et tu t’engages dans une petite allée sombre avant d’arrêter la voiture. Le regard toujours aussi pétillant tu te tournes vers Donovan. « T’es prêt à y aller ? J’espère que je t’ai pas trop fait flipper. » Ouais c’est sûr que tu l’as mis dans les meilleurs conditions pour explorer une maison en pleine nuit. T’attrapes ton sac à dos sur la banquette arrière. Dedans se trouve absolument tout ce dont vous avez besoin pour ne pas mourir bêtement.

« j'suis un peu -trop- zen comme mec, faut croire » que j'dis en rigolant, tout en te regardant. Ouais, c'était bien le but de la manœuvre, faire croire que j'étais zen, sans prise de tête. Je pouvais l'être en plus, pour de vrai, c'est juste que c'était compliqué parfois de mettre son cerveau en pause. Je souriais de plus belle à tes mots, avant d'ajouter « je t'écoute ! » Et tu te mettais à raconter l'histoire de l'endroit qu'on allait visiter, pas forcément dans la légalité. C'était bien ça le principe de l'urbex, non ? Pénétrer dans des lieux abandonnés, désaffectés, pour la plupart privés, pour y découvrir l'histoire des lieux et ressentir la vibe qui s'en échappait. Et là, la vibe c'était plutôt des frissons de peur. Et je me mettais à rire de la façon dont tu clôturais l'histoire. La voiture tourne et on s'embarque dans une allée sombre et l'endroit était loin d'être rassurant. Mais on était deux et j'étais pas trop peureux. « noooon, ça va. mais tu me sauves si on doit échapper à une des soeurs... ou pire, aux deux ! » Bon, ça voudrait dire qu'on est amoureux et c'est pas le cas, heureusement. Mais les fantômes peuvent ne pas voir la distinction, j'en sais trop rien. J'ouvre la porte de la voiture, mon sac dans les mains avant de le mettre sur le dos une fois sorti du véhicule. « j'suis paré ! » Et je claque la porte en attendant que tu me montres le chemin.

Plongée dans la pénombre de la route sombre longée par de grands arbres tu racontes l’histoire du lieu. Une légende qu’on t’a raconté quand t’étais au lycée. Si au début elle te terrifiait t’as fini par te faire à l’idée que c’était faux, même si t’en est pas sûre à cent pour cent. Tu poursuis ton récit en jetant quelques coups d’œil vers Donovan pour vérifier qu’il suit toujours, et puis vous finissez par arriver sur place. Sac sur le dos, lampe torche dans la main, t’es prête à aller explorer cette maison hantée. Sa remarque te fait rire. « Promis je te laisserai pas tomber. J’essaierai. » Tu ris encore avant de prendre la direction de l’allée qui menait à la maison. On la voyait au loin. Mais ce qu’on voyait surtout c’était le portail qui vous barrait la route. Tu tentes de l’ouvrir sans grands espoirs, il est bien fermé. « Merde… »La lampe se balade autour des hautes planches de bois, pas d’autres accès. Tu te tournes vers le brun en souriant, l’air un peu embêté. « On va devoir escalader, je vais t’aider à monter. » T’oublies pas la fragilité de son bras. Vous êtes là pour vous amusez avant tout, pas pour qu’il fasse un nouveau séjour à l’hôpital. « Aller viens je te fais la courte échelle ! J’espère que t’as pas trop mangé aujourd’hui. » Normalement t’as assez de force pour le porter… normalement.

Franchement, ce genre de moment c'était cool. Ça aurait pu l'être si j'avais pas le bras et la main totalement destroy. Mais bon, j'allais faire en sorte de passer un bon moment à tes côtés et ça serait très bien comme ça. Sourire qui naissait à tes mots. « merci à toi, ô gente dame » Ouais, tu allais essayer... en gros, j'aurais pas le choix que de m'en sortir tout seul. Je riais alors en même temps que toi, et ça faisait du bien de pas se prendre la tête. C'était cool et pile ce qu'il me fallait. Garés devant l'habitation, il était temps de passer aux choses sérieuses. Le portail était alors fermé et il semblerait qu'on doive l'escalader. Ok, ça commence bien. Ton plan semblait être parfait... avant que tu ne me taquines sur mon poids, ce qui me faisait rire. « je suis aussi léger qu'une plume ! » admettais-je, me mettant sur la pointe des pieds. « promis j'essaye de pas faire le lourdeau » Je me mettais en place devant le portail et puis dès que t'étais prête, je me tenais aussi prêt à escalader, faisant travailler mon bras gauche plus qu'il ne faudrait, afin d'épargner le droit.

Non pas sûre que tu l’attendes très longtemps si vous êtes poursuivis par un fantôme ou une quelconque autre créatures. Chacun pour soit, Dieu pour tous comme disait ta mère. Un dicton qu’elle appliquait peut-être un peu trop… Bref. C’est néanmoins l’air amusé et pas bien effrayé que vous vous retrouvez face au portail. La solution pour le franchir te parait évidente. La fameuse courte échelle, c’est parti ! A côté des hautes planches en bois tu crées une marche avec tes mains, sur laquelle il finit par poser le pied pour s’appuyer. Et tu contractes tes muscles pour ne pas lâcher. « Eeehhh t’as menti ! » Tu râles et tu ris en même temps en le poussant un peu plus vers le haut. Tu sais pas trop si ça l’aide vraiment, t’es pas le genre à pousser à la salle tous les jours. Une fois de l’autre côté, t’escalades à ton tour le portail en prenant un peu d’élan avant de te laisser retomber sur le sol de la propriété privée. « Bon, t’es très mignon mais t’es pas très léger. J’espère qu’on aura plus rien à escalader. » Tu ris avant de rallumer ta lampe torche. Ouais t’en profites pour draguer, il est pas moche et plutôt cool alors pourquoi pas !

C'était marrant quand même cette histoire d'urbex, de légendes urbaines cachées dans des lieux abandonnés. Je me demande comment ça a pu devenir une passion partagée par autant de gens dans le monde, J'veux dire, c'est devenu tellement démocratisé, il y a des clubs et tout, alors que ça reste une activité illégale. Sans pour autant que les flics soient en chasse perpétuelle contre les pratiquants de cette activité. Mais c'était quand même étrange. Mais je me posais pas plus de questions quand tu me faisais la courte échelle, faisant bien attention de pas trop solliciter mon bras droit, encore un peu trop fragile des blessures qui lui ont été infligés. « je mens jamais ! » que je disais en feignant la surprise. Mon poids quittait tes appuis pour passer de l'autre côté, tandis que tu faisais à ton tour l'escalade pour me rejoindre. « c'est que du muscle... j'y peux rien » Je haussais les épaules, l'innocence émanant de mon visage. J'allumais ma lampe torche et puis je te suivais dans les fins fonds de cette habitation macabre. « et je savais que tu kiffais mon sourire » que j'disais en prenant un peu d'avance, prêt à rentrer dans ce petit jeu de séduction.

Tu l’aides à escalader le portail non sans effort avant de le rejoindre de l’autre côté. Premier obstacle franchis, sûrement pas le dernier vu l’état de la maison. On peut apercevoir la façade éclairée par la Lune, des vitres brisées, une porte au bois craqué, ça promet sur ce qu’il se trouve à l’intérieur, mais c’est certainement pas ça qui va t’effrayer. Bien au contraire. T’avances vers la demeure, lampe de poche en main. « Comment ne pas l’aimer ? Il est tellement éclatant que j’ai presque pas besoin de ma lampe pour y avoir clair. » Regard charmeur dans sa direction, t’apprécie le jeu de séduction. Une fois devant la porte, tu la pousses en restant à distance de l’entrée, examinant de loin l’intérieur. Des gros carreaux de carrelages au sol, un papier peint déchiré sur les murs. Un urbex comme un autre finalement. Pourtant tu lèves des yeux pétillants vers Donovan. « Je te laisse passer le premier. » Tu sais qu’il ne lui arrivera rien, même si on est jamais à l’abri d’un malade qui a décidé d’élire domicile ici.

Ce moment, c'était comme se retrouver sur un nuage de légèreté. Du flirt, des regards, des sourires. Voilà comment j'aimais que les choses se passent : dans la simplicité. C'était beaucoup plus sain que d'autres situations oui. Mon cœur pourtant épris, ne pouvait se résoudre à l'oublier. Mais ce soir, c'était toi qui était le centre de mon attention. Cette session d'urbex était parfaite comme ça et je n'avais pas envie de changer quoi que ce soit. Sauf peut-être l'état de ma main et de mon bras. Ouais, j'avoue que ça, je m'en serai bien passé. Sourire en coin à tes mots, je m'en retrouvais presque tout retourné. « tu parles de ton sourire là... » Celui qui était en train de me faire oublier tout ce qui était autour de nous, y compris l'histoire macabre de ces murs dans lesquels nous allions la tête la première. La porte d'entrée atteinte, j'te regardais la pousser, et elle s'ouvrait dans un grincement qui faisait limite froid dans le dos. La tension était palpable, mais c'était super excitant en même temps. Le regard qui cherchait à savoir ce qui se passait à l'intérieur, et voilà que tu m'invitais à y aller le premier. « ah oui, je vois, ça m'envoie au charbon comme ça, direct... » Sourire taquin avant d'emboiter le pas le premier et de pénétrer dans les lieux. « c'est pas mieux de faire ça de jour, histoire de bien voir tous les détails... sordides? » que je demandais, par curiosité, la lampe examinant alors chaque recoin du mur à ma droite.