(kovaloyner) papier, ciseaux

La journée avait été intense au conservatoire ce jour-là et même si nous étions samedi, je m'étais pointée avant même le lever du soleil pour m'entraîner sans relâche. Mais le jeu en valait la chandelle. C'est le corps mis à mal que j'étais pourtant rentrée sans traîner, étant donné que j'avais un invité ce soir. Même si je n'avais pas pour habitude de recevoir mes... amants ? chez moi, j'avais clairement cédé face à DJ. L'envie de passer la soirée avec lui étant bien trop présente, surtout après ce qui lui était arrivé au TD Garden. J'étais soulagée de le savoir sorti d'affaire.
Vu qu'il m'avait tendu la perche de lui faire à manger, je m'étais prise au jeu, et j'étais en train de finir de préparer mes ramens maison quand l'interphone sonna. J'allais jusque là, la bouche esquissant un sourire en le voyant à l'écran occupé à zieuter tout autour de lui. « Irasshaimase ! » lançai-je, de bonne humeur, tout en appuyant sur le bouton pour lui ouvrir.

Les choses allaient en dents de scie en ce moment et j'avais besoin de m'échapper, comme une dose de liberté. Et c'était à tes côtés que j'allais le retrouver, pour sûr. Difficile de faire mieux que juste s'amuser et se retrouver dans un lit, sans aucune prise de tête. Forçant un peu le truc, je t'avais même demandé de me faire à manger, histoire de pouvoir cocher le fait d'avoir passé une journée entière servi par les autres. Faut dire aussi que mon bras aidait pas mal pour cette démarche. Entre le repas de Simeon le midi, le tiramisu de Sage et ce soir, ce que tu me préparais, j'étais aux anges. C'est même plutôt guilleret que je débarquais chez toi ce soir, avec la ferme intention de passer du bon temps. Oublier mes tracas, c'était le but. Alors je sonnais à l'interphone, et j'avais droit à une réponse... incompréhensible. « ... hein ?? » Mais le porte s'ouvrait et je finissais par accéder au bon étage et à la bonne entrée d'appartement, où tu avais déjà ouvert la porte pour m'accueillir. « c'était quoi... le mot chelou ? » Non mais parce que peut-être que les grésillements ont tout faire foirer, que sais-je.

Je filais ouvrir la porte pour qu'il trouve rapidement, avant d'aller éteindre le feu pour éviter de cramer le repas. Une poignée de secondes plus tard DJ passait la porte d'entrée, n'ayant apparemment pas compris mon japonais. « Irasshaimase. J'aurais aussi pu dire dobro pozhalovat'... ou bienvenue » dis-je en m'adossant au plan de travail. « Mais ça s'y prêtait bien vu ce que j'ai préparé » ajoutai-je. Mon regard se porta rapidement sur son bras, souvenir amer de son contact un peu trop rapproché avec la mort. « Comment va ton bras ? » demandai-je, soucieuse malgré mon impassibilité habituelle.

Une fois que je te retrouve, l'interrogation était bel et bien présente. J'avais rien compris à ce que t'avais pu me dire dans l'interphone et il était préférable de mettre ça au clair dès maintenant pour éviter de passer pour un inculte par la suite. « ah... c'était quelle langue du coup ? » Parce que j'étais pas très littéraire pour le coup, plutôt scientifique dans l'âme. Donc ce genre de subtilité, très peu pour moi. « et t'as préparé quoi..? » Non mais parce que j'étais quand même affamé. « en tout cas, ça sent bon ! » Pour sûr, j'allais passer un bon moment à tes côtés, et mon estomac aussi. La porte se fermait derrière moi et j'esquissais un sourire. « ça peut aller, ça fait mal, ça gratte mais c'est en bonne voie. j'dois juste tirer un trait sur le football américain » C'était un gros sacrifice mais j'espère que je pourrais au moins reprendre mes études.