I want an information |Juliet

Juliet est le genre de personne que tout le monde apprécie, non seulement car c’est Madame Bonne Humeur Constante (c’est un long nom n’est-ce pas ?) mais aussi et surtout car elle est toujours très disponible et prête à aider, que ce soit avec ses élèves, ses collègues ou tout simplement ses proches. Bien qu’elle sache tout à faire dire non quand c’est nécessaire, elle se fait malgré tout toujours un plaisir de répondre favorable à la demande des gens en particulier lorsqu’il s’agit d’aider dans un domaine qu’elle maitrise. Il n’est pas rare que les gens viennent lui poser des questions concernant la loi, la justice, ce genre de chose que les personnes enseignant le droit se doivent de savoir. Elle recevait ces petits curieux toujours avec un grand sourire et une attention toute particulière à leur demande. Elle aimait montrer aux autres qu’elle s’intéressait à eux et qu’elle ne les ignorait pas, même s’ils lui étaient totalement inconnus quelques minutes plus tôt. Aussi, alors qu’elle disposait d’un peu de temps entre deux cours, elle avait décidé de se retirer dans son bureau où des dossiers l’attendaient. Elle avait également besoin de passer quelques coups de téléphones par-ci par-là, rien de vraiment important en soit, mais des choses qu’elle devait tout même effectuer avec régularité si elle ne voulait pas se retrouver débordée. Elle était justement en train de prendre place à son bureau, déjà concentrée dans un dossier concernant une affaire de braquage à main armé qu’elle avait accepté d’étudier pour son père avec qui elle travaillait en parallèle des cours qu’elle donnait à Harvard. Après être sortie d’ici même avec son doctorat en poche, Juliet avait trouvé un emploi au sein de l’entreprise de son paternelle pour qui elle avait donc travaillé pendant deux ans à temps pleins avant de se voir proposer un poste de professeur. A son âge c’était une occasion en or, aussi elle n’avait donc pas pu refuser mais elle avait tout de même insisté auprès de son père pour continuer de travailler avec lui sur certaines affaires. Cambridge se trouvant proche de Boston, sa ville natale et endroit où est implanté le cabinet de son cher papa, elle n’avait aucun mal à s’y rendre lorsqu’elle le devait.

Attrapant sa tasse de café tout en gardant sa tête plongée dans les papiers, Juliet ne vit pas tout de suite qu’une jeune femme venait de passer sa tête à la porte de son bureau. Lorsqu’elle releva la tête, elle vit une jolie petite blonde qui semblait hésiter à rentrer. Automatiquement, elle se leva et lui fit un accueil chaleureux. «Bonjours. Je peux vous aider ?» Un large sourire sur les lèvres, elle écouta l’étudiante lui demander si elle était bien «Maitre Kennedy». Elle ne pu s’empêcher de laisser échapper un petit rire. «C’est bien moi, mais vous pouvez m’appeler Madame Kennedy ou Professeur Kennedy, ça sera peut-être plus simple non ?» Juliet avait toujours demandé à ses élèves de l’appeler comme bon leur semblait, certains même s’adressait à elle en l’appelant par son prénom, mais il s’agissait uniquement des élèves qu’elle avait depuis son arrivée à Harvard ou ceux à qui elle proposait occasionnellement de travailler avec elle sur de véritables affaires. Elle était plutôt cool comme prof mais elle tenait tout de même à instaurer une barrière, durant la classe c’était Madame ou Professeur Kennedy pour tout le monde sans exception, et hors classe disons que ça dépendait un peu de la personne. Quoi qu’il en soit, Juliet était pratiquement certaine de n’avoir jamais eu en classe la jeune fille qui se tenait devant elle. A moins qu’elle ne soit une première année, Kennedy avait encore un peu de mal avec eux, elle ne les connaissait pas tous. Justement, la jeune blondinette l’informa qu’elle souhaitait lui poser quelques questions sur un sujet «personnel» et ayant un rapport avec le droit. Elle voulait savoir si un entretient était possible dès à présent ou s’il fallait prendre rendez-vous. Intriguée par cette demande, Juliet lui souris et invita la jeune femme à s’installer sur le siège en face de son bureau. «Installez-vous, j’ai un peu de temps avant mes prochains cours.» La jeune professeur s’avança vers la porte et la referma afin de créer un peu plus d’intimité. Vu le ton qu’avait pris l’étudiante il s’agissait de quelque chose de sérieux et de très personnel apparemment. Il fallait donc que Juliet la mette un en confiance. Elle alla à son tour reprendre place derrière son bureau et fixa la jeune femme, prête à lui accorder toute son attention. «Dites moi, si vous commenciez par me dire votre nom et en quoi je peux vous être utile ?»

«C’est bon. Ce n’est pas grave. C’est un vieux réflexe que les gens ont avec moi mais je dois bien avouer que je n’aime pas trop que l’on m’appelle Maitre Kennedy, je ne sais pas vous mais je trouve que ça me vieillit non ?» Juliet rigola, elle voulait détendre l’atmosphère et rendre la jeune étudiante qui venait chercher conseille auprès d’elle, un peu moins crispée. Elle ne semblait pas du tout à l’aise et même un peu gênée. Son visage était grave et sa voix était celle d’une fille angoissée, ou en tout cas préoccupée par quelque chose. La jeune fille se présenta alors à Juliet. Elle s’appelait Liana Buckley et était étudiante en mode. C’était une branche bien éloignée du droit que Juliet enseignait. Ici, à Harvard, les étudiants ayant tous des horizons bien différents se côtoyaient régulièrement et quotidiennement même. Juliet avait toujours trouvé cela fantastique car une fois son diplôme en main c’était un sacré carnet d’adresse que l’on s’était constitué, enfin à condition d’avoir été vers les autres durant ses années d’études et de ne pas être juste resté caché dans sa chambre miteuse à étudier jusqu’à ne plus avoir de vie sociale. Après avoir quitté Harvard, Juliet comptait dans ses amis des personnes faisant à peu près toutes les professions possibles et inimaginables, certains travaillaient aux quatre coins de la planète, certains étaient devenus riches et même célèbres. Elle aimait donc repenser à ses anciens compagnons de promo, à ce que eux tous étaient devenus. Elle n’enviait personne car elle-même avait réussi à réaliser ses rêves, en tous cas au niveau carrière. Mais la vie personnellement c’est toujours plus compliqué non ? Elle n’avait pas complètement échouée sa vie de femme, elle avait deux magnifiques enfants dont une âgée d’à peine quelques mois et un petit garçon magnifique, déjà très malin et débordant d’énergie. La seule chose qu’elle avait raté c’était donc sa relation avec Ryan. Six ans d’amour parti en fumé aujourd’hui… Depuis quatre mois Juliet dormais seule dans son immense lit construit pour deux, enfin pas vraiment seule puisque Houston, son fidèle chien dormait maintenant à ses côtés. Heureusement la séparation s’était bien passée, ou au moins elle s’était passée sans plus de dégâts que nécessaires. Les premiers jours avaient été difficiles, accepté de voir les enfants aller dormir chez leur père et ne pas les voir pendants plusieurs jours n’était certainement pas mince affaire, ils lui manquaient sans cesse et le pire pour Juliet était de se retrouver dans sa grande maison vide. Mais avec les semaines elle s’y était habituée et arrivait maintenant à apprécier le repos que lui offrait une maison où aucun cri d’enfant ou de pleurs de bébé ne retentissaient. A petite dose, cela passait très bien. Ryan était un bon père et Juliet avait une confiance totale en lui quand à lui confier ses bambins. En dehors des liens qu’ils entretenaient désormais seulement pour le bien être des enfants, Juliet et son ex essayaient de se comporter en personnes civilisées et aimables mais la vérité était que la jeune femme souffrait encore de la rupture et qu’elle avait bien du mal à regarder le père de ses enfants dans les yeux et faire comme si ils étaient amis. Même si leur rupture avait allégé le quotidien de tout le monde, ça n’avait pas empêché de lui briser le cœur.

Alors lorsque l’étudiante lui annonça qu’elle était enceinte et qu’elle tenait à ce que son ex petit ami et père du bébé n’ait aucun droit sur le bébé, son cœur fit un bond. Selon Liana son copain l’avait trompé avec une autre et pour Juliet la jeune fille parlait certainement plus sous le coup de la colère que de la raison. Elle ne voulait cela dit pas lui laisser voir son avis et garda son sourire chaleureux et amical habituel. Elle réfléchissait à la manière de s’exprimer face à la situation qui lui était présentée. «Hum… D’accord, je vois… Vous êtes plutôt jeune non ? Quel âge avez-vous ? Vous semblez avoir déjà réfléchis à ce que vous allez faire, je suppose que vous comptez donc garder votre bébé sinon vous ne seriez pas là n’est-ce pas ? Vous savez avoir un bébé c’est quelque chose d’extrêmement sérieux, et je pense que vous êtes aussi consciente que pour un enfant il est très important qu’il ait une mère ET un père. Croyez-moi, je comprends ce que c’est lorsque vous êtes déçue par un homme mais êtes-vous vraiment sûre de vouloir priver ce garçon de son enfant ?» Juliet marqua une pause laissant le temps à Liana de réfléchir et d’assimiler ses paroles. «Si la réponse est oui, alors je pourrais tout à fait vous apporter mon aide, mais si la réponse est non, je crois que vous devriez prendre du temps pour réfléchir, là aussi je pourrais vous aider mais j’ai besoin que vous me donniez une réponse avec certitude à 100% que vous ne regretterez pas ensuite.» Juliet fixa donc la jeune femme, attendant de sa part une réponse sûre et définitive. Lorsqu’elle se retrouvait face à des jeunes gens dans ce type de situation, Juliet voulait à tout prix s’assurer qu’ils ne faisaient pas la plus grosse connerie de leur vie.

Le compliment de Liana sur son âge la fit sourire, Juliet ne releva pas le fait que selon la jeune étudiante elle ne faisait pas trop vieille, après tout elle ne l’était pas tant que cela, mais elle fut plutôt satisfaite de l’entendre dire par une aussi jolie fille de plusieurs années sa cadette. Mais malheureusement la conversation n’avait rien de léger, aussi Juliet essayait de converser un visage posé et détendu, elle ne pouvait s’empêcher de prendre les questions de la jeune femme très au sérieux. Il ne s’agissait en aucun cas d’une chose à prendre à la légère, elle voulait se montrer de bon conseil pour Liana. Elle avait aussi envie de la rassurer, et peut-être même de la résonner. Juliet faisait partie de ceux qui pensent que chaque enfant a besoin d’un père et d’une mère, sans distinction particulière. Les deux sont nécessaires au bon développement d’un enfant et vivre sans l’un ou l’autre peut entrainer une grande souffrance chez un enfant. Aucune mère ne peut vouloir cela pour son enfant, et Juliet était persuadée que si elle arrivait à bien présenter les choses, elle arriverait à convaincre Liana. Celle-ci lui donna une réponse assez étrange, mais d’un autre côté Juliet n’était pas surprise. Elle correspondait tout à fait ce qu’une fille de cet âge pouvait dire. Mais comme à son habitude elle ne voulait pas la juger trop rapidement, d’ailleurs le vrai problème de cette fille n’est probablement pas son âge ou sa maturité, mais plutôt le fait que pour la première fois de sa vie elle doit prendre une décision qui affectera la vie d’une autre personne. C’est dur de devoir faire des choix qui pourraient changer du tout au tout la vie d’autres êtres. Juliet se montra donc compréhensive et même compatissante envers Liana. «D’accord, donc votre petit ami vous a trompé et maintenant vous… vous essayez de le punir? Ecoutez, je ne prétends absolument pas savoir ce que je ferais à votre place parce que, même si je suis mère de deux adorables enfants, je n’ai jamais eu à prendre de décisions seules et surtout pas à un si jeune âge, les concernant. Mais il faut vraiment que vous y réfléchissiez. Vous n’avez pas le droit de priver un père de son enfant, sauf si celui-ci est dangereux pour votre sécurité ou celle de votre bébé. Dans un tribunal, un cas de tromperie ne pourra pas vous aider à priver le père de son droit d’exercer son rôle. Au mieux vous pourrez obtenir la garde exclusive, mais à mon avis même cela serait encore viser trop haut.». Quelque part Juliet avait eu de la chance de rencontrer Ryan, parce que même si lui et elle n’avaient pas su continuer leur chemin ensemble, Ils avaient toujours mis un point d’honneur à protéger les enfants de leurs querelles d’adultes. Et puis elle ne peut pas dire que c’est un mauvais père, bien au contraire. Wyatt et Aimee sont fous de leur papa, jamais Juliet ne pourrait leur enlever ça, tout comme Ryan ne lui enlèverait jamais les enfants. Comme ils n’étaient pas mariés, la séparation a vite été réglée, ni l’un ni l’autre n’ont fait d’histoires, ils ont très vite trouvé les compromis qui leur convenaient à tous les deux et aujourd’hui leurs nouvelle vies dans deux maisons différentes se passent bien, en tous cas les enfants n’ont pas l’air trop perturbés, ni malheureux et pour Juliet c’est le principal.

Liana lui annonça ensuite avoir vingt ans, et vouloir garder son enfant, malgré une petite hésitation tout à fait compréhensible. Juliet s’interrogea alors sur le père de l’enfant. «Excusez moi de demander cela mais… Est-ce que le père du bébé est au courant pour votre grossesse ? Avez-vous essayé de lui parler ? Parce que si vous ne l’avez pas fait, il va falloir le faire avant d’envisager une quelconque procédure… Je comprends bien que ça ne doit pas être facile pour vous, mais quoi qu’il arrive ma porte vous sera toujours grande ouverte. N’hésitez surtout pas, d’accord ?». Juliet lui fit un sourire tout doux, comme celui qu’elle fait à ses enfants à chaque fois qu’ils la sollicitent. Elle voulait que la jeune femme comprenne bien tout, sans pour autant se montrer trop moralisatrice ou pire, défaitiste…