A peine rencontré que je me livrais à lui. Chose que je n’avais pas faite depuis longtemps. Mon mari étant mon confident. Il était celui à qui je me confiais, qui connaissais mes moindres secrets, mes faiblesses. Préférant rester la femme forte aux yeux de tous, je ne me livrais que très peu. Mais lorsque mon mari était là, j’avais une épaule sur laquelle pleurer. Quelqu’un à qui je pouvais faire des confidences sur l’oreiller. Ce qui n’était plus le cas depuis des mois maintenant. J’avais tout gardé pour moi. Ne voulant pas emmerder les autres avec mes histoires. Me pensant surtout assez forte pour tout garder en moi, pensant que j’irais mieux avec le temps. Pensant qu’il y avait pire dans le monde que ce que j’ai pu vivre. Si les autres s’en sortent, pourquoi pas moi ? Mais j’ai appris qu’on réagit tous d’une manière différente et que je n’étais peut-être pas aussi forte que ce que je ne le pensais. Je travaillais là-dessus. Evidemment, je ne savais pas si c’était une bonne approche que me confier aussi rapidement à un quasi-inconnu, mais je l’avais fait. Plus de retour en arrière possible. Et au pire des cas, on prendrait ce café et on ne se reverrait plus par la suite. Mais à ses paroles, je compris que je ne lui avais pas fais peur. Je souris, apaisée par ses mots. Je ne savais pas trop ce que je souhaitais avec ce café ; penser à autre chose, me changer les idées, ou me confier. Car c’est bien beau de parler à un psychiatre, c’est différent de se confier à une personne lambda. J’étais tout de même fière de moi d’avoir pu en parler. Et il est vrai que ça m’avait soulagé d’un poids. Au moins, l’homme savait à qui il avait affaire. Il savait qu’il avait une femme avec des fissures en elle. « C’est gentil Joshua. » Je le regardais tout en souriant, et je ne sais pas pourquoi ma main se posa sur sa main qui était présente sur la boite de vitesse. Juste le temps de quelques secondes, avant que je ne la retirer, car c’était un geste bien trop étrange que je venais de faire là. Légèrement gênée, je regardais face à nous, tant en lui jetant des petits regards alors qu’il se livrait à son tour. « Et bien dis donc, tu en as des choses à raconter aussi. » Je n’avais pas affaire à un petit militaire qui suivait des ordres. Il en avait des choses à dire, et des choses dans la tête. Surtout s’il passait un doctorat. J’étais impressionnée, oui. Je n’aurais pas imaginé cela en le voyant. Comme quoi, il ne faut vraiment pas juger au premier regard. Heureusement pour lui, je ne le faisais jamais. « C’est de famille l’armée ? » Demandais-je, me rappelant qu’il m’avait parlé de son frère, militaire aussi. Alors que nous arrivions sur place, je m’accrochais à la portière de la voiture suite à la manœuvre du jeune homme. Il savait ce qu’il faisait, mais j’avais encore cette boule au ventre sur la route. Bien que les accidents arrivés autour de moi s’étaient tous produits en moto, cela restait un traumatisme : la route. Mon cœur retrouva son rythme normal alors qu’il stoppa la voiture. Je le laissais m’aider, tel un gentleman. J’en souris, car encore une fois avant je ne l’aurais pas laissé faire. Prétextant pouvoir tout faire par moi-même. Mais assumer ses blessures et accepter l’aide des autres fait partie de la thérapie. Puis, ça fait toujours plaisir que l’on s’occupe de soi. Surtout lorsqu’il s’agit d’un bel homme comme lui. N’ayant discuté que par messages, avant de le voir sur ce parking, je ne savais pas à qui j’avais affaire. Et je n’avais pas cherché non plus. J’aurais pu pourtant le chercher sur les réseaux, mais ça ne m’avait pas traversé l’esprit. C’était donc une agréable surprise que de voir apparaitre un si charmant homme dans ma vie. Une fois dans le café, nous nous asseyons, face à face. Croisant mes bras sur la table, je regardais Joshua dans les yeux, petit sourire au coin des lèvres. « Parle-moi de ton doctorat. » Cela faisait longtemps que je n’avais pas eu de conversations profondes, intéressantes. Ce genre de conversation où tu dois te concentrer et réfléchir.