A roof for everyone, tonight ft. Rosie (13.11)

Ji-hun s’était entraîné au matin et avait enchaîné avec son travail à la Luna Caffe. Pour cette raison il ne put se rendre au service d’aides pour les sans-abris qu’aux alentours de dix-sept heures. Arrivé devant le bâtiment en briques rouges, il tira sur le fil de ses écouteurs et mit fin au morceau qui se jouait sur son téléphone. Il rangea le tout dans le sac à dos qu’il portait sur l’une de ses épaules, et entra à l’intérieur de l’établissement. Les quelques bénévoles du centre d’accueil étaient déjà en route, et un groupe sans domicile était d’ores et déjà installés dans le petit salon. À l’entrée, complètement perdu, il attendit que sa marraine d’accueil vienne à sa rencontre – il l’avait prévenue par message qu’il ne se trouvait pas bien loin. Elle arriva d'un pas décidé, accompagnée d’une jeune femme aux cheveux blonds qu’il ne connaissait pas, et cria gaîment que le renfort était arrivé. L’asiatique sourit, heureux de pouvoir rendre services aux diverses associations auxquelles la quadragénaire tenait ; il lui devait bien ça, après ce qu'elle avait fait pour lui.

Elle fit les présentations, et le nord-coréen tendit sa main en direction de Rosie : enchanté. Jay. Le dortoir qu'ils devaient aménager se trouvait au deuxième étage, ils durent prendre l’escalier pour y accéder. Ils arrivèrent à l’entrée d’une salle en bazar, où les lits étaient éparpillés d’un côté, et le linge propre entassé dans des cartons ; tout était à préparer afin d’accueillir un maximum de monde dès ce soir – le froid s’implantait à Boston. Elle fit part aux plus deux plus jeunes de la disposition qu'ils souhaitaient donner au lieu, avant de les laisser pour descendre s'affairer en cuisine. Une habituée, tu es, demanda-t-il à sa voisine ; pourra-t-il compter sur son expérience pour le guider ?

Les présentations se firent rapidement, puisque la plus âgée des bénévoles pressa le pas pour les mener jusqu’au deuxième étage, là où devait être aménagé un dortoir pour les sans-abris. À peine la porte passée qu’ils se trouvèrent tous les trois devant une salle vide. Seul un coin du grand espace était rempli de lits une place qu’il leur fallait disposer, et de cartons à déballer où le linge propre était soigneusement plié. Deirdre, la quadragénaire irlandaise, leur céda le plan qui avait été voté par les membres actifs de l’association, et leur souhaita bonne chance avant de tourner les talons et de disparaître dans l’escalier. Ji-hun posa ses yeux bridés sur la feuille de papier avant de demander si Rosie était une habituée des lieux et du bénévolat. J’ai aidé déjà, une fois ou deux, mais pas ici , avoua-t-il à son tour. Cela dit, ça ne semblait pas être compliqué. Le plus dur était de transporter les meubles d’un point à l’autre, et il espérait pouvoir compter sur les bras de la jeune femme.

Le froid hivernal arrivait à grand-pas sur Boston, il ne fallait donc pas trainer. À porter avec moi, ça va aller, l’interrogea-t-il en s’avançant vers la première literie à la structure métallique. Ça avait l’air bien moins lourd qu’en bois. Si une pause tu as besoin, à me dire n’hésite pas, affirma-t-il qu’il irait à son rythme, parce qu’ils n’étaient pas là pour se fêler une côte, ou se coincer un muscle. Qui vais reculer, ce sera moi, suggéra-t-il. Non pas qu’il ne faisait pas confiance à la force physique et mentale de sa vis-à-vis, mais son côté « gentleman » ne pouvait s’empêcher de ressortir – faute au patriarcat dans lequel il avait grandi ; un homme devait agir comme un homme. Il posa le plan à terre et agrippa le lit à sa base la plus solide. Tu tiens, c’est bon, s’assura-t-il avant de reprendre : à trois, on lève. Un… deux… et… Trois.