TW : trouble HSD - multiples agressions physiques évoquées - propos injurieux - évocation du souhait de donner la mort dans le passéLa boxe, il a commencé à la pratiquer très jeune. Ezekiel avait ce besoin irrationnel de frapper dans quelque chose et plutôt que ce soit dans les murs, c’est un sac de frappe qui lui a été offert lors de l’un de ses anniversaires. C’était une excellente idée en soi, puisqu’il y assénait des coups, encore et encore, dès lors qu’il en avait besoin, mais ses parents commençaient à se demander les raisons de sa rage. Seulement, il ne parlait pas. Ne le pouvait pas, tout bonnement. Alors, plus les années défilaient et plus, il cognait dedans, de jour comme de nuit. Il faut dire que taire les raisons d’un tel état est la plupart du temps désastreux, car lorsqu’enfin, il l’a laissé s’extirper, sa dite colère, cela a failli couter la vie d’un parfait salaud, certes, mais il aurait eu de terribles ennuis s’il avait été au bout de sa prise autour de la gorge de cet homme.
L’escrime s’est imposé à lui lorsqu’il est allé étudier à Oxford et cela lui a permis d’en apprendre davantage sur le fait de savoir esquiver. Puis il a toujours trouvé ce sport d’une beauté inqualifiable, en rapport avec les autres. Sans doute à cause de la maîtrise qu’il faut avoir, ainsi que la retenue de temps à autre avant de donner le coup qui lui permettait d’avoir son point. Il y avait aussi les tenues ainsi que la posture. C’était à l’image d’une symphonie à ses yeux et c’est toujours le cas, aujourd’hui.
- « Newbury Street ? » Il reprend, songeur, quand il se dit qu’il devrait le noter afin de le retenir, seulement, il n’en fait rien. Et cela, pour une raison bien particulière : sa pathologie. À l’heure actuelle, il a déjà bien eu du mal à ôter ses gants, alors prendre un stylo et écrire est tout bonnement impossible à imaginer. Puisqu’il ne pourrait le tenir et encore moins cacher la douleur qui se lirait sans mal sur son visage.
« Je devrais pouvoir le retenir. » Il murmure davantage pour lui-même que pour Elvira, lorsque aux propos qu’elle ajoute, l’espoir de trouver un tel lieu se dissipe.
« J’irai me renseigner, merci. » Pour l’information, bien qu’il ne soit pas l’un de ceux qui gardent espoir en quoi que ce soit. Puisque ce dernier est vain, synonyme de malheur et n’apporte que tristesse.
En tout cas, s’il y a une chose que le professeur est capable de faire : c’est écouté. Malgré ce que l’on peut s’imaginer en le voyant, il a bien plus de cœur qu’il ne souhaite qu’on puisse savoir. Car montrer ses faiblesses lui a toujours été prohibé et qu’il a grandi ainsi, en apprenant cette règle parmi tant d’autres.
- « Si vous saviez. » Il répond un sourire s’inscrivant sur son visage carré, à cause de ses mots qui sonnent on ne peut plus justes. Il pourrait écrire un roman sur son existence, même plusieurs ! Seulement, il ne le fera évidemment jamais.
« Nous verrons en ce qui concerne l’un de mes déboires. » Il ajoute pour se remémorer plusieurs d’entre eux avant de reprendre et ainsi de l’encourager à parler ; à enfin vider son sac.
« C’est étrange qu’ils aient pu penser qu’il était un dealer. » Ce sont les premiers mots qui s’extirpent d’entre ses lèvres pleines, alors que ses sourcils se sont froncés et qu’il médite à ce propos.
« Heureusement que d’autres personnes sont intervenues, afin de vous venir en aide. » Lui-même l’aurait fait sans se poser la moindre question, puisqu’il est du genre bagarreur lorsqu’il se rend dans les bars, notamment lorsque l’on s’en prend à une personne qui n’a strictement rien demander.
« Cela explique donc la trace sur votre joue. » Ezekiel pourrait se mettre en rogne, fulminer contre ces jeunes, mais il est bien trop épuisé ainsi qu’affaibli. Alors, il se contente de répondre ce qu’il pense, sans réagir, bien que ses poings se serrent quelque peu.
« Comment se porte votre ami ? » Il conclut son regard retrouvant le sien, quant à la fin de sa phrase, il acquiesce laconiquement.
« Je ne connais que trop bien cette sensation. » Il lui vient soudainement à l’esprit qu’il doit rendre le change et il soupire, regarde une nouvelle fois autour d’eux, avant de conter sa propre histoire.
« J’étais si en colère lorsque j’étais jeune que mes… » Il déglutit.
« … parents ont cru qu’un sac de frappe m’aiderait à me défouler. Ce fut le cas, au début. Mais j’étais toujours aussi en rogne. Plus les années défilaient et plus, elle montait crescendo. Car je craignais de parler, de dire enfin ce qui n’allait pas. » Il baisse le regard, ce dernier empli de scintillement dus à des larmes.
« L’homme qu’il avait engagé afin que j’apprenne les bonnes manières, les codes, me violentait. Il m’anéantissait aussi, psychologiquement parlant. Selon lui, mes fameux parents le lui avaient demandé. Bien évidemment, je l’ai cru. » Puisqu’il avait été adopté et n’avait confiance en personne, seulement, il tait cette partie de son histoire.
« Il est par conséquent resté et à continuer de m’humilier pour me donner des coups de plus en plus forts. Cela variait entre gifles, coups de poings dans le ventre et bien d’autres choses. J’ai encaissé durant si longtemps qu’un jour, je n’ai pas pu me contenir et il a été mon sac de frappe. À la fin, son visage était en sang, mais surtout, mes mains étaient autour de son cou. Je ne souhaitais qu’une chose : qu’il meurt. Par moi. À cause de tout ce qu’il m’avait fait subir, toute cette rage que j’avais accumulée en moi. » Il est loin d’en être fier et n’en avait jamais parlé à personne avant cet instant.
« Fort heureusement pour moi, mère est apparue et est intervenue. Elle m’a supplié de le laisser et des larmes de colère ont roulé sur mes joues. Je leur ai dit que je savais qu’ils lui avaient donné l’autorisation de me battre, mais la réalité était toute autre. » Sur ces derniers mots, il n’ajoute rien de plus et se contente de fixer le sol, sa révélation l’ayant remué plus qu’il ne l’aurait envisagé.