between the lines (wade)

Si les derniers jours ne l’avaient pas vus dans une forme mirobolante et qu’il avait bien eu du mal à tenir jusqu’à la fin du spectacle, n’aspirant qu’à retrouver les bras de Morphée après avoir passé le week-end à écumer les boîtes gay au point d’avoir du mal à s’asseoir, il se sentait repris d’une certaine vigueur après cet échange SMS désastreux avec son ex petit-ami et actuel sexfriend. Ou ex-sexfriend, il ne savait plus comment les situer s’il avait jamais su comment les situer. Vêtu d’un simple boxer et ayant tout de même pris la peine de mettre un débardeur, il allait et venait dans son petit appartement, passant de la cuisine à la chambre et de la salle de bain au salon, rendant sans le moindre doute folle sa voisine du dessous. Mais c’était un juste retour des choses au regard des longues conversations téléphoniques que cette dernière passait avec sa mère sur le balcon. Ses yeux ne quittaient pas le screen que lui avait envoyé Wade et qu’il ne comprenait pas. Il s’était certes ennivré plus que de raison les jours précédents mais c’était après que le jeune homme l’ait rejeté sans raison apparente. Il ne pouvait donc pas lui avoir envoyé cette déclaration sous l’emprise de l’alcool. La fatigue et les précédentes gueules de bois ne lui permettaient pas de réfléchir posément et d’essayer de remonter le fil des jours qui auraient pu aboutir à l’envoi d’un tel message. Il avait tout fait pour passer à autre chose, pour oublier le seul qu’il ait aimé en passant de bras en jambes. Il était même persuadé d’y être parvenu, quoi qu’en dise Skye et ses amis. Il était venu à Boston non pas pour se reconnecter avec celui auprès duquel il s’était vu finir sa vie mais bien pour raison professionnel. Bien sûr, à peine arrivé à Boston, il était allé lui rendre visite mais c’était juste une vitesse de courtoisie polie. Il en avait fait de même avec ses autres amis qui vivaient dans le coin. D’accord, ils avaient couché à nouveau ensemble à peine quelques jours plus tard et s’étaient entendu pour continuer tant qu’ils y trouvaient du plaisir mais il n’y pouvait rien si l’alchimie atteignait des niveaux inégalés entre eux. Les orgasmes partagés avec l’ancienne étoile montante du cinéma étaient de loin les meilleurs de son existence, pourquoi diable s’en priverait-il ? Et c’était, de toute manière, tout ce qu’ils avaient convenu. C’était du sexe et purement du sexe. Alors pourquoi ce message, qu’il jurait n’avoir pas écrit, résonnait en lui comme l’éclatante vérité. Et pourquoi espérait-il secrètement qu’il lui réponde un grand oui.

Le néerlandais grogna en tournant la clé dans la porte pour permettre à son ancien amant de pénétrer les lieux sans réveiller davantage les voisins. Il ne savait pas à quoi se tenir. Wade allait-il mettre un terme définitif à leur arrangement ? Ce n’était pas un drame : il avait une vingtaine de numéros dans son répertoire qu’il pourrait appeler en cas d’envie de luxure. C’en était uniquement s’il était le seul qu’il ait envie d’appeler. Et s’il voulait en terminer une bonne fois pour toute, pourquoi le contactait-il ivre, qui plus est un lundi soir alors qu’il avait les enfants ? Ne devait-il pas être avec ces derniers pour profiter de leurs vacances ? Son cœur se rongea de jalousie en l’imaginant se taper le premier type ou la première jolie fille venue qui passait dans son champs de vision au bar où il avait enchaîné les verres. Il n’en avait pas le droit évidemment, il n’était rien d’autre que des amis avec bénéfice et il avait juré dire adieu aux sentiments. Mais son cœur et son estomac refusaient visiblement de lui obéir. Les sourcils froncés, il se laissa tomber sur le canapé, continuant de fixer cet écran qui refusait de lui donner les réponses à ses questions. Que faisait-il ce soir là ? Lors de cet aveu ? Il travaillait et après ? Il était rentré sagement dormir chez lui. Enfin sagement …. Il avait longuement regardé la photographie de ce tatouage qu’il aimait tant. Il fit glisser son pouce sur l’appareil pour l’observer à nouveau, les battements de son cœur se calmant alors que ses doigts caressaient lentement l’objet métallique. Instinctivement, comme ce soir là, il glissa la paume de sa main sur son entrejambe, tentant de calmer mini Kitt mais déclenchant une vague de chaleur dans son entrejambe qui remonta dans toutes ses extrémités. Putain de Wade ! Il referma rageusement la photographie alors qu’il entendait la porte d’entrée s’ouvrir derrière lui. « T’as réussi à cuver en chemin ? » l’accueillit-il, clairement sur la défensive, les sentiments de ces derniers jours bouillonnant en lui et prêt à exploser. « Tu m’envoies paître, tu m’ignores pendant des jours avant de débouler à moitié ivre chez moi en m’accusant de j’sais pas quoi. C’était pas sensé être toi qui avait ta petite vie bien planifiée et bien calme et le type ingérable ? »

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12.08.2022 Kitt's flat.

Malgré les jours écoulés depuis que la déclaration de Kitt s’est affichée sur son téléphone, Wade est toujours aussi partagé. Il ne peut nier qu’une part de lui était heureux de voir que son ex-petit-ami, lui non plus, ne l’a pas oublié et que ses sentiments restent inchangés, ou qu’ils ont été ravivés. Mais cela le fait aussi royalement chier. Ce n’était pas le deal de départ et même si Wade avait conscience de jouer avec le feu, il espérait sincèrement que Kristofer tiendrait parole. Pas au point de maîtriser ses sentiments, c’est quelque chose que Wade sait incontrôlables, mais au moins au point de mettre un point d’arrêt à leur histoire au moment où ceux-ci devenaient trop compliqués à gérer, ou à les garder pour lui. Wade le fait depuis des semaines - des années, en réalité - et c’est ainsi que leur relation fonctionne. Evidemment qu’il sait bien qu’il ne devrait pas embrasser son cou avant de le laisser s’endormir à côté de lui, qu’ils ne devraient pas repousser le réveil qu’ils ont mis, sonnant l’heure maximum de départ de Kitt, d’un quart d’heure et qu’il n’aurait pas dû aller le voir plusieurs fois dans sa pièce. Mais aucun des deux n’était dupe quand ils se sont revus, ni quand ils ont couché ensemble et encore moins quand ils ont décidé de renouveler l’expérience régulièrement. Wade n’y croit pas une seule seconde et il connaît assez le néerlandais pour savoir que, malheureusement, celui-ci peut être assez de mauvaise foi pour le nier, jusqu’à la mort.
C’est la raison pour laquelle Wade n’a pas encore été mettre les points sur les i à ce sujet, mais l’alcool l’a aidé à finalement lancer la conversation. Quitte à ce que cela lui prenne autant d’énergie, autant qu’il se prenne directement la tête avec le principal intéressé. Voir Kristofer jouer les imbéciles et faire mine de ne pas comprendre pourquoi Wade ne lui parle plus, le rend tout simplement fou et il est hors de question qu’il s’en sorte ainsi. Wade n’est pas naïf, sait très bien que les messages peuvent s’effacer aisément désormais. Il ne sait pas pourquoi Kitt s’évertue à nier - et honnêtement, il ne s’y attendait pas - mais il n’a pas l’intention de le laisser s’en sortir de la sorte. Quitte à ce que cela mette le point final à leur histoire d’amour transformé en amitié améliorée.
Il décide de se rendre du bar à pied jusqu’à chez Kitt. Même s’il n’y a que vingt minutes de marche, cela le détendra légèrement un peu. Il achète au passage une bouteille d’eau qu’il descend avant de prévenir la migraine du lendemain. Une fois devant la porte de son ex-petit-ami, il hésite, prend une grande inspiration puis frappe rapidement avant d’entrer et de fermer en douceur la porte derrière lui. Wade s’apprête à lui demander ce que cela veut dire mais Kitt l’agresse directement. Se rend-il compte qu’il est le coupable dans l’histoire ? “A d’autres, Kristofer… Tu peux jouer les ingénus tant que tu veux, tu oublies combien d’années j’ai vécu à tes côtés et à quel point je sais que tu peux être menteur si ça t’arrange.” Il secoue la tête, puis repose son regard sur lui : “Que tu regrettes avoir envoyé ce message, ok, très bien. Mais assume-le, au moins !” Etrangement, Wade n’a pas envisagé une seule seconde qu’il puisse regretter le contenu du message et s’il est en train de faire des reproches à son amant, il sait aussi qu’il est à blâmer quand il a bien vu, cette première fois où ils se sont retrouvés, que Kitt n’avait pas tourné la page. Il aurait pu tout arrêter, mettre un stop et qu’ils en restent là, mais Wade n’en avait tout simplement pas eu envie. Il n’en a toujours pas envie, s’il est honnête mais maintenant que les choses ont été écrites… Wade peut très bien fermer les yeux sur certaines choses mais il n’est pas non plus un homme cruel. S’il est venu à dire ces choses, c’est sans doute qu’elles ont, au moins en partie, bouffer le jeune homme de l’intérieur. “J’ai été très clair sur le fait que je ne voulais pas une relation de couple avec toi, Kristofer et je n’ai pas changé d’avis.” Il se retient de préciser que ce n’est pas une histoire de sentiments, parce qu’il sait que Kitt chercherait à tout prix à s’infiltrer dans la brèche pour convaincre Wade de lui donner une chance. C’est justement pour qu’il en ait une, que Wade tient à ce qu’il garde sa liberté. “La situation est la même qu’il y a trois ans. Ce n’est simplement pas une option. Et je pensais que tu l’avais compris.”

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12.08.2022 Kitt's flat.

Il lui en veut. Il lui en veut tellement qu’il en a le souffle coupé et qu’il a bien du mal à respirer. Cela fait des jours que son ancien petit ami et ami avec bénéfice n’a pas daigné lui adresser la parole, le plongeant dans les méandres de l’anxiété. Il ne veut pas revivre ce qu’il a dû traverser la dernière fois. Il ignore si cette fois-ci il survivra à une telle déchirure, surtout après l’avoir retrouvé. Et c’est ainsi qu’il s’en veut à lui-même également. Il est retombé dans un piège qu’il savait être tendu là, juste devant lui, mais il se pensait trop intelligent et malin pour le contourner. Manifestement et comme toujours, il s’est une fois de plus lourdement trompé. Il n’est pas plus intelligent qu’un autre et Wade apparaît une fatalité maintenant plus encore qu’auparavant. Il ne peut lui échapper ni à lui, ni à ses sentiments. Si les mots que ce dernier lui prêtent ne sont clairement pas de lui, force est de constater qu’ils raisonnent en lui comme il est bien incapable de l’admettre. Oui, il l’aime encore. Oui, il pourrait passer des heures à caresser les tâches de rousseur qui s’égrènent le long de la nuque et sur les épaules de son amant. Oui, il n’a pas envie de le partager avec d’autres même s’ils ne se sont jamais posé pour parler d’une quelconque exclusivité. Oui, lorsqu’il est avec les enfants, il se plaît à se laisser emporter par une vie conjugale et domestique avec lui. Oui, il n’est jamais meilleur sur scène qu’en sachant qu’il est là quelque part dans la salle et que la déclaration d’amour faite à Jo est pour lui, uniquement pour lui. Mais il a toujours su au fond de lui que s’il exprimait ses sentiments, il pourrait le perdre à tout jamais. Alors, il avait préféré maintenir cette demi-relation entre eux, faite de non-dits et dont les sentiments s’exprimaient entre les lignes sans savoir où cela les mènerait. Il s’en voulait autant qu’il en voulait à Wade et alors qu’il posait son regard furieux et à demi-réveillé sur le jeune homme qui venait de rentrer, il s’en voulait d’avoir envie de se précipiter sur lui pour l’embrasser parce que bon sang ces quelques jours sans lui avaient été une agonie.

“T’ai-je jamais menti, Wade ?” Sa voix est froide et d’un calme glacial en comparaison avec l’accueil qu’il lui avait réservé quelques secondes auparavant. Tous les jours, un petit peu. Ce n’était pas de la faute de Kristofer : depuis sa plus tendre enfance, il avait appris à mentir et faire preuve de mauvaise foi avec une facilité et une aisance déconcertantes. C’était un peu comme respirer pour lui tant il s’agissait d’une seconde nature. Mais la différence avec Wade, c'est qu’il n’en avait jamais eu besoin. Il n’avait jamais été aussi sincère avec quelqu’un. Tout au plus avait-il tu ses sentiments pour ne pas lui faire peur ou le pousser à bout. Sa mâchoire se crispa alors qu’il se faisait crier dessus à son tour, encaissant les paroles blessantes comme s’il encaissait des coups sans broncher. Dire que quelques instants auparavant, il était confortablement installé dans son lit en laissant Morphée le séduire lentement et sûrement. Ses cheveux avaient encore la forme de l’oreiller et ses joues demeuraient légèrement roses de la bonne nuit de sommeil qui se préparait et semblait s’envoler en fumée. Et maintenant, il était l’objet de l’ire de son ancien petit ami sans qu’il n’en comprenne véritablement la raison. “Je n’ai pas écrit ces mots.” répondit-il toujours aussi calme, ne voulant pas rendre témoins ses voisins d’une dispute d’amoureux. Ou d’une dispute tout court en définitive. “Si tel était le cas, je te les aurais écrit bien plus tôt. Je n’ai pas à les regretter puisqu’ils ne viennent pas de moi.” grogna-t-il entre ses dents. “Crois moi ou non, j’en ai rien à foutre, Wade.”

Il accusa le coup lorsque l’allusion à ce qu’il s’était passé trois ans auparavant. Malgré lui, il eut un geste de recul comme s’il s’était pris une droite en pleine figure et il dut détourner le regard pour dissimuler la douleur qui traversa ses yeux et se contraint à avaler la boule qui s’était formée dans sa gorge. Bon sang, il savait que Wade était passé à autre chose et qu’il n’éprouvait plus rien pour lui si ce n’était une simple attraction physique et une alchimie sexuelle indéniable mais l’entendre remuer le couteau dans une plaie qui refusait de se fermer était plus que ce qu’il ne pouvait supporter. Reportant son attention sur lui, laissant son caractère sanguin prendre le dessus, il s’approcha de lui pour poser ses mains sur son torse et le repousser violemment. “Qu’est-ce que tu fous ici alors ? Pourquoi tu déboules au milieu de la nuit pour me balancer ce qu’on savait déjà ? J’étais là y a 3 ans, pas la peine de renouveler l’expérience. J’étais aux premières loges quand tu m’as largué comme une merde alors que j’aurai tout fait pour toi. Putain, j’avait même commencé des auditions sur Broadway pour me rapprocher.” Il hocha négativement la tête. “Mais non, c’est toujours toi, toi et ta famille. Le reste, les autres t’en a rien à foutre.” Il hocha négativement la tête, la rage prenant le dessus et le faisant élever la voix sans désormais le moindre égard pour les voisins. “Je t’ai pas envoyé ce message mais ouais, peut être que c’est vrai. Contrairement à toi, t’es le seul que j’ai jamais aimé et j’ai pas réussi à t’oublier. Je t’aime encore comme le dernier des idiots. Mais qu’est ce tu vas faire ? Me briser le cœur et m’arracher les organes avec ? C’est déjà fait. Me traiter comme une merde pour laquelle tu n’as pas d’égard ? Fais toi plaisir. C’est bon j’ai compris, tu ne m’aimes plus, si tu m’as jamais aimé. On arrête ce qu’on était en train de faire. Va baiser ou te faire baiser par un autre, je ferai de même de mon côté. Je serai plus ton sex toy.” A nouveau, il le repoussa, voyant désormais rouge et ne supportant plus de l’avoir face à lui une seconde de plus : “Dégage de chez moi, Wade.” Son cœur battait la chamade tant la fureur avait envahi ses veines. Il était parfaitement réveillé désormais et prêt à en découdre pour jouer au plus cruel des deux. “Je ne te supplierai pas. Je ne l'ai pas fait à l’époque. Je ne le ferai pas maintenant non plus. Dégage. Sors de ma vie pour de bon, connard.”

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12.08.2022 Kitt's flat.

Un rire sec s’échappe des lèvres de Wade quand Kristofer lui demande s’il lui a jamais menti. “A part les fois où tu allais te taper ton producteur quand on commençait à se fréquenter, tu veux dire ?” L’ancien acteur est passé à autre chose, et n’a plus aucune rancoeur vis-à-vis de ce début de relation un peu chaotique mais il refuse de se faire prendre pour le dindon de la farce. Kitt ne peut montrer patte blanche et se considérer comme l’innocent de l’histoire quand il est menteur et l’a toujours été. Wade n’a aucun mal à croire qu’il a pu être épargné de par la nature de leur relation dans le passé mais il a aussi parfaitement conscience qu’il y a un début à tout. Au-delà de ça, il a bien reçu ses messages sur son téléphone et le fait que Kitt n’ait pas envisagé une seconde que quelqu’un ait pu utiliser son téléphone en dit long. Il a menti et une part de lui a sans doute envie de se faire prendre dans son mensonge. Eh bien félicitations, c’est jackpot. “J’en sais rien, mais il suffit d’une fois, et je ne suis pas fou. J’ai bien ces messages sur mon téléphone.” D’un air absolument pas crédule, les lèvres retroussées en avant, Wade acquiesce d’un signe de tête quand son ex-petit-ami lui répète qu’il n’a pas écrit ses mots. Honnêtement, ils peuvent en discuter pendant des heures, Wade ne le croira pas à moins que le soit disant auteur de ses sms se dénonce, et vice versa. “T’as une réaction bien véhémente pour quelqu’un qui n’en a, je cite, rien à foutre, Kristofer. J’espère au moins que tu es honnête avec toi-même, parce que cela devient vraiment ridicule.” Ils sont ridicules, et la colère que Kitt reçoit ce soir, il ne faut pas croire qu’elle n’ait pas autant dirigé contre Wade, qu’il ne se reproche pas non plus cette situation.
Wade a tout à fait conscience de ses torts, et plus encore du fait qu’il savait très bien quand ils ont recommencé à coucher ensemble que cela se finirait comme ça, avec des cris et beaucoup de colère. Il est reconnaissant que cela ne se passe pas avec les enfants à proximité. Kitt aurait autant fait attention à être discret que Wade mais Nana aurait eu aussi pu descendre chercher un verre d’eau, ou simplement un câlin et tomber sur les deux en train de s’écharper. Prenant une grande inspiration, Wade s’efforce de rappeler les principes élémentaires de leur relation. Il n’est pas venu faire particulièrement la morale à Kitt mais il est clair que les deux ont besoin de mettre les choses à plat pour pouvoir avancer, et c’est la seule raison pour laquelle Wade est là aussi tard. Kitt semble ne pas être tout à fait d’accord avec cela en tout cas, et l’agresse en lui demandant ce qu’il fout ici. Si Wade peut comprendre sa colère, il ne peut s’empêcher de lever les yeux au ciel quand Kitt lui dit qu’il a été largué comme une merde. Wade secoue la tête, fatigué de ce narratif. Il sait pertinemment que c’est celui dont le néerlandais est convaincu, puisque c’est celui qu’il a raconté à chacun de leurs amis communs à Los Angeles mais il n’est clairement pas objectif. Wade ne l’est sans aucun doute pas plus mais il sait très bien avoir fait des efforts pour lui expliquer pourquoi il le quittait et pourquoi c’était le mieux pour les deux. Que Kitt ne soit pas d’accord et ait du mal à l’accepter à l’époque était une chose, qu’il en soit toujours incapable maintenant en est une autre. Le manager de la pâtisserie a d’ailleurs un mouvement de recule quand Kitt vient lui reprocher de faire passer sa famille avant les autres. Il ne relève pas le fait qu’il se fasse traiter d’égocentrique car la personne en face de lui est bien pire à ce niveau. “Raconte-toi les salades que tu veux, Kitt. Tu m’aurais DETESTE pire encore qu’aujourd’hui si je t’avais demandé de me suivre, et si tu n’es pas prêt à te l’avouer, moi je le sais. Regarde la rancoeur que tu as encore aujourd’hui. La seule chose qui te rend fou, c’est que le monde n’a pas tourné autour de toi, que le bien-être d’autres personnes que toi sont entré en ligne de compte et a primé. Je ne regretterai jamais de les avoir choisi, Kitt et si tu me considères comme un connard pour avoir choisi mes frères et soeurs, DES PUTAINS D’ENFANTS, je suis le roi des connards et fier de l’être. Il n’a jamais été question de me supplier de quoi que ce soit mais ne viens certainement pas me parler d’amour quand tout ce qui te gêne dans ton histoire, c’est que c’est ton égo est blessé. Pauvre petit Kristofer. Alors, crois-moi, je sors de ta vie et sans aucun regret, mais ce n’est pas moi qui me suis ramené sur ton lieu de travail, dans une ville dans laquelle je n’avais absolument rien à faire pour manger une pâtisserie parce que ne pas être le centre de l’univers est trop dur à supporter.” Et sans un mot de plus, Wade tourne les talons, prêt à partir. Cette discussion n’a plus aucun intérêt et il a désormais dit tout ce qu’il avait à dire.

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12.08.2022 Kitt's flat.

Il a tendu le bâton pour se faire battre et il ne peut s’en prendre qu’à lui-même lorsque son ancien petit ami lui renvoie dans la figure ses méthodes de travail au début de leur relation. Pour autant, il n’hésite pas à rouler des yeux vers le ciel, jouant sur la subtilité des mots. Ne pas révéler quelque chose dont on n’est pas forcément fier et qui pourrait faire perdre de la valeur aux yeux du seul être qui compte vraiment, est-ce mentir ? Oui, selon Wade. Non, selon Kitt. Même s’il souffle bruyamment, il préfère ne pas répondre, son sang étant déjà bien trop bouillonnant face à son ami, son amant. Il ne parvient pas réellement à définir ce qu’ils sont désormais. Pas l’un au vu du regard noir qu’ils se jettent. Bientôt pas l’autre pour les mêmes raisons. “Que veux-tu que je te dise ? Je ne vais pas te dire que j’ai fait quelque chose que je n'ai pas fait. Mais si tu veux croire que tu es tellement merveilleux que je suis transi d’amour, un petit chiot en manque d’attention et qui te regarde en espérant une caresse, crois-le si tu veux. Je sais ce que j’ai fait ou non.” Ils s’arqueboutent chacun sur leur position, bien trop fier l’un comme l’autre pour revenir en arrière ou pour trouver un terrain d’entente. Voilà ce que cela donne quand deux artistes tombent amoureux. Il n’y a pas assez de place pour deux egos aussi importants que peuvent l’être des personnes comme eux.

Il voit la catastrophe arriver à toute allure, comme s’il était lancé sur l’autoroute, les voitures filant à droite comme à gauche sans qu’il ne lève le pied de la pédale de l’accélérateur. Il sait qu’il va droit dans le mur, qu’il va faire et dire des choses avec lesquelles il se torturera jusqu’à la fin de ses jours, qu’il est en train de commettre une grossière erreur en lâchant prise et en révélant tout ce qu’il a sur le coeur. Mais il ne peut pas s’en empêcher, il en a un besoin viscéral. Toujours ce complexe de l’artiste torturé et masochiste sur les bords, incapable de donner et de ressentir sans souffrir. Il n’a jamais été plus doué que lorsqu’il était poussé dans ses retranchements. Cela fera un bon matériel pour le prochain casting. Sauf que pour ce soir, il ne joue pas. Il ressent chaque parole jetée à sa figure, chaque coup de poignard qui transperce son cœur à peine battant, chaque regard qui se ferme de seconde en seconde jusqu’à devenir ces obsidiennes semblables à des trous noirs qui envahissent tout sur leur passage. Il est en train de le perdre comme il est en train de se perdre. Rien de ce qu’il ne pourra dire ou faire ne changera l’issue fatale de leur relation. Il le laisse alors déverser toute la haine qu’il semble ressentir pour lui, ouvrant les yeux sur la manière dont il le voit, dont il l’a toujours vu manifestement.

“C’est bon ? T’as fini ? T’as craché suffisamment ta haine et ton mépris à ma gueule ? C’est pour ça que tu voulais débarquer en plein milieu de la nuit ? Franchement, ça pouvait attendre.” ricane-t-il d’un air mauvais et en le fusillant du regard. “Niveau ego, t’es pas mal dans ton genre non plus si tu crois que j’ai traversé tout le pays pour toi, que j’ai choisi ce job pour te reconquérir parce que manifestement je serai incapable de vivre sans le grand, le talentueux, le parfait Wade Bailey.” Et à cet instant précis, il regrette. Tout. D’avoir postuler et obtenu ce rôle qu’il aurait très bien pu retourner sur les planches ailleurs, Londres ou Broadway. D’avoir pénétré cette boutique en sachant pertinemment ce que cela ferait de le revoir en chair et en os depuis leur précédente rencontre. De l’avoir embrassé et s’être laissé embarqué dans le délicat fantasme des souvenirs. Il regrette même d’avoir croisé sa route à Los Angeles, d’avoir emménagé avec lui, de l’avoir aimé comme jamais il n’avait aimé qui que ce soit et surtout de continuer à sentir son cœur battre pour lui et uniquement lui. “C’est ça, retourne à ta vie de merde dans laquelle tu te complais parce que t’as eu peur, parce que tu as encore peur aujourd’hui. Tu pouvais tout avoir. Tu avais dans ta main le monde prêt à s’offrir. Mais t’es pas taillé pour ça et tu le seras jamais. Je regrette d’avoir perdu mon temps avec quelqu’un comme toi. Je mérite mieux.” crache-t-il pendant que celui qui lui brise le coeur une seconde fois, la fois de trop, tourne les talons.

“Sors de ma vie pour de bon.” Incapable de contenir sa colère, il ne peut s’empêcher de le saisir par le col et l’espace d’un instant, le temps qu’un ange passe, il hésite. Il pourrait l’embrasser et laisser ses sentiments se déverser dans un baiser passionnel, le plaquer contre le mur et le déshabiller pour lui faire l’amour une dernière fois comme ils savent si bien le faire, comme leur alchimie demeure. Il en a envie et ce malgré tout ce qu’ils viennent de lui balancer parce que Wade est le seul à lui faire ressentir tout ça. Il pourrait tout autant lui coller une droite et le tabasser pour laisser sa rage sortir hors de lui et s’exprimer de manière pleine et entière. Il en a tout autant besoin. A la place, il le pousse dehors et referme la porte sur lui. Dans la foulée, il porte un violent coup dans le mur, hurlant de douleur et de soulagement tandis que des larmes de tristesse et de rage coulent le long de ses joues. Un bout de plâtre tombe au sol et un chèque de caution s’envole.

TOPIC TERMINE.