RAINEY HOPWOOD ► jessica parker kennedy

part 1. roots before branches.

avril 1994. le berceau accueil pour la troisième année consécutive une nouvelle venue, la position d’la cadette te revient. les racines posées dans l’engrais aux mauvaises priorités, la mission de bien paraître pour constamment dorer l’image des hopwood te berne d’un faux sentiment de supériorité. “un manque d’attention, madame.” les mots du docteur envers ta mère qui cherche un diagnostique à ta mélancolie. l’âme trop éveillé pour ton âge, le besoin de créer un drame pour un rien avant même de fréquenter un établissement scolaire.

les animaux, l’effet thérapeutique de monter en selle sur thunder, le poney dont tu as chéri la présence jusqu’à ce que ton père considère que tes privilèges étaient expirés, non mérités. le parfum chocolaté d’la résidence de ta grand-mère, ton safe haven que tu peux admirer que de l’extérieur, le décès accidentel qui te frappe de plein fouet, la première décennie de ta vie se termine sur des blessures qui te façonnent fragilement, constamment à la recherche de l'amour des parents.

part 2. edge of seventeen.

février 2011. harvard; l’enfant problématique qui s’évade dans l’apprentissage et performe, les billets verts qui se troquent pour ta place. le navire en perdition la journée même où t’as ton premier permis en possession, le réveil à l'hôpital est brutal; les jambes ne bougent pas, la voiture est une perte totale, tout comme toi si tu te fis au pronostic. un miracle, le destin, t’as pas vraiment d’opinion ferme sur ce qui t’a permis d’intégrer harvard avec un déficit de trois ans sur la moyenne d’âge des étudiants. la cicatrice d’une dizaine de centimètres au niveau du rachis lombaire, t’as passé des années à t’entraîner sans relâche, la peur que ton corps retrouve ces maux handicapants. tu prends le taxi, le bus, rien d’autre. ta peau refuse de toucher à nouveau quelconque volant.

part 3. girls like girls like boys like… some simply like souls.

décembre 2017. le paternel qui se languit d’un héritier masculin, l’homophobie de l’adolescence qui explique sa cause, le voile pour ne pas déplaire et devenir le mouton noir d’la famille. la première goutte d’alcool qui essaie de te convaincre que t’es jalouse et qu’tu veux juste lui ressembler, qu’en aucun cas t’es fiévreuse de désir. le dos qui s’arrête brusquement contre le métal froid d’la porte, la musique du bar qui s’fait défier par ta respiration qui se lamente de vouloir plus. tes mains déjà addictent de ses courbes, un dernier soupir rauque et la sortie d’la salle de bain qui te ramène à la réalité. “calmes ta respiration si tu veux avoir l’air moins coupable.” les jambes qui peinent à t’garder debout, sa voix t’envoûte encore plus. son toucher t’fait sursauter quand elle prend ton téléphone pour y inscrire son numéro. un monologue énergique silencieux, la salive qui oublie d’se faire avaler au bon moment quand tu la vois s’éloigner et rejoindre ses amies. “my god, t’as vu bobby dans la salle de bain?” -le ouija, la connerie d’ta jeunesse, dans l’noir à jouer avec tes amis, bobby le nom qu’l’esprit énonçait avec la planche.- t’es de retour auprès d'ton groupe, justin qui a un point d'interrogation d'planté sur le visage,
t’es plus blanche qu’la neige. c’est la fatigue qui porte le blâme et tu retournes à ton appartement avec le but d’vidanger ta mémoire des dernières heures.

un sms qui devient le créateur d’une histoire d’amour qui aurait subi des critiques de ta part dans le passé, le début de l’acceptation et d’un besoin de partager avec tes proches. le rejet qui se fait ressentir la première minute, ton père se souvient plus de ses fausses bonnes manières; le cliché d’qui est l’homme se fait entendre avant les présentations. un souper que ta mère a proposé, la surprise elle, veut pas se faire digérer par les deux. tes soeurs tentent de normaliser la situation alors que ta fréquentation goûte à sa première déception. “s’attendaient à un gars, hein?” la tête acquiesce faiblement. “on s’reparle demain, okay?” la première dispute qui mène à une fin éphémère, la passion qui reprend vie une nouvelle fois en secret.

part 4. call me when you’re sober.

juin 2019. manifester sa réalité. la pratique qui te tient en vie pendant que le dernier effort pour t’hydrater remonte à plus de soixante-douze heures. elle va m’écrire. ça joue en boucle, t’es trop bornée pour accepter que le téléphone qui a laissé sa marque dans ta paume droite a vibré pour la dernière fois en recevant ses mots. les faux espoirs qui provoquent les abysses de l’âme, l’venin des regrets qui convoite le rôle du bourreau. les fêlures profondes que t’essaies de panser avec une version artificielle de dopamine que te procure l’ecstasy. le maquillage de la veille qui devient ton partner in crime, les retouches avant de mettre le pied au campus le matin qui suit la débauche. la guérison que tu stagnes à chaque fois que tu tombes sur sa messagerie vocale.

octobre 2019. le crachat qui atterrit juste au-dessus de tes lèvres, tu réalises que t’es une cause perdue. “tu le gardes pas. tu prends rendez-vous et… tu le gardes pas.” t’es bien plus dégoûtée par c’qui se trouve dans ton ventre depuis quelques semaines que par le liquide biologique que tu t’empresses d’essuyer. “n’importe qui rain’... j’en ai rien à foutre. mais pas mon frère.” des mois à partager un lit qu’avec des femmes pour finalement y ajouter un seul homme, le frère de celle qui est encore la source de ton insomnie. tu renonces rapidement au futur de devenir une mère, un autre élément déclencheur qui t’fait enfin atterrir en thérapie fermée; la lumière apprend à passer au travers des fissures au bout de soixante jours. la combustion de sauge blanche pour gérer les anxiogènes, le déni avant d’retourner danser avec le diable.

part 5. dog days are not over.

décembre 2020. les braises négligées puis éteintes, la pénombre dans ta tête se fait oublier. l’hystérie de ne plus voir la vie en monochrome, les rêves qui reprennent leur place, t’as compris qu’à force de craindre le pire, tu ferais jamais rien d’autre que d’chasser le bonheur comme un épouvantail. le café a failli reprendre l’goût d’eau d’moppe quand tes études ont effleuré l’échec, l’argent, la seule arme pour sécuriser ton futur.

la nouvelle année dans les bras d’un ténébreux, tu boudes le sourire de ton père. un moment de détente en compagnie d’la lune, t’entends la porte s’ouvrir pour y laisser apparaître ta soeur. “j’ai passé la soirée -des mois à chercher la bonne façon d’te le dire.” la pause qui t’fait penser aux pires scénarios. “ça sert à rien rain’, de faire semblant. papa… t’auras rien.” ta réaction sait pas se faire attendre, tu répètes irritée le mot “semblant”. “tu m’feras pas croire que la rareté d’son p’tit cul bombé compense pour son qi de 30. j’sais que t’aimes tout l’monde. mais papa te donnera rien, même si tu nous annonçais ce soir que t’es enceinte.” le calcul se fait rapidement, les dérapages incessants ont eu raison de sa confiance. tu verras pas un sous de l’estimé de quarante millions qui dort dans l’compte bancaire des parents. le pathétisme qui veut comprendre et la rancœur qui t'empêche d’y remettre les pieds depuis.