JAKE TENNYSON ► Ed Westwick

L’accent british, ça fait toujours rêver. C’est dingue mais dès que je me mets à parler, les filles ont cet air genre elles fondent. Avec le temps, j’ai compris que ça les faisait tellement craquer que je pouvais leur demander n’importe quoi, elles le faisaient. Certes, c’était pas tout le temps, je pouvais croiser quelques exceptions. Mais en majorité, elles étaient comme ça les filles. Quand j’étais en Angleterre, à Londres plus précisément, rien de tout ça n’était possible, à part quand on croisait les touristes. Du coup, je la jouais charmant et attentionné pour sortir avec une fille. Des fois je couchais juste comme ça, histoire de batifoler, mais des fois ça devenait sérieux. Je suis même tombé amoureux une fois dans ma vie. Mes parents n’étaient, pour pas changer, pas d’accord. Ils espèrent me voir avec une fille de la haute société pour garder un certain rang aux yeux de tous. Malheureusement, venir d’une famille comme la mienne n’a pas forcément que des avantages. Certes, l’argent était là, mais aussi les obligations et ça, c’était pas tout le temps cool. Ma première petite amie était pourtant une belle fille, intelligente. Le seul truc qui n’allait pas, c’était son statut social. Venant d’une famille moyenne de la banlieue de Londres, elle ne convenait pas aux critères qu’avaient les Tennyson pour leur fils. Certes, j’étais jeune mais ils aimaient voir sur le long terme au cas où cet amour pouvait persévérer pendant des années. Nous souhaiterions la voir, Jackson. Oui, ils aimaient m’appeler par mon prénom, ce que je détestais. Et si je ne veux pas ? Après tout, je savais qu’ils avaient le don de faire fuir les gens, et je ne voulais pas que ma copine les confronte pour ensuite s’enfuir en courant. Tu n’as pas le choix, mon fils. Nous avons déjà prévu un diner pour demain. Elle a accepté. Et merde. Je fronçais les sourcils en leur faisant face, montrant mon mécontentement. Ne la faites pas fuir, je l’aime. Au début, elle était restée à mes côtés. Tout allait même très bien entre elle et moi, jusqu’à ce qu’elle tombe enceinte. Et c’était le début des ennuis. Mes parents s’en sont mêlés et… et je n’ai plus entendu parlé d’elle, tout simplement. Ils m’ont dit qu’ils lui ont proposé un marché : de l’argent contre l’avortement et la fuite, ce qu’elle aurait accepté. Je ne la pensait vraiment pas comme ça… Ce qui m’avait assez blessé. J’étais également en froid avec mes parents, qui avaient main mise sur ma vie de cette façon.

Le truc, c’est que peu importe la force que je mets à les détester, ils restent présent dans ma vie, à mon plus grand regret. Quelques fois, je me surprends à imaginer ce que serait la vie si j’étais né dans une autre famille. Pas d’obligation, pas de parents influents… Je me dis que j’aurai préféré cette vie simple. Mais j’en suis à vivre cette vie-là et je n’avais pas le choix. Même le choix de ma fac n’était pas une option. C’était Harvard et rien d’autre. Bien entendu, traverser l’Atlantique me faisait plaisir, d’autant plus qu’ils restaient à Londres et me laisseraient enfin tranquille. J’avais donc postulé pour intégrer Harvard et, une fois la réponse reçue, je daignais malgré tout l’annoncer à mes parents. Harvard ce sera. Ma mère se mit à rire, comme si c’était une évidence. Bien sûr que c’était une évidence, ils ont mis leur grain de sel dedans. Evidemment. Et tu n’y vas pas seul. Je la regardais, intrigué. Je jetais même des coups d’œil à mon père qui ne bougeait pas d’un poil. Nous t’avons trouvé une fiancée, de ton âge, qui intégrera la faculté avec toi. Puisque tu n’es pas capable de te trouver une « petite amie » digne de notre nom, nous avons pris la liberté de le faire pour toi. Je secouais la tête. Mais.. Mon père me coupa. Il n’y a pas de « mais ». Tu iras à Harvard avec cette fille, fiancé. Tu en sortiras diplômé et tu te marieras. C’est comme ça, ne discute pas. La colère m’envahit et je sortais de la pièce comme une furie. Même quand je serai à l’autre bout de l’océan, ils trouveront un moyen de me pourrir la vie.

Ça fait bien six ans maintenant que je suis sur le campus de Harvard, à Cambridge. Je rentre que très peu à la maison, à Londres puisque la vue de mes parents m’hérisse. Et bien évidemment, je suis célibataire à présent. Enfin, ce n’est que très récemment que j’ai retrouvé ma liberté, bien que l’événement soit tragique. Lorsque j’étais à la cafétéria un jour de janvier, une bombe a explosé. J’ai été touché et… ma fiancée tuée. Elle est morte de ses blessures à l’hôpital. Je n’étais pas amoureux d’elle ou quoi, j’étais juste attaché à elle, comme à une amie. Le fait est qu’on se côtoyait depuis six ans donc c’était normal que ça me touche. Elle comme moi savions bien que ces fiançailles n’étaient qu’une façade. Nous avions eu cet accord comme quoi nous pouvions voir qui nous voulions quand nous voulions et ça marchait plutôt bien. Nos parents ne se doutaient de rien et nous menions une belle vie. Et maintenant… je sens que je vais de nouveau avoir mes parents sur le dos, malgré le deuil que je viens de traverser.