Tout le monde rêve du conte de fées, mais avouons-le cela n'existe pas. Je n'aime pas parler de ma vie mais c'est un passage obligé si l'on veut oublier le passé, paraît-il.
C'est sous un ciel nuageux de New York que je me décidais, enfin, à pointer le bout de mon nez. Le trois février 1989 pour être plus exacte. C'était malgré tout, une très belle journée. Mes parents ainsi que ma famille m'attendaient déjà depuis quelques jours, j'étais arrivée en retard, à croire que je ne voulais pas affronter la vie trop rapidement. J'avais eu raison. Lors de son accouchement, ma mère décéda suite à des complications. Suite à cela on me déposa brièvement dans les bras de mon père qui, attristé par cette perte, me déposa soigneusement dans un lit. C'était le début d'une grande distance entre lui et moi. Les premières semaines, suivant ma naissance, j'ai été confié à mes grands-parents.
Je me nomme Nymphéas Arwen Pencey. C'est ma mère Alice, une jeune femme pleine d'assurance, qui avait choisi mes deux prénoms. Ma mère était une femme passionnée de mythologie grecque ainsi que par l'art. C'est l'une des choses qu'elle m'a transmises. J'ai aussi hérité de son calme et son sang-froid. Mon père me l'a toujours décrite comme une femme exemplaire. « Elle était belle et avait de magnifiques yeux verts, comme les tiens » m'a-t-il toujours répétés. Cette absence m'a toujours pesé. J'avais le regret de ne l'avoir jamais connu et la conscience de l'avoir tué.
Mon père, Alcibiad, était un homme plutôt timide et solitaire, c'était sa curiosité qui le faisait parler. Au premier abord, il était plutôt froid et grincheux, il n'était pas facile de savoir ce qu'il pensait. J'avais l'impression de le décevoir constamment. Que je le veuille ou non, je lui ressemblais beaucoup, j'avais la même maladresse que lui mais j'étais tout de même plus courageuse. Le dialogue ne passait pas entre nous, depuis toujours, nous nous contentions de vivre sous le même toit. Il subvenait à nos besoins avec son boulot de mécanicien qui ne lui rapportait pas grand-chose. Plus le temps passait, plus j'étais seule. Je me suis réfugiée dans des passe-temps. La musique fait part entière de ma vie, je pourrais passer des heures à écouter du bon vieux rock. C'est mon père qui m'a offert ma première guitare, je ne l'ai jamais quitté depuis. Je me suis intéressée très vite à l'art, c'était ce qui me liait à ma mère. Je me suis exercée afin d'être meilleure de jour en jour. Depuis j'aime beaucoup faire de la peinture, c'est un bon moyen d'exprimer ce que je ne peux pas dire.
« Le temps est venu de partir » ce sont les mots que mon père m'a prononcés un vendredi soir en rentrant chez moi. Il m'a brièvement expliqué vouloir quitter la ville, cette idée était réfléchie, il avait déjà un boulot ainsi qu'un appartement. Je ne bronchais pas, c'était pour nous un nouveau départ. Quelques jours plus tard, nous avions emménagé dans un petit appartement à Cambridge. J'étais aux anges, il y avait des galeries à chaque coin de rue. C'était un endroit qui ne dormait jamais, il était habité par une ambiance chaleureuse. De jour en jour, j'y prenais goût et New York ne me manquait désormais plus.
Le soir, je donnais des concerts dans les bars de la rue où j'habitais. Autant dire que je n'attirais pas vraiment l'attention, c'était ce que je voulais. J'étais une personne assez timide et calme, je ne voulais pas attirer les regards sur moi. Les situations embarrassantes, je les fuyais. Même si je me moquais de ce que les gens pensaient à mon égard, je ne voulais pas devenir un quelconque objet d'attention et encore moins une soufre douleur. Mon père ne ramenait plus beaucoup d'argent et plus il avançait, plus la vie lui était dure. La perte de ma mère lui pesait et je me sentais davantage coupable. Il sombrait dans l'alcool de jour en jour. L'appartement ne comptait qu'une seule chambre et il me la céda pour ne pas me réveiller la nuit. Pendant qu'il passait la porte d'entrée, qu'il faisait tout tomber sur son passage, qu'il allait vomir tout ce que son estomac ne pouvait accepter, moi, je me trouvais dans mon lit, incapable de trouver le sommeil tellement tout cela me faisait peur. Je souffrais en silence avec mon oreiller pour étouffer mes larmes.
« Tu me critiques mais tu es comme moi » et il avait raison. Mon père m'avait rendu solitaire et les seuls moments où il était sobre, je les passais dehors. Je commençais ma journée à l'université et je la terminais en soirée dans les bars avec des amis. Plus le temps passé et plus moi aussi, je sombrais dans l'alcool et les substances illicites. Je recherchais des sensations que je ne connaissais pas encore, je voulais combler le vide qui c'était creuser en moi en me consolant dans les faux sentiments de mes amis d'un soir. Je m'étais réfugiée dans les bras d'Addison qui lui aussi soufrait tout autant que moi. Nous avions une relation assez libre, sans réel attachement. Aucun sentiment ne nous unissait, on s'appréciait et c'était le plus important. J'étais cependant consciente de ce qui m'arrivait, j'étais très peu fière de ce que je devenais et ça ne me ressemblait en rien. Mon père sombrait encore et toujours et moi, je n'étais pas à ses côtés pour le sortir de ses démons. La distance entre lui et moi était devenue plus grande, nous ne nous parlions plus désormais, nous nous contentions juste de vivre ensemble. Je savais que je n'étais pas cette personne et quelques jours plus tard, Addison était déjà oublié, comme mort. Mais je ne m'en serais jamais sortie grâce à Romane Morgan qui a été d'un grand soutient pour moi et qui a tout fait pour j'arrête d'acheter de la drogue au réseau que tenait son père.
La routine se faisait pesante et mon moral était au plus bas. Je ne prenais plus le temps de jouer de la guitare comme je le faisais autrefois et mon inspiration ne venait plus. Je m'occupais de l'appartement comme je pouvais, il était devenue à mon goût. Je faisais de mon mieux pour aider mon père mais ça ne servait strictement à rien, il était trop tard. Mes études jusqu'ici étaient plates. Mes notes étaient excellentes, seulement je passais le moins de temps possible dans l'établissement où je me trouvais. Les professeurs me disaient intelligente et sérieuse mais je ne profitais en rien des années qui devaient être les plus belles. Je faisais partie tout de même de celle qui avait un « avenir », avec mes bons résultats, je sortis du lycée et étais admise à Harvard.
Mon trajet jusqu'à la maison se fit avec le sourire. J'avais le sentiment d'avoir accompli quelque chose dans ma vie, une chose dont ma mère aurait été fière. Je rentrais chez moi, avec pour la première fois depuis très longtemps, l'envie de voir mon paternel et de lui annoncer la bonne nouvelle. Je poussais la porte de l'appartement qui était entrebâillée, à mon grand étonnement. Je savais déjà que rien n'allait se passer comme j'allais le vouloir. Le silence régnait. Je m'avançais un peu plus, cherchant la raison et, arrivant à la salle de bain je retrouvai mon père allongé sur le sol. Il était mort.
Je faisais de mon mieux pour tenir le coup. Je voulais en aucun cas baisser les bras et m’effondrer. Les années passèrent à Harvard. Même si j'étais une personne timide et discrète, et que le mystère planait au dessus de ma tête, je me faisais facilement des amis. J'avais l'impression de revivre et d'être une autre personne. Puis, vint l'amour. Celui qui laisse des traces après son passage. Je rencontrais alors Ethan Barnes avec qui on eu une relation passionnelle et destructrice. Il y eu une rupture douloureuse, suivit d'une nouvelle remise en couple. Mais, peu de temps après Ethan succomba lors d'une noyade. Mon monde s'écroula, je n'eus pas le choix que de prendre sur moi. Je m'octroyais des moments de répit, seule. Petit à petit, quand je remontais à la surface, je fis la rencontre d'Edenshaw Cartwright qui était dans la même situation que moi. Plus le temps passait et plus nous étions proches, je savais qu'il était un ami sur lequel je pouvais compter à tout moment. Mais comme à chaque fois que le bonheur s'installe, il se passe toujours quelque chose de négatif pour que tout tomber à l'eau. Une bombe éclata dans l’enceinte de l'université. Je me trouvais dans la cafétéria à espérer que cela n'était qu'une mauvaise blague. En quelques minutes, Harvard n'était plus qu'un tas de cendre. Je m'étais précipitée pour m'assurer qu'Eden allait bien et qu'il n'allait pas à son tour m’abandonner.
Il était en vie, recouvert de blessures comme je l'étais moi aussi. Dans un élan de tristesse et de joie, un baiser fut échangé. C'était surement la chose de trop pour me rendre dingue. Je décidais donc de partir une nouvelle fois pour New York. De tout plaquer sans rien dire. J'avais besoin de me vider la tête, car il était arrivé trop d'épreuves en si peu de temps. Mais voilà que le temps est passé et arrivé le moment de revenir pour reprendre ma vie là où elle s'est arrêtée et de finir mes études.