Crisis (Tinglsley)

Contrat exécuté. Encore un. Plus compliqué cette fois. Victime bestiale aux envies violentes. Des griffures marquées et profondes dans le dos. Femme dominatrice. Femme de pouvoir réduite au néant. Message au grand patron. alea jacta es. Le sort en est jeté. Comment expliquer à ta femme les vestiges de ce coït ? Les traces de strangulation sur ton cou ? Les différentes marques qui apparaissent au fur et à mesure sur ton corps offert en dernière offrande ? Lui dire ce que tu es vraiment ? Ce que tu fais dans le plus grand des secrets depuis des années ?
Regagner la chambre silencieusement. Espérer que la belle se soit endormie, le temps d'élaborer un plan. Pièce sombre qui rassure ton esprit. Mais la tranquillité te quitte quand la lumière jaillit de la lampe de chevet. « Je t'ai réveillée ? » Feindre l'innocence.

Je ne sais pas si suivre ma femme était véritablement une bonne idée. Depuis qu'elle a parlé d'affaire personnelle, j'avais tellement envie d'en savoir plus. Mais je le savais quand elle était hermétique comme ça, même cent orgasmes ne pouvait pas faire délirer sa langue. Alors je serrais les dents comme je pouvais. J'avais eu en tête de la suivre. Mais je suis nulle en filature. Et la mettre en colère, était beaucoup trop risqué pour mes crises d'angoisse. Au moins, elle m'avait embarqué. C'est qu'elle me faisait confiance ? Bon par contre, je m'attendais pas à passer la nuit seule. Alors j'avais regardé une série, m'étais endormie. Puis j'avais sursauté, sentant une présence. C'est donc yeux grands ouverts que je l'avais attendu. Première bruit et j'allume, apeuré. Soulagement, c'est elle. Je quitte vite le lit pour la serrer contre moi, reprenant mes esprits. Puis je me recule, voyant les marques. C'est quoi ça ? Infidélité hurle dans le crane.

L'épouse se rue sur toi, et tes bras enlacent ce corps qui fait tant de bien par sa simple présence contre toi. Mais l'apaisement n'est que de courte durée. Femme qui s'éloigne et observe, remarque la peau bleuie autour du cou. Te voilà acculée, au pied du mur. Deux choix s'offrent à toi. Mentir ou dire la vérité. Mentir pour dire quoi ? Que t'as fait une connerie et que c'était un avertissement ? Elle est loin d'être conne. Elle va vite comprendre que c'est des conneries et tu n'auras pas d'autres choix que de dire la vérité. Autant prendre ce raccourci et aller droit au but, non ? « Chérie.. tu veux bien t'asseoir avec moi ? » Tu prends sa main, l'entraîne avec toi. Tu lui laisses le choix de rester debout ou d'être à tes côtés. Droit de fumer ou non, tu t'en fous, tu allumes ce bâton de cancer. Cet hôtel est à la Cosa Nostra, alors tu risques rien. « Je suis une veuve noire. Quand je viens ici, c'est parce qu'on fait appel à moi pour remplir des contrats. Ce soir, c'était un contrat. Sauf que ce contrat a laissé son empreinte sur moi. » Tu glisses ta main dans une poche pour en sortir ton téléphone secret. Celui où toutes les informations sont présentes sur chaque contrat que t'as exécuté au cours des six derniers mois. « Tu veux regarder ? » demandes-tu, résignée.

Cerveau en ébullition. Je m’assois a cote d’elle. Mais me releve aussitot. « Je le savaaaaais ! T’es une mafieuse ! Mais pourquoi tu m’as menti ?! Alors que tu sais que je l’aurais probablement accepté… Non c’est meme certain ! Par contre .. » Je cherche mon téléphone et google veuve noire. « Si j’en lis les articles. Tu tues mais je comprends pas pourquoi veuve noir … C’est ton nom de code ? » Moi je souris. Je peux pas lui en vouloir. «  J’arrive pas a y croire ! Je suis vraiment une femme de mafia .. Je vais monter un club secret .. » C’est bon l’euphorie me gagne .. J’imagine deja le succes ! « Du coup, ta victime s’est défendue ? Tu as besoin d’anti-douleurs ? Et non je veux pas regarder… Je crois. » Je fixe le téléphone mais j’avais assez vu d’horreur. Et quand je vois les marques et si c’etait son metier, c’etait pas beau a voir. « Pourquoi tu me l’as jamais dit ? » Je croise les bras et boude.

Tu t'attendais à toutes les réactions possibles, sauf celle-ci. Si bien que t'es abasourdie. L'excitation dont elle fait preuve est surprenante. « Je t'ai rien dit pour te protéger. J'ai toujours eu le nez fourré dans la mafia, et j'en connais les risques. Toi, tu es trop.. emballée par tout ça et ça pouvait être dangereux pour toi. » Parce que dans le milieu, c'est pas le genre de choses dont on se vante. Seuls les mafieux se reconnaissent et n'aiment pas qu'on parle d'eux. « Veuve noire, comme l'araignée. Une morsure de cette arachnide est mortelle. Mon nom de code c'est Black Mamba, comme le serpent. » Pendant qu'elle sourit, toi, t'es plus sérieuse que jamais. « Pas de club secret. On fait profil bas dans ce monde. » Tu te relèves du lit, marche dans la pièce. « Ma victime était une dominatrice adepte de violence en tous genres. » La fermeture éclair de la robe se baisse et tu la laisses glisser sur le sol, offre ta poitrine nue aux murs et les marques de ton dos apparaître à la vue de l'épouse. « Te dire que je suis une meurtrière sans état d'âme, une bête sanguinaire qui fait ça pour l'argent et pour la tranquillité de sa vie ? Peut-être parce que j'avais peur qu'il t'arrive quelque chose. Qu'un jour, une organisation ennemie s'en prenne à toi. » Tu te tournes vers elle, et t'en approche à nouveau, posant tes mains sur ses hanches. « Parce que te perdre m'est impensable. »

C'est bien la première fois que je découvre ma femme si .. vulnérable à cet instant. Je ne comprends pas totalement pourquoi elle ne m'a rien dit. Et elle-même le dit, ça m'emballe. Enfin pas les meurtres ni rien mais tout l'univers de l'interdit, de l'illégalité. Cela dit, je comprends ses motivations. Je suppose que j'aurais eu le même comportement pour la protéger également. Je hoche la tête, profil bas. Et mime une bouche close. L'entendre parler de sa victime fait poindre la jalousie, dominatrice. Mon cœur se serre en voyant son corps. Et là, je souris plus. Du tout. Je réalise à quel point, je pouvais la perde à tous instants. Que ce n'était pas un jeu. Je l'observe, comme si l'univers entier venait de me donner une leçon. Je serre ses mains dans les miennes. Tu sais que j'ai accepté de me marier avec toi parce que tu me rends heureuse et non pour ta famille. C'est difficile à croire mais je t'assure, mon amour, je t'aime toi de la tête aux mollets. Et que ton être. Tant de questions saturent ma tête. Et je finis par la serrer contre moi, nichant mon visage dans son cou. Chaque déplacement est une mission ? Y'a des fois où tu reviens blessée, et je le sais pas ? A ce moment, j'ai envie qu'elle cesse tout mais je suppose que cette demande sera impossible à réaliser. Je veux pas de détails mais je ne veux pas que tu me mentes, pas que tu m'offres une belle version quand tu me laisses à la maison. Je veux plus être sans toi Aura Zola Ferrantini-Kingsley. Front collé contre le sien. Sinon, j'apprends à tuer et ça sera toi ma victime. Compris ?

La façade offerte au monde se pète la gueule ce soir. La femme forte n'est qu'une illusion pour parfaire l'idée qu'on se fait de toi. Tu es sensible au fond, seulement, c'est pas comme ça qu'on t'a appris à être. Garder le silence était le meilleur moyen de garder cette carapace intacte. Mais la carapace s'est fendue sous les coups qui marquaient la peau ce soir. La femme forte réduite à l'objet. Au jouet des fantasmes les plus tordus. Mais pleurer n'est pas dans ta nature. Trop fière pour laisser les lacrymales s'échapper. « C'est parce que je t'aime de tout mon être que je suis toujours en vie et que je fais toujours attention de revenir plus ou moins entière auprès de toi. Mais oui, depuis qu'on est à Boston, chaque déplacement est une mission. Et c'est déjà arrivé que je rentre blessée et que je garde le silence sur mon état. » Nombreuses de tes cicatrices reposent dans ton dos, et proviennent de ce genre de nuits. Les nuits où la mort vient de ta main. Mais à cet instant précis, ta main n'apporte que la douceur d'une caresse sur le visage de ta moitié. « Maintenant que tu sais tout, ça ne sert plus à rien de t'offrir un mensonge pour t'apaiser. Mais je sais que tes angoisses seront décuplées à chaque fois. Et je te promets mon amour, jamais tu te retrouveras sans moi. Mais c'est compris. » Tu l'embrasses avec douceur comme pour sceller une promesse.

Je m'en voulais terriblement de n'avoir jamais fait attention. Chaque déplacement déclenchait une tornade, où le rejet et l'abandon m'étranglaient - qui n'existaient que dans ma tête. Et les retours suivaient des silences accusateurs alors qu'elle était blessée. Je n'étais qu'une merde égoïste. Je ferme les yeux à son contact. Les perles coulent. Et le baiser n'apaise que partiellement le cœur. Je ne sais pas .. L'ignorance m'allait peut-être mieux .. Mais le mensonge durant nos années me peinent. Je ne sais plus comment penser. Alors je la serre contre moi. Pourquoi n'avoir jamais rien dit pour tes blessures ? Je sais que .. je suis .. malade mentalement .. autant le dire .. mais .. je pense être apte à prendre soin de toi .. ou alors tu penses que je peux pas durant mes crises .. Ca se peut ..