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Le corps couvert d'hématomes, le visage marqué de cernes, l'esprit vaporeux, l'alcool comme unique remède à ton état émotionnel du moment. Deux jours que t'es au plus mal. Deux nuits où tu vas dans cette cage pour défier d'autres gens, pour ressentir la douleur physique et faire taire la psychologique. Des semaines que t'as l'impression que ta relation avec Hayley part en vrille. Des mois que tu n'as pas touché son corps, qu'elle ne se sent pas à l'aise avec celui-ci. Tu espères toujours que ça va s'arranger, qu'elle accepte cette cicatrice qui lui a été offerte par ton défunt géniteur, que tu vas pouvoir lui montrer ton amour. Mais t'as pas la tête à ça en ce moment. Tu peux pas combler la perte de ta soeur comme ça. T'as pas l'esprit axé sur ce sujet. Trop amochée, trop flinguée, trop bourrée aussi, peut-être.
Pourtant, t'as quitté ton lit, partiellement jonché de bouteilles de Jameson vides et de chiffons ensanglantés. T'as envie de la voir. Besoin de la voir. Tu sais pas trop comment ça va se passer, peut-être qu'elle va refuser de te voir dans cet état, peut-être qu'elle va tenter de te remonter les bretelles parce qu'elle supportera pas de te voir couler de cette façon. Peut-être même qu'elle va te dire qu'elle peut pas vivre avec quelqu'un comme toi, avec tes névroses, ton absence de gestion émotionnelle, ta façon de régler tes problèmes, ta violence excessive quand t'es dans ces phases de détresse. T'en sais rien, mais tu files quand même sous la douche pour paraître un peu plus présentable pour la voir. L'eau qui s'échoue sur son corps camoufle les larmes qui peinent encore à couler de tes opales. Tu sais même pas comment tu fais pour réussir à chialer encore. T-shirt large, short trop grand, chemise de bucheron pour camoufler certains bleus qui habillent l'épiderme dans la zone des avant-bras, lunettes de soleil sur le nez douloureux, téléphone et clopes dans les poches, tu quittes la coloc à pieds sans un mot. Porte qui claque dans l'espace de vie qui se joue dans le salon.
Tes pas sont titubants, mais tu connais ce chemin par coeur à force. Une fois de plus, tu passes la porte de ce bâtiment et tu grimpes les quelques marches qui mènent à son appartement. Si habituellement tu utilises tes clés, cette fois, tu préfères laisser ton poings s'abattre sur le bois. Voix rauque qui trahit ton état. « Bébé, c'moi.. » Epaule qui s'appuie contre le mur avec lassitude, dans un soupir résigné. Etait-ce vraiment une bonne idée de te pointer là, comme ça ?
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