Ma vie a commencé de la façon la plus banale qui soit à vrai dire, dans un hôpital de la charmante ville de Wellington, capitale de la Nouvelle-Zélande. Six personnes étaient là pour me souhaiter la bienvenue, ma mère Aliana et mon père Spencer bien évidemment mais également mes quatres frères aînées, Spencer Jr, Antonio et les jumeaux Nolan et William. Il faut dire que ma mère était heureuse d’avoir enfin une petite fille et mon père m’a toujours dit qu’elle avait fondu en larmes rien qu’en voyant mon sourire. En parlant de ma famille, je dois vous dire au passage que mon nom est connu dans l’industrie cinématographique. En effet ma mère d’origine mexicaine et une scénariste de talent et mon père néozélandais est un grand producteur de films. Vous vous en doutez, les deux se sont rencontrés sur le tournage d’un film mais je vous évite le bla bla que je connais par cœur à ce jour vu le nombre de fois où mes parents me l’ont raconté. Bref revenons-en au sujet moi Rosalinda Chastity Slader surnommée Rose c’est moins lourd et plus moderne, avouons le. Durant toute ma jeunesse, j’ai vécu bercée d’amour, d’argent et de tout de ce qu’il faut voir même plus pour une jolie petite fille. Et je n’ai jamais cessé d’être surprotégée par mes grands frères qui me considéraient vraiment parfois comme un bébé et puis j’étais la petite dernière donc forcément. Qui plus est très jeune, on a dépisté chez moi une malformation au niveau des poumons, me causant ainsi de nombreux troubles respiratoires. Souffrant donc d’un asthme assez important, je suis privée de sport et ma fragilité effraie sans cesse mes grands frères qui soulèveraient monts et merveilles pour moi. Je ne me plains pas car j’ai beaucoup de chance d’avoir l’amour d’une famille car niveau amitié c’était plus compliqué. Mes parents à cause de leurs professions respectives étaient amenés à beaucoup voyages mais aussi à se séparer de temps en temps, mais jamais cela a eu un quelconque effet sur leur couple à mon plus grand bonheur. Et donc dès mon plus jeune âge, j’ai du m’adapter à cette vie de nomade. Je n’avais guère le temps de me faire des amis que je partais déjà du pays. France, USA, Italie, Angleterre, Espagne, Australie, Brésil, Chine … je les ai tous fait, j’ai visité tous les continents à vrai dire et à 15 ans j’étais déjà polyglotte. J’ai passé la majorité de ma vie aux côtés de ma mère et de mes frères les plus jeunes, voyant un peu moins mon père, mais ça ne m’empêcher pas de l’aimer. Quand je le voyais, j’adorais passer du temps avec lui sur ses plateaux de tournage. Le cinéma, j’ai ça dans l’âme, dans le sang et le statut social élevée qui va avec. Très vite j’ai été habitué à côtoyer du beau monde, des gens hauts placés, être invitée à des réceptions, fouler des tapis rouges. Et malgré le fait que je n’aime pas forcément le fait que l’attention soit portée sur moi, j’aime ces mondanités sans trop en abuser non plus car je sais exactement ce que cela fait d’être emporté dans un tourbillon infernal sans fin dont on n’arrive pas à s’en sortir. Alors que je ne n’avais que 15 ans, le plus grand de mes frères est tombé dans la drogue, l’alcool et tout un tas d’autres trucs qui vous pourrissent de l’intérieur. La vie Hollywoodienne est à l’origine de tous ces déboires. Lentement il s’est enfoncé, a changé, quitte à devenir quelqu’un d’autre et tout cas à cause de la tentation tellement présente dans le monde du cinéma, ce monde où toute ma famille baigne depuis des années. Perdre un frère parce que je ne le reconnaissais plus m’a profondément meurtri ainsi que le reste de la famille. En parallèle de cela je continuais mes études. Malgré le fait que je change souvent d’établissement, mon niveau scolaire était bon voir même excellent, en même temps mes bouquins et ma caméra étaient devenus mes meilleurs amis vu que je n’avais pas vraiment d’amis à proprement parler. Je préférais ne pas m’attacher pour éviter de souffrir dès que je quittais un nouvel endroit. A la longue, je m’étais habitué à cette solitude et durant mon temps libre, je m’amusais à filmer tout et n’importe quoi. Etre derrière la caméra c’est ce que je préfère, assembler des minis films sur mon ordinateur. Voilà ce à quoi je pensais mon temps, j’étais comme déjà plongé dans mon avenir, celui de devenir une réalisatrice reconnue. Rester dans l’industrie du cinéma comme le reste des membres de ma famille.
Cependant mon avenir, j’ai failli ne jamais le vivre. Et ce fameux jour du 14 octobre 2008, alors que j’avais eu 18 ans il n’y a quelques semaines, j’ai failli perdre la vie dans l’enceinte du lycée où j’étudiais à l’époque à Vancouver. Un élève ayant décidé d’ouvrir sur le feu sur les élèves présent dans la bibliothèque ce jour là à 11h52 précise. Une balle était venue se loger dans mon bras droit alors que j’étais en train de me cacher à la seconde où j’avais entendu le coup de feu. Mais par rapport à d’autres personnes, j’étais plutôt chanceuse si l’on peut dire. J’ai vu des dizaines de mes camarades se faire abattre autour de moi avant que l’auteur de ce geste ne décide de retourner l’arme contre lui. En attendant l’aide venir, j’étais resté assise entre 2 rayons de la bibliothèque, toute tremblante alors que je me vidais de mon sang mais j’avais eu le réflexe de compresser ma blessure à l’aide de mon foulard. Je vous laisse imaginer l’horreur de mes parents et de mes frères en voyant ce qui m’était arrivé en me rejoignant à l’hôpital craignant le pire pour moi. J’avais été hospitalisée d’urgence pour qu’on retire cette balle dans mon bras. Qui plus est pendant mon petit séjour à l’hôpital, j’ai bien évidemment eu le droit à suivi psychologique, comme la logique le veut. Mais aussi surprenant que cela puisse paraître, cet épisode ne m’a pas hanter des dizaines et des dizaines de jours. Evidemment j’ai profondément été choqué et je garde cela en moi comme une marque de mon passé mais je me dis que si Dieu a décidé que ce n’était pas mon heure alors la vie doit continuer. Et c’est exactement la chose que je fis. Un an plus tard je rejoignais Harvard, prenant ainsi mon indépendance. Ma mère a pleuré toute la journée où je fis mon entrée à l’université section Arts Visuels, à noter que je suivais là encore les traces de mon père. Durant ma première année, j’appris malheureusement que mon frère aîné était interné en centre de soins psychiatrique pour tentative de suicide. Sa descente aux enfers continuait donc et mes parents ont donc décidé que c’était la meilleure des solutions pour lui, cela dit ils ont fait cela en secret et étouffer l’affaire pour éviter que cette nouvelle se répande comme une traînée de poudre dans la presse à scandale. J’ai tout fait pour m’intégrer dans cette prestigieuse université, essayer de me sociabiliser en faisant même mon entrée dans la très renommée Eliot House. C’est vrai que comparée aux autres membres, j’étais beaucoup plus coincée, timide, associable. J’étais un peu mal à l’aise je dois l’avouer mais bon aux moins les membres de cette confrérie me comprenait, ils vivent la même chose que moi. Etre à la hauteur de son nom de famille c’est pas toujours chose facile. Hélas peu de temps après avoir entamée ma troisième année j’ai tout plaquée. Trop de pression, et puis cette honte que j’ai vécue lors de cette fameuse soirée de la Eliot House, ont eu raison de moi. J’ai préféré mettre en suspens pendant quelques temps mes études pour suivre mon père sur l’un de ses tournages en Nouvelle-Zélande, ma terre natal et aussi grand pays de cinéma. De toute façon, c’est toujours une bonne expérience et cela m’a permis de passer du bon temps avec lui mais si j’avais su alors peut être que je serais restée à Harvard. En l’espace de quelques mois seulement j’ai du faire face à des révélations qui ont le pouvoir de briser un être humain. Mon frère ainé, malgré son internement quelques années lus tôt pour ses addictions à la drogue à succomber à une overdose. C’était la première fois que je devais affronter la mort d’un proche et c’est encore plus dur quand il s’agit d’un membre de votre famille, la seule chose qui compte à mes yeux. J’ai eu beaucoup de mal à me faire cette terrible nouvelle même si cela faisait des années que mon frère Spencer ne se souciait plus de rien si ce n’est de se foutre en l’air. Il a bien réussi son coup au moins en nous laissant dans la douleur. Mais comme cela ne suffisait pas, il faut que j’apprenne par le plus grand des hasards qu’en réalité il n’a jamais été mon frère, ni les 3 autres d’ailleurs, étant donné que j’ai été adopté à la naissance. Je ne sais pas comment mes parents ont pu me cacher un tel secret pendant les vingt deux années de ma vie. S’ils pensaient que jamais je ne l’apprendrai, ils se sont bien trompés vu que je suis tombée sur les papiers de mon adoption alors que je faisais un peu de rangement dans notre grande maison au bord de la mer. Je n’y suis pas allé par quatre chemins pour leur demander le pourquoi du comment, ils n’ont jamais su me dire que je n’étais pas leur fille biologique. Leurs explications concernant le fait que ma mère voulait à tout prix une petite fille alors qu’elle ne pouvait plus avoir d’enfants n’ont rien changés au fait que je leur en veux de m’avoir caché cela parce que selon leur dire je suis beaucoup trop fragile pour connaître cette douloureuse vérité. C’est trop facile aussi de tout mettre sur le dos de mon caractère de fille trop faible, et qui ne peut donc rien entendre. Toutes ces histoires m’ont au moins permis d’apprendre une chose : être la petite fille faible ne m’aidera pas, j’en ai marre qu’on me cache tout, qu’on me préserve sous prétexte que je ne suis pas assez forte psychologiquement. Pour le coup, j’ai décidé de ranger la douce Rose au placard et de montrer une Rose beaucoup plus forte et sûre d’elle. Un changement du jour au lendemain. Fini la fille gentille qui se laisse marcher sur les pieds et bonjour la jeune femme avec plus de prestance, de franc parler mais toujours aussi solitaire, voir inaccessible. C’est donc avec cette nouvelle peau neuve que j’ai décidée de faire mon retour à Harvard. . J’ai perdu toute foi en ma famille alors que c’était la seule notion en laquelle j’avais vraiment confiance. Peut être qu’en réintégrant l’Université, je retrouverai des gens qui m’apprécieront à ma juste valeur malgré tous les changements que j’ai pu faire dans ma vie de tous les jours.