Waiting for you • Teal

Vendredi 21 Mai. 21:45

La crise était passée. Elle s’était effacée sans avoir réellement le temps de surgir. Panique que j’avais su enfermer à l’intérieur de mon être. Panique que j’avais su gérer. Et ce n’était clairement pas grâce à LUI. Nate. Mon trésor. Lui qui était entré dans les toilettes pendant que je m’y trouvais. Lui qui m’avait fixé un instant avant de filer si rapidement. Lui qui aurait pu m’aider et qui avait préféré fuir en me laissant dans d’autres mains. Des mains qui savaient y faire. Des mains qui m’avaient aidées. Des mains qui n’étaient pourtant pas les siennes. Quelques minutes s’étaient écoulés perdu dans ces toilettes. Le manteau du costume abandonné à la main alors que la veste et la chemise étaient un peu trop ouvertes pour mieux respirer. Je fixais mon reflet dans le miroir glissant une main dans mes cheveux foutrement en bazar après cette crise. Je passais ma main sous l’eau pour m’asperger le visage et la nuque d’eau froide. Et, après un dernier souffle de courage, je me dirigeais de nouveau dans la salle de bal. Yeux rivés au sol, j’avais mémorisé le chemin pour retourner à la table où je m’étais trouvé toute la soirée. Cette table qui semblait beaucoup trop vide. Katalia semblait s’être évaporée. Mais, surtout, Lukas avait disparu. J’hésitais un instant sur le comportement à adopter. Est-ce que je devais m’asseoir ici et attendre le retour de Lukas ? Est-ce que je pouvais sortir prendre l’air sans inquiéter personne ? Est-ce que je devais tenter de joindre Lukas ? Ou est-ce que… Je m'appuyais contre la chaise y déposant mon manteau avant de laisser mes iris sombres se promener dans la salle. Je trouvais rapidement la personne cherchée comme si mon cœur savait le détecter. Nate était à sa table en compagnie de sa cavalière. Il semblait presque trop heureux là-bas avec elle et ça tordait mon ventre désagréablement. Partir ? Rester ? Agir ? Ne rien faire ? Attrapant mon téléphone portable, je composais un message à l’attention du trésor. Je n’attendais pas de voir sa réaction. Je n’attendais même pas de voir sa réponse. Attrapant la bouteille d’alcool qui trônait sur la table, je me dirigeais sans tarder vers l'extérieur. Cet extérieur où je m’isolais me mettant alors à faire les cents pas. L’angoisse montait de nouveau dans mon ventre. Je la sentais s’insinuer dans mon être douloureusement. Je m’arrêtais un instant fixant la porte. Et s’il ne venait pas ? Portant le goulot de la bouteille à mes lèvres, j’en descendais quelques gorgées avant de me remettre à marcher. Mes dents mâchouillaient nerveusement ma lèvre tandis que je soufflais à l’intérieur de ma tête que je lui donnais cinq minutes. Si dans cinq minutes, il n’était pas là, je quittais ce bal en demandant à Lukas de rentrer à la maison. Enfin encore fallait-il que je le trouve… Non. Ne pas penser à cette possible chasse à faire. Juste continuer de marcher et se concentrer sur les pas. Un, deux, trois, quatre, cinq. Se concentrer sur la respiration en rythme. Ne pas se laisser avoir par la panique. Juste attendre.

Un. Je descendais une nouvelle gorgée de la bouteille d’alcool. Deux. Je sentais mon cœur cogner un peu trop fort à l’intérieur de ma poitrine. Trois. Est-ce que c’était moi ou est-ce que le monde se mettait à valser dangereusement ? Quatre. Qu’est-ce qu’il avait dit le médecin au check-up déjà ? Rester calme, éviter les excès et éviter les situations à risques. Le rire amusé glissait entre mes lèvres. Je bafouais toutes les consignes en une seule soirée. Mais, en même temps, personne ne savait. Personne ne contrôlait. Cinq. Bordel, ça faisait cinq minutes non ? Et il n’était toujours pas là. J’étais toujours seul à l’attendre alors qu’il était sans doute auprès de sa belle. Sa belle qu’il avait préféré rejoindre m’abandonnant dans les toilettes comme si je n’étais rien. Vulgaire secret masqué dans son existence. Stupide jouet qui ne méritait pas réellement d’exister. La colère grimpait. Je la sentais sinuer lentement à l’intérieur de mes veines. Elle m’enflammait. Elle me donnait mal à la tête. Gamin qui avait envie de crier. Gosse qui avait envie de frapper. Je me retenais conscient que la descente n’en serait que trop mauvaise. Mes prunelles se relevaient une nouvelle fois sur la porte et voilà qu’il arrivait. Nate était là. Toujours aussi sexy. Toujours aussi foutrement apaisant. Et, sur le coup, je voulais le détester pour ça. Le haïr de m’envoyer cette vague d’apaisement alors que je voulais être en colère contre lui. Un baiser qui accélérait le cœur et qui apaisait l’âme un instant. Nate prenait la parole sans que je ne puisse souffler un seul mot. Il lançait ces excuses qui semblaient bien trop minables à mes yeux. Ces excuses que je n’avais pas envie d’entendre alors qu’il m’avait fait mal. Ces excuses qui semblaient un peu trop bancales pour celle qui vivait dans ma tête. Il avait paniqué alors il m’avait abandonné là-bas. Il avait paniqué et il avait préféré s’enfuir au lieu d’agir. Je secouais doucement la tête à ces mots. Gamin qui aurait préféré entendre des bêtises et avoir sa présence là-bas. Gosse qui aurait préféré sa jalousie à son abandon. Des tonnes de questions tombaient alors qu’il marchait un peu trop sous mon regard. Les prunelles se fermaient en entendant la question qui glissait. Moi ? Vouloir rompre ? Ça semblait tellement ridicule alors que j’étais celui qui se projetais le plus. Celui qui semblait trop souvent en manque à réclamer sa présence. Mes prunelles l’observaient glisser sa main dans ses cheveux et retirer sa cravate avant qu’il ne s’appuie contre la rambarde en pierre. Et une nouvelle interrogation qui tombait. Une interrogation qui allumait un peu plus la colère. Il agissait comme si j’étais le méchant de l’histoire et que j’allais le faire souffrir. Bouteille d’alcool porté aux lèvres pour une nouvelle gorgée, je finissais par la balancer soudainement sur le sol. Adrénaline cognant trop fort. Colère grondant si vivement. Je m’approchais soudainement de Nate. Mains posées contre la rambarde en pierre, je l’emprisonnais là. Mes prunelles trouvaient les siennes « Moi j’pense que c’est plutôt toi qui a envie de rompre Nathaniel… » Prénom soufflé en entier un peu trop froidement. Colère grondant un peu trop fort dans le corps. Mes doigts glissaient pour venir attraper son menton et l’obliger à me regarder. Mon corps se pressait contre le sien. Et, je venais lui souffler « Tu m’as regardé et t’es parti… Comme si j’étais rien… » Comme si je n’étais qu’un truc sans importance. Un déchet sur la route dont il se détournait. Et, comme pour lui faire comprendre ce que ça pouvait faire, je m’éloignais de lui. Contact coupé en un rien de temps. Pas à reculons alors que je regrettais déjà d’avoir balancé la bouteille. Gamin qui aurait aimé s’enivrer pour oublier la peine. Gosse qui voulait se mettre à chialer sous la douleur du cœur qui se fracturait.

Les mots s’étaient échappés d’entre mes lèvres. Nombreux. Beaucoup trop nombreux. Ils m’avaient échappés de façon incontrôlable comme si la tête ne suivait plus. C’était comme si le cerveau n’était plus là pour réfléchir à tout ce qui glissait et mettre des stops pour ne pas trop en dire. Pour ne pas l’effrayer. Quoique… Avec ce qu’il m’avait dit, il y avait peu de chances que mes propres mots l’effraient alors que je répondais simplement à ses propos. La déclaration avait glissé entre mes lèvres. Elle n’était pas aussi belle qu’elle aurait dû l’être. Elle n’était pas aussi douce que je l’imaginais. Elle n’était pas aussi romantique que je l’aurais souhaité. Mais, elle était là et c’était tout ce qui comptait. Elle exprimait tout ce qu’il y avait à dire. Sur moi. Sur lui. Sur nous. Elle exprimait peut-être même plus que ce que je voulais dire osant relever les côtés sombres de l’histoire. Je laissais passer tout ce qui cognait en moi depuis quelques semaines. Je laissais glisser les propos sans chercher à les contrôler. Gamin pourtant habitué à se taire. Gosse qui, ce soir, osait prendre la parole sans s’arrêter pour exprimer des choses bien à lui. Les mots passaient peut-être hésitants. Les propos glissaient. Peut-être qu’ils s’entrechoquaient un peu trop nageant entre reproches et amour. Ils flirtaient entre la passion exquise et la douleur dévorante. Passion pour tout son être. Amour pour lui. Douleur à l’idée du cauchemar de le perdre. Reproche pour ce qu’il m’avait caché et pour cet abandon commis. Je finissais par m’approcher de lui plantant mon regard sombre dans le sien. Iris emplies de larmes à lui demander de m’emmener comme il le voulait. Qu’il m’emmène. Ailleurs. Loin d’ici. Que nous soyons ensemble lui et moi. Mes bras glissés autour de son cou, j’hochais la tête lorsqu’il soufflait qu’il fallait arrêter de nous déchirer puisque nous voulions la même chose. Tous les deux désireux de cette existence. Tous les deux désireux de ces instants uniques et magiques passés dans notre monde. Les mains du trésor glissaient dans ma nuque me poussant à soupirer de bien-être. Contact délicieux qui venait apaiser la tension montée bien trop rapidement. Contact salvateur qui m’empêchait de laisser l’Enfer s’abattre sur moi. Cet Enfer qui voulait me bouffer m’entraînant dans la panique incontrôlable. Avant que je ne puisse réitérer mes sentiments à l’égard de Nate, les lèvres du jeune homme se posaient sur les miennes. Mes bras se resserraient autour de son cou. Mes prunelles se fermaient. Le palpitant s’accélérait. Et je me sentais vivant. Le baiser avait été timide au départ, mais il devenait fougueux. Gamins entraînés par la passion qui les dévorait. Gosses amoureux qui se laissaient toujours électriser du moindre contact. Ses dents mordaient mes lèvres et nous nous retrouvions à bout de souffle. Le front de Nate reposait contre le mien et les mots glissaient. Des mots qui me poussaient à fermer les yeux sous cette vague de peur qui débarquait de nouveau. S’éclater le cœur m’effrayait tant. Moi qui ne voulait pas faire souffrir ce trésor si essentiel à ma vie. Moi qui ne voulait pas heurter le précieux Nate de mon existence. Je n’avais même pas le temps de prendre la parole que Nate se détachait de moi regardant sa montre. Mon cœur loupait un battement. La douleur s’invitait dans mon être. La peur de le perdre revenait au galop. Il allait me laisser là encore n’est-ce pas ? Il devait sans doute rejoindre sa belle à l’intérieur ? Ou peut-être que c’était l’heure de son after ? Je n’en savais rien. Mâchouillant nerveusement ma lèvre, j’avais envie de le supplier de rester quelques minutes supplémentaires. Je voulais lui avouer ce désir que j’avais de profiter de la chaleur de ses bras quelques instants encore. Contrairement à mon attente, Nate m’invitait à autre chose. Venir. Prévenir mon cavalier. Une heure devant nous. Mes sourcils se fronçaient sous l’incompréhension, mais j’obéissais par automatisme. Téléphone sorti de la poche. Messages échangés avec le plus que meilleur ami avant que la main de Nate glisse dans la mienne. Il m’emmenait. Ailleurs. Loin. Peu importait. Je le suivais. Je le suivrais n’importe où. Confiance un peu trop grande placée dans le trésor. Nous arrivions à la voiture dans laquelle il grimpait. Je suivais m’installant à ses côtés et sentant mon cœur cogner plus fort. Souvenir de nos retrouvailles sur le campus et de cet instant dans la voiture pour rejoindre son appartement. Aujourd’hui, la main de Nate se trouvait sur ma jambe rassurante et agréable. Aujourd’hui, je sentais son regard sur moi. Ce regard qui accélérait mon cœur et faisait monter le rouge à mes joues. Ce regard qui me donnait envie de bouger pour me jeter sur lui sans attendre. Le temps semblait si long.  Bordel, j’étais pourtant certain qu’il n’habitait pas si loin. Impatience grandissante. Envie affolante. La voiture s’arrêtait enfin. Nate sautait hors de la voiture et je suivais le mouvement plus sagement pour faire attention à ma jambe. Grimper les escaliers. Arriver devant la porte. Mes mains se posaient sur les hanches du beau jeune homme que j’étais déjà prêt à bousculer à l’intérieur. Prêt à venir dévorer son cou. Cependant, Nate s’arrêtait là et m’interrogeait. Le doux sourire se dessinait sur mes lèvres. J’hochais la tête avant de murmurer « Je veux mon Trésor… » Oui je voulais de ce moment juste lui et moi dans cet appartement loin de tout. Oui je voulais de cet instant juste nous fermés loin du monde. Oui je voulais de cet amour un peu trop fort qui pulsait entre nous. Oui je voulais de lui. Et, comme pour accentuer encore cette envie, mes lèvres venaient s’échouer sur celles du trésor. Déjà prêt à m'offrir à lui. Déjà prêt à cette union ce soir. Déjà prêt à vivre Teal. Respirer Teal. Aimer mon trésor et oublier cette soirée entre ses bras pour une heure magique.