Thorn and Sofia : same blood, same characters

Les vacances en Thaïlande touchaient à leur fin. Demain, nous allions tous reprendre l’avion en direction de Cambridge. Je préférais balayer cette pensée de mon esprit, car je n’avais pas envie que cela me gâche la dernière soirée. J’aurais bien aimé rester un peu plus de temps ici, à Bangkok. Pendant ces quelques jours, j’avais eu l’impression que le temps s’était arrêté et nous allions bientôt devoir retourner à notre banal quotidien.

Je prenais ma douche et me préparait. J’avais prévu de passer ce dernier soir avec Thorn, mon cousin. Quand je pense qu’avant, on ne se voyait que rarement ! Je me demande comment on a fait, parce que maintenant qu’il étudie aussi à Cambridge, nous sommes inséparables. Thorn est mon unique cousin et je n’ai pas de frère, alors je me sens proche de lui.

J’enfilais ma robe bleu roi. Celle-ci était à fines bretelles et m’arrivait au dessus des genoux. J’ajoutais une veste par-dessus et mettait mes chaussures ouvertes et à talons. Mes cheveux étaient légèrement bouclés et je les laissais lâchés. Je prenais mon sac à main avant de quitter la suite. Le restaurant était tout proche. L’hôtel était très bien situé et nous avions tout à portée de main.

Thorn n’était pas encore là lorsque j’arrivais au restaurant, mais cela ne m’étonnait pas. Il n’a jamais été très ponctuel, mais bon, c’est mon cousin alors je lui pardonne tout. Je laissais donc le serveur m’accompagner à l’une des tables et patientait tranquillement en lisant le menu. Quelques minutes plus tard, « gueule d’ange » arrivait enfin et j’esquissais un grand sourire – « Ouais, je sais comment tu es et le pire, c’est que je ne peux même pas t’en vouloir. » - Oui, comment lui en vouloir alors qu’il arrivait avec sa bonne humeur et son petit sourire d’ange ? – « Mais je me demande ce qui t’as mis en retard par contre… » - Un nouveau sourire se dessinait sur mon visage. Puis, je reprenais la parole à sa question : « Non, j’ai préféré t’attendre pour commander. » - Je n’allais pas passer ma commande alors qu’il n’était même pas encore arrivé.

« Ah oui, c’est vrai qu’il y’a eut le mariage hier… c’était bien ? » - Je savais qu’Andy était un ami de mon cher cousin et cet ami c’était marié la veille. Je n’avais pas été de la fête tout simplement parce que je ne connaissais ni Apple, ni Andy, du coup, je n’étais pas invitée. J’avais donc passé ma soirée en ville avec une amie. Un sourire se dessinait sur mon visage lorsqu’il évoquait Reaghan. La jeune Quincy était l’une de mes amies et mon cousin chéri semblait beaucoup l’apprécier. Du moins, c’est ce que j’en déduisais puisque je savais qu’il avait été la voir à plusieurs reprises à l’hôpital – « J’ai l’impression que tu passes beaucoup de temps avec Reaghan en ce moment… » - Thorn devait bien se douter que ces mots évoqueraient ma curiosité. Enfin, ce n’était pas de la simple curiosité. TJ est important pour moi, alors je m’intéresse à ce qui se passe dans sa vie.

Thorn se plongeait dans son menu et trouva rapidement ce qu’il allait commander – « Tu as raison, autant profiter des spécialités Thaï pour notre dernier repas ici. » - Rétorquais-je tandis-ce que mon cousin faisait signe au serveur pour qu’il vienne prendre notre commande. Je choisissais aussi une spécialité du pays. Je refermais mon menu et posais mon regard sur TJ à ses paroles. J’eus un léger froncement de sourcils assez surpris par sa question, pas sa façon de la poser aussi. En tout cas, cela me laissait penser qu’il était inquiet pour moi et qu’il pensait que ça n’allait pas – « Oui, je vais bien. » - J’esquissais un petit sourire. En fait, ce n’était pas l’exacte vérité. Depuis l’attentat à la bombe sur le campus, ça n’allait pas fort. Je ne me sentais plus du tout en sécurité là-bas. Mais bon, je ne pouvais et ne voulais pas laisser ma peur me dominer. J’avais donc dû trouver une solution pour calmer mon anxiété... Cette histoire de bombe avait été la goutte en trop. J’avais déjà subi une agression – dont personne ne savait rien – au début de l’année scolaire. Après ça, un malade avait mis des bombes à Harvard. Non, mais dans quel monde on vit ? Je quittais TJ des yeux au moment où le serveur arriva à notre table – « Bonsoir, je vais vous prendre du sizzling avec du poulet. » - Il s’agissait d’un plat avec du poulet ou du bœuf au légumes sautés et sauce sucrée et piquante. J’aimais bien le contraste entre les deux. Je commandais aussi un cocktail fruité en boisson apéritif et laissais TJ parler à son tour.

Lorsque le serveur nous laissa de nouveau tous les deux, je reportais mon attention sur mon cousin. Je repensais à la conversation qu’on avait juste avant que le serveur ne débarque – « Pourquoi est-ce que tu ne me demandes pas directement ce que tu veux savoir ? » - Dis-je sur un ton calme. Je n’ai jamais été du style à tourner autour du pot. Autant aller droit au but, n’est-ce pas ?

Reaghan était aussi mon amie et j’avais appris la façon dont Jasper s’était comporté avec elle. La pauvre, après ce qui lui était arrivé, sa maladie, elle n’avait pas besoin de ça. Je me demandais bien comment Jasper avait pu la faire souffrir à ce point. Reaghan est tellement adorable, gentille, que je trouve ça affreux de lui faire du mal. Jasper devrait avoir honte – « Ouais c’est vrai et heureusement qu’elle a des gens sur qui compter. » - C’est dans ces moments là qu’on voit qui nous aime vraiment ou pas. Reaghan n’avait parlé à personne de sa maladie, mais était-ce une raison pour lui en vouloir ? Je comprenais très bien ce qui avait poussé la blondinette à ne rien dire. L’annonce de son entrée à l’hôpital et de sa maladie m’avait quand même bouleversée, mais je ne lui en voulais pas d’avoir rien dit – « Tu es sûr que ce n’est que ça ? Elle a besoin de soutien, mais tu es quand même très présent pour elle… » - Je sous entendais que cela cachait peut-être quelque chose d’autre. TJ semblait beaucoup tenir à Reaghan, mais peut-être que je me trompais et qu’il n’y avait là qu’une relation amicale.

Le serveur interrompit notre conversation quelques instants, le temps pour nous de passer notre commande. Lorsqu’il repartait, nous reprenions notre conversation. Thorn semblait inquiet à propos de moi et je voulais savoir pourquoi. A ses mots, je réalisais alors qu’il était tombé sur mes cachets. Je ne le quittais pas des yeux et gardais mon calme. Il allait falloir que je trouve rapidement une explication quant à la présence de Bromazépam dans mon sac. Cela dit pour que mon histoire soit crédible, j’étais consciente de devoir lui donner une part de vérité. J’allais juste omettre de lui dire que je ne pouvais plus me passer de ses cachets, que même ici en Thailande, loin d’Harvard j’avais pris chaque jour une dose – « Ah, je vois… » - Je marquais une courte pause – « Je ne vais pas te mentir. Après ce qui est arrivé sur le campus, j’ai commencé à faire des attaques d’angoisse. Je me réveillais en pleine nuit complètement paniquée et… le fait de retourner là bas me terrorisait complètement. Alors, j’ai été voir un médecin psychologue qui m’a prescrit un traitement. C’est bien pour ça que j’ai des cachets dans mon sac. Mais, je n’en ai pas pris un seul depuis qu’on est ici. Ces vacances m’ont fait énormément de bien. J’ai juste emmené les comprimés en cas de crise d’angoisse… mieux vaut être prévoyant, non ? » - J’esquissais un faible petit sourire avant de reprendre la parole : « Si je ne t’en ai pas parlé, c’est parce que je me sens nulle. Je veux dire, j’ai eu de la chance, j’étais au staduim du campus et ce n’est pas là que les bombes ont explosées. Ce jour là, il y’a des gens qui ont été gravement blessés et c’est moi qui panique comme une pauvre fille. » - C’était vraiment ce que je ressentais. Je n’avais pas envie d’être cette fille fragile et je m’en voulais de ne pas avoir été assez forte sur ce coup-là. Et d’ailleurs, j’avais une fois de plus été assez faible pour contracter une dépendance à mon traitement. Je me sentais bien avec ces cachets. Plus d’angoisse, plus de crise de panique. Les comprimés endormaient tout ça… peut-être même plus encore – « Ne t’en fais pas, maintenant ça va mieux et je me sens prête à retourner à Harvard. A reprendre ma vie comme avant. Tu me connais, même si je faiblis de temps à autre, je me relève toujours. » - Un sourire se fendillait sur mes lèvres. Je posais un instant ma main sur la sienne sur la table – « Mais merci de te faire du souci pour moi. Tu es vraiment le meilleur des cousins. » - Je relâchais sa main et ajoutais : « Même si ouais, tu ne peux pas t’empêcher de sortir toute ta science de médecin. » - Je riais légèrement.

Je déteste mentir et surtout aux gens que j’aime. Aux paroles de mon cousin, je me sentais encore plus mal et la culpabilité s’emparait de moi. Comment réagirait t-il si il apprenait que j’étais devenu dépendante, comme les jeunes dont il me parlait ? J’étais persuadée qu’il serait déçu de mon comportement. Si seulement il savait que je faisais parti de ces gens faibles. Il réussit cependant à me faire décrocher un sourire lorsqu’il me dit qu’il était le meilleur traitement à mes problèmes - « Tu as raison. Et qu’est-ce que je ferais sans ma dose de Thorn chaque jour ? » - J’aimais savoir mon cousin près de moi. On n’a pas eu l’occasion de passer beaucoup de moments ensemble lorsqu’on était petit et je le regrette. Heureusement pour nous, on rattrape le temps perdu maintenant. Tj est l’une des personnes qui compte le plus pour moi. D’ailleurs, c’est un peu l’homme de ma vie dans le sens où je sais qu’il en fera toujours parti. Je peux compter sur lui et il sait que c’est la même chose dans le sens inverse. C’est aussi pour ça que je me sens coupable de lui mentir. Si la vérité éclate un jour, il va penser que je ne lui fais pas confiance. Mais ce n’est pas ça. Je ne veux juste pas le décevoir et l’inquiéter de trop. Je ne veux pas qu’il voit à quel point je suis tombée bas. En tout cas, il semblait avoir cru à mon explication. Après tout, il y avait quand même beaucoup de vérité dans ce que je lui avais dit – « Oui, je sais, je suis vraiment la meilleure des cousines et tu ne pourrais pas te passer de moi. » - Lui répondis-je avec un faux air vantard. Il savait très bien que je plaisantais. Je suis une fille plutôt naturelle, loin d’être du genre à me vanter et à me croire la meilleure. Je suis loin de l’être… surtout en ce moment.

Le serveur arrivait avec notre bouteille de vin avant de remplir nos verres. Quand il prit congé, Thorn proposait de porter un toast – « Entièrement d’accord. » - Je tendais aussi mon verre et le faisait doucement cogner contre celui de Thorn – « A nous, les meilleurs ! » - Je souris et bus quelques gorgées avant de reposer le verre sur la table – « Au fait, tu n’as pas répondu à ma question… » - Je laissais passer un court silence – « Reaghan… tu sembles tenir à elle. » - Thorn savait que j’étais du genre à ne pas lâcher le morceau. Je suis entêtée, il le sait. Reaghan avait besoin de soutien, certes, mais pour être aussi présent pour elle, Tj devait être bien attaché à elle. Mon amie et mon cousin semblaient assez proches amicalement et j’étais contente qu’il s’entour d’une fille comme elle. Reaghan est une personne extraordinaire.