Jasmin Kyoung ► Lee Taemin

TW : mention de racisme, d'homophobie et de violences physiques (pas de détails) & psychophobie


Jasmin, le fils unique de deux expatriés coréens établis en France, petit trésor d'un couple qui ne pensait jamais avoir d'enfants, fruit et objet de tant d'espérances... Son prénom fut choisit avec une certaine application, ses parents désirant qu'il porte un prénom français pour ne pas se faire embêter par les autres enfants, mais aussi un prénom qui aurait une signification qui leur était chère. Ils voulaient que leur enfant soit un gentil garçon, intelligent, poli et aimant, un enfant facile qui ne ferait pas de remous.

Enfant, Jasmin allait souvent au parc, où il passait des heures à faire des couronnes de fleurs et de la balançoire. Il suivait des cours de musique et de danse, ses professeurs découvrant, au plus grand bonheur de ses parents, qu'il avait l'oreille absolue, et en quelque sorte un avantage. De plus, ayant déjà compris l'importance de bien étudier, il passait le reste de son temps à essayer de prendre de l'avance sur le programme. Comme ses parents le voulaient, il était d'un naturel doux et poli, curieux du monde et ses alentours. Comme ses parents le craignaient en revanche, il lui arrivait de se faire embêter par les autres enfants, victime de leur racisme ou d'autres remarques déplacées.

Pourtant, Jasmin il n'était jamais devenu un méchant garçon, se faisant marteler qu'il devait être indulgent, passif aux violences par sa mère. Son père lui avait parfois en aval suggéré d'être "un vrai homme", et de riposter, mais déjà trop sensible et soucieux de ne blesser personne, il ne l'avait jamais fait.

Pré-adolescent, Jasmin rencontra Clémentine, sa meilleure amie. Meilleure amie qu'il ne croisait qu'en revenant de l'école, avec qui il faisait le chemin le matin et le soir. Ils partageaient beaucoup de valeurs, se disputaient parfois, mais au fond il semblait évident qu'elle serait toujours là. Ils jouaient ensembles au parc, zigzaguant à toutes jambes entre les arbres pour fuir des monstres imaginaires que Jasmin voyaient pourtant. Mais Clémentine était là pour le protéger, et ils finissaient leurs après-midi au soleil à manger des petits gâteaux, enfants innocents qu'ils étaient.

Après trois ans d'amitié avec Clémentine, et avoir parlé d'elle maintes et maintes fois à ses parents, Jasmin trouva le temps opportun pour leur présenter celle qui lui était si chère. Après lui avoir ouvert, il l'avait présenté, sourire aux lèvres, ne s'attendant pas à la réaction qu'il allait savoir, à une phrase décisive qui fit se fissurer son monde :
"Jasmin, je ne vois personne..."
Et quand il se rendit compte qu'elle n'était vraiment plus là, il la chercha dans la maison des heures, s'écroulant en pleurs dans le salon. Ce déchirant évènement marqua le début d'une longue errance dans l'espoir de le "réparer".

Arrivé au collège, brutalisé pour son apparence, craignant chaque individu, son état empira, le rendant paranoïaque, sensible à des hallucinations plus brutales et choquantes... Les premières années de l'adolescence de Jasmin furent turbulentes, ses découvertes à propos de lui-même inquiétantes, et comme cet âge rend tout le monde si fragile, l'être délicat qu'il était déjà fut durement ébranlé. Découvrant son homosexualité au cours de sa 5ème, il garda la bouche cousue, sachant ses parents fortement homophobes, développant des complexes autour de son identité, son apparence, sa manière de s'habiller, jusqu'à son propre prénom. Traversant une dépression sévère durant son année de 3ème en plus de devoir gérer ses nombreuses hallucinations aux formes plus ou moins claires, les médecins décidèrent de le faire étudier depuis l'hôpital.

Même si Jasmin ne devint jamais un garçon turbulent, méchant ou un mauvais élève, il devint malgré tout une honte inavouable pour ses parents, un sujet qu'ils taisaient auprès de leurs amis. Ils ne disaient pas qu'il passait ses journées à l'hôpital, lui demandaient comment s'était passé l'école quand il revenait le soir, et l'adolescent se pliait toujours à cette pièce de théâtre. Il était un enfant normal devant les autres, seulement un enfant "cassé" quand les rideaux se fermaient. Un être effrayant qu'ils n'osaient plus appeler leur "fils", comme si le mot écorchait leurs gorges.

C'est avec les autres adolescents de l'hôpital qu'il se plût le plus, appris à s'aimer petits pas par petits pas. Oui, il était différent, pas comme on voudrait qu'il soit, mais si c'était son cerveau "cassé" qui avait crée une existence comme celle de Clémentine des années de cela, alors il ne voulait pas vivre loin de ce monde parallèle. Plutôt que malade, il se considérait comme vivant entre deux mondes. Même si cet autre monde que seul lui voyait, entendait et sentait était parfois effrayant, qu'il finissait blessé. C'était lui, il avait grandit avec.

Durant sa dernière année de lycée, Jasmin fit sa toute première requête aux médecins de l'hôpital : il voulait vivre sa vie d'étudiant dans le supérieur sans avoir à étudier à l'hôpital. On lui laissa plusieurs mois pour prouver qu'il en était capable, et l'adolescent s'efforça de prouver ses capacités.

Avec l'appui d'une psychologue et de ses professeurs, Jasmin avait convaincu ses parents de postuler à Harvard aux États-Unis, idée qui lui avait été soufflée par un ancien étudiant qu'il avait rencontré en ligne. Jamais il n'avait perdu ses prédispositions scolaires, et il trouva sa porte de sortie, loin de ses parents, de l'hôpital, des enfants qui l'avaient tourmenté, loin de Clémentine aussi...

"Sois prudent," avait juste dit sa mère avant de le laisser passer en salle d'embarquement.
Quelques part, il ne savait pas si c'était son esprit qui exagérait ou la réalité, mais il avait l'impression qu'on était contents qu'il parte. Plus d'enfant cassé, plus de honte.
"Au revoir, papa, maman"

Vivre à Harvard, être libre de ses parents et partiellement délivré de l'emprise de l'hôpital, se fut un tout nouveau monde. Il dû apprendre à faire les choses seuls... à aussi cacher ce qui ne devait pas être vu.
A Harvard, il ne cache pas vraiment son homosexualité, il n'essaie pas d'avoir un air exagérément masculin, il parle d'art ouvertement sans avoir besoin de parler de sciences pour qu'on ne se moque pas de lui, il n'est plus le seul non-blanc de l'établissement, et il redécouvre un peu la vie. Il expérimente, part dans de folles aventures, s'intéresse à tout et à rien, soucieux d'aider les autres et d'apprendre à les connaître.
A Harvard il a l'impression d'enfin être devenu plus proche de lui-même.

Mais c'est aussi à Harvard qu'il expérimenta sa première peine de coeur, cette première expérience qui fait qu'on a l'impression que le monde s'écroule et perd son sens.
Il rencontra ce garçon, sourire charmeur, odeur de café, chemise marron. Il le crût son ami, eut son premier crush, et ils sortirent ensembles.
Il aurait dû être plus prudent, peut-être... Peut-être aurait il dû se demander vraiment ce qu'il en était, et dans quelle réalité se trouvait chaque chose.
A Harvard, il a fini le cœur brisé quand il a remarqué que cette image et ces sons n'existaient que pour lui, qu'il s'était lui-même berné, peut-être parce qu'il avait trop pleuré quant à ce qui devait être un tournant de leur relation, on lui avait dit qu'il faisait peur, qu'il était bizarre parce qu'il avait essayé de s'ouvrir sur ses psychoses... Juste alors, oui, il l'avait oublié, mais son cerveau avait crée une jolie illusion, qui au final n'avait existé que pour le faire encore plus pleurer quand il découvrit ce qui s'était vraiment passé.

Jasmin, c'est le gamin qui espère que personne ne découvrira plus jamais la vérité, parce qu'il a peur qu'on le voit pour une personne effrayante et cassée. Pourtant il aimerait croire que le monde il est pas comme ça, que le monde il déteste pas les gens comme lui. Il aimerait croire qu'il a pas un corps en verre, qui se brise et le blesse sans cesse, il aimerait croire qu'il n'y a pas un monstre dans sa chambre, que le frigo n'est pas constamment ouvert même fermé... Pourtant c'est ce qu'il est. C'est ce qu'il est, mais abandonné désormais de gens qui puissent le comprendre, s'est remis à avoir honte et peur.
Comment donc pourrait il trouver sa place à nouveau ?