JAGHAN ₪ When you lose something you can't replace...

Ouais bien sûr que je comptais le boire et plutôt deux fois qu'une! Je me tenais devant le bar de la plage, attendant que le beau barman finisse de me confectionner le super cocktail à base de téquila, qu'il a lui même nommé "Démon de minuit". Oh oh... ce type me la joue Brian Flanagan. Vous savez, dans le film Cocktail? Ouais, non? Bref, je lui tend un billet et je m'empare ensuite de la boisson. En plus, il avait mis un joli parasol dessu. Je jetais un oeil à Sofia qui était en grande discussion avec un mec de sa maison. Je voulais la laisser tranquille, voir tous ses couples réunis sur la plage, ça me fichait un coup... Je m'éloignais donc du monde, pour me mettre un peu à l'écart. Je venais prendre place sur le sable, assise en tailleur. Je repensais à ma conversation avec Apple quelques heures plus tôt. Je soupirais. Décidément, j'étais à la ramasse moi dans ces histoires de couple. Je humais le cocktail. Il sentait bon les fruits rouges, d'ailleurs il en avait la couleur. Je prenais ensuite une gorgée. POUAAAAAh, ça du mal à passer. Je ferme les yeux. Comment les gens arrivent à se rendre ivre? Et à boire pour boire? J'en sais rien...Je sentais un frisson sur mes épaules. J'étais toujours en bikini mais j'avais mis un long t-shirt à bretelle au dessus. C'était beau, la plage, le soir, comme ça, seule, seule avec mon "Démon de minuit".

« La boisson alcoolisée, la moins alcoolisée que vous ayez. » Vu les yeux étonnés que lui adressait le barman, ce n'était pas une requête des plus courantes. Ouais, mais c'était la nouvelle résolution de Jasper pour ces vacances : en rester là où il était encore conscient de ce qu'il se passait autour de lui. Il n'avait aucune intention de réitérer dans le domaine de la connerie, qui cause larmes et tristesse. Ils étaient là pour fuir ce genre de sentiment, non ? En parlant de fuir ; une fois son cocktail à peine rehaussé d'une pointe d'alcool prêt, et saisit d'une main, il s’avança de quelques pas sur la plage. Celle-ci était bien plus calme que celle des précédents jours, et ça ne pouvait définitivement pas faire de mal au garçon, que de s'isoler un peu. Partir avec ses amis n'a pas que des avantages. Partir avec ceux qu'on est censé éviter, encore moins. Ses quelques pas le menèrent à quatre-cinq mètres de Reaghan, qu'il reconnu aisément du coin de l’œil. Ils étaient au même niveau, et pouvaient difficilement ne pas se voir. Levant les yeux au ciel, Jasper poussa un soupire, regrettant déjà cette résolution. En fait, il redoutait ce moment depuis qu'il avait aperçu son nom dans la liste des participants au voyage. Elle n'avait rien à foutre là. Égoïstement, il lui en voulait un peu de gâcher son voyage. Comment pouvait-il arrêter de penser à elle si même à des milliers de kilomètres d'Harvard, il la croisait à chaque mouvement de tête ?

Je croyais être tranquille, sur cette portion de sable, un peu à l'écart. J''étais assise avec à la main, un cocktail qui était finalement délicieux. Je reprenais une autre gorgée alors que la musique de la plage arrivait à mes oreilles. Je me sentais bien ici. Enfin jusqu'à ce que mon regard ne croise celui de Jasper. Je me doutais qu'il serait du voyage, mais j'aurais préféré ne pas tomber dessus à chaque fois que je sortais de ma chambre d'hôtel. Je n'avais toujours pas oublié tout ce qu'il m'avait dit. Et franchement, j'allais avoir du mal à oublier. Mais je n'avais pas envie qu'il me gâche mes vacances, plus qu'il ne l'avait déjà fait. J'avais autant de droit que lui, de me trouver ici. D'ailleurs son attitude m'exaspérait. Je l'observais à nouveau alors qu'il restait planté là à quelques mètres de moi comme un piquet. Je me redressais pour lui faire face. S'il pensait que j'allais quitter les lieux parce qu'il était là, il se mettait le doigt dans l'œil. Je venais vers lui, mon cocktail à la main. « Ellington... » Ouais parce que moi, j'avais assez de classe pour lui adresser la parole et ne pas me comporter comme une gamine de douze ans. Je l'observais tout en m'approchant de lui : « Tu as oublié ton ordi? » Puis je me rendais compte que j'étais un peu trop près. Je reculais. « Oh excuse-moi, je ne voudrais pas empiéter sur ton espace vital. » Je prenais une gorgée de mon cocktail avant d'ajouter: « Je vois que tu passes de bonnes vacances, ça m'enchante...même si je ne savais pas que fourrer ta langue dans la bouche d'une fille déjà en couple, était un de tes passe-temps. » Je lui souriais, ouais mais pas le sourire joyeux que vous connaissez. J'étais blessée par son attitude, encore une fois. Mais je commençais à avoir l'habitude.

Jasper boirait deux-trois gorgées, et retournerait à l'hotel. Juste assez pour faire le mec qui assume, mais pas trop, pour ne pas rendre ça gênant. Restons dans cet accord tacite qu'on ne s'est pas vraiment vus. Sauf que Reaghan a plus de courage, ou au moins de rage, et se déplace jusqu'à lui. De front, sans ciller. Oh, on était bien loin de la fragile jeune femme de l’hôpital, s'effondrant à chaque réplique du vilain. Jasper resta interdit, comme étourdit pas les salves d'attaques de Reaghan. En fait, si lui n'avait pas mâché ses mots à son encontre, il avait toujours eu du mal à s'imaginer la situation inverse. Écarquillant les yeux, ses traits se muèrent en une expression dubitative. Il se passait quoi, là ? Ce n'était pas pour rien qu'il avait demandé expressément qu'ils s'en tiennent au silence absolu. L'ignorance. Afin d'éviter ce genre de situation, cette réouverture des plaies ayant à peine commencées à cicatriser. Le garçon observait la fille, le nez plongé dans son verre, se demandant où et quand elle allait s'arrêter. Il ne bronche pas, se contentant de faire bouillir son sang. Elle avait vraiment mal choisit son sujet. Sujet dont elle n'aurait pas du avoir connaissance d'ailleurs, elle n'était pas sur la plage si ? Poppy n’étalerait pas ça et Aaron.. Bref, il camoufla sa légère décontenance par un brin d'arrogance : « Il y a tellement de choses que tu ne connais pas sur moi, Evers. » Soulignant son nom en se penchant légèrement vers elle. C'est comme ça désormais, visiblement, on a plus la courtoisie des prénoms. « Comment tu sais ça ? » Puis corrige, juste après : « Peu importe. » Il n'avait surtout pas envie de savoir. Que le bruit ai couru ou qu'elle les ai vu, ce n'était pas bon pour lui. « Rappelle moi depuis quand ça te concerne ce que je fais de ma langue ? » Elle était vraiment mal placée pour se la jouer gardienne de moralité. Ce n'était définitivement pas son domaine de compétence.

Je ne savais pas pourquoi il agissait de cette façon. Je l'observais. Il semblait surpris par mon aplomb. Oui, je n'étais pas une petite chose fragile. Je venais de sortir du coma quand il m'avait asséné toutes ces paroles cruelles. Je n'étais pas prête à entendre tout ça. Je ne le voulais pas. Je croyais qu'il tenait à moi et j'étais tombée de très haut. Mais le Dunster semblait oublié que j'étais une fille avec du caractère. C'était ce qui lui avait plu à notre rencontre, nos piques, nos joutes verbales. J'étais cette fille là. Alors je n'étais pas décidé à me laisser faire, surtout pas quand il se comportait de cette façon. Je l'observais quand il reprit la parole. Oui, apparemment je ne le connaissais pas. Puis à sa question, je ne pouvais m'empêcher de répliquer. « Si tu ne voulais pas qu'on sache, il ne fallait pas l'embrasser dans un lieu public » Mon cœur battait la chamade. Je croyais m'être forgée une carapace face à ces répliques acerbes mais non. Je les avais vu s'embrasser et ça m'avait fait un mal de chien. Je me demandais s'il le faisait exprès, de me torturer comme il le faisait. Est-ce que c'était sa vengeance? Il pouvait être fier de lui, ça marchait très bien. J'étais lasse de cette situation. « Tu as raison. C'est ta vie. » Je serrais les dents. Comment avais-je pu me tromper à ce point? L'amour rend aveugle disait-on? Oui, et aussi sourd et conne par la même occasion. Ça m'attristait. Je relevais les yeux sur lui. « Je sais que j'ai fais une erreur. Je sais aussi maintenant, que tu ne partages pas mes sentiments et que tu ne me pardonnera jamais mais... » Je soupirais. « … j'ai l'impression que tu prends un malin plaisir à me blesser. J'aimerai que ça s'arrête. » Est-ce que j'allais devoir payer longtemps pour tout ça? Je baissais les yeux, fatiguée. « Le Jasper d'avant me manque. » J'avais l'impression de ne pas connaître celui qui me faisait face. Ce n'étais pas de cet homme que j'étais tombée amoureuse.

Ca n'aurait jamais du se passer comme ça. Tout ça, toute cette histoire. Reaghan et lui. Ca devait pas se passer comme ça. Elle n'aurait pas du être malade, ils seraient toujours ensemble, et ils auraient profité de ce voyage en Thaïlande à deux, plutôt que de s'éviter. Ce voyage était un cauchemar, et Jasper regrettait le confort de sa chambre, la constance de son quotidien. Car même la beauté du paysage ne pouvait rattraper la laideur de ce qui était entrain de se passer, là, sur la plage. Fatigué de s'expliquer, Jasper ne fit que pousser un profond soupire, détournant son regard vers la mer, lorsque la demoiselle lui reprocha l'aspect public de sa légère incartade. Dans cette affaire, il avait déjà perdu un ami, peut-être deux, alors il s'estimait suffisamment punit pour quelques secondes d'errance, sans guère d'importance. Quand bien même, célibataire, Jasper n'avait trompé qui-que ce soit. Il se raccrochait à cette idée. Dans la situation inverse, le garçon aurait surement réagit de façon moins civilisée. Assurément même, il n'aurait jamais supporté de voir Reaghan avec quelqu'un d'autre que lui. C'est peut-être pour ça qu'il, plus calmement, reprit : « T'en sais rien. Strictement rien. T'as pas la moindre idée de ce que je ressens. » C'était de sa faute, il ne lui avait rien montré d'autres que de la haine. Il détourna enfin le regard de l'étendue bleue pour affronter ceux identiques de son ancienne complice. « Tu crois vraiment que ça me fait plaisir cette situation ? » Il recula d'un pas, presque blessé qu'elle puisse penser qu'il était aussi mauvais que ça. Il n'allait pas s'effondrer sur la plage là, il avait trop d'ego pour ça, mais ce n'est pas la tristesse qui manquait pour le faire. « Si ça peut t'aider de croire que je fais tout pour te rendre la vie pénible, que je ne ressens rien pour toi.. » Ses traits se crispèrent légèrement, tandis qu'il continuait : « Avec Poppy c'était une connerie. On était ivres morts, ça n'a pas d'importance. », se justifiant sans vraiment le vouloir. Mais lui, à sa place, aurait aimé le savoir qu'il ne l'avait pas remplacé aussi vite. Comme quoi il n'y avait ni ancien, ni nouveau Jasper. Juste un type qui réagit comme il peut aux obstacles qui se placent sur sa route.

Je l'observais alors qu'il prenait la parole. Oui, je ne savais rien, strictement rien. Parce qu'à chaque fois que nos chemins, nos regards se croisaient, c'était toujours la même chose: de l'indifférence, de la colère, de la frustration peut-être. J'avais l'impression que l'on n'arriverait plus jamais à se comprendre. Je me sentais si loin de l'homme avec qui je partageait mes cafés matinaux, avec qui j'arpentais les allées de Harvard tout en parlant des dernières technologies. Je n'y connaissais rien mais le fait de le voir me parler de tout ça avec un tel entrain, me faisait complètement craquer et je ne lui disais rien. Je me contentais de l'écouter, un grand sourire sur les lèvres. A ses mots, je l'observais à nouveau. « Je crois avoir une idée. Tu as été assez... explicite à l'hôpital... » Je soupirais. Je me souvenais de chacune de ses paroles assassines. Elles étaient à présent gravées en moi et à chaque fois que mes yeux bleus se posaient sur lui, tout me revenait à la figure. Je n'avais pas l'impression qu'il soit le plus malheureux des hommes quand je le croisais. « Ooh arrête! Rien ne m'aide là, tu m'entends! Rien! » Je commençais à m'emporter de nouveau. Je détestais le ton qu'il prenait quand il me parlait. Comme si j'inventais tout et que je le faisais passer pour le pire des salauds. Je fronçais les sourcils à ces dernières paroles. Poppy? C'était quoi ce prénom? Je serrais les dents alors que mon cœur battait toujours la chamade. « Pas d'importance... » Mon ton s'était radouci, comme si je m'étais parlé à moi même. « On a échangé deux baisers... » Je me souvenais de ce moment dans toute sa précision. « Pour moi ils avaient plus d'importance que tout autre chose. Parce que c'était un moment qu'on partageait tous les deux. Parce que ça représentait bien plus... » Je soupirais une nouvelle fois. « Alors un baiser, ce n'est jamais sans importance... » Enfin pour moi en tout cas. Je me serais jamais permise d'embrasser quelqu'un pour qui je ne ressentais rien. Je finis par m'asseoir à nouveau sur le sable. Je n'avais pas envie de me disputer davantage avec lui. Il était célibataire, il n'avait aucun compte à me rendre, comme il l'avait si bien dit.

Les conflits n'étaient pas son fort. Certains s'en délectaient. Lui, les fuyait. Jasper abandonnait le combat avant qu'il ai lieu, s'il le pouvait. Ca ne faisait pas de lui un pacifiste, loin de là. S'il pouvait remercier papa-maman de lui avoir donné des traits harmonieux et bienveillants, sa gentillesse souveraine, pouvait allègrement se muer en une rage souterraine. Le coup venait de nul part, et souvent, n'était même pas signé de sa main. Le privilège de l'intelligence, comme il aime le rappeler. Malgré la blessure, le garçon n'avait jamais, ne serait-ce que penser, s'en prendre de la sorte à Reaghan. Car elle n'était jamais aussi belle que lorsqu'elle était heureuse. Car, malgré tout, malgré les mensonges, elle avait représenté un futur auquel il tenait. Même si ce futur faisait se tendre ses muscles présentement. « J'étais en colère. J'avais le droit de l'être. » Qu'il glisse entre ses dents serrées. Lui rappeler ce moment n'était guère judicieux. Hausser le ton non plus. Il ne savait plus quelle stratégie adopter. Que dire pour que les choses s'apaisent, au lieu de s'empirer à chaque réplique. Si appréhender le lendemain était difficile en sachant qu'il était convenu qu'ils s'ignorent, il devenait impossible si à chacun de leurs croisements, ils se jetaient au visage toute la rancœur accumulée. Tout ça, car de toute évidence, ils campaient chacun d'un côté de la route. A une même situation ils y voyaient des significations différentes. Comment lutter contre ça ? Alors que Jasper traitait son baiser avec son amie avec le peu d'importance qu'il méritait, Reaghan parlait des leurs. Ce qui était incomparable, sous tous les points. Elle s'assit, et il prit place à côté d'elle après s'être accordé quelques secondes de réflexion, allongeant ses jambes devant lui. « Ca l'est, si on sait que ça ne représente rien pour l'un et l'autre. » Son ton est posé, calme. Car elle ne connaît pas grand chose de lui, et surtout pas son passé. Et puis, le garçon y voit là une occasion de la prendre par la main, et l'emmener sur le trottoir d'en face, de son côté de la route. « Je le sais car on a déjà essayé, elle et moi. Et c'était dramatique. » Il eu un léger rire. « Mais vraiment, dramatique. On sait pas être autre-chose que des amis, et on l'a accepté depuis longtemps. » Ce que les autres en pensent, peu importe après tout, tant qu'eux deux savaient. Trois, même. Jasper voulait que Reaghan le croit. Il scruta ses traits pour y tenter une lecture, avant de continuer, dans un murmure, le regard maintenant jeté dans les vagues. « Je ne pourrais pas embrasser quelqu'un, et que ca ai une importance, une signification, avant longtemps. » La blonde était bien trop présente dans ses pensées pour cela.

En colère oui mais il n'empêche qu'il avait dit des paroles blessantes. Et que s'il les avait dit, c'est qu'il les passait dans un sens. Il pensait que j'étais égoïste, lâche. Que je n'étais qu'une gamine. C'est qu'il me connaissait mal alors... comme quoi nous nous étions fourvoyés tous les deux. Assise sur le sable, je préférais me taire. J'avais l'impression que nous étions dans une conversation sans fin. Sans une fin qui pourrait me convenir en tout cas. Et je savais reconnaître les causes perdues. Et ce qui s'était passé entre nous, en était une, malheureusement. Je repliais mes jambes alors que j'avais posé mon verre près de moi. J'étais surprise ensuite de voir Jasper s'asseoir près de moi. Je tournais mon visage vers moi. Nous n'étions pas censé nous éviter? Qu'il se rassure, je n'allais plus faire d'esclandre. Je reportais mon regard devant moi alors qu'il reprenait la parole. Et à mesure qu'il parlait, je me disais de plus en plus que j'étais vraiment pas douée pour tout ça. L'amour, les mecs, franchement c'était bien trop compliqué... Je reprenais mon verre pour en boire une gorgée. J'avais pincé la paille entre mes lèvres et j'aspirais le contenu tout en me demandant pourquoi il me racontait tout ça. Ils étaient amis et alors? Est-ce que les voir s'embrasser était moins douloureux maintenant que je savais ça? Non. Je dirais même que savoir qu'il s'était passé quelque chose avec « Poppy » me rendait encore plus jalouse. J'étais jalouse, impulsive et rancunière, ce qui ne m'aidait pas dans cette situation. Je reportais ensuite mon regard sur Jasper. Je restais silencieuse un instant avant de demander. « Pourquoi est-ce que tu me dis tout ça? » Est-ce qu'il voulait que je crois ces paroles? Et même si je le crois, à quoi ça va me servir tout ça? De savoir que c'était un moment d'égarement entre deux personnes ivres? Puis quand il reprit la parole, je restais interdite quelques secondes. Puis je répondais: « Oui... et bien je plains cette pauvre fille qui aura à te supporter... » J'avais dis ces mots avec un léger sourire, même si dans un sens cela me faisait mal. « … parce que tu es le garçon le plus compliqué que je connaisse... » Je le regardais à nouveau tout en me demandant s'il m'en voulait encore...

Jasper était partagé. Autant que cette fois, à l’hôpital. En fait, il était constamment tiraillé par son besoin de sécurité et ses envies. Peut-on vraiment le blâmer de se protéger, de ne pas vouloir souffrir ? La vie est suffisamment compliquée, pour ne pas en plus s'infliger des obstacles supplémentaires. Ses épaules étaient larges, mais peut-être pas assez. Les histoires d'amour c'était vraiment pas son domaine de prédilection. Trop fier, trop égoïste, trop têtu. Pas étonnant qu'aucune histoire n'ai tenu la route, souvent par sa faute. Là, il acceptait de partager les tords en s’asseyant aux côtés de Reaghan. Son propre intérêt n'était pas loin : peut-être serait-ce plus simple de s'essayer à une relation cordiale, plutôt que de s'ignorer. Il avait essayé pendant quelques semaines, et le résultat était carrément désastreux. Il souffrait bien moins sur cette plage, que seul dans sa chambre à ruminer le désastre. Déjà car le ton employé par l'un et l'autre s'était apaisé. Le garçon venait de s'expliquer, mais cela ne semblait pas complètement satisfaisant. « .. Je voulais que tu saches que ce n'était pas comparable. » Il se serait bien excusé de lui avoir imposé cette vision, mais qu'en pouvait-il ? Il y a certaines choses qui ne sont pas réparables. Lui ôter cette image de son esprit, il en était bien incapable. Mais atténuer la douleur qu'elle avait provoqué, il pouvait essayer. En fait, à ce moment, les yeux perdus sur ce paysage magnifique, Jasper se met un instant à la place de Reaghan. Il n'aurait pas supporté de la voir avec quelqu'un d'autre. Il le savait. Car si de nombreuses parties de lui-même lui en voulait toujours, le manque de sa présence commençait à les faire taire, posant alors la question des priorités. Peut-être méritait-elle un instant de pause. Baissons les armes, juste pour quelques minutes. Le temps de respirer. Ainsi il réponds : « C'est ce qui fait mon charme. » avec un léger sourire amusé. Enfin, c'est sûrement trop tôt pour en plaisanter, alors il se ravise : « Ou qui l'enlève, je sais pas vraiment. » Tient, Jasper prendrait-il enfin conscience d'y être pour beaucoup dans cette débâcle ? Sa main libre s'enfonce dans le sable, ses lèvres s'entrouvrent, hésitent, et se lancent. « Je suis désolé d'avoir réagit de façon si.. virulente, à l’hôpital. J'aurais pu dire les choses plus calmement. Ou pour certaines, ne pas les dire du tout. » Parmi toute la vérité dite cruellement, il y avait des choses faites juste pour la mettre à terre, gratuites, non pensées. Une blessure infligée pour une subite. « J'étais en colère, déçu, cela faisait des semaines que je vivais en apnée. » Plus une explication que des éléments pour l'excuser. Il ne se rappelait pas avoir déjà passé des jours aussi pénibles, à son chevet. C'est l'inconvénient d'une vie passée sans souffrance. Sa première apparition est brutale.