Appel de Katalia à Neal

La nuit avait été longue. Sans fin. Intense. Sublime. Désastreuse. Salvatrice. Je ne savais plus trop pour tout vous confier. Tout se mélangeaient violemment à l’intérieur de ma tête tandis que je gigotais seul dans mon lit m’éveillant de ce sommeil agité qui me collait à la peau depuis des semaines. Seul ? Mes sourcils se fronçaient et je me redressais en gémissant sous la douleur qui me parcourait partout. Ouais, j’étais bel et bien seul au sein de mon appartement. Seul au sein de ce lit un peu trop grand. Et, putain, qu’est-ce que j’avais foutu pour avoir mal comme ça ? Mes prunelles se posaient un instant sur le réveil de ma chambre indiquant que midi approchait et je me levais de mon lit. Tanguant difficilement dans mes déplacements, je m’arrêtais à la salle de bain pour jeter un regard à mon reflet. Pâle. Malade. Cerné. Mes blessures de jeudi ne s’étaient toujours pas atténuées et je… Oh bordel, attendez, est-ce que j’avais des suçons sur le peau ? M’approchant un peu plus du miroir, je manquais de tomber et j’oubliais bien vite mon inspection. Il fallait que je me recouche. Je me sentais tellement épuisé. C’était sans doute la faute à l’alcool et aux pilules que j’avais ingurgité hier poussé par la voix à l’intérieur de ma tête. C’était sans doute à cause de cette inconscience qui était venue me cueillir sur la plage. Cette inconscience dont Caesar m’avait fait sortir me poussant à vomir et à revenir dans le monde des vivants. Dans cet Enfer incessant. Dans ce cauchemar ambulant. Passant de l’eau sur mon visage, je finissais par faire demi-tour pour rejoindre de nouveau mon lit où je me laissais tomber. J’étais presque prêt à plonger de nouveau dans un semi-sommeil qui risquait de me réveiller dans quelques minutes. J’étais presque prêt à glisser dans cette inconscience bénéfique pour quelques minutes peut-être avant de me faire bouffer par l’horreur de ma tête. Ouais, j’étais presque prêt. Mais, cela ne pouvait guère arriver.

Mon téléphone sonnait à côté de moi et je soupirais avant de tendre le bras pour l’attraper. De nombreuses notifications en absences venaient envahir mon écran et j’hésitais un bref instant à tout éteindre. Je voulais avoir la paix. Je désirais qu’on me laisse tranquille. Néanmoins, mon attention se reposait sur les messages que j’avais reçu. Katalia m’avait écrit la veille ainsi que Summer ce matin. Répondant rapidement à ma Wifey pour éviter qu’elle se fasse du soucis, je prenais ensuite le temps d’écrire un rapide texto à Kat’. Mon message était bref et il laissait clairement sous-entendre que je n’avais aucune envie de plonger dans une discussion. Oh non. Je ne voulais guère me perdre dans des conversations qui s’éternisaient et qui ne servaient à rien. Je n’avais aucune envie de tenter de faire la papote alors que tout allait aussi mal à l’intérieur de mon existence. J’allais trop mal pour parler sans but. Malheureusement pour moi, la belle Italienne ne semblait guère saisir le message puisque son nom s’affichait en gros sur mon écran. Un appel. Et merde ! Jurant un instant, je finissais par décrocher conscient que, si je ne le faisais pas, elle risquait de débarquer chez moi et ça je ne le voulais pas. Pas dans mon état. N’ayant aucune envie de coller le téléphone à mon oreille, je le basculais sur haut parleur sans attendre me laissant retomber dans mon lit en gémissant de douleur. J’entendais Katalia me souffler qu’elle était aussi dans son lit et je fronçais les sourcils n’y comprenant strictement rien. Pourquoi m’appeler pour me dire ça ? Me contentant de marmonner un « Okay Kat’… », je me plongeais alors dans le silence incapable de savoir ce que j’étais censé lui dire. Je ne comprenais pas ce coup de fil. Je ne comprenais pas le sens de cette conversation. Que me voulait-elle ? Posant le téléphone sur l’oreiller à mes côtés, je fermais les yeux avant de demander « Qu’est-ce que tu veux mon Ange ? » Ma voix était douce et fatiguée. Je n’étais pas en état de m’énerver. J’étais trop épuisé. J’étais si mal en point.

Le téléphone posé sur l’oreiller à mes côtés, je fermais doucement les yeux comme si j’avais le fol espoir de pouvoir me rendormir grâce au son de la voix de Katalia. Après tout, sa voix m’avait accompagné tellement de fois que peut-être je parviendrais à sombrer sans trop de difficulté. J’en avais tellement besoin après cette nuit. J’en avais si follement envie après ces longues semaines à sombrer. Malheureusement pour moi, la voix de mon Ange ne résonnait pas de la bonne manière. Non. Elle venait prendre la parole d’une façon un peu trop agaçante. Vous savez ça ressemblait à la voix d’une petite sœur qui faisait tout pour vous foutre les nerfs. C’était la voix d’une petite sœur qui semblait vouloir chercher la petite bête pour provoquer la dispute. Elle me soufflait que la prochaine fois que je postais une photo comme ça et que je ne lui donnais pas de nouvelles pendant des heures c’était terminé. Mes prunelles s’ouvraient soudainement. Mon cœur s’agitait un peu trop follement. Mon ventre se tordait si réellement. Terminé ? Sourcils froncés, je ne parvenais pas à croire que la belle Italienne osait me souffler de tels mots aujourd’hui. Elle savait pourtant bien que j’étais au bord du gouffre non ? Non… Peut-être qu’elle ne le savait pas vraiment. Peut-être qu’elle n’avait pas encore fait le rapprochement. Néanmoins, elle aurait dû s’en douter sans que je n’ai à souffler les mots. Elle avait connaissance de mon trouble et de mon attachement que ce soit pour Lukas ou pour Nixon. Elle aurait dû capter que j’étais en train de sombrer sans rien pouvoir y faire. Elle aurait dû voir que je glissais et que je ne trouvais pas la moindre prise pour remonter et m’en sortir. Mais, non, elle ne voyait pas et elle osait me souffler de tels mots. Mon sang ne faisait qu’un tour et je répliquais froidement « J’ai essayé de te joindre hier Kat’. Avant la photo, j’ai essayé de t’appeler et t’étais sur messagerie alors ne viens pas me souffler de tels mots. T’as pas le droit ! » Non, elle n’avait guère le droit de faire ça. J’avais fait des efforts. J’avais tenter de tout stopper. Réellement. Violemment. J’avais pris sur moi. J’avais essayé. J’avais tenu. Des jours… Des heures… Alors, elle ne pouvait pas me faire ça. Encore moins sans être au courant de tout ce qu’il s’était passé. De toute manière, je ne comptais guère lui dire. Je ne voulais pas lui avouer que j’avais sombré dans l’inconscience hier et que, sans la présence de Caesar, j’y serais peut-être resté.

Soupirant longuement, je laissais le silence s’installer entre nous parce que je n’avais plus rien à dire. Je ne voulais plus rien dire. Je n’avais aucune envie de me prendre la tête avec la demoiselle qui n’était même pas venue avec moi à la battue. Je n’avais aucune envie de parler. Le silence restait un moment à l’autre bout de ce téléphone. Ce silence que je détestais parce qu’il me faisait revenir des mois en arrière. Il me poussait à replonger dans les souvenirs de ces mois où ma relation avec Katalia avait été bancale. Ces mois où nous nous étions un peu trop déchiré à cause des aveux sur mon passé et de ceux concernant Summer. Je n’avais aucune envie de replonger dans cet Enfer qui me brisait le cœur. Je ne voulais pas vivre cette histoire une nouvelle fois. Malheureusement pour moi, ce n’était guère à moi de prendre la décision. Je n’étais pas en état de faire un choix. Kat’ risquait bien de le faire toute seule et ce serait sans moi. Je finissais d’ailleurs par marmonner un bref « D’solé » comme pour me décharger de toutes responsabilités si les choses tournaient mal. Et, soudainement, d’une voix sèche, l’Italienne m’annonçait que son ex petit-ami Ottis avait un cancer et qu’il allait mourir. Fermant les yeux, je sifflais un « F*ck ! » sans pouvoir m’en empêcher. Il fallait vraiment que tout nous tombe dessus en ce moment ? Apparemment, il était impossible que les choses se calment. Il était impossible de cesser de couler. Tout venait nous charcuter encore et toujours. Me redressant dans mon lit, je grimaçais sous la douleur avant de jeter un œil à mon réveil. J’hésitais quelques secondes et… Non. Franchement, vu mon état, je n’avais aucune envie de me présenter devant Katalia aujourd’hui. Je n’étais pas capable de faire bonne figure. Je n’étais pas en mesure d’encaisser son mal-être en plus du mien. Basculant mes jambes sur le sol, je déposais mes coudes sur mes genoux ne sachant même plus quels mots j’étais censé prononcer. Tendant le bras, j’attrapais une cigarette que je glissais entre mes lèvres et que j’’allumais bien vite avant de me tourner vers mon téléphone toujours posé sur l’oreiller. Et, je soufflais doucement « C’pour ça qu’il a rompu avec toi hein ? » À vrai dire, ma question était rhétorique. Je n’attendais même pas de réponse. Je m’en doutais d’avance. Et, là, soudainement, je ne pouvais plus détester ce mec même s’il avait fait tant de mal à mon Ange. Je ne pouvais pas le haïr parce que je savais que j’aurai sans doute agi de la même manière que lui. Éloigner les proches pour ne pas les entraîner dans cette spirale. Passant une main nerveuse dans mes cheveux, je finissais par l’interroger « Qu’est-ce que tu vas faire ? Qu’est-ce que vous aller faire ? Je… Tu… Comment tu te sens ? » Attrapant le téléphone, je le déposais sur ma table de nuit et je me mettais à faire les cent pas dans la pièce tirant sur ma clope comme pour m’aider à gérer cette nouvelle. Comme pour m’aider à encaisser et à apporter mon aide à celle que je considérais comme ma petite sœur. Mettre de côté tout ce qui me bouffait pour m’occuper d’elle… Je devais y arriver.

Il était sûr et certain que je n’allais pas pouvoir me rendormir maintenant. Je le savais à l’instant même où la voix de Katalia résonna une nouvelle fois dans ma chambre grâce au haut parleur de mon mobile. Je le savais parce qu’elle prenait cette voix un peu trop agaçante qui cherchait à me foutre les nerfs. Je le savais parce qu’elle était en train de chercher la petite bête dans toute cette histoire. Cette petite bête qui avait le pouvoir de tout faire éclater en un rien de temps. Les mots que la brunette soufflait me percutaient violemment et j’ouvrais finalement les yeux. J’étais totalement réveillé suite à cette réalité probable qu’elle dessinait. J’étais un peu trop paniqué à l’idée qu’elle m’abandonne. J’étais si follement agacé à l’idée qu’elle me fasse subir ça dans le contexte actuel. Honnêtement, je n’avais pas besoin de subir ça après la soirée que je venais de vivre. Je n’avais pas besoin de subir ce retournement de situation en plus de tout ce qui pouvait s’abattre sur moi ces dernières semaines. C’était trop. C’était beaucoup trop. Mon cœur s’agitait follement dans ma poitrine et j’y portais la main par automatisme. Ça me faisait mal. Aussi mal qu’hier soir lorsque mon myocarde s’était remis à battre. Ma langue glissait sur mes lèvres et je me demandais si je n’allais pas vomir une nouvelle fois. L’horreur m’entourait. Elle me compressait si vivement et je regrettais que ma vie ne se soit pas terminée hier. Je me sentais comme un funambule au bord de la falaise du gouffre. Les mots de Katalia faisaient trembler la corde et je peinais à garder mon équilibre. C’était trop. J’allais tomber. J’allais chuter. J’aurai pu tenter d’ignorer les tremblements et continuer d’avancer. J’aurai pu simplement accepter une chute et m’excuser en espérant que cela suffirait pour que je puisse me raccrocher. Néanmoins, ce n’était pas ce que je faisais. Oh non. Mon sang s’échauffait un peu trop. Je tremblais tellement que je chutais tout seul de cette corde imaginaire avant de me rattraper. Et, sans plus attendre, je répliquais froidement mettant en avant la responsabilité de l’Italienne. J’avais essayé moi. Réellement. J’avais fais des efforts pour ne pas plonger et lui laisser l’occasion de me secourir. Kat’ soufflait dans le combiné et je savais qu’elle tentait de prendre sur elle pour ne pas s’agacer. Je savais qu’elle essayait de contrôler sa colère et sa peur. Elle y parvenait se contentant de souffler un accord qui ne me plaisait pourtant pas. Ça sonnait trop faux. Ça sonnait si froid. Alors, comme pour la pousser à réellement se calmer et cesser d’imaginer le pire, j’ajoutais « J’suis pas resté tout seul très longtemps… Caesar est venu me rejoindre… » Je soufflais ces mots juste pour qu’elle sache que je n’avais pas fait de conneries sur cette plage puisque je n’avais pas été seul. Bon… Ok… Ce n’était pas vrai… J’étais resté suffisamment longtemps pour faire une connerie avant d’être sauvé par Caesar. Mais, ça, elle n’avait pas besoin de le savoir. Alors, pour son bien-être, je gardais le silence sur cette histoire.

Le silence s’instaurait beaucoup trop longtemps d’ailleurs. Il n’y avait plus le moindre mot qui se faisait entendre et je sentais mon ventre se tordre encore plus. Ça faisait mal. Tellement mal. Alors, je finissais par reprendre la parole pour marmonner des excuses. Je ne savais pas trop si j’étais censé en souffler ou si c’était plutôt à elle de le faire. Néanmoins, je ne voulais pas ressentir la culpabilité d’un déchirement au sein de notre Kataneal alors je cédais du terrain et j’acceptais de m’excuser. Et, là, sans que je ne m’y attende, la nouvelle tombait. Elle éclatait soudainement à l’autre bout du combiné. Inattendue. Réelle. Douloureuse. C’était comme si quelqu’un venait chopper un verre pour le laisser tomber au sol juste sous mes yeux. Ottis avait un cancer. Ok, je ne connaissais pas le jeune homme plus que cela. Je l’avais croisé à quelques reprises sans pour autant me lier follement avec lui. Je l’avais apprécié parce qu’il rendait ma Kat’ heureuse. Je l’avais apprécié parce qu’il semblait réellement aimer mon ange. Et j’avais commencé à le détester lorsqu’il avait brisé le cœur de ma petite sœur. Sauf qu’à présent… Avec cette nouvelle, je ne pouvais plus le haïr. Je le comprenais. Fermant les yeux, le juron quittait mes lèvres. Tout était en train de nous tomber dessus. Il semblait impossible que les choses se calment. Il semblait impossible de passer un peu de temps sans mauvaises nouvelles. Me redressant sur mon lit, je grimaçais de douleur avant de chopper une cigarette que je coinçais entre mes lèvres. Mon cerveau bouillonnait. Est-ce que je devais aller voir Katalia ? Non. Putain, non, je ne pouvais pas. Je n’étais pas en état de faire face à la brune. Alors, qu’est-ce que je devais lui souffler ? Je posais une question rhétorique. Je laissais glisser beaucoup trop de questions avant de poser le mobile sur ma table de nuit et de me mettre à marcher dans la chambre. J’entendais Kat’ me dire qu’elle ne savait pas avant de renifler. Et elle enchaînait me disant que ça n’allait pas. Lukas… Mon cœur se brisait en l’entendant souffler ce prénom et je mordais violemment ma lèvre pour retenir le sanglot qui menaçait de glisser. Rosalia et maintenant ça. Les sanglots de mon Ange résonnaient venant me briser le cœur alors qu’elle me disait qu’il n’y avait pas de ‘on’ puisqu’il lui avait fait comprendre qu’il ne voulait plus d’elle. Je jurais dans ma barbe tout seul tournant en rond comme un fauve en cage. Tirant sur ma cigarette, je finissais par souffler « Je… Je suis sincèrement désolé mon Ange… »s Désolé qu’elle vive tout cela. Désolé qu’elle doive affronter toutes ces choses. Désolé de ne pas être suffisamment présent pour l’aider comme il le fallait. Désolé qu’elle subisse un tel enfer. Me laissant retomber sur mon lit, je demandais « Est-ce que je… Est-ce que j’peux faire quelque chose ? » J’étais trop perdu pour savoir quoi faire. J’étais beaucoup trop à l’ouest pour réfléchir à ce que j’étais censé faire. Alors, je lui demandais de l’aide. Je cherchais à savoir ce qu’elle attendait de moi. Ce qu’elle voulait de moi.

Je ne savais guère comment répondre à la belle Italienne lorsqu’elle m’annonçait être à bout avec toutes ces choses qui nous tombaient dessus. Toutes ces choses qui lui tombaient dessus sans qu’elle n’ait rien demandé. Ottis avait rompu avec elle alors que, merde, ils semblaient être un couple heureux et fonctionnel. Ils semblaient avoir une belle histoire à vous en faire rêver… Enfin, jusqu’à ce que tout vole en éclat malheureusement. Après ça, Lukas avait disparu de façon officielle tout comme Rosalia quelques jours après. Des disparitions trop floues dont on ne savait pas grand-chose et qui ne faisaient qu’augmenter l’angoisse et la dépression. Et, maintenant voilà qu’elle apprenait qu’Ottis – l’homme qu’elle avait aimé et qu’elle aimait sans doute encore beaucoup trop – avait un cancer. Allait-il pouvoir en guérir ? La question n’avait pas glissé entre mes lèvres parce que je ne voulais pas savoir. Je n’étais pas prêt à encaisser ce genre d’information. Avec notre chance toute pourrie, la réponse risquait d’être négative et je ne voulais pas entendre ça. Le karma s’abattait vraiment sur nous pour tenter de faire de nos existences un véritable Enfer. Ce n’était clairement pas possible autrement. Katalia soufflait ces mots et j’avais envie d’hurler. J’avais envie de lui crier que moi aussi j’étais à bout. Je subissais aussi ces disparitions et des millions d’autres épreuves qui saccageaient mon existence. Le manque de sommeil, l’interrogatoire par la police, la voix dans ma tête, la drogue, l’alcool, les bagarres, les corps à corps dont je ne parvenais pas à me passer, le manque d’appétit, la folie d’hier qui avait poussé mon cœur à beaucoup trop ralentir… Ouais, je subissais tellement de choses et j’encaissais. Encore et encore. Ce matin, j’encaissais les reproches de Katalia et maintenant j’encaissais son mal-être qui venait s’ajouter au mien. Alors ouais, bien sûr, j’avais envie de lui hurler dessus pour qu’elle se rende compte qu’elle n’était pas la seule à chuter dans le précipice. Pourtant, je ne disais rien. Je ne pipais mot sur tout ce qui était en train de me ronger. Je gardais la bouche close encore et toujours parce que ce n’était pas n’importe qui à l’autre bout du fil. C’était Katalia. Celle que je considérais comme ma petite sœur. Celle face à qui j’avais un réel devoir de grand frère. Je ne devais pas craquer. Les failles devaient rester cachées pour qu’elle me pense fort et capable de l’aider à traverser. Comme avant. Comme lorsque j’étais en Italie et qu’elle ne savait rien de mon Enfer quotidien. Je ne cherchais donc pas à lui montrer que ma vie était aussi pitoyable que la sienne, voir peut-être même pire. Je me contentais de babiller quelques excuses en tirant sur ma cigarette. Quelques excuses pour combler le silence et tenter de lui répondre. Quelques excuses un peu trop sincères parce qu’au fond j’étais vraiment désolé qu’elle subisse un tel Enfer. J’étais vraiment désolé que mon Ange ne puisse pas avoir la vie heureuse et sans drame qu’elle méritait tellement.

Me laissant retomber sur mon lit sous la fatigue qui cognait en moi et l’inconnu qui planait au-dessus de ma tête, je finissais par demander à Katalia si je pouvais faire quelque chose pour lui venir en aide. Mon cerveau était tellement embrouillé à cause d’hier que je n’étais clairement pas en état de réfléchir par moi-même. Oh non, aujourd’hui, je n’étais pas foutu de trouver la sublime idée qui pourrait remonter le moral à mon Ange et lui permettre de continuer à traverser les épreuves difficiles de la vie. Enfin… Si… J’avais la sublime idée qui pouvait toujours fonctionner. Si j’allais la voir, que je la prenais dans mes bras et qu’on se goinfrais de cochonneries devant des films idiots, je savais que cela pourrait l’aider. Au-delà de la distraire de toute cette existence morbide, cela lui permettrait de profiter de ma présence et d’être encore plus rassurée sur mon état. Cela l’aiderait sans le moindre doute possible. Malheureusement, cette solution miracle n’était pas applicable. Non. Je ne me sentais guère en état pour aller voir la demoiselle parce que je savais qu’elle devinerait les choses trop rapidement. En voyant mon visage, la brune saurait que quelque chose clochait et qu’un secret demeurait entre nous. Le secret d’hier. Le secret qui pourrait la foutre encore plus à terre. Aussi, malgré cette sublime idée qui la sauverait, je devais faire une croix dessus et tenter de trouver autre chose. Autre chose que je ne parvenais pas à trouver et qui me poussait à lui demander son avis. Savoir ce dont elle avait besoin était le mieux. Mon Ange me soufflait alors que je pouvais lui parler. Juste lui parler. Malgré moi, un bref rire passa entre mes lèvres. Lui parler ? Mais de quoi voulait-elle que je parle ? Je n’avais rien à dire. Je n’avais rien à raconter si ce n’était cet Enfer qui me bouffait un peu trop fort. Cet Enfer que je refusais de partager avec elle parce qu’elle était déjà trop bas et que je ne voulais pas l’entraîner avec moi dans cette chute. Fronçant les sourcils, je tentais de trouver un sujet de babillement alors que du mouvement se faisait entendre à l’autre bout du fil. Était-elle en train de se recoucher ? Je n’eus pas le temps de plus me questionner que la belle Italienne me demandait d’entendre le son de ma voix lui dire que ça s’arrangerait. Je levais les yeux au ciel à cette demande tout en soupirant et  en soufflant « Je… » Je quoi ? Je ne peux pas te dire ça Katalia ? Je ne peux pas te mentir comme ça ? Mordillant ma lèvre, je fermais les yeux. Je savais à quel point mon Ange avait besoin d’entendre de tels mots même s’ils étaient faux et que je n’y croyais pas du tout. Je le savais. Alors, prenant sur moi, je finissais par murmurer « Tout va s’arranger Kat’… Je… Tu… Tu vas voir… Tout va s’arranger… » Ma voix tremblait peut-être un peu trop, mais j’essayais vraiment d’y mettre de la conviction pour que la brune y croit. J’essayais d’y mettre de la conviction pour tenter d’y croire moi aussi peut-être. Ouais, j’essayais réellement. Je faisais des efforts. J’en faisais même encore plus puisque, soudainement, je me mettais à babiller « Je… Quand Lukas va revenir, je crois que j’ai envie de l’emmener en voyage quelque part… Juste lui et moi… Ailleurs… Loin… » Je soufflais ces mots avant de me mettre à babiller sur des idées de voyage décrivant des lieux où j’avais voyagé tout seul par le passé. La respiration de Katalia se calmait au fil de mes mots et je finissais par murmurer « Tout va s’arranger Katalia… » J’aurai aimé lui promettre. Les mots étaient sur le bout de ma langue. Mais, je ne pouvais pas faire ça. Je ne pouvais pas promettre quelque chose d’aussi incertain. Alors, lentement je finissais par rajouter « Repose-toi… Je t’aime… » avant d’appuyer sur la touche pour raccrocher mon téléphone que je laissais sur la table de nuit. Pour moi, le sommeil s’était foutu maintenant. Alors autant aller prendre une douche et peut-être tenter de reprendre les recherches pour la journée.