Lucy H. Lemaitre ► Chanel Iman

Dès ma naissance, je crois que j'ai été programmée pour les voyages. En effet, je n'étais pas encore née que déjà, j'avais pris l'avion et parcouru pas mal de kilomètres. De la Réunion à Paris, en même temps... C'est sans doute de là que je tiens ma passion pour les voyages. Pour la petite histoire, j'ai été adoptée. Par la famille Lemaitre. Qui est d'ailleurs des parents comme on aurait tous rêvé d'avoir. Une famille formidable. Catherine et Laurent.Je crois que je n'aurais jamais pu aussi bien tomber. J'ai été chouchoutée comme jamais, traitée comme une vraie petite princesse. C'est sans doute pour ça aussi que j'aime autant la mode. Les vêtements, les chaussures... tout ! Mais il ne faut pas forcemment associer moyens financiers et pimbêche. Au contraire, depuis toute petite mes parents, enfin surtout ma mère, a pris soin de m'enseigner les bonnes manières, principalement tout ce qui tourne autour de la politesse. Mais aussi la discrétion. Je n'ai pas toujours été comme je suis aujourd'hui, c'est à dire timide, m'exprimant peu et évitant de me mettre trop en avant. En fait, jusqu'à mon entrée au collège, j'étais une petite fille plutôt extravertie, qui riait souvent aux éclats, pour tout et n'importe quoi, qui chantait à dansait à longueur de journée, qui au final, faisait tout pour se faire remarquer. Un vrai petit rayon de soleil, peut-être un peu trop éblouissant, donc gênant, parfois. Mais ma mère m'a rapidement fait part de ce qu'elle considérait être une vraie jeune fille. Bourgeoise, elle l'était peut-être un peu sur les bords. Un peu beaucoup, en fait, et ça se voyait dans ses manières, sa façon de parler. En même temps, elle passait ses journées avec la plus haute élite Parisienne, les plus grosses fortunes de la mode, et des clients les plus remarquables. Elle qui venait tout droit d'une petite campagne bretonne, c'était un peu normal qu'elle essaie de s'adapter à ce milieu au point d'en copier les mimiques. Je ne lui en veux pas de m'avoir changer à ce point. Après tout, un peu de retrait, ce n'est pas plus mal. Faire le bon mélange entre l'attrape-regard et la discrétion, c'est pas mal non plus. "Soit aimable, soit souriante, tient toi droite, ne parle pas trop et surtout ne t'éloigne pas du sujet principal, propose ton aide, prime la générosité, et surtout, ne répond pas aux mauvaises remarques, il faut rester digne.", ce sont des mots, des bouts de phrases qui me reviennent continuellement à l'esprit. Mais à côté de ça, ma mère est la femme la plus douce et la plus chaleureuse du monde. Comparée à mon père, elle était toujours là à m'attendre aussi bien le midi que le soir, quand je rentrais de l'école, avec un repas soigneusement et amoureusement préparé, venait me border et me réveiller chaque soir et chaque matin, et j'en passe. Une mère extrêmement présente dans ma vie. Un modèle, un exemple que je ferais tout mon possible pour égaler. Mon père, c'est une autre histoire. Je crois qu'il a eu beaucoup plus de mal à combler le vide que leur petite fille, Tina, avait creusé quelques mois après sa naissance. Il avait surement eu plus de mal que ma mère a me considérer comme la remplaçante de cette petite. Il ne me le faisait pas ressentir comme ça, bien évidemment. Il mettait juste très peu d'effort de présence, trop occupé par son travail . et puis de toutes façons "maman est là pour toi si jamais, ma puce. Et je serais là aussi si jamais tu as besoin de moi, je suis un peu ton papa quand même!". ça aussi je le connais par coeur. Mais à lui non plus je ne lui en veux pas. Après tout, c'est vrai qu'il a toujours été là pour moi quand j'en avais besoin. Et même s'il n'est pas très paternel, il m'aime quand même.

J'ai vécu à Paris jusqu'à mes 11 ans. Après, mon père décida de se rapprocher de ses bateaux, ce qui nous amena à déménager dans le sud, à Monaco. Très vite, je me passionnais pour les langues. L'anglais, l'espagnol, le malgache, l'italien, le russe. J'aimais l'idée qu'il pouvait exister autant de langues différentes, de façons de s'exprimer propres à chaque continent, voir chaque pays. J'avais envie de toutes les connaitre, de pouvoir m'exprimer n'importe où où je pourrais me trouver. Mes résultats étaient bons. Pas excellent, il y a toujours mieux que soit. Mais ils étaient bien classés. En même temps, même si je ne passais pas ma vie sur mes devoirs et mes leçons, quand je m'en occupais, je le faisais avec concentration, attention, et j'y mettais beaucoup. Ce n'est pas que j'aimais ça, c'est juste que je n'aime pas faire les choses qu'à moitié. Je n'abandonne jamais. C'est pour ça qu'à la fin de ma terminale, à 17 ans, je savais que j'arriverais à intégrer Harvard. Je le savais, je devais y arriver. C'est pour ça qu'après une année plus que réussie à l'Université de langues, mes parents, pour me féliciter et m'encourager dans mon choix, me payèrent un aller simple vers les États-Unis, logement compris.

Le premier pied que je posais sur le sol américain fut le plus excitant de toute mes 19 années de vie. Le début d'un nouveau chapitre de ma vie. Peut-être celui où je trouverais enfin mon prince charmant, celui où je trouverais le chemin menant à ma future vie d'adulte, celui où je m'affirmerais enfin en tant que Lucy Hannah.