Tu viens à peine de pousser ton premier cri, celui qui signifie clairement que tu es en vie. Celui qui dis que t'es là, que t'es prêt. Que t'es prêt à en voir de toute les couleurs. Parce que c'est peut être ton premier cri. Mais ça ne sera sûrement pas le dernier. Quelques mètres plus loin, une femme est allongée sur la table d'accouchement. Les pieds encore dans les étriers. Elle soupire, tente de reprendre sa respiration. Parce que mine de rien, ça lui a demandé un sacré effort de t'expulser de son vagin. L'infirmière qui s'occupe de toi, se retourne vers cette femme et se présente à elle. Te présente à elle. Et elle détourne le regard, immédiatement. Vous n'avez pas envie de le prendre dans vos bras ? Rien qu'une fois. Elle ne comprends pas, même si elle n'est pas là pour ça. Oui, d'ailleurs, qui pourrait comprendre qu'on ne veuille pas voir son propre enfant ? Sa progéniture. Toi même, tu ne comprends pas comment on a pu te faire ça. Même si t'es pas sûr de vouloir en connaître les véritables raisons. Non, j'ai été plutôt claire.. Je ne veux ni le voir, ni l'entendre et encore moins le prendre dans mes bras. Ni même savoir si c'est une fille ou un garçon, je ne veux rien savoir de cet enfant. C'n'est plus le mien, à présent. Wow, c'est plutôt choquant. Mais la jeune infirmière reste stoïque. Et quittes la pièce. T'emmenant bien loin de la femme qui t'as mise au monde. C'est la première et la dernière fois que tu aura eu l’occasion de respirer le même air qu'elle. Voilà comment débute l'histoire de ta misérable vie.
Hôpital. Cette fois ci, c'était la fois de trop. La fois où on ne pouvait pas ne pas t'y emmener. Les autres fois passaient, c'n'était que des simples blessures, ou même entorses. Cette fois, on t'as cassé un membre. Du moins, tu t'es cassé un membre, c'est ce que tu dira. Parce que t'as sept ans, que ces parents là t'aiment, tu le vois. Et que t'as pas envie de quitter cette famille. Non, tu ne veux pas retourner à l'orphelinat. Tu réponds distraitement aux questions du pédiatre, te contentant de soutenir le regard de Pete. Pete, c'est le premier enfant de tes nouveaux parents. Et tu dois avouer qu'il te fait un peu peur, mais tu ne le dira pas. Les questions se sont arrêtés et le pédiatre s'est éloigné de toi, pour rejoindre le fond de la pièce et discuter avec tes parents. Tu ne quittes toujours pas son regard mais t'essayes d'entendre ce qu'ils se disent. Sur les clichés de la radio on voit qu'il y a une double fracture du bras. Et que celle ci s'est faite en deux étapes. Les parents écoutent, tentant de comprendre le double sens de cette phrase. Le médecin poursuit. Cela veut dire que la thèse du toboggan ne me semble pas valable. Du moins pas pour la première fracture. De plus, certaines marques sur son corps prouvent que Clifford a été déjà blessé plusieurs fois, au cours de ces dernières semaines. Un silence s'abat avant que "ta" mère réagisse. Mais c'est un enfant ! Les enfants se font toujours ma, voyons. Ils se cognent, tombent. Vous ne pensez tout de même pas que.. Elle ne continue pas sa phrase mais t'es en mesure de comprendre ce qu'il se passe ici. C'est alors que Pete intervient. Vous n'allez pas m'enlever mon frère hein ! Vous avez pas le droit, vous avez pas le droit de faire à nos parents. crie-t-il du haut de ses neuf ans. T'es un peu choqué de ce qu'il dit. Toi qui penses qu'il ne rêve que de te voir partir. Le médecin fait sortir tout le monde de la pièce, prétendant que tu as besoin d'un peu de calme. Un psychologue emmène Pete manger une glace et pendant ce temps tu ne sais pas ce que le sort te réserve. Et tu as peur. Mais tu t'endors, parce qu'au fond, tu es fatigué. Quand tes yeux se réouvrent, tes parents ne sont toujours pas là. Pete non plus. Il y a juste ce pédiatre au fond de la pièce et ce psychologue près de toi. Tu as peur, parce que tu ne sais pas ce qu'il s'est passé pendant ton sommeil. Ou est ma mère ? demandes-tu, pour information. Même si tu as quand une petite idée de l'endroit où elle se trouve. Clifford, ta mère t'aime, tu le sais ça ? Tu ascquieces de la tête, alors qu'il continue. Mais.. tu sais Pete, elle l'aime aussi. Et il a des problèmes. Des problèmes qui demandent à ce que sa maman s'en préoccupe, fasse plus attention à lui. Tu comprends mieux ce que cela veut dire. Il a parlé. A ta place, alors que tu avais envie de te taire. Il a dit ce qu'il t'avais fais, comment il te punissait quand il trouvait que ses parents ne le faisaient pas assez. Et ils sont parti, avec lui. Te laissant ici, tout seul. Ce qui veut dire que tu vas devoir retourner à l'orphelinat. Quelle vie de merde. Tu n'as pourtant que sept ans et tu sais déjà que la vie n'a pas bien grand chose à t'offrir. C'qui est triste.
T'as jamais plus bougé de cet orphelinat. Aucune famille n'a voulu de toi, après celle ci. Alors tu t'es accommodé de cette vie, t'as fais avec. Parce que de toute façon, tu n'avais pas vraiment le choix. C'était ta vie, la seule dont tu avais droit parce qu'on avait pas voulu de toi à ta naissance. T'as l'impression que toute ta vie, ça va se passer comme ça. Qu'on va te rejeter tout le temps, en toute occasion. Peut être bien. Et tu vas être dans l'obligation de te forger le caractère qui pourra gérer ça, qui pourra gérer cette vie.
Le lycée, tu détestes le lycée. Tu en détestes les lieux, les cours, les professeurs, presque tout les gens qui y mettent les pieds. La seule chose que t'aime ici, c'est le sport que tu y pratique depuis que t'es au lycée. Le lacrosse. C'est vraiment le seul truc qui te motive encore à aller au lycée. Sinon, tu ferai plus souvent ce que tu fais là tout de suite. C'est à dire séché les cours pour aller fumer un joint derrière les gradins du stade. A cette heure ci, t'es tout seul. Il y a vraiment personne et c'est parfois. Tu t'asseois à même le sol, sortant ton attirail. Tu roules ton spliff et le glisse entre tes lèvres. Profitant de la sensation que te procure ta première taff. Bordel, ce que c'est bon. Tu te contentes de fumer ça tranquillement, sans te presser. Parce que t'as tout l'après midi pour ça. Une longue après midi de solitude. Du moins, c'est ce que tu croyais. Le silence est interrompue par une voix. Une voix que tu ne connais que trop bien. Bien entendu, je savais que tu ne pouvais être qu'ici. Tu relèves le regard, c'est bien elle. Marilyn. Un sourire s'étends sur tes lèvres alors qu'elle vient t'asseoir sur tes genoux. Oui, mademoiselle est du genre à prendre ses aises. Tu ne dis rien, te contentant juste de continuer à fumer. Est ce qu'un jour, tu vas arrêter de nuir à ta santé ? Tu la regardes, répondant du tact au tact. Est ce qu'un jour, tu vas arrêter de prendre en considération ce que l'on pense de toi plutôt que ce que tu as envie de faire ? Elle ne dit rien, parce que vous connaissez tout les deux la réponse. Elle tends le bras comme pour prendre le joint entre tes lèvres avant de se raviser. On était d'accord Cliff, on était d'accord pour que.. tout 'ceci' reste entre nous. J'n'ai pas besoin que le monde entier sache que.. Elle se tait, ne poursuivant pas sa phrase. Tu soupires, las de cette situation. T'es peut être un sophomore qui se tape une senior, mais c'est plus aussi drôle que ça l'était dans les premiers instants. D'accord, elle jouait dans un monde différent du tien. Dans une catégorie différente de la tienne, mais c'était blessant. Blessant d'être caché de cette sorte. Mais si tu devais subir ça pour passer des moments avec elle, alors soit. Encore cette foutue peur de l'abandon. C'est bon, oublie ma remarque. Elle sourit faiblement avant de glisser ses lèvres contre les tiennes. Puis de se relever. Je dois y aller, j'ai un cours dans cinq minutes et on doit déjà se demander où je suis. T'hausses les épaules, tu ne dis rien. A plus tard, mon bad boy. Tu ne rajoutes rien, te contentant de la regarder partir.