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Après que les pompiers m’aient injecté une seringue pleine de sérum dans le bras, je me suis endormi. J’ai cru distinguer la voix de Sateen avec moi. Je me suis mis à me vider de mes forces, peu à peu, et puis à faire le rêve le plus étrange de toute ma vie. Comme si je n’étais plus dans mon corps, mais à l’extérieur, comme un simple spectateur. Je voyais Sateen tenir ma main, pleurer. Je m’approchais d’elle, lui disait de ne pas s’en faire, mais elle ne me voyait pas. Ne m’entendais pas. Rien. Arrivé à l’hôpital, je me mettais à courir avec les pommiers et les infirmiers jusqu’à la salle de soins, les écoutants parler de choses incompréhensibles. Effrayer par mon corps ensanglanté à côté de moi, j’en avais presque envie de vomir. J’étais complètement charcuté à niveau de la jambe, le visage et les vêtements pleins de sangs et de saletés. Un médecin se met à hurler : « vite ! Son coma s’aggrave, son cœur ne bat presque plus ! » Un assistant lui apporte des défibrillateurs et je vois ma poitrine se soulever au rythme des chocs électriques. Mes yeux bleus s’ouvres par moments et je suis tétanisé de me voir dans cet état. Mon cœur se remet alors à battre et ils m’emmènent à nouveau quelque part. La porte se referme devant mes yeux et le décor change du tout au tout. Je me retrouve alors avec Lavender, dans le parc, elle parle mais c’est comme si le son était coupé, je me vois, lui caresser les cheveux. Toujours en spectateur, je nous observe, si heureux, si serein. Puis des cyclistes passent et l’environnement change à nouveau. Je suis dans ma petite ferme, en Irlande. Ma Grand-Mère et ma mère regardent la télé dans la cuisine. Elles pleurent en apprenant au journal ce qui s’est passé à Harvard. Maddy entre dans la pièce, toute joyeuse mais son sourire s’efface presque aussi tôt. Elle fixe intensément ma mère, puis la télé où passent en boucle sur la moitié de l’écran, des photos des blessés et des morts. Quand ma photo apparaît à nouveau, elle écarquille les yeux et mitraille ma mére de questions. Mon beau-père entre alors dans la pièce et ma mère se jette sur lui. Le bruit des larmes devient comme un écho dans la pièce et un vent froid s’engouffre dans la cuisine pour faire changer la scène. Je suis maintenant dans le transept et observe comme au ralentit ce qui se passe devant mes yeux. Je cherche Lavender du regard, mais ne la voyant pas, je me mets à la chercher parmi les décombres ; encore et encore. Quand je relève la tête, il n’y a plus personne. Je suis seul. Je me relève donc et au moment où je tourne la tête vers la sortie, je reviens brusquement à la réalité. Je fixe le plafond blanc au-dessus de moi et verse une larme. J’ai peur. Peur de la suite, peur du destin des autres, de ceux qui sont morts et des vivants qui souffrent. Je tourne la tête et remarque des fleurs sur le bord de ma fenêtre. Combien de temps ai-je été dans le coma ? Ça m’a paru si court… Je me lève sur un coude puis remarque la couleur livide de ma peau. Je m’efforce de chercher un miroir des yeux et quand j’aperçois mon reflet, je ne me reconnais pas. Je suis blanc à faire peur, j’ai des énormes cernes autour des yeux, qui eux sont rouges ; et mes joues sont creuses. Je passe une main sur mon visage, l’autre dans mes cheveux et essaye de retrouver l’ancien Casey ; mais n’y arrive pas. Je repose alors ma tête sur mon oreiller.
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