VELKAN MIKOVEL ► Bill Skarsgård

L'automne était en train de prendre ses aises, il couvrit les arbres de coloris rouge, orange et brun. Les feuilles formaient des dentelles fragiles que le vent avait fait tomber. Les arbres se penchaient et écoutaient le silence qui s'installait. L'atmosphère devenait plus aérienne, plus mystérieuse. L'été s'était éteint et la lumière du jour avait perdu son éclat trop vif. Malgré le froid ce soir, cela ne l'empêchait pas de fumer, il pouvait s'en réjouir ou le déplorer, c'était un fait il fume depuis ses seize ans.
Comme à son habitude, dès qu’il franchit le seuil de la maison colorée, Velkan retira ses chaussures, posa son manteau dans l’entrée et alla tout droit dans la cuisine pour se servir un verre de whisky. Au moment où il versa le whisky dans son verre, un bruit étrange parvint jusqu’à ses oreilles… Des grattements encore. Velkan fronça les sourcils, se demandant bien d’où provenait ce bruit. Aucun membre de la fratrie n'était présent actuellement dans la maison.
Puis il vint s’accroupir devant le placard au trésor. Celui des gâteaux. Nouveau bruit. Il stoppa son geste quelques secondes, avant de finalement prendre son courage à deux mains. Que ne ferait-il pas pour des granola. 
Il hurla à plein poumons, lorsqu’une énorme boule de poils marron lui fonça dessus, toutes dents dehors. Les gâteaux volèrent de part et d’autre de la pièce. En quelques secondes à peine, Velkan se retrouva à l’extérieur de la maison, dans le jardin. Jamais encore de sa vie il n’avait fait un tel sprint. 
Le cœur battant la chamade, il tenta de rassembler ses esprits. Il fit alors le tour du jardin et se retrouva sur le bitume de l’allée menant à la maison et constata alors qu'il n’avait plus ses chaussures. À présent bien embêté et surtout en chaussettes devant chez lui, Velkan Mikovel se demanda quoi faire. Hors de question de retourner dans la maison pour se mesurer à sa phobie. Décidément, ce n'était pas pour ce soir qu'il allait en profiter. Assis sur les marches du porche qui se situait à l'entrée de la maison, il attendit sagement l'arrivée d'un membre de sa famille. 
Dès lors qu’il prévoyait quelque chose, rien ne se passait jamais comme prévu. Jamais. Note à lui-même : ne plus jamais rien prévoir, afin d’éviter toute catastrophe. Un sentiment de frustration monte en lui. Velkan n'avait pas vraiment du temps pour lui, entre son boulot, les repas à préparer pour la fratrie, les factures à payer, Asher à garder, mais surtout surveiller que ses parents biologiques n'allait pas débarquer et tout foutre en l'air. Heureusement que Murphy était assez grand pour l'aider. La routine était établie depuis ses quinze ans. Il les réveillait chaque matin, et chacun savait ce qu'il avait à faire pendant la journée. Un quotidien bien réglé, et un rôle de grand frère bien trop lourd. Ajoutez à ça le manque d'argent, il était parfois difficile de ne pas craquer, mais il se devait de garder la tête haute afin d'aider sa famille du mieux qu'il le pouvait.
Deux des membres de sa fratrie arrivèrent enfin vers lui, soulagé par leur présence, il se précipita directement vers eux. Sa petite sœur Nina l'avait pris immédiatement dans ses bras pour le saluer, quant à Daryl il ne perdait pas de temps à taquiner son grand-frère. " Depuis quand tu sors dehors avec tes chaussettes ? Toi qui râles quand on les laisse traîner. " s'exclama-t-il avec une pointe de sarcasme. " Depuis qu'un idiot de la famille Mikovel à décidé de faire crécher une putain de famille de rats dans la maison ! " dit-il encore ahurie par la situation. " Ah ça... ! C'est Asher qui les à trouver en rentrant du lycée. Il voulait les adopter. " annonça Nina, craignant de balancer son petit-frère. " Les adopter ? " s’interrogea Velkan en levant un sourcil, il commençait limite à désespérer vis-à-vis de son plus jeune frère. " Bon, il faut s'en débarrasser avant qu'il rentre. " affirma Velkan.
Aucune journée ne pouvait se ressembler chez les Mikovel. Ils étaient aussi loufoques les uns que les autres, peut-être par un manque d'éducation dû à l'absence de leur parent. La vie était tout sauf un long fleuve tranquille. Leur mère, Rachel, droguée et paumée les avait abandonnés pour vivre dans une caravane à l'autre bout du pays. C'était il y a huit ans. Quant à leur père, Ben, chômeur et alcoolique, il dilapidait l'argent et voulait faire des trafic de drogues pour subvenir à ses besoins. La définition d'égoïste ne pouvait pas être plus subtile.

La famille Mikovel c'est une histoire de survie.