inspire, expire. juste ça. sofia, elle a eu de la chance. elle le sait. née dans une famille privilégiée, une vie stable et les moyens de faire tout et n’importe quoi. surtout ça. boston, le berceau de son enfance. dernière née d’une famille de trois enfants qui auraient dû s’arrêter à deux. elle n’était pas prévue au programme, gosse ingénue qui déboule en un claquement de doigt. et si ses ainées ont toujours eu le besoin de plaire à leurs parents, de suivre une voie professionnelle louable, sofia, elle, n’en fait qu’à sa tête. tornade brune qui ne trouve intérêt qu’en divertissant les autres. boule d’énergie qui rit de tout, ne prend jamais rien au sérieux. c’est une vie paisible qui s’engage. celle sans ombre dans le paysage. une alchimie qu’elle créé avec arizona, avec ambrose. avec le monde autour d’elle. sofia elle est libre, elle aime, elle vit. gosse turbulente mais qui offre ses sourires à la terre entière.
sometimes you hit a point where you either change or self destruct. - (( 2009 )) quinze ans. la vie n’est plus aussi paisible depuis quelques temps. la tornade sofia s’intensifie, pas spécialement dans le bon sens. pression qui la ronge quand elle se sent sans cesse inférieure à ceux qui ont le même sang. et si ses sourires sont toujours aussi hypnotisant, elle fait disparaître son mal être à travers la nourriture. boulimie qui ne cesse d’accroître, elle avale tout ce qu’elle trouve, plonge ses doigts dans sa gorge pour repartir à zéro. puis recommence, sans relâche. à côté, ambrose n’est jamais présent. travaille d’arrache pied pour satisfaire un père qui revoit sans arrêt ses exigences à la hausse. elle est fatiguée, dépassée. fixation sur son reflet qu’elle ne supporte plus. les joues trop ronde qui la dérange, ce besoin de perdre du poids pour rentrer dans le moule d’une société désirant un physique parfait. cette incapacité à suivre le moindre régime, le besoin maladif de fouiller les placards à la recherche de tout et n’importe quoi. cycle infernal où le pire est à venir. ambrose, malgré ses heures de travail acharné, il ne déroge jamais à une promesse, il n’est jamais en retard. une heure, puis deux. rien. un téléphone qui sonne dans le vide et pas un mot, pas un message. des heures, jours qui s’étirent sans rien trouver. une disparition inquiétante en premier lieu et sofia qui perd un peu de sa lumière, à rester devant sa fenêtre toute la nuit dans l’espoir de voir les phares de la voiture illuminer l’allée. un espoir mort dans le tas quand les phares qui débarquent sont ceux d’une voiture de patrouille. ils ont retrouvés ambrose qu’ils disent. mort. overdose. les mots renversent, font froid dans le dos. sofia elle reste figée comme une poupée de porcelaine, suspendue dans le temps, sans réaction. impossible. ambrose, il prend pas de drogue. ambrose il est surmené mais jamais il ne ferait ça. c’est pas son ambrose ça, c’est n’importe quoi. et pourtant, c’est les funérailles qui sont organisées quelques jours plus tard. pas seulement celle de son frère mais celle de son âme par la même occasion.
but she wasn't around, and that's the thing when your brother die, you feel like instead of going in to every fight with backup, you are going into every fight alone. - (( 2009-2012 )) ari ? t’en penses quoi ? virevolte sur elle même, stressée à l’idée d’être bouffi dans sa robe. et arizona d’un geste de main, l’envoie balader une nouvelle fois, la tête plongée dans des centaines de dossier, hypnotisée à l’idée de prouver à la terre entière qu’ambrose ne se droguait pas. probablement qu’elle était futile à demander des conseils pour un premier rendez-vous amoureux, futile de croire que la vie pouvait continuer après tout ça. si arizona avait été en plus de sa soeur, sa confidente et meilleure amie, il ne restait plus que des bribes d’une relation se détériorant de jour en jour. elle soupire lentement puis tourne les talons, traversant le couloir ramenant à sa chambre, la porte qui claque sur son passage. au diable tous les efforts qu’elle pouvait faire, c’était comme si elle n’existait plus. comme si la mort de son frère lui interdisait d’exister encore. et aussi égoïste que ce soit, elle venait parfois à être en colère contre lui. de l’avoir abandonné, de l’avoir placé dans cette position-là. retire la robe sur son épiderme, repousse sa fixation sur ses complexes une nouvelle fois. l’air triste et fatiguée qui observe le miroir, les éclats de voix qui se font entendre à l’étage du bas. plaque ses mains sur ses oreilles, attends que la tempête passe. si les rires de sofia venaient généralement résonner dans les dédales de la maison victorienne, ce n’était désormais plus qu’un souvenir du passé, fantôme hantant les murs. elle avait arrête de sourire à foison, de faire le pitre pour voir naître des sourires sur le visage des autres. elle avait arrêté d’exister quand ambrose était parti, comme s’il lui avait volé une part d’elle même, punition pour ne pas l’avoir sauvé. oh, elle n’était pas responsable ne cessait de répéter le psychologue qu’on lui avait assigné. ce n’était pas de sa faute mais l’adolescente de quinze ans se flagellait répétitivement à coup de et si comme s’ils pouvaient avoir le pouvoir de la faire revenir en arrière. peut être que si elle avait fait plus attention, elle aurait remarqué des signes, n’importe quoi. quelque chose mettant ses sens en alerte, indiquant d’une manière où d’une autre que le danger rôdait non loin. mais comme pour tout le monde, la mort survient sans frapper. elle débarque juste un beau jour, sans prévenir, sans laisser de choix. elle emporte les gens et laisse les vivants se consumer petit à petit.
whoever said that loss gets easier with time was a liar. here's what really happens: the spaces between the times you miss them grow longer. - (( 2012 )) douce sofia ferme ses prunelles une nouvelle fois, bande visuelle de sa vie qui défile dans son esprit. le joli portrait de famille était parti en lambeaux, les silences entre chaque membres de plus en plus oppressant. communication coupée, se passer à côté sans se regarder. elle avait regardé la dégringolade de chacun comme une spectatrice. figurante postée dans un coin de la maison sans ligne apparente pour s’interposer. dilemme draconien se livrant avec elle même, aider celle qui avait toujours eu sa priorité ou la laisser tomber comme elle l’avait fait de son côté. sofia, elle avait passé les derniers mois à faire oublier son existence. pas un seul mot qu’elle ne déverse entre les murs d’une maison qu’elle déteste, fantôme qui se déplace par obligation dans le silence le plus complet. ironiquement, l’obsession reprochée devenait la sienne, des nuits blanches à ne plus pouvoir les compter ou la gosse considérée comme écervelée avait fouillé chaque recoin de la maison pour trouver les dossiers fait sur son frère. des heures à les éplucher, à relire les même phrases des milliards de fois comme si la sentence pouvait changer. mémorise les noms, les lieux, chaque détail de la nuit fatidique et l’emploi du temps passé au crible pour trouver le fil conducteur de tout ça. elle n’a jamais voulu faire de grandes études sofia sans être bête pour autant. elle a refait le trajet d’ambrose des milliers de fois, gardé le message vocal sur sa messagerie pour ne pas oublier sa voix, relu les sms encore et encore, le coeur en morceaux. si tu cherches, c’est là où tu sais. message reçu, placé entre les milliers de connerie qu’elle pouvait lui envoyer, qu’elle n’avait pas comprit jusqu’à présent. contemple le message trop longtemps avant de verrouiller son téléphone, ses doigts qui viennent masser ses tempes endolori. trois, deux, un. se redresse en sursaut, milieu de la nuit et pas un bruit dans la maison. et si c’était l’indice qu’il manquait ? celui dont arizona avait tellement besoin pour trouver ? pieds nus sur le parquet, elle se glisse dans le couloir, prends garde à rester silencieuse, invisible pour s’infiltrer dans la chambre d’un frère qui n’avait pas bougé. elle pourrait presque sentir l’odeur de son parfum, un tee shirt traînant sur le sol depuis des année que personne n’avait pu se résoudre à ramasser. et doucement, elle ouvre le placard, assise sur le sol, les doigts fins qui déplacent les vêtements de sport, à la recherche de la planche amovible. les mêmes doigts qui tremblent quand à tâtons, elle effleure le relief d’une couverture rigide, sort le carnet de sa cachette. par le passé, c’était là qu’ambrose venait planquer toutes les sucreries qu’il refilait en douce à une sofia insouciante. secret entre eux, innocent, mémoire d’une enfance envolée. si tu cherches, c’est là où tu sais. elle remet tout en place, trajet inverse pour retourner se blottir dans ses draps, des pages et des pages de chiffres qui se succèdent, des phrases sans sens mais toujours le même patronyme qui revient. noté des centaines de fois comme une litanie, les flèches qui pointent du doigt. ambrose était sur quelque chose. quelque chose qui a précipité sa fin. des recherches qui s’intensifient mais le silence qu’elle garde. ne pas donner d’espoir à une famille déjà décimée, trouver les réponses puis les soulager. c’est sûrement pour cette raison qu’elle quitte boston sur un mensonge. l’angleterre qu’elle arbore comme sa nouvelle destination, qu’elle agite comme sa manière de recommencer à zéro quand en réalité elle s’envole pour la corée.
i wasn’t obsessed with him until i felt him fading. But maybe i was always obsessed, i just didn’t feel the anxiety of it until the trust was gone. - (( 2012-2016 )) jeju, heure d’arrivée ; 18h51. elle débarque dans un pays qu’elle ne connait pas, une langue qu’elle ne comprend pas mais un objectif dont elle ne démord pas. et tant pis pour les difficultés, sofia elle est entêtée, avide de réponse, avide de trouver cette paix qu’on lui a volé. c’est du travail de longue haleine, ne rien laisser au hasard. entrer en contact avec les bonnes personnes, travailler dans des endroits stratégiques. elle amasse les informations, complètent les détails, trouve les concordances dont elle avait besoin pour avancer. elle sait qu’elle approche du but et pourtant, n’arrive pas à dénouer le fil de l’histoire rocambolesque. ses envies évoluent et elle le sait : elle doit frapper plus fort pour y parvenir. l’argent ne fait certainement pas le bonheur mais permet d’avancer. elle est intelligente sofia, elle sait comment attirer dans ses filets. création de son entreprise, son journal, sofia and co qui devient rapidement fructueux. la machine se met en route, le processus démarre, les contacts qui lui permettent de remonter jusqu’au noms qu’elle avait en sa possession. et si le père semble inaccessible, c’est le fils qui devient sa proie. un interview qu’elle programme, met toutes les chances de son côté pour passer à la phase supérieur. hoseok et naïf ou complètement obnubilé par les longues jambes dénudées, les rires idiots et les yeux de biche qu’elle lui lance entre trois mots. ticket gagnant quand il lui propose de sortir un soir, prendre un verre, n’importe quoi. elle se montre difficile, sur la réserve, fuir étant le meilleur moyen d’accrocher l’autre. le compte à rebours est lancé. relation qui s’intensifie de semaine en semaine, importance qu’elle gagne auprès de lui. il est moins vigilant, moins sur ses gardes. confiance aveugle qu’il lui offre quand elle profite de chaque moment d’inattention pour récupérer ce dont elle a besoin. mais sofia perd la tête, perd à son propre jeu. hoseok est tout aussi charmeur que ce qu’elle peut l’être, tout aussi manipulateur. c’est son coeur qui la trahit quand il se met à battre un peu plus vite en sa présence, quand elle se surprend à imaginer un futur à ses côtés. elle se persuade de s’être trompée, il n’est pas coupable, jamais. elle oublie ses convictions, ses doutes, emménage à ses côtés et laisse enfermé à double tour toutes les suspicions et preuve en sa possession. il a volé son coeur sans qu’elle ne s’y attende et ne semble pas vouloir le lui rendre. des projets qu’ils créent à deux au milieu des tumultes d’un amour qui consume. ils s’hurlent dessus tout le temps mais s’aiment à en crever. et si elle pense que ça fait mal, elle est bien loin de se douter des ravages que ça produirait.
the song is ended but the melody lingers on - (( fin 2016 )) elle passe les portes de l’appartement qu’ils partagent le sourire aux lèvres en prévision du week end qui les attendaient. virée romantique à deux, possibilité de se ressourcer après des heures de travail acharné. sofia, elle laisse tomber ses clés sur le meuble d’entrée, pousse un soupir de soulagement quand ses pieds quittent les talons qu’elle a arboré toute la journée. étrange constatation que de n’avoir que du silence autour d’elle. elle détend ses muscles, l’appelle une fois, puis deux, sans rien en retour. détends lentement ses muscles, pousse la porte du salon où elle le découvre, verre de whisky sur sa gauche, dossier lavande face à lui. le coeur qui s’arrête une fraction de seconde, membres qui refusent d’obéir alors que lentement il tourne la tête vers elle. sofia blackwell. les mots sont froids, quasi menaçant. c’est pas ce que tu crois, je... les mots qui se perdent alors qu’il se redresse soudainement, le verre qui lance dans sa direction, s’explose avec fracas contre le mur. traits déformés par la rage qui lui coupe le souffle. qu’est-ce qu’elle pourrait expliquer ? les insultes s’enchaînent face à ses mensonges. elle a menti, jouée, s’est glissée dans un terrain qu’elle n’était visiblement pas apte à maîtriser. et il l’empoigne soudainement, le regard noir, le contrôle qui prend la fuite. je t’aime, j’ai pas menti sur ça supplie du regard quand il ne veut rien entendre. il s’est fait prendre au piège, lui, l’avide de contrôle. berné par une femme qui aurait pu tout lui faire perdre. les cris qui s’intensifient, les justifications vaines. il porte le premier coup comme une décharge, sofia qui s’écroule au sol quand il la maintient par les cheveux. elle n’est plus un être humain, relégué au stade de punching ball quand les coups pleuvent sur son épiderme. elle sent ses os craquer, le goût métallique de son sang qui l’étouffe à moitié et pourtant, elle rampe sur le sol, espérant s’échapper. c’est ses chevilles qu’il agrippe, la tire en arrière, la force à se relever. elle ne le reconnait plus et au fond, elle le sait. c’est finit pour elle, elle suivra les traces d’ambrose ce soit, game over. sa tête qui s’entrechoque contre la table basse et ses yeux qui se ferment. plus de douleur, juste le vide, juste la fin. [...] elle ouvre les yeux pour y découvrir le ciel, s'étouffe encore et encore, l'eau salée qui engorge ses poumons peine à trouver la sortie. des dizaines de visage autour d'elle, mélange entre l'inquiétude et le questionnement. membres engourdis qu'elle peine à bouger, bribes de mots qui ne parviennent pas à remonter jusqu'à elle. y a plus qu'une chose qui tourne dans sa tête : disparaître.
every renaissance comes to the world with a cry, the cry of the human sprit to be free - (( 2019-now )) disparaître. le choix qu’elle a fait pour échapper à tout ça. ne plus être elle, ne plus donner signe de vie. elle quitte l’asie pour l’europe, premier vol pour milan. sofia blackwell est morte, leah caldwell voit le jour. elle est terrorisée, aux aguets, constamment en train de regarder derrière son épaule. traumatisme qui ne semble pas vouloir disparaître quand elle se réveille au beau milieu de la nuit, hurlements stridents qui sortent de sa gorge, terrorisée quand son visage apparaît dans son esprit. il l’a cassé mentalement, physiquement, l’a laissé pour morte et jeté comme une poupée de chiffon. mais sofia, c’est une battante, elle reconstruit petit à petit. arnaque les touristes pour survivre puisqu’elle ne possède plus rien. difficile de récupérer le moindre centime quand elle se doit de rester cachée. sociabilité qui se perd, elle reste en retrait. ne parle à personne, s’emmure dans ses tourments jusqu’à son arrivé. priam est le touriste voisin qui du haut de son balcon ne cesse de chercher à la charmer. les sourires, les quelques mots et sofia qui répond poliment sans jamais donner suite à ses attentes. elle n’a pas confiance, pas de temps à perdre, rien à lui donner. et un soir, perdue dans ses pensées, verre de rouge à la main, il tente une nouvelle approche. les mots qu’ils se lancent, le verre qu’elle lui offre qui débouche sur d’autres. l’esprit qui s’embrouille un peu plus à chaque instant, peaux brûlantes qui entrent en contact dans une seconde d’inattention. elle se promet que ce ne sera qu’une fois, que ça ne se reproduira pas. qu’elle est humaine avec le droit de faiblir juste pour ce soir là. et la soirée en devient une deuxième, découle sur une troisième, continue à s’étendre sûrement trop. conversations jusqu’à tard le soir où elle raconte une vie inventée de toute pièce, mêle les rires et les faux semblants à l’homme qui semble craquer pour elle. réflexion intense quand elle réalise s’apaiser à ses côtés, les cauchemars qui disparaissent, la légèreté qui prend place. mais sofia, elle n’est pas stable, pas encline à vivre quoi que ce soit. et la veille de son départ, c’est un somnifère qu’elle glisse dans son verre, murmure des faibles excuses quand ses traits s’apaisent. il ne sait rien d’elle, ni son nom, ni son histoire. et elle fouille dans chaque recoin pour trouver ce dont elle a besoin. finit par quitter l’endroit, son portefeuille en main, vide chaque pièce de son passage. leah est une fable, un conte, une arnaqueuse et leah, elle se sent enfin prête à être elle une nouvelle fois. retour au point de départ. boston, ville de naissance. six ans qu'elle n'y avait pas remit les pieds et voilà qu'elle s'y retrouve à nouveau, prête à renaître de ses cendres. elle a pas les réponses mais a survécut à l'enfer. sofia, elle récupère ce qu'elle a bâtit, recrée son monde, revient à la vie. réactive ses réseaux sociaux, récupère tout ce qu'elle avait bien pu laisser derrière elle. et tant pis pour ses parents, pour arizona, aucun d'entre eux n'est venu la chercher après tout. elle prouve juste qu'elle réussit, qu'elle n'a pas besoin d'eux. puis qu'il vienne donc de son côté, cette fois, elle sera préparée.