La voiture de Milo venait de s’engouffrer sur ce chemin trop boueux nous conduisant vers la forêt et l’angoisse ne parvenait plus à me quitter. Putain, cette soirée du nouvel an risquait sérieusement de devenir mémorable et pas forcément dans le bon sens du terme. Je ne comprenais pas pourquoi Milo m’avait invité à une soirée avec ses amis si c’était uniquement pour y passer en coup de vent. Avais-je finalement fait une bêtise ? Avait-il eu honte de moi ? S’était-il rendu compte qu’il ne voulait pas ? Je l’ignorais et tout cela ne faisait qu’augmenter mon angoisse. Merde, je ne comprenais pas pourquoi Milo nous avait fait quitter cette soirée amusante bien avant que minuit sonne. Je ne comprenais foutrement pas pourquoi il tentait de m’attirer autant à l’écart du monde. Ou peut-être que je ne le comprenais que trop bien et que je n’étais pas prêt à subir cet assaut douloureux. Mon cœur repoussait d’ores et déjà ces possibilités dévastatrices. Mon cerveau tentait d’y mettre un barrage parce que je savais. Je savais que notre futur trop incertain semblait prêt à se dessiner réellement dans quelques minutes. Milo avait fait son choix. Je le sentais. Pour le meilleur ou pour le pire. Mon amant babillait dans la voiture comme pour tenter d’obtenir mon attention en me faisait parler. Je savais qu’il essayait de me détourner de l’horrible agonie qui commençait déjà à naître en moi, mais c’était foutu. Je ne parvenais pas à me laisser entraîner aussi aisément qu’habituellement. Non. J’étais déjà trop fichu. Soudainement, le moteur de la voiture s’éteignait me poussant à prêter un peu plus d’attention au lieu où nous nous retrouvions. Nous étions là tous les deux. Seuls. Isolés. Nous surplombions la ville et cela aurait pu prédire un magnifique moment avec une superbe déclaration. Foutue illusion. Fichu rêve. Je détachais ma ceinture et j’hésitais pendant quelques secondes. Milo sortait de la voiture afin de s’installer sur le capot. Moi ? Je prenais quelques secondes à observer mon amant comme si je savais qu’il s’agissait des dernières minutes de paix où je pouvais observer cet homme qui savait réveiller tellement de choses à l’intérieur de mon être. Milo… Mon Milo. À mes yeux, il était toujours ce jeune adolescent moqué que j’avais approché en Italie. Ce garçon si attirant que je ne parvenais pas à détacher mon regard de lui. Il y avait quelque chose chez Milo que personne d’autre ne possédait. Ce truc un peu trop spécial qui me poussait à être irrémédiablement et follement attiré par lui. C’était une action tellement incontrôlable comme un aimant était attiré par un autre aimant dès lors qu’ils se retrouvaient au sein d’un environnement propice à leur proximité. Après toutes ces années, j’avais fini par retrouver mon aimant. Milo. Mon Milo. Mon premier amour. Mon unique amour. Dès que mes prunelles s’étaient posées sur lui au bal de Thanksgiving, ma boîte à sentiments s’était ouverte à nouveau m’enchaînant à ce garçon qui me rendait ivre. Je n’avais pas été fichu de rester à l’écart quand bien même le jeune homme semblait avoir refait sa vie. Et Milo n’avait pas su s’éloigner non plus. Nous avions couché ensemble. Milo avait été le premier à pouvoir coucher avec moi sans provoquer une violente panique ou une réelle douleur. Ce fut un corps à corps simplement trop agréable que j’aurais aimé réitéré. Encore et encore. Jusqu’à la fin de mes jours. Le prénom de mi Tesoro était gravé dans mon cœur. Sa présence était mon oxygène. Milo savait enchanter et sublimer ma vie comme personne. Aussi, lorsqu’il m’avait proposé de l’accompagner à cette soirée, je m’étais fait des films. Je m’étais mis à croire qu’une histoire allait être possible entre Milo et moi. Après tout, n’étions-nous pas des âmes sœurs ? Comme un pauvre petit idiot, j’avais cru que Nealo prendrait enfin vie après cette soirée. Et, à présent que je me retrouvais dans cette voiture, une alarme cognait dans ma tête pour me dire que je n’étais qu’un gamin trop stupide et que tout allait mal se passer. Je devais disparaître avant que le point final ne soit mit. Merde. Pourquoi toutes les histoires finissaient mal tandis qu’elles se terminaient toujours si bien dans les contes de fée ? Pourquoi la féérie de ces histoires ne pouvait pas toucher la réalité ? C’était comme si nous étions trop dévastés pour laisser l’opportunité à une si belle histoire de vivre à jamais. Notre histoire d’amour était une ampoule en train de cramer. Elle avait brillé dans le passé. Elle ne cessait de clignoter depuis ma disparition. Et, maintenant, elle risquait de s’éteindre à tout instant. J’en avais conscience. Au lieu de disparaître comme tout en moi me le criait, au lieu de m’enfuir pour me protéger, je n’étais pas fichu de résister à la tempête Milo. Ma sublime tempête. Je me glissais hors de la voiture afin de venir m’installer aux côtés de cet homme que j’aimais sous ce ciel étoilé. Mon amant prenait ma main réchauffant mon cœur qui était déjà en train de mourir. Le feu d’artifice éclata faisant briller mes yeux comme ceux d’un gosse devant une superbe vue. Pendant quelques secondes, j’oubliais l’horreur et l’angoisse. Pendant quelques secondes, je me permettais d’y croire encore un peu. Trop peu. Milo prenait mon visage entre ses mains afin de m’embrasser. Tout avait un goût d’adieu et de tristesse. Ça faisait si mal. Milo me souhaitait une bonne année avec ce surnom qui accélérait mon cœur et je lui répondais de la même manière. Mais, je n’étais pas stupide. C’était la dernière fois que je pouvais le surnommer de cette manière. Mon compagnon avait soupiré. Un voile de tristesse marquait son regard. Je voulais partir, mais j’étais pétrifié. Les yeux rivés au sol, les mains tremblantes, je me contentais de supplier mon amant tout en retenant mes larmes. Je le suppliais pour qu’il ne brise pas mon cœur, qu’il ne joue pas comme ça, qu’il ne fasse pas ça, qu’il reste avec moi. Tout s’embrouillait. Mi Tesoro déposait son front contre le mien et ses lèvres venaient trop vite s’écraser sur les miennes. Le baiser était empli d’un trop plein d’amour et ça faisait si mal. Il me laissait un goût amer dans la bouche. Il me donnait une peur du futur et de cet enfer qui allait s’abattre. Lorsque j’ouvrais les yeux, je tombais sur les larmes de Milo et je savais. Tout allait voler en éclat. Tout allait me heurter. Bien trop vite. Le jeune homme m’embrassais de nouveau à en perdre haleine et je me laissais emporter dans ce baiser. Ce baiser qui provoquait tellement de choses délicieuses à l’intérieur de mon corps. Ce baiser qui me poussait à me sentir si vivant. Et, soudainement plus rien. Plus rien que ces mains sur mes joues, ce front contre le mien. Ce n’était pas assez. La fin approchait et j’en frissonnais d’horreur. Dans un chuchotis, Milo soufflait qu’il était désolé. Et, je ne pouvais pas me contrôler. Les larmes se mettaient à glisser le long de mes joues dans une agonie silencieuse et dévastatrice.
La bombe venait de tomber. Il n’avait pas besoin d’en dire plus. Je savais déjà et je ne voulais pas y faire face. Non, non, non. Je secouais négativement la tête comme si je ne voulais pas qu’il continue de parler, comme si je n’étais pas capable d’encaisser les mots futurs. Non, je ne pouvais pas entendre ça.
Merde. J’étais foutrement stupide d’avoir cru que les choses pourraient vraiment s’arranger aussi facilement que dans toutes ces histoires servies dans n’importe quel média. J’étais tellement idiot de croire que tout pourrait aller parfaitement d’ici quelques temps. Les premiers mots de Milo laissaient déjà présager le pire. Les propos de mon amant prouvaient à quel point je m’étais trompé et à quel point je m’étais monté la tête tout seul sans doute. Je m’étais fait trop de films comme le pire des idiots. Merde, merde, merde. Mon histoire avec Milo n’était pas bonne. Je l’avais abandonné en Italie des années auparavant et il en avait souffert pendant si longtemps. Je l’avais fait pour protéger le jeune homme et je savais que je le referais sans la moindre hésitation si on me donnait l’occasion de recommencer ma vie. La sécurité et le bonheur de Milo passeraient toujours en priorité. Même si c’était loin de moi. Même si c’était à mon désavantage. Même si cela provoquait ma souffrance. J’avais abandonné Milo et il avait vécu un enfer pendant si longtemps. Et, lorsque sa vie avait commencé à s’arranger et qu’il avait même retrouvé le bonheur dans les bras d’une autre, j’étais venu pour tout foutre en l’air. Le flou s’était mis à planer partout autour de nous. Les sentiments s’étaient mis à pulser de nouveau. Et le désir s’était emparé de nous. Nous avions couchés ensemble plongeant dans le délice d’un passé qui n’était pas terminé, qui aurait toujours du mal à se clore. Et, Milo avait trompé sa copine faisant de moi son petit secret. Un petit secret qui avait fini par éclater pour foutre en l’air sa nouvelle vie. Lorsque Milo m’avait annoncé que c’était fini avec sa blonde, je m’étais mis à croire que quelque chose serait possible entre lui et moi. Cette idée s’était faite plus forte depuis qu’il m’avait invité à une soirée pour le nouvel an. Putain, mais j’étais tellement idiot de croire que toute notre histoire pouvait commencer après une tromperie. J’étais stupide de me dire que nous pouvions mettre un point final à ce dessin d’horreur afin de nous mettre à dessiner de nouveau la construction d’un bonheur absolu. Un bonheur que nous avions touché parfois. Mais, un putain de bonheur qui avait si souvent fini par voler en éclat. Un bonheur qui allait encore une fois voler en mille et un morceaux. Après les excuses de Milo, je secouais négativement la tête comme un fou qui ne voulait pas y croire et qui ne voulait guère entendre plus de choses. Cependant, je n’avais pas réellement le choix. Je ne pouvais pas échapper aux propos du jeune homme. J’étais obligé de tout entendre. Je ne parvenais pas à bouger de ce capot de voiture parce que je savais que Milo n’avait pas terminé et que je refusais de lui faire subir ça. Je refusais de l’enfermer dans une bulle de souffrance en l’empêchant de s’exprimer. Je ne parvenais pas à me soustraire des mains de Milo posées sur mes joues parce que, si je le faisais, c’était comme si je disais adieu à ce contact pour toujours et je n’étais pas prêt. Non. Pas encore. Pas tout de suite. Je ne parvenais pas à m’enfuir au plus loin quand bien même tout mon être me criait de le faire au plus vite. Milo reprenait la parole et je me concentrais sur sa voix pour éviter de me laisser attirer par une spirale encore plus désastreuse. Mon amant soufflait qu’il m’aimait tellement tout en m’appelant Teo encore une fois et je fermais les yeux sous la vague de douleur qui se logeait à l’intérieur de mon cœur. C’était comme si la main de Milo forçait ma poitrine pour venir arracher son prénom de mon cœur, mais qu’il n’y parvenait pas réellement. Ce n’était que de la torture sans la moindre réussite. Son prénom ne pourrait jamais se retirer de mon cœur. Jamais. Milo soufflait qu’il ne pouvait pas. Et, malgré tous mes efforts pour ne rien laisser entendre, je ne pus retenir le sanglot violent et réel qui glissa entre mes lèvres. Je levais une main vers mon visage afin d’essuyer le torrent de larmes qui s’était mit à glisser sur mes joues. Milo souffla finalement que ça devait s’arrêter ce soir et je relevais la tête à la vitesse de la lumière face à cet aveu. Mes prunelles se plongeaient dans celle de celui que je devais appeler mon ex à présent. Mon corps réagissait à cet électrochoc foutrement trop prévisible. Mon cou craqua sous l’action un peu trop soudaine que je venais de commettre et je m’en foutais. À vrai dire, cela m’aurait même carrément arrangé de crever là. Maintenant. Tout de suite. Toute cette histoire c’était trop d’horribles douleurs à supporter. Je m’étais préparé à mille et un scénarios dans ma tête depuis que mon amant m’avait invité à cette soirée. Je m’étais joué mille et une sublimes histoires. Mais, putain, je n’avais jamais envisagé cette horrible histoire. Je n’avais jamais envisagé cette vérité qui me fendait terriblement le cœur. Merde. Je ne voulais plus rien entendre. Je ne voulais pas subir d’autres coups. Celui-ci était déjà suffisamment puissant pour me foutre à terre et je ne voulais pas finir complètement k.o sur le tapis. Malheureusement, Milo n’en avait pas fini. Oh non. Avec la voix tremblante, l’homme que j’aimais me disait que c’était le point final. Il susurrait ces mots qui m’achevaient avant d’écraser encore une fois ses lèvres contre les miennes. Putain, non ! Pourquoi faisait-il ça ? C’était de la torture. Et, pourtant, au lieu de repousser le jeune homme, je profitais de ce baiser qui serait sans doute le dernier. Je profitais de la caresse des lèvres de Milo sur les miennes. Je profitais de mon cœur qui battait agréablement sous ce contact. Je profitais de ce garçon que j’aimais tellement. Je profitais simplement de ce qu’il m’offrait. Et, lentement, je finissais par m’éloigner de ces lèvres qui ne cesseraient pourtant jamais de m’appeler. Là, à quelques millimètres à peine, je murmurais « Je t’aime Milo » avant de m’éloigner de cette tentation. Je gardais les yeux fermés parce que je ne pouvais pas le voir si je voulais résister. Je ne pouvais pas prendre le risque de replonger à nouveau parce que je risquais de lui demander de me faire l’amour. Là. Tout de suite. Une dernière fois. Une ultime fois. Et, je ne pouvais pas demander ça. Je ne pouvais pas nous torturer de cette façon. Mon front appuyé contre celui de Milo, je soufflais pendant quelques minutes à la recherche de courage. À la recherche d’un souffle de vie. Lentement, j’attrapais les mains de Milo qui retenaient mon visage et je les repoussais. Je me remettais bien vite sur pied quittant le capot de la voiture et créant ainsi une réelle distance entre le jeune homme et moi. Et, soudainement, je plantais mes yeux embués de larmes dans ceux de cet homme que j’aimerais à jamais et je bafouillais.
Je… Il… Je… J’crois que c’est mieux que je rentre…
@Milo Novak