ARCHER RALSTON ► Matthew Daddario

Une naissance, rien de bien exceptionnel en soi. Mais pour ce couple, les Ralston, ça l'était. Après cinq fausses couches, ils les attendaient fermement ces enfants. Archer, très vite surnommé Alex - diminutif de son deuxième prénom - par toute la famille, et surtout ses parents. Archer. L'un des deux enfants miraculés. Un de ceux qui débloquaient ainsi toutes les peurs et appréhensions de ses parents. Archer, la moitié des deux seuls enfants biologiques des Ralston, mais le seul qui a survécu. Un seul prévu, deux à la naissance, mais un seul qui survit. En réalité, ils étaient une fratrie de cinq. Pas beaucoup plus vieux, et surtout adoptés. Ce n'est pas pour autant qu'ils sont moins aimés, au contraire. Mais Archer, c'est la glu qui est venu souder à nouveau tout ça.

Archer, l'enfant tombé des cieux. J'avais toujours eu du mal à m'y faire à cette expression. C'est comme si j'étais un miracle. Non, je suis simplement le résultat d'une science inexacte. J'aurais pu être une fausse couche moi aussi. La chance a fait que non. Mais en aucun cas, je suis un miracle. Mais je laisse mes parents dire ça, répéter à chaque Noël tout ceci au reste de la famille, à tous ceux qui ont fait le déplacement pour nous voir, pour nous voir tous réunis. Mine de rien, ce statut d'enfant miracle, c'était une pression monstre. Je ressentais à chaque instant la pression foutue sur mes épaules. Et j'avais envie de tout foutre en l'air parfois. Et puis je me ravisais. Ils ne veulent pas ça à mal. Ils désirent le meilleur pour moi et je le comprends. Seulement, je ne suis pas ce petit garçon parfait que j'ai pu être autre fois... Et ça, j'ai peur qu'un jour, ils puissent le découvrir. Tous autant qu'ils sont.


Un déménagement. Edimbourg ne convenait plus. Alors les parents Ralston sont partis vers Glasgow, plus à l'ouest. C'était peut-être pas plus mal. Une nouvelle vie les attendait, avec des nouveaux amis, des nouvelles fréquentations. Tout ce que ce qu'il faut savoir, c'est que ce choix n'est pas sans conséquence. Certes, Archer n'avait que cinq ans, il ne connaissait rien à la vie, si ce n'est ce qu'on lui a montré. Ses parents décident, pensent que c'est mieux pour tout le monde, ainsi soit-il. C'est pas comme s'il avait quelque chose à dire, à cet âge si peu avancé.

En y repensant, c'était un choix clairement pas le plus judicieux. De ce que j'avais compris par les dires de ma famille, rien ne les poussait à changer de ville. Et pourtant, c'est ce qu'ils ont fait. Quitte à s'éloigner de leur famille, quitte à délocaliser leurs enfants. Quitte à avoir un job moins bien payé. Qu'est-ce qui a bien pu les pousser à bouger comme ça ? Faut pas se méprendre pour autant, j'aime mes parents, ils sont mon sang, ma fierté. Mais des zones d'ombre subsistent quand j'y repense, des zones bien trop étranges pour être laissées de côté. Alors un jour peut-être, j'aurai le courage de les confronter sur cette histoire. En attendant, je me contente simplement de vivre ma vie, comme si de rien était. Éteignant le plus possible cette lumière qui me guidait vers la paranoïa.


Un étudiant à l'université, parmi d'autres. Il avait les capacités pour y arriver Archer, depuis toujours. Mais il avait su à un moment que Roxane venait dans cette université et, comme un con, il était en train de suivre celle qu'il kiffait. C'était idiot oui, parce qu'il devrait penser à lui, penser à ce futur si prometteur qui l'attendait s'il y mettait vraiment du sien. Seulement voilà, il semblait incapable de la laisser partir trop loin. Et puis, l'université de Glasgow, elle est pas si mal, n'est-ce pas ? Certes, il était au courant de ce qu'elle faisait, la jeune femme. Il le savait pertinemment. Mais elle n'était pas comme ça avec lui. Jamais. Et c'était sûrement pour ça qu'il n'avait d'yeux que pour elle.

J'ai mal agi, je le sais. J'aurais pas du faire ça. Mais elle m'a demandé, m'a fait ses yeux doux et comme un incapable, j'étais pas en posture de refuser. Alors une vie a été ruinée et moi, je devais vivre avec la culpabilité d'avoir fait ça à cette fille. C'était compliqué. Me regarder dans un miroir revenait à présent d'une épreuve quasi insurmontable. Comment avait-elle pu me pousser à agir comme ça ? J'entends par là, on se connait depuis longtemps, elle me connait. Elle... elle m'a cependant utilisé à ses dépends, dans sa vendetta contre cette fille. Et j'ai encore du mal à l'accepter. Alors quand j'ai proposé à Rox de postuler pour Harvard, je l'ai aussi proposé à cette fille, celle qui s'est vue totalement détruite par ma faute. Mais au milieu de tout ça, j'ai pas pu m'empêcher de le faire également.


Fraichement arrivé de son Écosse natale, Archer avait pas eu vraiment de mal à s'adapter à la culture américaine. C'était simplement le fait d'être loin de sa famille qui était le plus difficile dans ce moment à passer. Mais il savait qu'il n'était pas seul dans le fond. Elle était là, Roxane. Il savait que, quelque part, elle resterait là pour lui. Elle n'était pas encore au courant qu'il avait postulé et qu'il avait été pris. C'était la surprise. Seulement, il avait bien d'autres trucs à lui annoncer. Comme le fait que Natasha était là, elle aussi. Par sa faute en plus. Et cette discussion, elle n'était pas prête de bien se finir. Et ça ne manquait pas. A peine avait-il annoncé la nouvelle, la tornade rousse s'était transformée en ouragan destructeur, le poussant ainsi dans ses derniers retranchements. Révéler ce qu'il a fait ? Ferait-elle vraiment ça ?

Bien sûr qu'elle ferait ça. Je ne suis qu'Archer, insignifiant pour les gens comme elle. Alors je m'en tiens au plan : terminer mes études, réussir à décrocher mon diplôme et repartir en Écosse. Possible aussi que je vais chercher à l'éviter, elle. Me menacer ? Oui ok, j'ai merdé en proposant à Tasha de venir... mais en même temps, je regrettais bordel de merde. Je regrettais amèrement ce que j'ai pu lui faire subir, pour les beaux yeux de Rox. Et je ne veux plus jamais m'y reprendre. C'était bien trop de conséquences et une histoire qui me dépassait totalement. Il était temps de profiter au mieux de cette vie américaine qui m'était offerte pour m'améliorer du mieux que je peux.