Mardi 11 Octobre 2011 - Dublin, Irlande
La nuit était sombre, et le brouillard qui s'étendait sur la ville de Dublin épais. Tout semblait paisible. Enfin, aussi paisible que puisse l'être une nuit dans une ville Irlandaise. Au loin, on pouvait donc entendre des hommes chantant à tue-tête d'une voix mal accordée, des bouteilles s'entrechoquant. Nul doute que certains avaient passés une soirée bien arrosée.
Ils se dirigeaient vers les docks, visiblement. Peut-être étaient-ils des marins. Ca aurait été un peu cliché. Mais toujours est-il qu'ils traversèrent une série d’entrepôt. Tous étaient les mêmes, à première vue, et pourtant... C'était loin d'être le cas.
A l'intérieur de l'un d'eux des hommes se tenaient debout à attendre, à côté d'une voiture. Une berline, noire. Encore un cliché, sans le moindre doute. Mais ils étaient pourtant bien là à attendre, les phares allumés. Et ils furent rapidement rejoint par une autre voiture du même acabit. Des hommes en sortirent. Ils étaient tous roux, et lorsque l'un d'eux ouvrit la bouche pour parler, son accent - irlandais - trancha dans le vif de l'air.
L'échange se fit rapidement. Lorsqu'ils eurent récupérer deux mallettes, celui qui se trouvait le plus en avant fit un signe de tête à celui derrière lui. Il se dirigea jusqu'au coffre, et en sortit deux plaques, emballées dans un tissus blanc qui ne laissait pas deviner ce qui se trouvait dessous. Il les amena jusqu'à leurs interlocuteurs, pour leur tendre. L'un d'eux défit un des tissus, et observa l'objet. Oui... C'était parfait. Les moindres détails étaient là, c'était juste... parfait. Il hocha la tête et, un sourire échangé, chacun des groupes se séparèrent, puis quittèrent les lieux à tour de rôle.
La voiture roulait paisiblement sur la rouge. Elle s'arrêtait à chaque feu rouge, ou poursuivait son chemin, sans dépasser les limites. Se faire contrôler le véhicule ne serait pas la meilleure idée du monde, à l'heure actuelle. Bah, ils avaient des contacts pour éviter ça, ce n'était pas bien grave. Le conducteur sortit de la ville. Il roula comme ça encore pendant une longue demi-heure, avant de quitter la route pour se rendre dans un coin reculé, rejoignant une villa bien éloignée du bord de la route, située en bord de mer. Ils s'arrêtèrent devant l'entrée, et deux des hommes en sortir, l'un toujours en tête. Il grimpa les marches du grand perron deux à deux, et poussa la porte d'entrée, qui n'était pas verrouillée.
A l'intérieur de la maison, on pouvait entendre du piano se jouer, dans une douce mélodie. Un sourire doux se dessina sur les lèvres de l'homme. Il inspira longuement. L'odeur de la mère était différente ici. Elle n'était pas pollué par celle des cadavres de poissons entassés dans les hangars, ou les déchets des bateaux dans les bennes. Non, l'air était pur ici. Agréable et vivifiant.
Il grimpa à l'étage, alors que l'homme de main restait dans l'entrée, et se dirigea vers là où la musique se jouait. Dans le petit salon une femme était assise devant un piano à queue, et jouait tranquillement, sans discontinuer, ses doigts glissant à la surface des touches, enchaînant les notes dans une partition visiblement inconnu de l'homme. Mais un seul mortel la connaissait-il ?
La fenêtre était grande ouverte, laissant un froid glacial d'octobre entrer dans la pièce. L'homme se dirigea vers elle, et vint l'enlacer de ses bras, sans interrompre pour autant la mélodie qui se jouait. Il déposa un baiser dans son cou, et elle frissonna imperceptiblement.
- Ely. Tu vas attraper froid à jouer la fenêtre grande ouverte.
Elle s'arrêta de jouer, et un fin sourire gagna ses lèvres. Elle vint se blottir contre lui, se laissant aller en arrière. Elle sentait la barbe de l'homme dans son cou et vint frotter sa tête contre la sienne, pour finalement se retourner contre lui et venir l'embrasser.
- Aucune chance, tu seras là pour m'en protéger, pas vrai ?Aujourd'hui - Harvard, Etats-Unis
Edmée observait autour d'elle les étudiants qui quittaient la salle de classe tranquillement. Ils discutaient de choses diverses et variées, alors qu'elle rangeait les notes qu'elle avait posé sur son propre pupitre. Ils avaient de la chance. Ils pouvaient sortir tranquillement de cette salle, sans se soucier de rien. Un dernier étudiant restait au fond de la salle. Un étudiant. Non. Ca n'en était pas un. Elle l'avait rencontré avant d'arriver ici, en tant que professeur. Oh, il se camouflait bien. Ou presque. Néanmoins, il passait plutôt inaperçu pour le moment. Bah... Ce n'était pas son problème. Enfin, si, mais pas non plus trop.
Tant qu'il parvenait à la protéger, elle s'en fichait comme d'une guigne. Quittant tranquillement la salle de cours, elle avançait dans les couloirs d'un pas plutôt confiant, bien que repensant à ce qu'il s'était passé au cours des dernières années. Au final, sa naissance, sa vie jusqu'à sa rencontre avec lui... ça n'avait pas d'importance. Née dans une famille riche, elle avait connu une enfance heureuse, et avait toujours pu faire ce qu'elle voulait. Notamment, des études de musique et de piano. Elle n'avait pas dans l'idée de devenir connue, particulièrement, ou quoi, c'était juste que je voulais pouvoir s'y consacrer. Ca ne dérangeait pas ses parents, puisqu'à leurs yeux, elle reprendrait sans doute par la suite les affaires familiales. Elle pourrait toujours apprendre sur le tas.
C'est lorsqu'elle finit ses études qu'elle l'avait rencontré.
Siothrùn O'Connor.
Roux, grand, charismatique. Le genre d'homme qui ne passe pas vraiment inaperçu. Mais aussi un homme dangereux. Membre d'importance du crime organisé Irlandais, il était rapidement tombé sous le charme de celle qui se prénommait alors Aelig. Un étrange prénom pour une jeune femme, mais ça l'avait plus amusé qu'autre chose, et il avait vite finit par la surnommer simplement Ely. Lorsqu'ils avaient commencé à sortir ensemble, elle ignorait tout de ses activités. Oh, bien sûr, elle s'en doutait. Il se montrait toujours très prudent à son encontre, et lui cachait tellement de choses... Elle n'avait pas pu s'empêcher de fouiner, discrètement. La curiosité était un vilain défaut.
Après leur mariage, ils s'installèrent non loin de Dublin. Ayant passé une partie de son enfance en Irlande, la jeune femme en fut particulièrement heureuse. Et puis, c'était un beau cadeau de mariage. Une fois unis ainsi, Siothrùn n'hésita plus à confier à Ely ce qu'il était, ce qu'il faisait. Et en soi, ça n'avait pas de réelle importance pour elle. Parce qu'elle l'aimait. Et puis il lui avait affirmer que si altercation il devait y avoir, il faisait tout pour éviter que ça ne se termine dans un bain de sang. La blague. En tout ca, ça suffisait, sans doute parce qu'elle avait envie d'y croire.
Mais ce n'était pas si simple, tout ça.
Jeudi 13 Octobre 2011 - Dublin, Irlande
La voiture démarra dans l'allée et commença à s'éloigner. Aelig resserra sa robe de chambre autour d'elle, et attendit que la voiture ait disparu de son champ de vision pour quitter la baie vitrée à son tour. Siothrùn était parti pour au moins deux semaines. Elle se dirigea vers l'armoire et en sortit des habits, qu'elle revêtit tranquillement après s'être douchée avant de descendre. Arrivée en bas, elle se dirigea vers la cuisine, où deux personnes se trouvait déjà. La première était une femme plutôt forte, à l'air sévère, vêtue d'un uniforme de servante. Elle travaillait dans la maison et s'occupait de diverses tâches. La seconde était un jeune garçon qui ne devait même pas avoir dix ans, et qui semblait un peu ailleurs.
Ely s'approcha de ce dernier et vint déposer un baiser sur le haut de son crâne, et passer une main dans ses cheveux, sous le regard désapprobateur de la femme qui semblait voir ça d'un mauvais œil à première vue. La jeune femme s'installa à la table, en face du garçon, qui semblait à peine avoir remarqué la présence des deux femmes. L'employée apporta son thé à Aelig, déposant la tasse devant elle, accompagné de deux tartines beurrées. Bien. Elle resta tout de même à côté. Ah. La mari de la plus jeune avait dû laisser un message.
- Madame, votre mari m'a dit qu'il vous avait laissé une enveloppe dans le salon. Il aimerait voir les instructions à l'intérieur réalisées avant son retour.
- Bien, merci.
Ely acheva de prendre son petit déjeuner assez rapidement et se leva. Le garçon la suivit alors, silencieusement. Elle s'installa dans le salon, et prit l'enveloppe qui était disposée sur la table basse, l'ouvrant alors. Elle la lu rapidement, avant de la ranger et de la reposer. Le petit s'était assis à même le sol, contre l'accoudoir du canapé, les genoux repliés sous son menton.
Le pauvre avait perdu sa famille, un mois plus tôt. Assassinée par un groupe rival à celui de son mari. Parce que le gamin était doué d'un don bien rare. Il avait une mémoire photographique, mais plus que tout, il savait reproduire tout ce qu'il voyait. Et comme il s'en souvenait à la perfection... Je vous laissais deviner les nombreuses utilisations qui pouvaient en être faites. Sa famille avait refusé de laisser des gens utiliser leur enfant, et à cause de ça, ils étaient morts. Siothrùn était parvenu à le récupérer avant qu'il ne puisse lui arriver malheur, et avait décidé de le confier à Aelig. Après tout, ils n'avaient pas encore d'enfant, alors ils pouvaient bien se le permettre. Malheureusement, le petit, traumatisé, n'arrivait depuis plus à parler, ni à faire quoique ce soit. Du moins, c'était ce que tout le monde pensait. Jusqu'à ce que, après avoir fait sa séance journalière de piano, Ely découvre de ses dessins sur le sol de la chambre où il avait été mis. Et lui-même roulé en boule sous ses couvertures, cachés. Elle avait alors compris que le garçon se détendait en l'entendant jouait, et pouvait alors revenir à la réalité.
Depuis, il la suivait partout. Elle était devenue indispensable à son fonctionnement.
Et elle s'était attachée à lui.
Se levant, elle le prit par la main et le guida jusqu'à l'étage, dans la salle où se trouvait le piano. Elle prit son ordinateur avec elle. Là-haut, elle lui montra des tableaux, des choses comme ça. Elle s'arrêta sur un plus en particulier. Puis elle le laissa ensuite avec des crayons, des peintures, des choses comme ça. Il faudrait qu'elle l'emmène au musée, si elle voulait qu'il fasse une bonne reproduction. Hum... Tout de même... Il y avait beaucoup de choses qui clochaient dans cette histoire.
Bien sûr, elle savait que son mari n'était pas un enfant de cœur, mais jusqu'à présent, elle avait fermé les yeux, n'ayant jamais réellement été impliqué dans ses affaires. Mais pour le coup... Bah... Elle se faisait sans doute des idées.
Elle s'installa sur la banquette tranquillement, et commença à jouer quelques notes. Le gamin releva la tête vers elle, et écouta, attentif. La mélodie s'éleva. Et elle le fit longtemps. Le gamin finit par en avoir marre de dessiner, de peindre ou de faire elle ne savait trop quoi encore, et il vint s'installer près d'elle. Il y avait encore de la place. Et alors que les notes s'égrenaient, il vint lui murmurer quelque chose à l'oreille.
- C'est lui, tu sais... C'est lui qui les a tué.
Et pour la première fois depuis des années, Ely fit une fausse note.Aujourd'hui – Harvard, Etats-Unis
Après ça, les choses avaient changés de façon radicale dans l'esprit de la jeune femme. Elle s'était rapidement retrouvé face à plusieurs dilemmes, et aura fini par choisir de trahir son mari pour cet enfant. Les choses étant ce qu'elles étaient, en faisant ça, elle se mit à dos tout un clan du crime organisé.
Placée sous protection par Interpole, elle dû changer d'identité, quitter à nouveau l'Irlande pour revenir aux Etats-Unis. Elle suivit une rapide formation d'un an, pour pouvoir être placé à Harvard, en tant que professeur d'histoire de la musique. Elle en avait les compétences après tout. Dans une cité universitaire animée de jour comme de nuit, sans doute serait-elle plus en sécurité. Toujours est-il que pour le moment, ils ne l'ont pas encore retrouvée.